Elle ne paye pas de mine cette épouvantable couverture de Présence du futur des Éditions Denoël. Il n'empêche que grâce à eux, la littérature Science-Fiction a pu être abordable à la populace – un peu comme la collection terreur de chez Pocket.
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Encore un peu de verdure » ne jouit qu'une seule édition – celle de 1975. Il aura fallu 28 ans pour que cet ouvrage trouve une traduction et foule notre sol. Vous ne rêvez pas ! Ce court roman a bien été écrit en 1947 et Dieu merci – c'est une expression –, n'a pas eu de rafistolage, c'est-à-dire une réécriture.
Quand je détiens un livre aussi ancien entre mes mains, j'attends surtout de vivre une aventure à l'époque à laquelle il fut écrit, même si pour cela ledit ouvrage doit posséder des désuétudes, ce qui peut paraître davantage choquant lorsque l'auteur nous parle géopolitique – ce qui n'est pas le cas ici.
Albert Weener (un jeu de mots avec winner?) va se retrouver bien malgré lui dans une fabuleuse histoire. Notre sympathique personnage est un antihéros. Commercial – démarcheur – il répond à une annonce dans la presse locale pour vendre un produit révolutionnaire. Miss Francis est une scientifique. Elle a mis au point un métamorphosant – ne lui parlez surtout pas sa découverte d'engrais. Son souhait est de pouvoir accroître les rendements agricoles. le souhait de Albert Weener est d'accroître son pécule en démarchant les particuliers. Par ses agissements, il va déclencher une catastrophe environnementale.
Quelles furent savoureuses ces cinquante premières pages. Sur un ton absurde, j'ai pris beaucoup de plaisir à les lire et j'ai ri.
Le récit est narré à la première personne. Albert Weener nous raconte les événements depuis le jour de sa rencontre avec Miss Francis. On y découvre que ce personnage fabuleux arrive à s'adapter à cette situation, parvenant ainsi à se hisser dans la peau d'un reporter jusqu'à devenir un puissant patron d'une multinationale.
Si j'ai adoré le début, j'ai été déçu par la suite, non pas que le roman perd en qualité, mais davantage par son texte qui évolue vers une satire du monde capitaliste. L'ensemble prend une place trop importante dans l'histoire.
L'auteur prend le pari de raconter son aventure, mais aussi d'élargir sa vision au monde. Quelque part ce n'était pas ce que je voulais lire. le récit reste sur une touche passive et
Ward Moore nous à intercaler des passages indigestes (les articles de journaux) ou qui ne servent à rien (comme celui de l'auto-stoppeuse).
J'ai davantage apprécié la fin où l'auteur délaisse ses longs paragraphes pour des textes laconiques sous forme de journal de bord. J'ai même été surpris de lire les dernières lignes.
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Encore un peu de verdure » me laisse perplexe. Un ensemble plutôt réussi qui aurait pu soit être une longue nouvelle ou alors un court roman mieux exploité.
Ward Moore gonfle son texte et j'ai déprécié les passages inutiles et longuets, surtout ceux sur la bourse et le capitalisme. Toutefois ce récit se révèle riche sur bien des points. Notons également que l'auteur – au même titre que «
Autant en emporte le temps » (que j'ai adoré) – ajoute une pointe de modernité dans les rapports avec les femmes. Ici c'est une scientifique qui joue un rôle majeur, au fort caractère. On y voit également une certaine forme de patriotisme au travers ses réflexions. Bien évidemment on est au début de la guerre froide, et il est évident d'y retrouver les méchants soviétiques. Durant ma lecture, j'ai eu quelques moments de plaisir à lire certaines pitreries.
Il s'agit d'un roman novateur – je suppose pour son époque. Je retiens surtout l'originalité du thème exposé. le mieux est de se forger une idée par soit-même. Quoi qu'il en soit j'aime bien
Ward Moore, je pense continuer avec cet auteur. Pour toutes les personnes qui ont lu ce livre, je conseille d'aller lire la critique de
Jean-Pierre Andrevon sur le site NoosFere qui fut écrite à la sortie du livre. Attention toutefois, elle contient trop de spoilers.