Pas de légèreté dans ce livre ou alors, je ne l'ai pas vue. Profond, tendre, émouvant mais aussi violent, sauvage, insupportable. Quelques brins d'humanité dans l'horreur ! Que fait-on avec çà ? J'ai hurlé intérieurement, enragé devant toutes les absurdités d'un système politique et administratif à l'échelle de l'Europe qui conforte la loi du plus fort, qui ajoute de la misère à la misère, qui forge une carapace de protection en tout un chacun pour pouvoir supporter, accepter et au final banaliser.
Dès les premières pages, j'ai été happée par ce récit qui a pour cadre la jungle de Calais, « le plus grand bidonville d'Europe », dont on a tous devant les yeux, des images chocs. Ce livre m'a provoqué un choc émotionnel peu commun, mélange d'horreur, de révolte et
d'impuissance. J'ai pris des claques à chaque page et il me poursuivra longtemps entre la culpabilité d'être seulement un spectateur du problème et la honte de ne rien faire, de ne pas faire ma part de colibri.
Ce livre est présenté comme un polar. Il est bien autre chose, me semble-t-il : un document ou un témoignage, crédible, qui nous embarque dans sa vérité. La frontière entre fiction et réalité est difficile à percevoir.
Il pose de vraies questions sur les crises de l'immigration et sur l'exil, démonte finement le processus psychologique des personnages (migrants, policiers, humanitaires) expliquant leur engagement ou leur désabusement.
Comme les fantômes, les migrants sont « Coincés entre la vie terrestre et la vie céleste, comme bloqués
entre deux mondes … des âmes
entre deux mondes. » « Réfléchissez pas trop, lieutenant, Ce job, il se fait en apnée. Tentez pas de respirer sous l'eau »
C'est bien écrit, ce qui ne gâche rien. Je vais m'empresser de lire d'autres histoires d'
Olivier Norek sur des sujets, j'espère plus légers.
Je recommande sans réserve.