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3,77

sur 1450 notes

Critiques filtrées sur 5 étoiles  
Ce livre est juste inouï d'intelligence et de lumière ! Assurément un des mes meilleurs livres contemporains que j'ai lus depuis longtemps !

Un tour de force magistral qui parvient à fusionner des genres très différents avec évidence et classe folle. Improbable cocktail pourtant que de faire cohabiter sans sensationnalisme ni voyeurisme :

- un essai-plaidoyer surpuissant ( car subtil ) contre la peine de mort et une passionnante réflexion sur les travers du système judiciaire américain

- une enquête criminelle haletante de type True crime à la Truman Capote, on sent que l'auteur a avalé des kilomètres d'archives et de retranscriptions judiciaires pour nous les présenter sous la forme d'un quasi thriller

- un récit autobiographique bouleversant tournant à l'introspection personnelle et familiale jusqu'à parvenir à la résilience

2003 : Alexandria Marzano-Lesnevich est étudiante en droit à Harvard et choisit d'effectuer son premier stage auprès d'un cabinet spécialisé dans la défense des détenus du couloir de la mort en Louisiane. La première affaire à traiter : celle de Ricky Langley, un pédophile qui a étranglé un enfant de 6 ans, Jeremy Guillory. Elle qui est farouchement opposée à la peine de mort voit ses certitudes s'écrouler en visionnant la video des aveux, envahie par une pulsion de haine et une envie de voir Ricky mourir.

Car ce n'est pas Ricky Dangley qu'elle voit et entend, c'est son grand-père qui l'a violée à maintes reprises durant son enfance, dans un silence familial assourdissant. Elle ne sera pas avocate mais écrivaine. Ecrire pour faire partir le poids de la souffrance, pas pardonner, non, être juste apaisée, se libérer de cette empreinte mortifère.

Le titre originel est plus fort que cette simple empreinte : «  the fact of a body », « la preuve par le corps ». Dans cette collision de deux faits réels douloureux ( Ricky a tué Jérémy – son grand-père l'a violée ), c'est le corps qui porte tout : son corps à elle depuis l'anorexie jusqu'aux souffrances invisibles aux yeux d'une famille dans le déni ; le corps de Jérémy qui lui seul détient la vérité qui est au coeur du procès ( Jérémy a-t-il été tué ou violé puis tué ? ).

Ce livre est bruissant de dix mille réflexions, éclairant des Lumières de la Raison des événements terribles tout en laissant battre son coeur dans des pages profondément incarnées et émotionnellement intenses.
Inoubliable.
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Alexandria Marzano-Lesnevich nous livre dans L'empreinte un récit bouleversant à mi-chemin entre le récit autobiographique et un récit journalistique dont il faut souligner le travail d'orfèvre qu'il y a derrière. Bravo à elle.

En 1992, en Louisanne, un petit garçon de 6 ans, Jérémie croise la route de Ricky Langley, farouche pédophile de 26 ans. L'enfant n'y survivra pas. Les aveux du pédophile tombent trois jours plus tard. Incarcéré dans le couloir de la mort, la partie adverse clame la peine de mort.
Alexandria suivra cette affaire de près effectuant alors un stage au barreau.

On suit en filigrane l'empreinte sur Alexandria de deux histoires. Celle de Ricky et la sienne. Violée de nombreuses années petite par son grand-père, la pédophilie, les traumatismes, le choix du pardon sont au coeur de ce récit.
Alexandria est aussi fermement opposée à la peine de mort. Quand elle suit l'affaire de Ricky Langley, ses certitudes vascillent car ses propres souvenirs refont surface. Peut-on pardonner l'horreur ? Peut-elle être excusable et cachée sous les faux-semblants d'une maladie mentale ou bien sur les maltraitances vécues par ces mêmes bourreaux, victimes jadis? Peut-on mettre sous silence les agissements pervers sous prétexte de protéger la famille ? La protège-t-on d'ailleurs en fermant les yeux ?

C'est 470 pages de plaidoyer ce roman. Au coeur même de la machine judiciaire, dans les tripes saignantes du vague à l'âme et des blessures individuelles et collectives.

Alexandria Marzano-Lesnevich prend à bras le corps le cas Ricky Langley, ça la secoue, ça réveille les ombres de son passé. Elle écrit avec beaucoup de pudeur et de retenue. Les émotions sont sous la couche des horreurs, pas de larme coulant à flot.

En Amérique, c'est la pluie qui mouille les visages. Parce que les anges dans le ciel pleurent ces enfants dont la vie s'est arrêtée dans les bras d'un adulte à l'amour assassin.
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En 2003, alors étudiante en droit à Havard, Alexandria Marzano-Lesnevich, âgée de 25 ans, effectue un stage dans un cabinet d'avocats de la Nouvelle-Orléans. Aux stagiaires présents, une femme leur passe, au cours d'une conférence, une vidéo leur présentant les aveux d'un homme, enregistrés en 1992, dont le deuxième procès vient de se terminer. Condamné à mort 9 ans auparavant, le jury le condamne aujourd'hui à la perpétuité. Son crime : avoir tué Jeremy Guillory, un enfant de 6 ans. Son nom : Ricky Langley. Pourtant farouchement opposée à la peine de mort, les certitudes de la jeune étudiante vacillent. Commence alors pour elle des années aux côtés de Ricky et Jeremy mais aussi une plongée au coeur de son passé tourmenté, jusque là enfoui...

Passionnant de bout en bout, L'empreinte fait montre d'un travail de recherche et de précision remarquables, mais aussi d'introspection, presque salvatrice. Partant de procès-verbaux, d'articles de presse, d'articles de tribunaux ou encore de reportages télévisés, Alexandria Marzano-Lesnevich retrace avec fidélité, adresse et intelligence aussi bien les faits criminels que le déroulement des procès, la vie, de son enfance à l'âge adulte, de Ricky Langley ou encore les conséquences. Une enquête saisissante et fourmillante (des milliers de pages consultées, 10 ans de réflexion et de reconstitution, de nombreux voyages) qu'elle entremêle avec son propre vécu. Son enfance dans la grande maison grise, les violences subies, les secrets de famille, les silences imposés. Une double enquête qui n'a qu'un seul but : la vérité. Ce récit, aux thèmes aussi divers et tragiques que l'inceste, la pédophilie et la peine de mort, est doté, à la fois, d'une force et d'une sensibilité rares. Émouvant et dramatiquement captivant...
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C'est parce que le petit Jeremy est mort à 6 ans, victime d'un délinquant, proie de hasard d'un jeune homme déjà repéré et condamné pour des attouchements et qui la renvoie à de douloureux souvenirs, ou au moins ce qu'il en reste lorsque la mémoire a censuré l'impensable,
qu'Alexandria Marzano-Lensnevich a pris la plume.

Pour décortiquer les circonstances du drame, refaire l'enquête, analyser les insuffisances du processus judiciaire, étudier méticuleusement les histoires des personnages, du criminel comme de leur famille. Pour comprendre. Comprendre comment on peut en arriver à commettre de tels méfaits, et quels sont les mécanismes à l'origine de ces aberrations. Rôle de l'inné et de l'acquis, responsabilité de l'éducation?

Cette quête n'est pas anodine, l'auteur le révèle rapidement, elle fut elle même victime d'attouchements, de la part de son grand-père et circonstances aggravantes, les faits ont été soigneusement camouflés, bien que connus de la famille, experte pour taire tout ce qui peut faire des vagues.

Des questions plus générales en découlent.

Sur la peine de mort. Faut-il être pour ou contre? Faut -il établir une hiérarchie des délits pour déterminer de qui devrait relever de la peine capitale ? Il ne suffit pas de se prononcer précisément pour s'en sortir. C'est ce que l'auteur a pu constater quand, dans le cadre de son métier puisqu'elle fut un temps avocate, elle défendait l'abandon de la peine de mort, mais l'a souhaitée dans ce cas particulier du meurtre de Jeremy.

De même, il faut se mettre dans la peau d'un juré, plutôt favorable à une exécution sur des arguments d'inhumanité du crime, ne peut se résoudre à prononcer la sentence pour l'accusé qui lui fait face en chair et en os. Les convictions basées sur la théorie peuvent être malmenées lorsqu'elles sont confrontées au réelle


Outre le caractère passionnant de ce débat intérieur, il faut reconnaître à l'auteur un talent de conteuse, qui fait de l'empreinte un récit captivant. Les deux récits se mêlent et tentent de répondre à la question fondamentale : le pardon est possible?
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« Il me faut commencer par Jeremy. C'est lui qui a porté le crime de Ricky dans son corps. » Jeremy avait six ans était blond. Ricky avait vingt-cinq ans et avait toujours été attiré par les enfants blonds âgés de six ans. Ricky a tué Jeremy. Pourquoi est l'une des nombreuses questions que se poseront les psychologues, les juges, les jurés, les avocats, sa famille, Ricky lui-même, mais également et surtout Lorilei, la jeune mère de Jeremy, et Alexandria Marzano Lesnevich l'auteure de ce livre, victime comme Jeremy d'un pédophile, son propre grand-père.

Si dans un premier temps Lorilei veut que Ricky meure, dix ans après les faits, alors que celui-ci est dans le couloir de la mort, sans pardonner à Ricky elle va se battre pour lui éviter la peine capitale. Afin de comprendre, elle a rencontré le meurtrier de son fils — dont l'enfance complexe est hantée par son frère mort dans un accident, qu'il dira avoir tué en la personne de Jeremy — et a finalement vu un jeune homme qu'elle n'a pu réduire à son crime, aussi affreux soit-il.

Alexandria-Marzano-Lesnevich, ancienne étudiante en droit à Harvard farouchement opposée à la peine de mort, a longuement enquêté sur le passé du jeune pédophile. Contre toute attente, son histoire d'enfance bouleversée, avec ses vérités, ses mensonges et ses secrets, est entrée en résonance avec la sienne. Alors qu'elle était encore une enfant, elle s'est ouverte à ses parents des viols subis par elle et sa petite soeur de la part de leur grand-père. Des parents qui ont fait le choix de faire comme si cela n'avait jamais existé, un grand-père qu'elle a détesté, comme Lorilei avec Ricky, mais n'a pas voulu réduire à son crime.

Car la vérité est toujours beaucoup plus complexe, c'est ce qu'Alexandria qui mêle autobiographie et journalisme d'investigation nous dit avec force arguments dans ce livre formidable d'intelligence et de sensibilité.

« Sur le plan juridique, le verdict était une contradiction.
Alors je me disais que, confronté à la question de savoir si Ricky devait vivre ou mourir, le jury avait refusé de trancher. Mais j'ai réalisé que j'essaie de préserver une place pour l'ambiguïté constitutive de tout ce qui s'est produit. Lorilei n'a pas pardonné Ricky, mais elle ne voulait tout de même pas sa mort. Mon grand-père a fait tout ce qu'il a fait, et il était toujours mon grand-père. le droit – avec l'entêtement de chaque partie à imposer une unique version des faits – n'a jamais su que faire de cet entre-deux complexe. Mais la vie en est pleine. »


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« Je suis immédiatement frappée par cette idée que l'avenir était entièrement en germe dans le présent, le présent secrètement en germe dans le passé. »


Brillant, captivant, émouvant voire éprouvant, Alexandria Marzano-Lesnevich se livre à un exercice littéraire compliqué d'autant que ce récit l'engage émotionnellement. Elle se dévoile intimement et sa douleur, personnellement, je l'ai ressentie. C'est un récit qui tient à la fois de l'investigation, de la thérapie, de l'autobiographie mais surtout d'une quête : comprendre, dans comprendre il y a le mot prendre, c'est-à-dire, faire sien. Et c'est bien de cela dont il est question dans ce récit, comment un être humain peut-il tuer, abuser d'un enfant de six ans, qu'elle est sa part d'humanité ? Et cet être humain, peut-il être condamné à mort par un autre être humain ? Et que penser du silence de l'entourage familial qui est récurrent dans ces cas de maltraitance.

Ce livre est particulièrement perturbant à plus d'un titre, il oblige le lecteur à se poser nombre de questions qu'elles soient philosophiques, médicales, qu'elles aient trait à la justice des hommes, à l'éthique d'un individu, en un mot, plus d'une fois je me suis trouvée à poser ce livre pour tenter de me confronter à mes propres réflexions.

Alexandria est étudiante en droit, issue d'une famille d'avocats, entourée depuis son enfance par des livres de droit, bien formatée par son milieu familial, elle va suivre le chemin de ses parents. Fervente opposante à la peine de mort, elle décide de se présenter à un stage d'été dans un cabinet en Louisiane spécialisé dans la défense des condamnés à mort.

Le lendemain de son arrivée, l'avocate qui prend les étudiants en charge les réunis autour d'un table :

« Nous allons vous montrer ça. Elle brandit une cassette vidéo. Il s'agit des aveux de l'homme dont nous venons de terminer le second procès. L'enregistrement date de 1992. Il y a neuf ans, il a été condamné à mort mais cette fois-ci, le jury lui a donné la perpétuité. »

« Cet homme c'est Ricky Langley, des lunettes épaisses, en cul de bouteille, des oreilles en feuille de chou, héritage de l'alcoolisme de Bessie, sa mère. Des yeux marron, les derniers qu'ait vus Jérémy (après avoir été abusé sexuellement et étranglé). Il parle des enfants qu'il a touchés. »

« Mais je regarde l'homme à l'écran, je sens les mains de mon grand-père sur moi et je sais ».

« Malgré la formation que j'ai suivie, malgré le but que je poursuivais en venant travailler ici, malgré mes convictions. Je veux que Ricky meure. »


Dans ces passages qui donnent le ton du livre, l'inconscient d'Alexandria prend la main sur son état émotionnel et conscientise, un peu comme des vagues successives qui viennent déposer à chaque flux et reflux, les éléments enfouis depuis son enfance afin de pouvoir vivre. Ce qui m'interpelle, c'est la synchronicité des évènements pour reprendre les termes de Carl Gustav Jung. Cette cassette a été présentée aux étudiants en remplacement d'une rencontre avec le fondateur du cabinet, absent pour raison professionnelle.

Je ne crois pas trop au hasard et j'aime cette formule bouddhiste « Lorsque l'élève est prêt, le maître se lève ». Cette vidéo va modifier le cours de la vie d'Alexandria. L'empreinte est indélébile, la mémoire du corps et de ses traumatismes se rappelle à son souvenir. Alexandria va se mettre à nue, elle n'omet rien, elle assume son passé, elle nous fait des confidences courageuses et afin de conquérir sa résilience, elle va tenter de concevoir les raisons qui ont poussé Ricky Langley à la pédophilie et au crime. Dans un récit extrêmement structuré, en s'appuyant sur les procès-verbaux d'audience, les évaluations psychiatriques, des rapports sur son passage dans le couloir de la mort, les articles, elle tente de reconstituer l'histoire de Ricky. Mais comme elle le constatera, il lui manque les émotions, les souvenirs, le passé. C'est ce qui l'incitera à se rendre sur place pour mieux s'imprégner des lieux. Ce qui rend son écriture assez exceptionnelle, c'est que de ces documents, elle a réussi à élaborer une histoire avec des individus qui prennent corps, qui s'animent sous nos yeux avec leurs sentiments, leurs questionnements, leurs incohérences, leurs faiblesses. Malgré la violence du contenu de certains passages, Alexandria parvient à déstabiliser son lecteur en l'amenant à découvrir les traumatismes psychologiques et physiques du milieu familial de Ricky Langley comme les ravages qu'engendrent les non-dits dans une famille. Elle ouvre des portes, ses portes, qu'elle lègue peut-être aussi à celles et ceux qui ont vécu des situations identiques. Que ce soit l'histoire de Ricky ou d'Alexandria, même si les situations sont différentes, on y trouve des points de similitude.

J'ai ressenti que ce livre libérait Alexandria, c'est un récit qui aurait pu être plus synthétique mais toutes ces pages sont salutaires, je fais le parallèle avec le passage où elle raconte « Mais à présent, le simple fait d'avoir quelque chose dans l'estomac, n'importe quoi, est soudain, inexplicablement, terrifiant. Seules les pommes, le yaourt à 0 % et les burgers végétariens sans le pain sont sans danger ». On visualise très bien ce à quoi cela la renvoie.

Elle ne vomit plus, elle écrit. Elle met à l'extérieur d'elle-même les secrets du passé.

C'est un témoignage remarquable et d'un courage admirable : elle a dû surmonter énormément de barrières. Ce livre a été couronné aux Etats-Unis par de nombreux prix.

« L'homme au centre de ce procès, dont la personnalité sera interminablement discutée et débattue, interminablement reconstituée et disséquée dans un dossier qui finira par faire près de trente mille pages, cet homme restera en ce sens une énigme. Il est bien possible que ce que l'on voit en Ricky dépende davantage de qui l'on est que de qui il est ».


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Quel roman intense, dense et déchirant !
Sublime Alexandria Marzano- Lesnevich. Intelligente, sensible, vive, combative. Son livre est fort, profond et …rythmé, très rythmé, on ressent une urgence de comprendre, de dire. Une urgence de SURvivre. A quoi ? A son passé, auquel elle « s'est cognée la tête » trop longtemps.
Le point de bascule qui fait ressurgir violemment ce passé opaque ? Une vidéo, et sur cette vidéo, un homme : Ricky Langley. Condamné à perpétuité pour meurtre, ce pédophile à longtemps côtoyé le couloir de la mort. A l'époque de cette hasardeuse découverte, fervente militante opposée à la peine de mort, l'écrivaine fait des études de droit à Harvard. Instinctivement attirée et fascinée par cet homme qui réveille en elle des sentiments incompréhensibles, elle mène une enquête minutieuse, qui vire à l'obsession car le passé trouble de ce criminel et sa déviance sexuelle lui rappelle sa propre histoire. En quête de vérité elle va investiguer sur le passé de Ricky Langley en s'appuyant sur différentes sources (pièces du dossier, salles d'archives, témoignages, visites de lieux…) tentant de reconstituer les événements, éclairer les zones d'ombres et peut être trouver une humanité là où n'apparaît que noirceur. En parallèle, elle retisse son parcours personnel.
C'est l'histoire, en partie autobiographique, de deux trajectoires, deux douleurs qui se télescopent avec en commun le dysfonctionnement familial et ses conséquences tragiques, les abus, le deuil impossible et, en filigrane, le mortifère poids du silence. Enfances aux traumatismes similaires menant pourtant à deux voies opposées : celle de la résilience, pour elle, l'emphatique, celle de la perversion pour lui, le « déconnecté » aux autres (et à lui-même)..

Alexandria Marzano-Lesnevich parvient à mettre des mots magnifiques sur l'ineffable. Elle comble les vides et les données lacunaires avec son imagination. C'est absolument bouleversant.

L'auteure place également la focale sur la notion de pardon et d'identité sexuelle ainsi que sur les limites de la Loi et du système judiciaire.
Profondément touchant, profondément humain.
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Ce que j'ai ressenti:

***Entre journalisme et biographie…

Alexandria Marzano Lesnevish ne se contente pas d'un récit journalistique sur un prédateur sexuel, elle nous démontre que L'Empreinte de blessures intimes, peut déterminer nos comportements et nos convictions. Avec cette lecture, on est confronté à regarder de plus près, les histoires et les ressentis de chacun, dans une affaire de pédophilie. A partir d'un meurtre d'un enfant de 6 ans, celui de Jeremy Guillory, l'auteure remonte le fil des causes directes et indirectes d'un tel acte, et nous laisse interpréter les responsabilités de chacun des protagonistes… Et parce qu'il n'y a pas cette froideur de faits établis, et parce qu'il n'est jamais facile de se positionner face à de tels débats d'éthique, cette auteure m'a bluffée, avec ce récit. Elle y apporte une touche personnelle. Très personnelle. Et c'est cette symbiose, qui rend ce livre incroyable.

« Je savais qu'il allait pleuvoir, leur dit-elle. Mais j'aime autant, au fond, parce que c'est comme si les anges dans le ciel pleuraient. »

***Un récit bouleversant…

J'ai rarement été aussi bouleversée par une lecture…Mais celle ci, elle a quelque chose de très spécial, puisque elle aborde des thèmes difficiles comme l'inceste, la pédophilie ou encore la peine de mort: des sujets très sensibles auxquels il est compliqué de prendre parti, sans une certaine réserve, ou de le lire sans une certaine émotion. C'est une lecture qui laisse des traces, un de celles que l'on n'oublie pas, même une fois, les pages refermées…

D'abord étudiante en droit, Alexandria Marzano se retrouve au coeur de l'affaire Langley, mais des démons se rappellent vite à elle…On le sait, les histoires ont beaucoup de versions selon ceux qui les racontent, mais dans le corps de Alexandria et son ressenti sur cette affaire, une autre histoire va naître: L'Empreinte. Elle mettra plus de 10 ans à l'écrire, tellement le parallèle entre sa vie et celle de Ricky Langley, semble étrangement entremêlé.

C'est un choc littéraire parce que les traumatismes de l'un se reflètent dans l'autre, et il est presque évident qu'un tel livre voit le jour et, qu'il envoie valser toutes les étiquettes des genres qu'on voudrait lui donner…Il est, c'est tout. Parce qu'après les drames, la résilience est nécessaire. Découpé en trois grandes parties (Le Crime, Les Conséquences, le Procès), ce récit/thérapie est surtout doté d'une sensibilité à fleur de peau. L'Empreinte ne se lit pas seulement, il se ressent, à la puissance de notre empathie…

« le silence fonctionne de la sorte. Il n'est pas fragile. Il protège les moments resplendissants et aussi les moments perturbants. »

***Humain, avant tout…

J'ai été interpellée par les coïncidences entre l'enfance de Ricky et Alexandria, et surtout leur hypersensibilité avec les réminiscences des drames de leurs familles. C'est curieux comme leurs deux histoires vont se mêler, et nous passionner le temps de 470 pages intenses. C'est un tour de force!

« Qui sait pourquoi le passé transparaît aux moments où il transparaît; qui sait pourquoi un secret devient soudain trop lourd à porter? »

Je pense que l'auteure a réussi son pari avec ce livre. Il dérange, autant qu'il questionne. Il a une énergie puissante, parce qu'il y a encore et toujours des secrets à dévoiler, des combats à mener, des histoires à interpréter, des problèmes à régler, des êtres à comprendre…Avec des livres de cette envergure, on prend conscience que nous sommes juste humains, avec nos blessures, nos failles, nos opinions et quelque fois, L'Empreinte. Indélébile.

« Sous la surface de ce qui peut être dit subsiste la vibration d'un monde qui n'appartient qu'aux ténèbres. »



Ma note Plaisir de Lecture 9/10
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Alexandria Marzano-Lesnevich nous donne à lire un document entre thriller psychologique et enquête minutieuse sur le basculement d'un individu dans une folie qui le conduit irrémédiablement à devenir un monstre.
En mettant en parallèle sa propre histoire et celle de Ricky pédophile et assassin, l'auteure reconstitue le cheminement des acteurs de l'affaire l'accusé, la victime, leur famille, les avocats, les juges, et pose en parallèle sa propre histoire. En visionnant la cassette des aveux de Ricky, Alexandria Marzano-Lesnevich se souvient de ce qu'elle et sa soeur ont subi, jour après jour, de la part de leur grand-père incestueux, protégé par une quasi omerta familiale. Bien que farouchement opposée à la peine de mort, elle se surprend à souhaiter l'exécution de cet homme.
Présenter « L'empreinte » comme un livre sur la loi et la recherche de vérité serait à mon sens réducteur, tant il contient d'émotion et de sentiments douloureux.

Je me suis surprise à lire avec passion ce document, moi qui en lis généralement très peu. Grâce à une écriture simple et efficace d'Alexandria Marzano-Lesnevich réussit à s'immiscer au plus profond dans la psychologie des protagonistes de ce drame.

« L'empreinte » est une lecture souvent douloureuse, qui pose une multitude de questions et dont on ne ressort pas indemne.
A mon avis, une grande réussite traité avec une parfaite maîtrise.


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Titre : L'empreinte
Auteur : Alexandria Marzano-Lesnevich
Editeur : Sonatine
Année : 2019
Résumé : Alexandria Marzano-Lesnevitch est étudiante en droit à la prestigieuse université d'Harvard. Opposante farouche à la peine de mort, toutes ses certitudes s'écroulent lorsque son chemin croise celui de Ricky Langlais, jeune pédophile condamné pour le meurtre d'un enfant. Cette affaire fait soudain écho avec l'histoire de la jeune fille et ses propres traumatismes. Bouleversée par ce cas, Alexandria tentera de comprendre les raisons qui ont pousser Ricky à commettre de tels actes.
Mon humble avis : Sonatine, excellent éditeur s'il en est, de nombreux prix, des avis de blogueurs extrêmement positifs, un thème clivant, un document basé sur des faits réels, une enquête approfondie, bref, tous les feux étaient au vert avant de démarrer la lecture de L'empreinte. Et puis vint le temps de la lecture et un mal fou à rentrer dans le texte malgré une écriture élégante et une construction soignée. Et puis petit à petit, alors que l'auteure dévoile ses failles, alors que le parallèle entre l'histoire personnelle de la narratrice et le sujet principal du roman se fait jour, un regain d'intérêt, la découverte d'une histoire forte, entêtante, marquante. Mais je devrais dire deux histoires, deux destins chaotiques marqués par la concupiscence et le crime. Pour la précision de l'enquête tirée d'un fait divers réel, pour l'implication de son narrateur, comment ne pas penser à Truman Capote et son fameux de sang froid ? Comment ne pas évoquer le génial Un long silence de Mikal Gilmore publié chez Sonatine également ? Alexandria Marzano-Lesnevich réussit le tour de force de hisser son texte au niveau de ces romans, et la comparaison n'est aucunement galvaudée, croyez-moi. L'empreinte plonge dans les tréfonds de l'âme humaine, l'auteure se livre sans fard, avec impudeur et honnêteté ; c'est intense, incarné et d'une intelligence rare. Document de l'intime, comme je viens de l'évoquer, mais aussi document universel traitant de sujets comme la peine de mort, le pardon, la culpabilité ou les secrets de famille, l'empreinte est indéniablement un grand roman américain. Pour cela, pour sa résilience et son opiniâtreté, je ne peux que m'incliner devant le talent de Alexandria Marzano-Lesnevich pour décrire l'indicible.
J'achète ? : Evidemment. Même si j'ai mis une centaine de pages à vraiment profiter de ce texte, il restera dans ma mémoire comme l'une des lectures les plus marquantes de cette année. Superbe, sans pathos et – pour ceux qui l'ont lu – parfois aussi effrayant que le pas d'un grand-père dans les escaliers.
Lien : https://francksbooks.wordpre..
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