Alexandre Najjar est né en 1967 à Beyrouth. Dans ce récit dédié à sa mère, c'est son père qu'il nous présente. Né en 1923, au lendemain de la proclamation du Grand Liban, ce père est à lui seul un précieux témoin de l'histoire de son pays puisqu'il a "tout connu : le Mandat français, l'Indépendance de 1943, la Belle Époque (les années cinquante et soixante ), la guerre, l'occupation. le Liban est, en quelque sorte, son ami, son complice, son confident". Malgré tout, c'est également un fervent francophile, maîtrisant parfaitement la langue de
Molière, bien que son nom de famille, "najjar" soit arabe, (cela veut dire "menuisier"). Un joli résumé du Liban à lui seul, je trouve. Ce père voue une admiration sans bornes à
Bonaparte (sans doute à cause d'ancêtres corses !), mais aussi à
De Gaulle. Bourreau de travail, avocat passionné et perfectionniste, il passait des heures enfermé dans son bureau à écrire. L'injustice le révoltait. Spécialisé en droit maritime, il etait surnommé "Amir al bihar" ("l'Armiral"), mais ses plaidoiries lui valurent le surnom de "ténor".
Le ténor en impose ! C'est un homme de principes et de valeurs : patrie, travail, famille. Marié sur le tard à 43 ans à une femme de... 26 ans, père de quatre enfants, on devine derrière l'homme austère et ce qu'on appellerait ici " vieille France", un être généreux, esthète, épicurien à sa façon, et drôle . Sa maison, c'était tout ! Quand Alexandre est né, il planta un Cèdre (le symbole du Liban) dans le jardin. "C'est donc qu'il m'aimait autant que son pays" déclare l'auteur. On n'en doute pas et son fils lui rend merveilleusement son amour dans ce portrait magnifique. On s'attache au personnage. On sourit quand il réprimande ses enfants et surprenant Alexandre à lire une lecture indécente : Camus ! Menant sa tribu d'un pas militaire (tous debouts à 7h pour une séance de "culture physique" et pas de foot, hein, du moins pas tout de suite...), il aimait aussi les bons plats du pays : taboulé, foul (fèves à l'huile), batenjen me'lé (tranches d'aubergines frites - miam !, poissons. Hors de sa vue pizzas et hamburgers !! Ah !, et la coupe de cheveux : hors de question qu'un poil dépasse sous peine d'être un "khanfouss" (mouton très frisé) ! Dire à son fils qu'il ressemblait à
Mireille Mathieu était la solution pour qu'il aille chez le coiffeur. 😂
Bien évidemment,
Alexandre Najjar va vous parler de la guerre civile, de la fuite hors de la maison, ravagée par les obus et les tirs, pillée par les miliciens. Pourtant... rien n'aura raison du cèdre ! Même pas Tsahal qui pilonne le Liban à la moindre provocation du Hezbollah.
J'ai aimé ce père ! J'ai aimé le Liban à travers ses yeux. J'ai adoré la plume de son fils qui brosse un portrait très attachant, avec beaucoup d'humour et d'amour. C'est un livre magnifique, très émouvant. On le termine au bord des larmes. J'avoue : je l'ai lu deux fois ! L'émotion est intacte. ❤
Coup de coeur .
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