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La convocation », qui date de 97 dans la collection allemande de Métaillé (avec de bons titres tels que « A tire d'aile » de Angela Kraus, ou « Chroniques du roi David » de Stephan Heym). Bref. L'histoire est relativement simple et se passe en Roumanie sous Ceausescu, Conducator de son état. HM est roumaine de naissance, de cette minorité germanophone du Banat, à la frontière avec la Hongrie et la Serbie (province de Voïvodine, dont on retrouve souvent le nom voïvode, ou gouverneur dans les littératures d'Europe Centrale).
Donc une femme (je n'ai pas retrouvé son nom, si toutefois elle est nommée), mariée à un Paul, qui boit (de l'alcool de prune « Deux Prunes » local), et qui travaille pour une maison de couture italienne, va glisser un message (Ti aspetto, avec [s]on nom et [s]on adresse ») dans une poche de pantalon. Peu de communication entre les deux époux « Hier, ton ivresse était plus grande que cette cuisine » (ou alors l'appartement est trop petit). Mais rassurons nous « [il] ne boit pas pour oublier, mais parce que [il] aime ça ». Pour avoir donc glissé ce message, elle est convoquée à la Securitate « jeudi à dix heures précises» ou « mardi à dix heures précises», « samedi à dix heures précises» ou encore « mercredi ou lundi à dix heures précises ». On juge de la ténacité de l'administration. Là, elle rencontre le commandant Albu, qui lui fait un baisemain, mouillé, en lui écrasant les ongles. Et en plus il se parfume à « Avril, une eau de toilette française », « que [son] beau-père, communiste de pacotille, utilisait aussi » (ah, c'était au temps de
Georges Marchais, Liliane devait aussi lui en acheter).
Donc, cette femme se rend à
la convocation du commandant Albu, en tramway. Cela vaut un long descriptif, avec les différents passagers du tramway, le conducteur qui prend son temps car « le tramway n'a pas d'horaires fixes » et grignote des bretzels. le tramway revient tout au long des 200 et quelques pages. Il est intercalé avec des souvenirs (en fait tout ce qui fait qu'il y a maintenant cette convocation, les souvenirs avec Paul ou Lilli, sa meilleure amie qui a fini en charpie lors d'une tentative d'" évasion "
Ses petits billets dans lesquels elle attend une réponse lui valent d'être poursuivie pour « prostitution sur le lieu de travail » (et en plus elle n'est pas membre du parti). Ses collègues en profitent également pour glisser des petits billets « meilleures salutations de la dictature ». Mais bon, elle se fait renvoyer et ne trouve pas d'italiens qui lui répondent « en fait d'italiens, [elle eut] le commandant ». au total une humiliation permanent et des tracasseries de petits chefs " L'humiliation, comment appeler cela autrement lorsque tout le corps se sent pieds nus ". Tout est bon pour à son tour essayer d'influencer ses espions. A monsieur Michu, un voisin chargé de l'espionner, elle offre un cahier d'arithmétique, « moitié par malignité parce qu'il notait mes allées et venues et sans doute encore bien d'autres choses, moitié par gratitude parce qu'il m'avait mise dans la confidence » « l'idée étant de lui faire perdre son assurance quand il noterait ». Manque de chance, ce cahier est trop grand « parce qu'il fut que ça entre dans une poche de veste ».
Le livre évoque aussi l'idée de partir et d'émigrer. Cependant l'idée reste très vague. On pense plutôt « besoin d'un ailleurs », si bien que « tôt ou tard, d'une manière ou d'une autre, on tente le coup ». Par opposition c'est plutôt le fait de rester dans cette ville qui est important, avec ce que cela comporte de peur, d'angoisse et d'humiliation.