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sur 61 notes

Critiques filtrées sur 4 étoiles  
Bruno, le narrateur, s'est installé à Lisbonne « pour y attendre la fin du monde », mais pas seul : il attend aussi sa femme Cecilia, dans cet appartement qu'ils viennent d'acheter. Retraité, Bruno s'est occupé du déménagement de leur appartement de New York vers le Portugal et, pendant que Cecilia règle les détails de son transfert professionnel en Europe, il aménage leur nouveau foyer. A l'écart du bruit et de la fureur des grandes villes et du reste du monde qui court à sa perte (des feux de forêt font rage au même moment en Californie, en Australie, en Allemagne), Bruno prépare minutieusement l'appartement - couleurs de peinture, distribution des pièces, emplacement des meubles – pour qu'il soit le calque parfait de celui de New York. Pourquoi ce besoin de reconstituer aussi fidèlement un endroit familier ? Besoin de sécurité, de repères, de continuité, comme si rien n'avait changé, comme si tout était comme avant malgré leur retour sur le Vieux Continent ? Est-ce la peur de la nouveauté, du changement ? Et si oui, qui a peur, qui est fragile au point d'être perturbé par l'emplacement différent de telle lampe ou de tel ustensile de cuisine ? Bruno, Cecilia, les deux ? Autant de questions que le lecteur rationnel se pose pendant le premier tiers du roman, tant cette manie de Bruno apparaît obsessionnelle et surtout, à ce stade, inexpliquée. Pendant ce temps, le flux de conscience de Bruno nous dévoile l'histoire du couple, deux Espagnols travaillant à New York, fortement marqués par le 11-Septembre, le métier prenant de Cecilia, neuroscientifique renommée qui se livre à des expériences sur le cerveau et la mémoire de rats pour tenter d'en extraire le sentiment de peur, avec pour objectif de « déterminer s'il est possible de supprimer des souvenirs atroces de la mémoire de soldats souffrant de stress post-traumatique ».

Au fil des pages tout en introspection, le temps s'étire, se dilate, se distend entre New York et Lisbonne, entre souvenirs et projection, avec la certitude inébranlable de Bruno que les jours à venir couleront heureux et doux avec sa chère Cecilia. Mais le temps passe, ou semble passer, et un voile de confusion entoure l'arrivée toujours aussi indéterminée de Cecilia.

Suspense psychologique hypnotique, « Tes pas dans l'escalier » embarque le lecteur dans une histoire très simple au départ, qui glisse imperceptiblement vers quelque chose d'inquiétant et mystérieux, au fil de l'accumulation de petites entorses à la rationalité. On se perd en conjectures sur ce qui a pu se passer au sein du couple, avant de le découvrir dans les dernières pages.

C'est la première fois que je lis A. Muñoz Molina, et je découvre un écrivain au style impeccable et maîtrisé, qui excelle ici dans l'installation d'une ambiance floue d'inquiétude et d'oppression diffuses. Dans ce roman sur l'attente, il explore, en profondeur et sinuosités, la mémoire, la raison, la peur, la fragilité des murs qu'on se construit face à l'âpreté de la vie.

En partenariat avec les Editions du Seuil via Masse Critique de Babelio.
Lien : https://voyagesaufildespages..
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Ah, Antonio Munoz Molina ! Il y a entre cet auteur et moi une longue histoire, une très longue histoire, une interminable histoire... de procrastination. Depuis combien de temps je me suis promis de le lire, et surtout « Dans la grande nuit des temps » ? le canyon abyssal que représente ma pal en terme de temps de lecture n'en garde aucune trace sédimentaire. Par contre il y a eu récemment une résolution de début d'année aux vapeurs optimistes sur un fil de Florence, comme quoi il serait bon de mon côté d'ouvrir enfin un livre de l'aficionado du temps, pourquoi pas justement le 29 février de cette année à rallonge quotidienne. C'est chose faite, même si j'ai pas attendu le supplément de temps à notre calendrier pour ouvrir « tes pas dans l'escalier ».
le narrateur quant à lui est un spécialiste de l'attente, et s'est installé dans une bulle temporelle du côté de Lisbonne, en emménageant le futur appartement que Cécilia et lui devraient habiter dès qu'elle sera arrivée. Son présent est ainsi une vie de transition en attendant Cecilia, même s'il paraît osé de parler ici de vie à part peut-être celle d'objets, qu'il dispose à l'identique de leur logement à New-York, et qui réactivent sa mémoire d'un passé américain. Une non-vie plutôt, une existence en léthargie comme une quête de refuge hors du temps en attendant Cecilia avec sa chienne Luria, pour attendre en couple la fin du monde. Les souvenirs new-yorkais assiègent ses pensées, trauma apocalyptique du 11 septembre qui résonne avec l'angoisse généralisée d'un monde perclus de catastrophes et d'incendies notamment, vie amoureuse avec Cécilia et vie professionnelle, la sienne dont il semble soulagé d'en avoir été mis dehors et celle de Cecilia, neuro-scientifique que l'on suivra dans ses travaux laborantins. Il sera ainsi question de mémoire et en particulier celle de la peur, une mémoire qui pourra se faire le réceptacle amnésique de dates voire de l'absolution du temps, tout cela pouvant aboutir au mirage dans la conscience du temps qui passe.
Roman d'une littérature de la nuance, de l'attente, de la mémoire, de l'illusion et d'une sorte de mélancolie angoissée, on pourrait croire qu'il ne s'y passe pas grand chose, si ce n'est justement ce pas grand chose qui peut prendre de la place dans le désert de l'attente. La serrure du nouvel appartement coince comme un symbole et c'est le doute qui s'insinue assez tôt dans l'esprit du lecteur, avant que des aspérités dans la fin du récit ne viennent érafler pour de bon la quiétude lisboète de cette attente polissée.
J'ai bien aimé, mais de là à dire que j'ai été passionné... Ce roman m'en a rappelé d'autres que ma mémoire capricieuse m'empêche de saisir avec précision, des livres aux souvenirs incertains coincés quelque part entre « un homme qui dort » de Pérec, « les gommes » de Robbe-Grillet ou plus récemment « Oh canada » de Russel Banks sur la mémoire. Je pense avoir fait une erreur à vouloir le lire en février, en cette fin d'hiver frissonnant de signes d'un printemps précoce, dérèglement climatique oblige. Mauvais timing, c'est plutôt un livre d'automne à mon avis. J'aurais peut-être dû attendre un peu plus.

(merci en tout cas Florence, je continuerai je pense avec Molina)
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Bruno, le narrateur, lassé du monde, lassé d'un travail qui n'a plus de sens, traumatisé par l'attaque des Twin Towers, quitte New-York et s'installe à Lisbonne. Il y attend l'arrivée de Cecilia sa compagne, retiré de la fureur du monde, seul avec sa chienne, dont nous est dressé un superbe portrait, celui d'un animal si vivant, si intelligent, si sensible.
C'est cette attente qui nous est comptée, meublée d'une réflexion sur la vie, sur un monde qui s'écroule et devient dangereux. Autant Bruno est immobile, contemplatif, rêveur, réfugié dans les livres, autant la Cécilia qu'il nous décrit est active et impliquée dans des recherches de haut niveau sur le cerveau et la mémoire.
Il y a beaucoup de charme dans la description de cette attente, dans cette exploration d'un esprit déstabilisé, en proie à l'angoisse mais sachant où se trouve son bonheur. Un roman sur pas grand' chose, d'une grande densité et d'une sacrée élégance !
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Lisbonne. le narrateur, en retraite anticipée, a quitté New-York où il y réside avec sa femme Cécilia, grande neurologue. Ils ont prit la décision de quitter cette ville pour le Portugal. Il va donc s'intaller tout d'abord, et préparer l'appartement du mieux qu'il le peut afin d'accueillir sa femme dans un logement confortable.

Quel roman surprenant. J'ai été étonnée de tant l'apprécier d'autant plus qu'il ne s'y passe pas vraiment grand chose, et c'est là que réside le talent de conteur l'auteur.

En effet, pendant une bonne partie du roman, nous suivons l'attente du narrateur et les différentes étapes visant à aménager au mieux le logement pour sa femme. Leur histoire se dévoile par petites touches au travers des diverses introspections du narrateur.

Toute cette langueur installée au fil des pages est nécessaire afin d'amener un dénouement totalement inattendu et surprenant. L'auteur a su maîtriser la tension narrative et je n'ai absolument pas imaginé comment terminerait ce récit.

La plume de l'auteur est d'une grande élégance. Avec un sens du détail et beaucoup de digressions qui sont très intéressantes, l'ennui ne se ressent pas, même s'il ne se passe pas beaucoup de choses dans ce récit. le roman est narré à la première personne sous le point de vue du narrateur, ce qui donne un récit tout en introspection.

Un roman original et surprenant à découvrir.
Lien : https://mavoixauchapitre.hom..
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Un couple quitte New York après les attentats du onze septembre et décide de s'installer à Lisbonne… pour attendre tranquillement la fin du monde.
Un couple ? D'abord lui, qui profite de sa retraite anticipée pour meubler et décorer le nouvel appartement. Elle viendra ensuite, lorsque tout sera prêt. En attendant, brillante chercheuse en neurologie, elle parcourt le monde de congrès en symposiums médicaux. Il attend son arrivée en compagnie de leur chienne…
Il attend, nous attendons… Il sort le chien, aménage leur nouveau cadre de vie à l'image de celui qu'ils viennent de quitter. le lecteur plonge dans ses pensées, ses souvenirs. Ses idées passent de New York à Lisbonne, on s'y promène avec le chien et on s'y perd un peu, lui aussi semble hésiter. Il s'égare et peu à peu le temps et l'espace lui deviennent flous. Elle va le rejoindre, aujourd'hui. Plutôt demain… Il la guette à la fenêtre et bientôt il entendra ses pas dans l'escalier…
Quand arrivera-t-elle ? Je ne divulgache pas plus.
Disons simplement qu'il est question de retraite, temporelle et géographique, du temps qui passe et des souvenirs qui s'effilochent jusqu'à ce que les symptômes de la terrible maladie que chacun redoute commencent à apparaître.
Ennuyeux ? Un peu. Déroutant ? Complètement. Bien écrit ? Absolument. Faubert rêvait d'écrire un roman sur rien, Molina l'a peut-être réussi ? A vous de juger…
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Un auteur que je découvre avec ce livre que j'hésite à critiquer car il me laisse un sentiment un peu flou.
Une impression d'être un peu passée à côté d'une grande oeuvre.
D'avoir lu un texte magnifique et profond mais de n'avoir pas su l'apprécier à sa juste valeur.

Si vous voulez de l'action, ce livre n'est pas pour vous. C'est un livre sur l'attente, une description des pensées du narrateur qui s'est installé à Lisbonne et attend que Cécilia, sa femme, le rejoigne.
Il a emménagé l'appartement de façon presque identique à celui dans lequel ils vivaient à New-York.

Le début à été un peu laborieux pour moi car malgré une belle écriture, je ne ressentais pas ce petit quelque chose qui fait que l'attention est aiguisée, je ne me sentais dans l'attente de rien...Le narrateur me semblait plutôt commun.

Et puis l'intérêt est venu quand j'ai commencé à me poser des questions sur sa santé mentale. Je me suis même demandé si sa femme existait vraiment.
Et finalement j'ai globalement bien plus apprécié la fin que le début.

Mais j'ai quand même le sentiment d'être passée à côté de quelque-chose et d'être restée un peu en dehors du roman.
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Parce que Prix Médicis étranger 2020, parce que Lisbonne que je connais un peu et les 4T de Télérama. Déroutant, les lieux m'ont bien aidée à patauger dans ce marasme cérébral. J'étais agacée par un début très répétitif d'un quotidien tellement banal et d'un décor répété comme un vibrato. Je me suis laissée manipuler par l'auteur avec des questions permanentes, il est fou, il est où, c'est inventé, c'est vrai, c'est qui, c'est Alzheimer? Mais ces questions sans vraies réponses créent de l'angoisse sur la santé mentale de cet homme qui se barricade dans du concret, du répétitif. le temps devient prioritaire, secondaire et impalpable. En parallèle, il y a les expériences scientifiques sur le cerveau qui n'allègent pas l'ambiance, un licenciement brutal, injuste sans parler de la fin du monde qui se rapproche. le dénouement semble lointain tellement on voudrait que cesse l'attente de la femme adulée, inventée, morte dans l'attentat des tours jumelles, quittée ou en voyage? La fin expédiée comme un château de cartes qui s'écroule ne soulage pas le mal-être et la tension dominante. Etrange ce livre qui me retient, j'aimerais justement qu'il sorte de mon cerveau malmené. Et je sais pourtant qu'il va rester dans ma mémoire comme un certain Dino Buzzati.
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« Je me suis installé dans cette ville pour y attendre la fin du monde ». Ainsi commence le dernier roman de l'écrivain espagnol.
Pour fuir New York et sa folie de l'après-11 septembre Cecilia et Bruno décident de s'installer à Lisbonne pour y vivre la fin du monde « paisiblement ».
Cecilia étant accaparée par ses recherches tentant de supprimer les « souvenirs atroces de la mémoire de soldats souffrant de stress post-traumatique » et Bruno ayant été congédié d'un job qu'il détestait, c'est ce dernier, flanqué de sa chienne Luria, qui arrive en éclaireur et aménage leur nouvel appartement qui ressemble étrangement au précédent.
Commence alors l'attente de celle qu'il aime, attente qui tourne à l'obsession et glisse progressivement vers la folie.
« Tes pas dans l'escalier », à la fois récit apocalyptique, plongée dans l'intimité d'un homme dans le déni qui se détache de la réalité, immersion vertigineuse dans le fonctionnement de la mémoire, dégage un charme envoûtant qui enveloppe le lecteur dans un cocon empli de chimères et de faux-semblants.

Lien : https://papivore.net/littera..
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Lisbonne. le narrateur ("je") aménage son appartement à l'identique de celui de New York et attend que celle qu'il aime le rejoigne. Il se remémore leurs moments passés, raconte son quotidien dans cette nouvelle ville et se projette dans ce que pourrait être leur vie de couple.
C'est le livre de l'attente, du temps qui s'étire mais pas de l'ennui !
Découverte de cet auteur et de son style adapté au rythme du livre.
Et une rencontre très intéressante à maison de la poésie à laquelle j'ai pu assister...
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Aujourd'hui je vais évoquer Tes pas dans l'escalier roman lisboète hypnotique du romancier espagnol Antonio Muñoz Molina.
L'histoire de Tes pas dans l'escalier est assez simple : le récit énamouré d'un homme qui attend la femme qu'il aime. le narrateur, tardivement nommé Bruno, est arrivé récemment au Portugal. Dès l'incipit il précise : « je me suis installé dans cette ville pour y attendre la fin du monde. Les conditions y sont inégalables. L'appartement se trouve dans une rue silencieuse. du balcon on voit le fleuve au loin. (...). Au bout de la rue, au-delà du fleuve, s'étend la ligne des collines de l'autre berge et le Christ aux bras ouverts qui semble vouloir prendre son envol. » La ville dont il est question est Lisbonne qui est systématiquement opposée et comparée à New York d'où il a décidé de partir. Il était sur place le 11 septembre 2001, a recueilli et hébergé sa future compagne alors traumatisée. L'attente est donc double dans cette histoire : celle de la femme aimée Cecilia et celle impliquant toute l'humanité de la probable fin du monde. L'intrigue n'est pas précisément datée dans cette dystopie futuriste. Trump est au pouvoir aux Etats-Unis, la menace climatique est à son acmé : sécheresse draconienne, phénomènes météorologiques extrêmes, incendies gigantesques. Lisbonne semble un peu préservée. L'homme s'installe seul dans un premier temps dans la ville où sa femme doit le rejoindre prochainement. A l'aide notamment d'un employé polyvalent local Alexis et d'une femme de ménage il aménage l'appartement, attentif au moindre détail pour installer un cocon où le couple se sentira bien. Il reconstitue au Portugal l'intérieur américain. L'environnement n'est pas le même, depuis la terrasse il assiste fasciné au ballet incessant des avions. Il sait que bientôt Cecilia sera à bord de l'une des carlingues. Elle est une chercheuse en neurologie, voyage beaucoup et est en pleine activité professionnelle. Elle partage avec son époux le résultat de ses recherches notamment sur la mémoire. le narrateur a été licencié et mis à la retraite ce qui l'a poussé à partir de l'autre côté de l'Atlantique. Il est accompagné de sa fidèle chienne Luria qui elle aussi attend à ses côtés, docile et indolente. Tes pas dans l'escalier est un roman de l'attente, de la solitude, de l'amour à distance. le sentiment qui domine est celui de la saudade lusitanienne, difficilement définissable, mélange de nostalgie, de mélancolie et de douceur. le narrateur tourne parfois à l'obsession, sa mémoire défaille, il mélange les temps et les époques. Progressivement il devient inquiétant, le lecteur se demande s'il dispose de toutes ses facultés et s'il ne réinvente pas sa réalité. Au-delà de la petite musique de l'attente s'établit une partition plus angoissante.
Tes pas dans l'escalier est un joli roman poétique et en même temps un peu triste. Cette dystopie intègre des préoccupations contemporaines et à travers le personnage du narrateur propose une réflexion très intéressante sur le devenir du monde, probablement plus vivable malgré ses hordes de touristes et d'investisseurs à Lisbonne qu'ailleurs.
Voilà, je vous ai donc parlé de Tes pas dans l'escalier d'Antonio Muñoz Molina paru aux éditions du Seuil.
Lien : http://culture-tout-azimut.o..
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