S'abstenir de tirer sur une ambulance est moins drolatique que de demander à Liliane de faire les valises (cf même collection). Pourtant, cette nouvelle d'anticipation sociale ne manque ni de charme littéraire ni de cynisme sur la nature humaine.
En cette fin de matinée du 22 décembre 2012, trois hommes attendent que sonne midi sur la terrasse d'une suite du Negresco déserté. A portée de main, une bouteille de champagne pour fêter la fin du monde annoncée fort sérieusement.
Les côtes françaises ont été abandonnées par crainte du tsunami prévu, les régions volcaniques délaissées.
Bref, après quelques mois de chaos social et économique, l'ensemble de la population française a été regroupée dans Paris et la région Centre. Quelques individus ont, cependant, refusé de déraisonner (il y a toujours des têtes brûlées), de se prendre l'esprit dans le tapis des croyances. Ils se sont installés dans des hôtels vacants, et quitte à choisir autant s'offrir du luxe, même sans service d'étage ni électricité. Ici, le Negresco.
Face à une Méditerranée sage, un ciel peu chaotique et une douce température, les trois Sceptiques constatent qu'à l'heure convenue la terre perpétue sa rotation sans hoquet.
Tout le talent de
Francis Mizio se développe alors. Jusqu'alors, les Sceptiques stigmatisés et minoritaires s'étaient installés en zone isolée en respectant un code moral permettant à chaque groupe d'évoluer selon ses désirs.
Dans la fronde, la solidarité était chose concrète. On ne pillait pas les biens ce ceux qui grelottaient dans le Nord, on se faisait confiance entre personnes sensées. On vivait doucement.
L'heure est passée. Les gens vont revenir.
L'heure est passée, que vont-ils devenir, eux?
L'heure est passée, que souhaitent-ils?
Il n'est pas tout d'avoir refusé le catastrophisme d'un calendrier venu du fond des âges, il s'agit de se confronter à un réel informe, d'imaginer un avenir.
L'heure est passée.
Le soir, à la lueur des bougies, l'une des locataires du Negresco parie sur la déréliction de leurs rapports humains, à eux, les Sceptiques. L'opinion personnelle sonne alors comme une prophétie…
Dans mon marc de café (noir, sans sucre, merci), je vous prédis une bien agréable lecture aux accents du film Melancholia de mon réalisateur vénéré
Lars von Trier.