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Court texte de souvenirs, quelques épisodes marquants de la vie d'un enfant, anodins le plus souvent, mais malgré tout sertis dans son histoire, jalonnant l'évolution de la relation entre le père et le fils, qui fut loin d'être paisible.

C'est une sorte d'absolution d'autant que les rares confidences paternelles fournissent une explication sinon un alibi à ce qui pouvait assombrir le regard d'un enfant sur son père.

Si le récit est très bref, il est accompagné de superbes illustrations qui soulignent les propos écrits, dans un style épuré mais très précis, restituant les faits et l'ambiance.

Les amoureux de Murakami ne manqueront pas d'être émus par ces confidences, puisqu'on apprécie d'en savoir plus sur les auteurs qui nous ont fait rêver.

Est-ce une façon de découvrir cet auteur ? Sans doute pas. Si elles permettent de voyager dans le temps et l'espace pour s'exporter au coeur du Japon tourmenté du début du vingtième siècle, ces confidences ne constituent cependant pas un reflet de la portée de l'oeuvre et de la magie de l'écriture d'un Kafka sur le rivage.
L'auteur se pose d'ailleurs clairement la question :

« J'ignore à quel point ces souvenirs personnels peuvent intéresser les lecteurs »

et confesse le besoin de

« raviver sa mémoire, de reconsidérer le passé et de le transformer en phrases et mots que l'on peut voir, que l'on peut lire à haute voix ».

Tentative d'exorciser le passé, et également réflexion sur la fragilité et le peu de valeur de nos existences individuelles, soumises aux seules lois du hasard.

Merci aux éditions Belfond et Netgalley.
Lien : https://kittylamouette.blogs..
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Abandonner un chat est une flânerie parmi les souvenirs du narrateur, agrémentés des merveilleuses illustrations d'Emiliano Ponzi, ce qui en fait une lecture délicieuse.
Le court récit s'ouvre sur un souvenir vivace dans la mémoire du narrateur, pas un bon souvenir, ni un mauvais, juste un souvenir saillant.
Son père et lui sont partis en bicyclette avec l'intention d'abandonner une chatte, pourquoi alors que la famille du petit garçon vit entourée de chats ? L'enfant ne se le rappelle plus et nous n'en saurons pas plus. Mais quand ils rentrent tous deux chez eux, ils ont la surprise d'être accueillis par l'animal délaissé. Comment a-t-il fait pour arriver avant eux ? Mystère.
C'est un petit livre qui ne permet pas vraiment de découvrir l'auteur, mais qui ravira ses fans.
Merci à NetGalley et aux éditions Belfond pour cette lecture.


Lien : https://dequoilire.com/aband..
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Abandonner un chat : Souvenirs de mon père est un récit très court de Haruki Murakami, quatre-vingts une pages, et encore, comprenant les belles illustrations d'Emiliano Ponzi. Mais celles-ci sont parties prenantes du texte, ces dessins m'évoquent d'une certaine manière, dans l'immobilité presque intemporelle des personnages dessinés, l'atmosphère de certains tableaux du peintre Edward Hopper.
Abandonner un chat... Quelle sotte et horrible idée !
Un jour alors qu'il était enfant, le petit Haruki partit avec son père à vélo en tenant une boîte dans laquelle était enfermée une chatte. Ils la laissèrent quelques kilomètres plus loin sur une plage avant de revenir à la maison. Murakami ne se souvient plus de la raison pour laquelle son père avait décidé d'abandonner l'animal mais il se rappelle son visage qui exprima successivement « la stupéfaction, l'admiration et le soulagement » à la vue de la petite chatte qui les attendait à la maison…
Abandonner un chat, lorsque le père du petit Haruki entraîne son fils dans cette cruelle invitation, cela fut-il un acte fondateur pour Haruki Murakami ? Dans son existence ? Dans son existence d'auteur ?
Cette histoire de chat est en effet un prétexte pour poser un regard intime sur son père, ou plus précisément sur la relation d'un fils à son père...
Quatre-vingts pages, c'est si peu pour évoquer un thème qui me touche. Tout est là pourtant déjà, les prémices de cette relation, la guerre entre le Japon et la Chine qui dessine le destin du père. La cruauté de la guerre et les questions d'un enfant sur ce que son père a fait pendant cette guerre, et après aussi...
Le destin tient à si peu de choses... Si son père était mort à la guerre, Haruki-Murakami n'aurait pas existé et certains d'entre nous n'auraient jamais emporté dans leur île déserte des livres inoubliables comme Chroniques de l'oiseau à ressort , par exemple...
Je me suis souvenu alors d'une question naïve que j'avais posé enfant à mon père. « Papa, toi aussi tu as tué des soldats allemands ? » Surpris, mon père ne me répondit pas, j'ai réalisé aussitôt qu'il ne s'attendait pas à une telle question de ma part. Ma mère comme toujours était dans les parages et s'arrangea pour m'éloigner vers ma chambre en disant que j'avais sûrement mieux à faire avec mes devoirs scolaires que de poser ce genre de questions morbides et idiotes. Je n'ai pas entendu l'échange qui s'ensuivit entre mon père et ma mère, le ton est monté, mais j'ai senti que ce n'était pas forcément une question à remettre sur la table et qu'entre-temps elle avait briefé mon père pour qu'il puisse me répondre plus spontanément, du genre : « non, bien sûr, je n'ai jamais tué aucun allemand, mais quelle question ! »... Mon père ne savait jamais mentir et là encore il m'avait attendri...
Abandonner un chat est magnifiquement écrit, mais ce texte me laisse sur ma faim. J'aurais tant voulu que l'auteur nous entraîne dans cette relation à son père, en quatre-vingts pages cela était impossible bien sûr, mais l'auteur est extrêmement pudique sur ce sujet, il me faudra me contenter de ces quelques pages qui donnent tout simplement envie d'élargir un horizon qui m'échappe. Dommage ! J'aurais voulu lire Haruki Murakami parlant de son père sur cinq cents pages. J'y étais prêt. J'avais le souffle pour cela. Dites-moi seulement si cette relation est présente dans l'univers romanesque d' Haruki Murakami. Alors j'y viendrai.
«Je suis le fils ordinaire d'un homme ordinaire». C'est ainsi que Haruki Murakami conclut modestement ce court livre.
Abandonner un chat, abandonner un père, abandonner un fils...
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Un bel objet que ce petit livre, j'ai adoré les illustrations superbes de l'italien Emiliano Ponzi avec leurs couleurs minutieusement choisies, qui répondent à merveille, avec beaucoup de douceur et de délicatesse, à différents moments de la vie de Murakami, de son enfance à la mort de son père.
Avec beaucoup d'humilité, Haruki Murakami, à l'âge de 73 ans ressent le besoin de nous livrer une part très intime de ses souvenirs, en particulier ceux qui l'ont marqué dans l'enfance, et ceux liés à son père. Ce père avec qui le dialogue a été difficile, parfois même interrompu pendant plusieurs années, mais dont l'auteur s'attachera après la mort à reconstituer les années de sa vie passée sous les drapeaux japonais. La blessure intime du père sur le front va lui survivre. Sa souffrance d'être revenu vivant d'une guerre dans laquelle tant d'autres de son régiment sont morts, il va la transmettre à son petit garçon.
Plusieurs passages sont émouvants lorsque Murakami évoque ses ancêtres, son père, son enfance, sa relation particulière avec les chats.
« Il y a toujours eu des chats à la maison. Je crois que nous vivions heureux avec eux. Pour moi, ils ont toujours été des amis merveilleux. Étant fils unique, mes compagnons les plus précieux étaient les livres et les chats. » (p.15)
Cependant, j'ai regretté des longueurs lors de l'évocation du conflit sino-japonais et également que Murakami ne se livre pas plus, et reste finalement un peu trop pudique à mon gout. Il balaye d'ailleurs cette objection d'un revers de main page 66 « Je ne veux pas m'attarder sur ces frictions entre père et fils. Cela m'entraînerait trop loin, je risquerais d'expliciter les choses trop crûment. Je m'en tiendrai donc là. »
Modeste, Murakami s'interroge sur l'intérêt que les lecteurs pourront trouver à son ouvrage, et sur l'incroyable nombre de « si », de circonstances qui ont amené ses parents à se rencontrer, puis à avoir un fils, lui. Il s'interroge avec pudeur sur cette somme de hasards qui nous permettent de venir un jour au monde, et nous rendent finalement bien peu légitimes, et pourraient même faire de nous des êtres diaphanes, évanescents.
« J'ignore à quel point ces souvenirs personnels peuvent intéresser les lecteurs. Mais je ne peux penser qu'en écrivant (et je n'ai jamais été à l'aise avec les théories abstraites), j'ai besoin de raviver ma mémoire, de reconsidérer le passé et de le transformer en phrases et en mots que l'on peut voir, que l'on peut lire à haute voix. Et plus j'écris, plus je me relis, plus je suis envahi par la sensation étrange de devenir transparent. Si je lève la main en l'air, j'ai l'impression de voir au travers.
Si mon père n'avait pas été démobilisé et avait été envoyé sur le front, aux Philippines ou en Birmanie… Si le professeur de musique, le fiancé de ma mère, n'était pas mort à la guerre… Quand j'ai ce genre de pensées, j'éprouve un sentiment très singulier Parce que, si ces hypothèses s'étaient réalisées, je ne serais pas ici, sur cette terre. La conscience de moi n'existerait pas non plus, ni les livres que j'ai écrits. Dans cette perspective, le fait même que je vive ici et sois romancier s'apparente à une simple illusion éphémère, qui manque bizarrement de substance. le sens que j'ai de mon individualité devient de plus en plus flou. Pas étonnant que je sois capable de voir à travers la paume de ma main. (p.72) »
Quelques attentes un peu déçues de mon côté, mais n'hésitez pas à feuilleter ce petit livre rien que pour le plaisir des yeux et découvrir les dessins d'Emiliano Ponzi. Il est aussi l'occasion pour les fans de recueillir des confidences et apportent un éclairage intéressant sur des thèmes chers à l'auteur.
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Haruki Murakami fait parti des auteurs que j'aime retrouver. Ses romans sont comme des rendez-vous que j'attends avec impatience. J'aime ses énormes pavés, son écriture, son univers mystérieux, étrange, onirique.

Mais ce livre est très différent de ceux que j'ai pu lire jusqu'à maintenant, car « Abandonner un chat » est un petit récit autobiographique qui tourne autour de la figure du père.

« J'ignore à quel point ces souvenirs personnels peuvent intéresser les lecteurs. Mais je ne peux penser qu'en écrivant …, j'ai besoin de raviver ma mémoire, de reconsidérer le passé et de le transformer en phrases et en mots que l'on peut voir, que l'on peut lire à haute voix. Et plus j'écris, plus je me relis, plus je suis envahi par la sensation étrange de devenir transparent. Si je lève ma main en l'air, j'ai l'impression de voir au travers. »

Relater ses souvenirs de jeunesse, ses pensées intimes, se mettre à nu, est un exercice que je trouve particulièrement difficile et exigeant.
Je lis assez peu de romans autobiographiques, par pudeur, je pense. J'ai l'impression de faire preuve d'une curiosité déplacée, de m'immiscer dans la vie privée des gens. Ce n'est pas tout à fait vrai, puisque dans une autobiographie, c'est l'auteur qui entreprend de nous révéler des moments intimes de sa vie.

Alors pourquoi l'ai-je lu ?
Je voulais trouver quelques clés de l'univers si fascinant de Haruki Murakami.

*
Cette biographie débute par un souvenir d'enfance insolite, mettant en scène une chatte que son père et lui ont abandonnée sur une plage. Haruki Murakami ne se souvient plus des raisons de cet abandon, mais il se souvient de sa tristesse et de ses regrets de ne pas s'être opposé à son père. Mais de retour de la plage, quelle n'est pas leur surprise de voir la petite chatte revenue avant eux, comme par magie.
Un autre souvenir marquant surgit au détour d'une page, celui d'un chaton coincé dans un arbre du jardin, qui appelle pour qu'on vienne le déloger et qui disparaîtra mystérieusement.

Ces deux anecdotes communes au père et au fils m'ont rappelé la présence constante de cet animal dans ses romans.

*
Mais cet essai est avant tout des scènes de vie ordinaires et des souvenirs de son enfance.
L'auteur se remémore des évènements qui peuvent être perçus comme insignifiants, banals, mais que son inconscient a choisi de conserver et qui d'une manière ou d'une autre, ont façonné sa personnalité et son écriture.

« En tout cas, il y a une chose, une seule, que je voudrais ajouter à ce texte : je suis le fils ordinaire d'un homme ordinaire. C'est parfaitement évident. Mais au fur et à mesure que j'ai approfondi cette réalité, j'ai été convaincu que nous sommes tous le fruit du hasard, et que tout ce qui a eu lieu dans ma vie et dans celle de mon père a été accidentel. »

*
Ses souvenirs se cristallisent autour de la figure paternelle, ce père qu'il a si mal connu, si mal compris, si mal aimé. Malgré l'affection sincère et la douleur de sa perte, l'absence de dialogues entre eux, le manque de réponses à ses questions ont laissé un vide en lui.

Ce père passionné de haïkus, silencieux, secret quant à sa jeunesse, semble avoir gardé au fond de lui de profondes blessures qui ont laissé sur son esprit, une cicatrice invisible, mais indélébile.

« Tout le monde a vraisemblablement connu une expérience plus ou moins douloureuse, en tout cas impossible à oublier, difficile à transmettre, et dont le fardeau doit être porté jusqu'à la fin dernière. »

Ainsi, Haruki Murakami dresse le portrait incomplet de ce père marqué par une éducation stricte et sans amour, par la douloureuse expérience de l'abandon, puis par la guerre sino-japonaise et la seconde guerre mondiale.

« Sur le chemin du retour
Je marche une seconde fois
Dans la boue, sous la pluie. »

Ce livre m'est apparu d'autant plus authentique et honnête que l'on ressent les besoins de l'auteur de comprendre ce père, de compléter les pages manquantes de sa propre histoire, en se défaisant des ombres qui ternissent le passé de son père.

Ce titre revêt alors pour moi une autre signification, car en abandonnant ce chat, le père a également abandonné son fils.

*
En nous parlant de l'expérience de guerre de son père, cette histoire de famille, ces petits fragments de vie s'inscrivent dans une histoire plus grande et participe à intégrer la petite histoire dans la grande.

« Une des choses que je voulais souligner, dans ce récit, c'est que la guerre provoque, dans la vie et dans l'esprit d'un homme – d'un citoyen ordinaire, anonyme –, des changements profonds, énormes. Changements qui ont eu pour résultat ce que je suis, moi, ici. Si le destin de mon père avait emprunté un chemin un tout petit peu différent, je n'aurais pas eu d'existence. Voilà ce qu'est l'histoire : une réalité froide et unique parmi une myriade d'éventualités. »

*
Avec simplicité et pudeur, Haruki Murakami dresse un portrait délicat de son père, à la fois sincère et touchant. Les magnifiques illustrations d'Emiliano Ponzi qui accompagne le texte ajoute une touche plus personnelle et poétique.
L'écriture est douce, belle, mais je regrette la brièveté du récit. Il y a de belles réflexions, mais seulement esquissées. J'aurais aimé une oeuvre plus étoffée. Ce n'est bien sûr que mon ressenti, il n'engage que moi, et je reste bien entendu une fan inconditionnelle du grand auteur japonais.
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« Abandonner un chat » est un récit autobiographique dans lequel Haruki Murakami évoque son père, et donc, en creux, lui-même aussi. le premier souvenir qui lui vient à l'esprit et à la plume, c'est celui où, petit garçon, il est parti à vélo avec son père dans le but d'abandonner une chatte à quelques kilomètres de chez eux. Un abandon sans drame ni larmes, mais qui ne les a pas empêchés de se réjouir secrètement quand, de retour à la maison, ils ont découvert que la chatte y était revenue plus vite qu'eux ! L'auteur se remémore aussi la profonde piété de son père, son caractère silencieux et secret, et raconte comment il a cherché à découvrir et comprendre le comportement de celui-ci pendant la guerre sino-japonaise puis la deuxième guerre mondiale.
Tout en pudeur, il nous parle aussi de ses propres regrets de s'être éloigné de son père à l'âge adulte, de leur incompréhension mutuelle, de leur incommunicabilité pendant des dizaines d'années.
En 80 pages, difficile d'analyser en profondeur cette relation, qui au final n'est qu'effleurée, et c'est peut-être dommage. Il en reste un texte, joliment illustré par E. Ponzi, touchant, simple et délicat, qui ébauche le portrait sincère et nostalgique de ce père qui aura toujours été en partie inaccessible.

En partenariat avec les Editions Belfond via Netgalley.
#HarukiMurakami #NetGalleyFrance
Lien : https://voyagesaufildespages..
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Tout commence par une anecdote, une histoire vraie en fait, un moment passé avec son père : ce dernier avait décidé de se débarrasser du chat en l'emmenant assez loin, pour l'abandonner sur la plage, au grand désarroi de l'enfant. Ô surprise, en arrivant à la maison, le chat les attendait, il avait réussi à revenir avant eux. Abandonner un chat ! choquant, mais on sait la lace qu'occupe les chats dans l'oeuvre comme dans la vie de l'auteur !

"Il y a toujours eu des chats à la maison. Je crois que nous vivions heureux avec eux. Pour moi, ils ont toujours été des amis merveilleux. Étant fils unique, mes compagnons de jeu les plus précieux étaient les livres et les chats."

Haruki Murakami nous propose un court texte (environ quatre-vingt pages) où il raconte son père décédé, sa relation difficile avec lui, les sentiments que l'on éprouve et que le cache par pudeur, l'ombre tutélaire qui plane au-dessus de nos têtes lorsque la personnalité de l'un semble plus forte que l'autre, rendant difficile l'aptitude à être un adulte à part entière.

Il retrace d'abord le parcours : son père a fait des études pour être prêtre bouddhiste puis a réussi, à force de travail, à intégrer l'université impériale, après un concours difficile. Il a été mobilisé à trois reprises au cours de ses études, dans des combats lointains où beaucoup de ses camarades ont laissé leur vie. Il leur rend hommage chaque matin en récitant des sutras devant un autel qu'il leur a consacré.

Haruki Murakami revient sur la rencontre et le mariage arrangé entre son père et sa mère, mariage qui s'est quand même caractérisé par une entente entre eux, un respect mutuel à défaut d'amour fort ou de tendresse. Son père était professeur de japonais lorsque leur unique enfant est né en 1949, à Kyoto.

S'il savait que son père était un excellent professeur, spécialiste des haïkus, du poète Bashô, il ne se Haruki n'avait vraiment conscience de l'admiration que lui vouaient ses élèves. Il s'en est rendu compte seulement en voyant qu'ils étaient nombreux à assister à son enterrement. I fait souvent allusion à un recueil de haïkus, cher à son père : l'anthologie « les mots de saison » qui était peut-être pour lui aussi précieuse que la Bible pour les chrétiens.

L'auteur nous propose une autre réflexion, en revenant sur le passé de son père: se celui-ci avait réussi sa vie comme il le désirait au départ, aurait-il rencontré et épousé la même femme et quid de Haruki?et par voie de conséquence, à quoi tient notre existence?

Les relations entre le père et le fils, qui n'étaient déjà pas très chaleureuses (doux euphémisme !), se sont distendues au fil des années, et Haruki s'est éloigné, ils ne se sont vus que rarement, et ce qui ne s'est pas construit laisse un vide, sinon des regrets. Il s'est toujours senti inférieur à ce père, doué pour les études alors que lui-même ne s'y intéressait guère. On remarque quand même au passage, qu'il est devenu, sinon professeur reconnu spécialiste en poésie, un écrivain lui aussi reconnu, donc deux domaines qui se rejoignent.

Pour la petite histoire, Haruki Murakami nous propose aussi dans ce livre l'histoire d'un chaton qui a voulu grimper très haut dans un arbre et n'a pas pu en redescendre, paralysé par la peur ; quand l'homme veut tutoyer les étoiles, ne risque-t-il pas de se brûler les ailes comme Icare ? l'anecdote sert de base à des réflexions plus philosophiques…

Lorsque l'auteur évoque la guerre et les ravages que celle-ci opère sur les hommes, sur leur mental comme sur leur physique, imprégnant à jamais leur présent et leur avenir, comment ne pas faire un parallèle avec ce qui se passe en Ukraine ces derniers jours quand un esprit dérangé, paranoïaque décide qu'il a droit de vie et de mort sur un autre. Comment ne pas penser à Hiroshima et Nagasaki et à tous les ravages engendrés sur plusieurs générations…

Il s'agit donc d'un texte court, mais très intense, que l'auteur a illustré d'images superbes, à la manière des estampes, et qui permet de connaître Haruki intime, humain avec ses forces et ses faiblesses. J'ai éprouvé beaucoup de plaisir à lire ce texte, car il s'agit d'un auteur que j'aime beaucoup, que j'ai découvert avec le sublime « Kafka sur le rivage », gigantesque coup de coeur il y a quelques années, qui me surprend toujours et dont, fort heureusement il me reste encore pas mal de romans à lire.

Je mettrais peut-être un petit bémol,: quatre-vingt pages, c'est un peu juste j'aurais aimé en apprendre davantage sur le père de l'auteur. Mais, c'est vraiment un tout petit bémol. J'ai lu la version numérique, mais je pense me le procurer pour pouvoir profiter pleinement des « images » dont la douceur évoque aussi certains tableaux d'un peintre que j'aime beaucoup : Edward Hopper.

Un grand merci à NetGalley et aux éditions Belfond qui m'ont permis de découvrir ce roman et de retrouver la plume de son auteur.

Lien : https://leslivresdeve.wordpr..
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Gros coup de coeur pour ce petit livre autobiographique superbement illustré par l'artiste italien, Emiliano Ponzi. Haruki Murakami rend un hommage touchant à son père disparu quelques années auparavant. Il se livre ici comme il ne l'a jamais fait. Avec douceur et pudeur il partage quelques souvenirs marquants de son enfance (les chats en font partie) et évoque l'histoire de sa famille.

Père et fils n'ont jamais été très proches, leurs relations ont été distendues, complexes. L'auteur se sentait inférieur à son père brillant et doué pour les études, alors que lui-même se désintéressait des matières scolaires. Leurs centres d'intérêt et leurs aspirations divergeaient et longtemps ils ne se sont pas compris. Mais cela n'exclut pas respect et regrets.

Dans cet ouvrage très concis (82 pages), Murakami tente d'enquêter sur le passé de son père, ses études à l'université, son goût pour les haikus, ses trois mobilisations. Une jeunesse difficile ponctuée par plusieurs conflits meurtriers auxquels, contrairement à ses frères il a miraculeusement survécu, mais qui ont changé le cours de sa vie et laissé un profond traumatisme ; la guerre sino-japonaise et les massacres perpétrés, la seconde guerre mondiale…

Ses réflexions l'amènent à penser que tout individu est "fruit du hasard et que tout ce qui a eu lieu dans sa vie et celle de son père a été accidentel." "Si le destin de son père avait emprunté un chemin un tout petit peu différent, il n'aurait pas eu d'existence." Il ne serait pas devenu l'écrivain prolifique qu'on apprécie.

La lecture de ce livre m'a procuré beaucoup de plaisir. A la fois touchant, léger et nostalgique, le récit emprunte de temps à autre un style journalistique et didactique pour aborder l'Histoire du Japon et les guerres sanglantes auxquelles il a participé. Et surtout, cet ouvrage est magnifique, superbement mis en valeur par les nombreuses pages d'illustration aux couleurs tantôt douces et poétiques tantôt plus sombres à l'image des périodes de guerre. Je le recommande à tous.

#Challenge Riquiqui 2024

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Depuis longtemps Haruki Murakami désirait écrire sur l'histoire de son père. Arrivé au début de la septantaine, il se souvient d'un jour, dans sa sixième année, où son père l'emmena sur la plage afin d'y abandonner leur chat. C'est au départ de ce souvenir qu'il pu réaliser ce récit superbement illustré.
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Longtemps Haruki Murakami a été dans l'incapacité d'écrire sur la mort de son père survenue en 2008. Et puis un jour, par hasard mais comme souvent dans ses fictions, un souvenir fortuit a déclenché le processus d'écriture. Quand il était enfant, il était allé avec son père Chiaki Murakami abandonner un chat sur une plage.
Dans ce court récit intime et pudique, il sera surtout question de la guerre, des coups du sort et de ses conséquences dans nos vies minuscules de gens ordinaires. Les jolies illustrations d'Emilano Ponzi apportant une agréable touche poétique au texte.
le père plein de piété aurait dû être prêtre bouddhiste à la suite du grand- père mort prématurément, mais cela ne s'est pas fait. il aurait dû échapper à la guerre mais, à cause d' une misérable histoire de paperasserie, il a été enrôlé en 38 dans une unité combattant en Chine. Il aurait dû mourir quand il a été mobilisé, par trois fois. Et cela ne s'est miraculeusement pas produit. Et quotidiennement, devant un petit autel, Chiaki Murakami priait pour les âmes de ses camarades moins chanceux mais aussi pour celles des ennemis chinois. Haruki était encore petit quand son père lui a fait sa seule et unique confidence. Il lui a décrit l'exécution d'un prisonnier chinois, décapité au sabre. Avait-il été témoin de la scène ? Avait-il été contraint d'exécuter le prisonnier ? Avait-il participé aux terribles massacres ? Haruki Murakami voulait savoir ce qu'il s'était réellement passé. le silence du père a été lourd, source de confusion, d'anxiété, de culpabilité, de colère. Pendant vingt ans père et fils n'ont pas communiqué après qu'Haruki eut quitté la maison pour ouvrir une boîte de jazz. Mais il est bien difficile d'abandonner son père.
Le traumatisme psychologique de son père, la violence sourde de la guerre, la culpabilité mais aussi les déroutants coups du sort nourrissent l' oeuvre de Murakami et racontent en creux le Japon tout entier.
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