Je remercie Babelio et les Presses Universitaires du Midi pour ce livre reçu dans le cadre de l'opération Masse Critique.
Hélas, ce livre est une déception pour moi. Si certes, j'ai l'habitude que les textes analytiques soient bien trop éloignés de la réalité pratique et clinique sur le terrain, j'attendais une force théorique utile et utilisée pour parler fort. Avec ce titre, "Le Féminin, problème ou devenir", je m'attendais à un discours fort, un cri pour rallier la vague qui devrait encore revenir et revenir pour l'égalité des droits des femmes, et de tous les êtres humains. Un féminisme qui n'est qu'un humanisme. Ou l'humanisme doit être un féminisme.
Projections de ma part. A partir des quelques lignes données en primeur pour ce livre lors de la Masse Critique. Oui, grosse grosse projection. Projection rime souvent avec déception.
Ce que nous avons là est un retour théorique et historique de la vision de Jung de la psychanalyse, dans ses fondements et ensuite dans le détail, et plus particulièrement dans l'appréhension du féminin, son utilisation, son avènement, tant chez l'homme que chez la femme.
C'est très pointu. Il y a des liens avec énormément d'ouvrage de Jung et d'autres analystes ou spécialistes de la question, notamment anthropologiques.Ce livre a un côté thèse de doctorat. Et à ce titre, je pense qu'il ne peut s'adresser concrètement qu'à des férus du sujet ou des psychanalystes. Un individu lambda s'effondrerait devant les concepts et leur enchaînement.
L'auteure explique : "Cet ouvrage explore l'altérité, intérieure et extérieure, concept jungien fondamental, représentée par des figures inconscientes, de l'ombre d'une part, ainsi que des figures complexes, féminines pour l'homme (anima), masculines pour la femme (animus). le féminin est l'image psychique qu'en portent les uns et les autres, individus et collectifs."
Je ne vais pas faire une tentative de résumé, d'ailleurs les quelques dernières pages de l'ouvrage en sont un, et à mon sens ce résumé est suffisant pour entendre et comprendre les messages voulus.Le livre fait environ 300 pages, il y a une bibliographie massive, il y a beaucoup d'intelligence, beaucoup. J'aurais apprécié un lexique parce qu'il y a énormément de concepts qui mériteraient un lien facilité au coeur de l'ouvrage. Certes, il y a un glossaire, mais il me semble trop pauvre en comparaison au texte.
Je retiens que Jung a clairement fait évoluer la psychanalyse freudienne, selon moi il a fait voler en éclat les définitions, les images et concepts de
Freud, et pourtant Jung lui-même n'est jamais qu'un humain, avec ses idiosyncrasies et ce qu'il tente d'ériger en universel ne sera jamais qu'une façon de voir les choses. Une façon bien intéressante, nettement plus crédible et sur laquelle on peut nettement plus se baser pour réfléchir et travailler (peut être) que son aîné Viennois.
Bref, un livre pour les pros. Ou les passionnés de la question des identités et de l'identité féminine en particulier.
Je préfère terminer par ces deux citations qui terminent le résumé qui lui-même termine le livre :
"Si l'on peut différencier quatre plans du féminin inconscient [...] ne peut-on parler aujourd'hui d'un cinquième plan, recherché et trouvé parfois par la femme moderne consciente, qui bénéficie de la contraception, mais toujours à conquérir ? Ce cinquième plan correspond à une tentative d'entièreté de tous ces plans représentés chacun par une femme mythique : en effet, la maternité charnelle n'est pas inconciliable avec la procréation par l'esprit, pour rejoindre Diotime dans le Banquet de
Platon. Mais, pour l'heure, cette femme moderne, en recherche plus ou moins consciente, a-t-elle élaboré la question de la matrice ? Devant sa manière de s'identifier à l'homme, la plupart du temps, il semble que non."
"Mais le devenir du féminin concerne les deux sexes et ne peut se passer ni de l'homme ni de la femme. Nous dirons que, pour chacun, il s'agit d'un travail dialectique entre logos et Eros dans la réciprocité. Si, pour la femme, la conquête de son propre logos n'est pas une imitation de l'homme, pour celui-ci, l'Eros peut lui permettre d'adoucir un logos la plupart du temps porté à l'extérieur en termes de pouvoir, pouvoir sur l'autre et pouvoir sur les autres (discours politique ou professionnel)à. L'intimité du couple peut alors se transformer en échangeant mutuellement les qualités d'Eros et de logos."