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EAN : 9782710385936
320 pages
La Table ronde (09/01/2020)
3.53/5   37 notes
Résumé :
Le 6 décembre 2013, Johannesburg se réveille à l'annonce de la mort de Nelson Mandela. Ce jour-là, Gin, de retour dans sa ville natale pour les quatre-vingts ans de sa mère, prépare la fête qui aura lieu le soir même. Mercy, l'employée de maison, l'aide à tout organiser, mais guette ce qui se passe dehors : quelques rues plus loin, la foule commence à se masser autour de la Résidence pour rendre hommage à Madiba. Peter, ami de jeunesse de Gin devenu juriste pour une... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (26) Voir plus Ajouter une critique
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J'aime beaucoup la littérature anglaise et  Virginia Woolf  y tient une place particulière par son écriture, profonde, précise, ciselée, par sa personnalité, fascinante, intrigante, à multiples facettes et mystérieuse. Donc j'ai eu très envie de découvrir ce deuxième roman de Fiona Melrose qu'elle a composé à la manière de Virginia Woolf pour Mrs Dalloway, ce beau roman à la forme si particulière dans lequel on suit Mrs Clarissa Dalloway dans Londres à la recherche de fleurs pour la décoration de la réception qu'elle donne le soir mais qui est surtout un récit de pensées des différents personnages qui vont prendre tour à tour la parole pour non seulement parler de ce qu'ils vivent mais aussi de leurs sentiments profonds, intériorisés, forme connue sous le nom de flux de consciences.

Fiona Melrose s'est largement inspirée (voire calquée) sur l'oeuvre de Virginia Woolf en la transposant en Afrique du Sud, son pays natal, à Johannesburg, le 6 décembre 2013, le jour du décès de Nelson Mandela. Depuis plusieurs jours l'annonce de sa mort est attendue, la ville retient son souffle et c'est le jour où Gin (diminutif de Virginia...) organise une fête pour les 80 ans de sa mère Neve, fête organisée contre sa volonté. La relation entre les deux femmes est tendue, mère et fille sont très différentes et ne se comprennent plus depuis que Gin est partie vivre aux Etats-Unis afin de pouvoir exercer son métier d'artiste, en toute liberté et surtout mener la vie qu'elle souhaite, libre, loin du regard de sa mère et d'un pays où elle étouffait.

C'est le récit de cette journée très particulière pour le pays mais aussi pour les différents personnages et le roman se découpe en chapitres reprenant les différents moments de cette journée qui restera à jamais marquée par le décès de Madiba, nom tribal et affectueux de tout un peuple pour ce guide charismatique. L'auteure opte pour des personnages aux noms assez similaires à son modèle : September (pour Septimus), un sans-abri noir, bossu, blessé lors de manifestations répressives, Peter Strauss (pour Peter Walsh), avocat, ami et soupirant inconsolable de Gin, Richard (pour Richard) allant jusqu'à évoquer la tante de Gin, Virginia, à qui elle doit son prénom et qui s'est suicidée en se noyant (comme Virginia Woolf) :

"Qu'est-ce que ça faisait de perdre sa raison d'être dans le monde que vous aviez vous-même créé ? Tante Virginia avait eu une meilleure idée. Elle avait marché dans la mer à Plettenberg Bay, vêtue de sa robe du soir à paillettes. Elle avait toujours été une drôle de vieille chose (un visage d'oiseau -, mais mariée, elle, et non pas seule. C"était si loin, à présent. (p67)"

Fiona Melrose donne à Johannesburg le rôle principal comme Londres et Big Ben rythmaient les heures de la journée de Clarissa Dalloway : la ville et ses habitants vivent à l'unisson d'un événement mais avec des préoccupations différentes, dans la chaleur écrasante, chacun marqué par la perte de l'homme qui voulait faire disparaître les différences de couleur, qui a redonné espoir à tout un peuple, chacun voulant passer à la Résidence pour lui rendre un dernier hommage.

Mais au-delà de l'événement il y a, avec le retour pour quelques jours de Gin, dans son pays natal, les pensées, ressentiments, souvenirs de chacun, leurs destins se croisant à nouveau : Gin, Peter, Richard, Neve, Mercy (l'employée noire de Neve), Duduzile (la soeur de September), Juno (la chienne) et September qui sera le lien entre tous, lui l'homme blessé, humilié, voulant dénoncer les erreurs commises par la Société Diamond, qui emploie Peter et Richard, et qui n'hésite pas à réprimer les manifestations par la violence.

Chacun vit cette journée à sa manière, plongé dans ses pensées, ses occupations mais, comme dans le roman modèle, il y a la confrontation entre intériorité de chacun et regard des autres sur la même personne, sur les événements. Nous ne sommes pas toujours ce que les autres pensent que nous sommes, nous ne percevons pas tous de la même manière les faits.....

On y retrouve les thèmes chers à Virginia Woolf : la nature et en particulier dans Johannesburg les agapanthes (comme sur la jaquette de couverture), les atmosphères, le climat se mêlent aux sentiments de chacun. L'accent est mis sur une journée qui aurait pu être ordinaire et qui devient, en raison des événements, une journée hors du temps.

La préparation de la réception d'anniversaire de Neve, la chaleur, le décès de Mandela mettent en avant les différents points de vue des différents personnages : racisme, abus de pouvoir, incompréhension familiale, émancipation, justice.

J'ai pris au final ce roman comme un hommage à la grande dame de la littérature anglaise qu'était Virginia Woolf et il faut malgré tout du talent pour y parvenir. Pour quelqu'un qui n'a pas lu Mrs Dalloway, ce roman offre une approche d'une écriture dite d'ambiance, de climat. Tout est lent, doux, décortiqué, analysé, c'est le récit d'un instant de vie. Pour moi qui ai lu l'oeuvre originale, je l'ai découvert comme un exercice littéraire, et pas des plus aisé et dans l'ensemble que j'ai apprécié, ne cherchant pas à dissimuler son inspiration et je le trouve réussi, actualisé et comme une marque de respect et d'admiration pour son modèle.

Je le recommanderai à ceux qui n'ont pas lu Mrs Dalloway, comme une approche d'un style, d'une écriture, d'une construction, d'un univers qui pourrait les inciter à découvrir Virginia Woolf mais il faut accepter d'entrer dans un récit où les voix sont multiples, se croisent, où il n'est pas question d'actions mais plus d'ambiance, de pensées, de sensations et de ressentis.
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Le 6 décembre 2013, Johannesburg se réveille avec l'annonce du décès de Madiba, le nom affectueux et respectueux que les Sud-africains ont donné à Nelson Mandela. L'espace d'une journée, sous les cameras du monde entier, la Nation arc-en-ciel est unie dans la douleur, elle rejoint la Résidence où le corps de Tata repose, pour un ultime hommage.
A deux pas de là, une fête se prépare. Gin Brandt a quitté New York le temps de célébrer les 80 ans de sa mère Neve à Johannesburg. le dîner qu'elle a prévu en son honneur au soir de cette journée de décembre est loin de faire plaisir à sa mère Neve. Une vieille acariâtre, « très blanche à l'intérieur comme à l'extérieur », qui donne tout son amour à sa chienne plutôt qu'à sa fille, et si peu à sa bonne Mercy. Neve n'a jamais compris Gin, ni son arrogance, ni son désir de fuir sa famille aussi loin que possible, ni pourquoi elle a rejeté Peter, un excellent parti qui lui aurait assuré une situation et une descendance respectables. Mais pour Gin, pas d'autre issue possible pour continuer à vivre que de rompre avec ce carcan culturel de bonne famille Afrikaner.
Un événement inattendu va semer le chaos au beau milieu de cette journée : la chienne Juno se retrouve par mégarde dans la rue, perdue et assoiffée. La panique saisit toute la maison, débute alors une course folle vers une tragédie.

Le récit ne se cantonne pas à ce huis clos entre ces trois femmes Neve, Gina et Mercy. Dans la maison voisine, Duduzile la domestique de cette famille blanche méprisante à son égard, prend soin de son frère September, un sans-abri qui trouve parfois refuge dans le jardin. Son quotidien à lui est de mendier sur les îlots des carrefours routiers et de se rendre au pied de l'immeuble Diamond, une société minière, pour protester contre le massacre d'ouvriers sur qui on a tiré au cours d'une manifestation. Il en a été une des victimes.
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On retrouve dans ce récit la construction du roman de Virginia Woolf « Mrs Dalloway » et de nombreuses références à la vie de cette femme. Fiona Melrose ne s'en cache pas, bien au contraire. Elle affirme son admiration pour cette auteure. Elle reconstitue également avec justesse l'ambiance de la chambre si chère à Virginia Woolf, « une chambre à soi » où ces femmes trouvent refuge et où elles créent un monde à elle.

Ce qui m'a vraiment plu dans ce roman c'est la place centrale accordée à la ville de Johannesburg et à ses habitants. Je suis allée à Joburg, et j'y suis retournée en plongeant dans ce roman, un immersion sensorielle incroyable à travers les bruits de la pluie d'orage de 16h, les hélicos survolant les hauts murs des résidences ultra-sécurisées des Blancs, les descriptions colorées et les parfums des fleurs qui embaument les rues de la ville (agapanthes, jacarandas, hydrangeas, frangipaniers, l'herbe des parcs) que les habitants préservent et honorent.
Johannesburg est une des villes les plus violentes au monde, mais elle sait aussi être généreuse, passionnée et unie le temps d'une journée.

Fiona Melrose porte un regard sévère sur cette nation qui peine à sortir de sa période ségrégationniste. Difficile de rendre sa place au peuple Noir au coeur d'un pays dirigé par une communauté blanche qui garde le pouvoir entre ses mains. Alors l'auteur nous force à ouvrir les yeux sur la situation de ce pays. Tout remonte à la surface : l'opulence des Blancs, les domestiques noires asservies et contraintes de laisser enfants et parents au pays, le Zimbabwe, pour une poignée de Rands, la volonté, mise à mal parfois, du respect des traditions des ethnies Zoulous, Sothos, Xhosas, la misère des « coloured people » laissés sur le carreau, les Noirs qui mendient et vendent des fleurs au bord des routes à des automobilistes blancs dédaigneux, et qui, le soir venu, rejoignent les townships dans les taxis-bus bondés. Voilà à quoi ressemblent 24 heures dans la vie de Johannesburg.

Les femmes font battre le coeur de cette journée - l'auteure évoque également les femmes de Mandela qui ont joué un rôle essentielle dans sa vie. Pourtant ce roman ne serait pas la même sans September, le frère de Dudu. Personnage lumineux et aimant, droit et fier comme un guerrier Xhosa malgré sa physionomie difforme, comme Quasimodo devant la façade du building impugnable de la compagnie minière qui a ouvert le feu sur la foule des grévistes, détruisant sa vie à jamais ; il est temps de rendre des comptes, alors, avec son panneau sur son dos bossu, il demande dignement justice chaque jour. September honore chaque parcelle de vie, humaine et animale. C'est un personnage magnifique qui arbore les fleurs des parcs en couronne.

Je suis encore sous le charme de cette écriture sensible, touchante, et ce regard très pertinent sur la société sud-africaine. Un coup de coeur !
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3 personnes se réveillent tôt, dérangées par le bruit de l'orage. September, un clochard, Gin (Virginia Brandt) de retour au bercail pour les 80 ans de sa mère et Mercy l'employée de maison.

On est à Johannesburg, Afrique du Sud, en hiver et à quelques semaines de Noël. le roman est basé sur une journée et se construit sur les heures successives de cette journée. Je sais dès les premières pages que ce livre va me séduire entièrement. Fiona Melrose sait parfaitement instiller une ambiance.

C'est un jour très particulier qui voit enfler une rumeur : la mort de Mandela. Mandela est qualifié de boussole morale. Est-il déjà mort ? September est persuadé que oui, depuis des mois.

Gin s'appelle Virginia comme sa tante qui était écrivaine. Celle-ci avait une certaine notoriété et s'est suicidée dans l'océan à l'âge de 80 ans.

Gin est peintre. Elle vit à New York. Elle a fui étant jeune adulte pour se réaliser et échapper à la désapprobation de sa mère qui ne la comprend pas. Elle a laissé son amoureux Peter, trop fragile pour la soutenir.

Dans la matinée, alors que sa mère refuse de la voir, Gin sort faire les courses pour la soirée d'anniversaire de sa mère. Elle est oppressée par la ville, les mendiants. Son unique but est d'organiser cette fête qui est si loin de ses conventions à elle.

Ce roman est dramatique. C'est la fin d'un cycle individuellement et collectivement. le parallèle est fait avec la mort de Nelson Mandela, le père de la nation. La mort de September est mauvais signe. On devine à la fin du roman que Peter va changer de vie et défendre d'autres intérêts que les dirigeants de la mine. Soignera-t-il enfin sa blessure suite au départ de Gin, 20 ans plus tôt ?

Les pales d'hélicoptères constants, l'orage qu'on attend, le chien de Neve qui a disparu, Neve qui part dangereusement dans la ville, la ville menaçante, tout est sujet à angoisse. le paroxysme arrive quand l'orage éclate.

Même les personnages secondaires prennent une autre direction, comme Richard qui travaille avec Peter ou Duduzile qui décide de retourner dans sa région d'origine après la mort de son frère, September.

J'ai voyagé dans Johannesburg, j'ai senti le soleil sur ma peau, le manque d'air, vu les quartiers barricadés de maisons opulentes, observé le Diamond (quartier d'affaires). J'ai voyagé plus loin que n'importe quel guide, menée par l'esprit zoulou, entendant l'océan saturé de voix, guidée par l'odeur des frangipaniers.

La fin du roman est un chant d'espoir, d'humanité. Gin est en vie, souhaite vivre, vibre et éprouve de la gratitude, me semble-t-il.
Lien : http://bit.ly/2ScPgAx
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Comment ne pas éprouver une certaine méfiance devant un roman écrit "à la manière de", comme Johannesburg de Fiona Melrose, directement inspiré de Mrs Dalloway de Virginia Woolf ? Et aussi de la curiosité, fatalement, lorsque les souvenirs de ce dernier livre se sont estompés avec le temps. Johannesburg, ouvrage circadien et polyphonique, se déroule le jour de l'annonce de la mort de Nelson Mandela, le 6 décembre 2013. Non que cette triste nouvelle ait un impact sur les différents personnages du roman mais elle permet à Fiona Melrose de créer une atmosphère douloureuse et de rappeler l'histoire récente de l'Afrique du Sud. Ils sont nombreux les protagonistes de ce livre choral et l'auteure passe de l'un à l'autre sans transition, ne consacrant à aucun un chapitre entier. La fluidité du récit en souffre car comme souvent dans ce type de roman car tous les personnages n'ont pas des personnalités égales et la frustration nait de ce que les plus intéressantes ne sont pas aussi développées que le lecteur le souhaiterait. L'équilibre est instable alors même que l'on sent bien que Fiona Melrose souhaite privilégier deux portraits : celui de la jeune artiste "exilée', revenue fêter le 80ème anniversaire d'une mère qui ne la comprend pas et celui d'un sans domicile fixe qui manifeste chaque jour après avoir été blessé par balle. Les pensées les plus intimes de ces deux-là et de quelques autres (dont un chien !) nous sont livrées par le menu et, même si le style de la romancière est remarquable, il y a un moment où ces états d'âme deviennent répétitifs et, surtout, brident sérieusement l'imagination. Difficile, dans ces conditions, si l'on aime plutôt une littérature qui suggère plus qu'elle ne souligne, de prendre un plaisir intégral à la lecture de Johannesburg.
Lien : https://cin-phile-m-----tait..
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J'ai aimé ce roman qui m'a bouleversée, et je peine à poster une critique ! Pour quelles raisons me direz-vous ? C'est complexe... et je vais être brève. La présentation de l'éditeur me parait excellente, c'est à souligner, et je ne saurais faire mieux. Mais je n'ai pas lu "Mrs Dalloway" de Virginia Woolf... est-ce un grosse lacune ? J'ai donc abordé "Johannesburg" sans méfiance, ni parti pris, avec en toile de fond des récits de proches ou des lectures d'autres auteurs qui font que ce pays me touche énormément, depuis longtemps. Il m'a fallu un peu de temps pour situer les personnages et leurs activités dans ce roman polyphonique, de construction originale. Il se déroule sur vingt quatre heures, le jour ou l'on apprend le décès de "Madiba", Nelson Mandela, dans cette ville qui donne son titre au roman. le 6 décembre 2013. Je n'y étais pas bien sûr, mais je peux m'en souvenir, ce fut bouleversant.
Les acteurs situés, le rythme pris, il ne m'a plus été possible de m'arrêter et j'ai pris un réel plaisir à cette lecture... les odeurs, les sentiments divers, la violence, l'exil... Ce roman me semble refléter le climat violent et incertain qui règne sur l'Afrique du Sud. C'est pour moi très proche du coup de coeur, et je remercie "Masse critique" et la Maison d'édition "Quai Voltaire" de m'avoir procuré ce plaisir... que vais partager. et conseiller.
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critiques presse (2)
LeFigaro
10 janvier 2020
Imagine-t-on Virginia Woolf chez les Zoulous? Difficile, voire impossible. Et pourtant, ce hiatus culturel, la Sud-Africaine Fiona Melrose l’a franchi avec un certain génie dans son deuxième roman, Johannesburg.
Lire la critique sur le site : LeFigaro
Lexpress
07 janvier 2020
Sur le modèle de Mrs Dalloway, Fiona Melrose propose une formidable radiographie de l'Afrique du Sud, le jour de la mort de Mandela.
Lire la critique sur le site : Lexpress
Citations et extraits (15) Voir plus Ajouter une citation
C'était une ville où la fameuse blonde et son homme à la carrure athlétique menaient des existences qu'ils croyaient extraordinaires. Où des comptables faisaient des plaisanteries sur les "ennuyeux comptables" sans jamais s'inclure dans le lot. Où des femmes commençaient presque toutes leurs phrases par "Mon mari dit que", en se rendant à un énième déjeuner au volant de leur 4 x 4. Un 4 x 4 acheté sur les conseils d'amis qui tous conduisaient la même voiture, toujours gris métallisé. Ils poursuivaient cette parodie inconsciente d'une vie qui existait déjà des décennies plus tôt et semblait persister et se propager.
Le mariage et les enfants étaient des hobbies, tout autant que l'évolution d'une relation. C'était ce à quoi s'occupaient les gens le week-end, avec quoi ils comblaient le silence; les mariages, les fêtes prénatales, les enterrements de vie de jeune fille, l'achat du landau et ainsi de suite, comme s'il n'y avait rien d'autre au monde qui ait de la valeur, rien pour attirer leur regard ou leur donner à réfléchir.
Et ça, cette infinie vacuité, était censé offrir à Gin une sorte de consolation. Elle était censée la trouver nourrissante, substantielle. Elle était censée attacher sa propre vie à cette vapeur et y puiser une satisfaction profonde et durable.
Plutôt mourir.
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Gin avait l'impression que la sueur montait de sa taille et, en même temps, dégoulinait du haut de sa tête, d'un endroit affreux, froid et humide. Elle marchait et courait alternativement, appelant Juno. Elle arrêta les gens dans les rues pour leur demander s'ils n'avaient pas vu un chien blanc et roux à la queue à long poil. Personne ne l'avait vu. La chaleur était si accablante que Gin en conçut une sorte de colère au moment même où ses larmes commencèrent à couler. Elle aurait voulu pouvoir échapper à son corps et nager dans des abîmes infinis de froid, en la seule compagnie des bulles glissant sur son visage à chaque expiration. Elle plongerait dans les profondeurs, puis avec un battement de pieds, cambrant la colonne vertébrale, elle disparaîtrait.
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Qu'est-ce que ça faisait de perdre sa raison d'être dans le monde que vous aviez vous-même créé ? Tante Virginia avait eu une meilleure idée. Elle avait marché dans la mer à Plettenberg Bay, vêtue de sa robe du soir à paillettes. Elle avait toujours été une drôle de vieille chose (un visage d'oiseau -, mais mariée, elle, et non pas seule. C"était si loin, à présent. (p67)
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Le secret de cette ville, c'est que ce sont les femmes qui portent le fardeau de toutes nos larmes. Cet endroit doré, nos murs et nos rues ont été bâtis à l'aide des grains de sucre laissés au fond de leurs tasse en fer-blanc. (p.140)
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Richard mit de l'ordre sur son bureau. Il aimait que les choses soient à leur place. Carrées, rationnelles. Pas ces pleurnicheries et ces débordements d'émotion.Il y avait un message lui demandant d'appeler Mogomotsi. Une histoire d'actionnaires. Ça c'était quelqu'un. Pas le genre à pleurer. Voilà pourquoi on pouvait lui faire confiance pour bien gérer les dossiers.
Richard ouvrit le journal. En une, un portrait pleine page de Mandela et le titre : Une Nation En Deuil.
Un si bel homme.
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