Depuis que son père est au chômage à temps plein et sa mère à temps partiel, depuis que leur chien est mort sous les roues d'un livreur de pizzas, David ne bosse plus au collège, il lit pendant les cours. Les profs se désolent, c'était un très bon élève, avant. Mais lui, il s'en fiche : « De toute façon, je serai écrivain. John Steinbeck en mieux, un Steinbeck qui inventera une solution pour épargner Lennie. » (p. 28)
D'ailleurs, désormais, vous êtes priés de l'appeler Cal, comme le héros des Raisins de la colère. Puisque ses parents ne lui disent pas la vérité - il est censé ignorer que son père a perdu son boulot - autant vivre dans son monde et se créer un univers. Ça aide à supporter la misère, la faim, les fringues du Secours Catho ou du Secours Pop que les autres gamins reconnaissent sur son dos, les brimades de Youssef le caïd et les gloussements de « sa cour de faux-culs rigolards ».
Les bonheurs de David : prendre le bus à côté de la belle Melissa, et lire.
Une belle histoire poignante - avec quelques traits d'humour - sur le chômage, la pauvreté, l'adolescence et le collège, les non-dits familiaux, le rôle des enseignants, les vertus thérapeutiques de la lecture. Jean-Paul Nozière rend ici un bel hommage à la littérature, et à quelques grands auteurs en particulier, Steinbeck en tête, mais aussi Daniel Defoe, Mark Twain...
« Comment l'auteur fait-il pour me chambouler ainsi, me faire croire dur comme fer aux choses insensées qu'il raconte ? » (p. 26)
« Comment un écrivain parvient-il à enfiler des mots ordinaires les uns après les autres pour, à la fin, vous clouer de stupéfaction ou vous faire rire ou vous faire pleurer ou les trois à la fois quand il est très fort ? » (p. 64)
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Ce livre on me l'avait donné pour la bibliothèque, dire que j'ai failli le vendre 0,10 € à la bourse aux livres du coin. Personne n'en a voulu. Heureusement. Intriguée par la couverture, un visage d'enfant à moitié dans l'ombre, au regard prégnant je me suis plongée dedans et je ne l'ai pas lâché.
C'est la rentrée, David remplit la fiche pour le prof, d'une écriture énorme et rageuse. Un père chômeur, une mère chômeuse à mi-temps. Un nouveau prénom Cal et puis rien en sport, loisir, métier... Cal pendant les cours se plonge dans les livres. Il est là sans être là. Excellent élève avant, les professeurs acceptent cette situation sauf un. Mais David/Cal s'en moque. il devient insolent, perturbateur et ne vit que pour sa passion de la littérature. Il sera Steinbeck, mais lui il ne fera pas mourir Lennie.
David/Cal n'a qu'un interlocuteur, son chien Tobby. Tobby est un chien empaillé. Cadeau du livreur de pizza, qui l' a écrasé avec son camion, pour éviter l'hystérie de la mère. Depuis ses parents ne lui achètent plus de pizza à ce type.
Au collège à cause de ses bravades et malgré une certaine mansuétude ce n'est pas facile pour David/Cal
Pas la peine de dire qu'à la maison ce n'est pas la joie non plus.
Dans cette famille ils semblent tous comme Toby. Empaillés.... Faux-semblant et silence.
David se débat dans tout ce micmac et souffre.
Jean -Paul Nozière nous dresse un portrait saisissant de cet ado, avec tendresse et justesse. Regard malicieux sur le monde du collège, avec des dialogues savoureux et de l'humour.
J'ai beaucoup aimé ce livre. J'ai aimé David et même Cal. J'ai savouré cette histoire qui parle de la vie. Et celle ci elle partait droit dans le mur...
Un roman paru il y a 10 ans dans une collection qui se nommait " c'est la vie ", qui se trouve maintenant sur les étagères de la bibliothèque. Et il mérite largement d'y être.
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L' auteur dépeint avec pudeur l' amour d'un adolescent pour ses parents. Dans un style simple. On suit l' adolescent à travers sa vie quotidienne. Plein d' amour
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- C'est une phrase interrogative, madame. Avec inversion du sujet et emploi du conditionnel.
Chapeau Youssef. Eve Logate [la prof de français] s'épanouit. Insiste.
- Quel effet recherche Voltaire...
Youssef consulte la classe d'un regard qui en dit long. Il regrette de s'être lancé.
- Madame, on ne connaît même pas son prénom au Voltaire, là, le type du texte. Si ça se trouve, il est pas plus écrivain que moi ! Il a écrit ça au pif, sans se poser autant de questions que vous nous en posez. Pourquoi on lit que des auteurs nases et pas, par exemple...
Youssef panique. Il est mal embarqué.
- Claire Chazal ! souffle Vianney.
- Ben oui, Claire Chazal ! approuve Youssef. Elle a fait un bouquin, ils l'ont dit à la télé. Et au moins, on la connaît, on la voit en vrai sur TF1. C'est pas comme Voltaire.
(p. 64-65)
- Mon pull ! Je suis sûr que t'as mon pull, David ! Ma mère l'a refilé au Secours Catholique parce qu'il était trop petit !
M'man, c'est vrai, elle est autant Secours Catho que Secours Pop. Je le sais maintenant. [...]
Restent les chaussures. Le plus difficile à avaler. Les autres ont des Adidas Spitfire ou des Nike Air Edge Max ou des marques encore plus top. Moi, je noue les lacets d'une paire de tennis qui ressemblent à deux tas de boue. Des pompes d'hypermarché. J'ai carbonisé la marque infamante avec le chalumeau de p'pa, mais sous le fondu du caoutchouc, les autres repèrent la vérité.
(p. 16)
- Je m'appelle Cal, madame pas John. qu'est-ce-que ça peut faire de m'appeler Cal à la place de John? Un surnom ou un autre...
- Sors, John, quitte immédiatement cette salle et va en permanence. Je n'ai pas passé l'agrégation pour...
Elle se tourne vers le tableau. Elle écrit. Sa main tremble.
Je me dirige vers la sortie, sous le regard admiratif des autres. Silence.
Avant de refermer la porte derrière moi, je les dévisage globalement, afin qu'ils comprennent, qu'ils sont tous des crétins et que je déteste leur admiration muette.
De toute façon, je serai écrivain. John Steinbeck en mieux, un Steinbeck qui inventera une solution pour épargner Lennie.
Jean Paul Nozière : Bye bye Betty
Depuis le
café le Rostand, à Paris,
Olivier BARROT présente le livre de
Jean-Paul NOZIERE "
Bye-bye betty". Un
roman publié aux éditions Gallimard dans la collection Scripto.Photo de
Jean Paul NOZIERE.