Un titre de roman avec le mot "Stradivarius" ? Mon coeur s'emballe. Une couverture éblouissante ? Je me jette aussitôt dessus. Violoniste amatrice, la musique est ma grande passion et j'ai tout de suite été intriguée par ce roman, impatiente à l'idée qu'il m'emmène dans les tourbillons fabuleux des plus grands violons au monde, et me permette d'effleurer par procuration celui qui me fascine le plus.
D'un côté on suit Alicia Carter, jeune violoniste virtuose de 26 ans, à qui l'on vient tout juste de prêter un majestueux Stradivarius de 1721, le "Dei Conti", ayant appartenu à un pape du XVIIIe siècle. de l'autre il y a Tim Lewin, la quarantaine, employé de banque à Wall Street, un peu égaré dans une vie sans saveur qui retrouve subitement un éclat furieux lorsqu'il apprend la réapparition de ce fameux violon. Dès lors, il développe une obsession étrange pour Alicia et – surtout – le précieux instrument.
Très vite, il n'a plus qu'une idée en tête : récupérer coûte que coûte ce fameux Stradivarius dont il est persuadé qu'il a appartenu à Janucz, son grand-père. L'histoire bascule alors et on se retrouve projeté plusieurs décennies en arrière, en pleine montée du nazisme…
Je ne m'attendais pas à ce que cette période de l'Histoire, si chère à mon coeur, apparaisse subitement et j'en ai été d'autant plus émue. Cette seconde partie du roman est pour moi la plus réussie : elle m'a envoûtée, terrifiée. Je ne peux pas en révéler davantage et c'est très frustrant mais nous croisons des actes d'une grande violence comme d'une grande beauté. Et puis on ne peut qu'être bouleversé lorsqu'on découvre l'histoire de Janusz et le secret intime que conserve le "Dei Conti" dans son délicat corps de bois.
Ecrit par un musicien – et c'est évident dès les premières pages –, ce livre est évidemment un régal pour les instrumentistes et passionnés de violons : on nous parle Stradivarius évidemment mais aussi Guarnerius del Gesù, Guadagnini, Vuillaume… On nous parle des grands maestros de la musique classique tels Heifetz, Milstein ou Rostropovitch, mais aussi d'interprètes beaucoup plus jeunes comme Joshua Bell, Lang Lang ou Nicola Benedetti.
Piazolla, Beethoven, Bach ou Monti, le roman est pailleté de ces oeuvres féeriques dont on entend les notes en tournant les pages. J'ai même réécouté certaines pièces lorsqu'elles étaient mentionnées pour joindre le carrousel des notes au récit. Et c'est merveilleux quand on aime cet univers, ce monde de travail acharné, d'émotions à vif et d'instants de grâce.
L'écriture de
Philippe Morane est impeccable, aussi raffinée qu'un archet se posant sur les cordes. A mes yeux, il s'agit bien plus d'un thriller, c'est un vrai roman d'ambiance. On vogue entre curiosité et inquiétude, emmailloté par cette aura à la fois mystique et angoissante du "Dei Conti". C'est d'ailleurs fascinant de suivre les mille chemins empruntés par ces violons d'exception, transmis de générations en générations, prêtés, vendus, légués, perdus ou volés, puis retrouvés et revendus…
J'ai vraiment adoré ce livre, encore davantage que je ne m'y attendais, et je remercie Librinova et NetGalley pour cette lecture émouvante.
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