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Critiques filtrées sur 5 étoiles  
Onfray au meilleur de sa forme.
On retrouve sa marque de fabrique, sa verve iconoclaste, une radicalité souvent pertinente. Mais parallèlement, indissociables des dérapages non contrôlés ( ?), des skuds qui zèbrent un paysage d'analyses solidement argumentées.
Mais l'intérêt de ce livre est d'interpeller, de faire réfléchir, ce n'est pas un livre à ranger à coté de manuels desséchés comme des oueds.
C'est un vrai livre philosophique avec comme matrice la vie et l‘oeuvre de Camus, les deux ingrédients étant indissociables.
On sait que ce critère, cette « catégorie » sont déterminantes dans les analyses d'Onfray ; il a la dent dure contre ces « professeurs de philosophie » qui ont une vie si peu philosophique. Onfray met en cause ces professionnels de la philosophie qui développent des systèmes très sophistiqués mais qui se révèlent des « maisons inhabitables » des « papillons que l'on épingle » dans une collection, si éloignés de la vie philosophique, de la vie tout court.
Cette appréciation déroule le fil d'ariane principal avec comme point d'orgue l'opposition existentielle entre Camus et Sartre.
Non sans fondements, Onfray souligne combien les origines géographiques et sociales de Camus ont formaté sa sensibilité, ses choix intellectuels, politiques. Toutefois, le mode répétitif pour rappeler, au cas où le lecteur l'aurait oublié, les origines très modestes de Camus affaiblit le propos. Et bien sur, cela devient franchement énervant, car derrière ces origines apparaissent en filigrane les propres origines d'Onfray qui se réincarne un tantinet.
Mais outre la (re)découverte de Camus, l'intérêt principal de ce livre est de poser des interrogations essentielles : qu'est-ce qu'une vie philosophique ? Qu'est-ce qu'une oeuvre philosophique ? Comment donner sens à la philosophie dans un contexte historique dramatique ?
La vie et l'oeuvre de Camus sont à cet égard une précieuse boussole.
« Ni bourreau ni victime »
La subtilité, l'humanité d'un Camus apparaissent plus que jamais nécessaires aujourd'hui où les esprits tendent de plus en plus à être formatés en mode binaire.
Le citoyen qui n'adhère pas à l'Europe, version traité de Lisbonne, est nécessairement anti-européen, souverainiste, frontiste…
Le citoyen reçoit en permanence des injonctions pour se déterminer, comme dans ces votes plébiscites des jeux de télé réalité, « votez 1 ou 2… »
Le mode binaire à l'époque de Camus fut tragiquement utilisé avec la guerre d'Algérie. Il fallait choisir son camp, les actes de barbarie des ultras du FLN d'un côté ou la répression sanglante de l'armée française de l'autre.
« Ni bourreau ni victime », Camus avait la fraternité chevillée au corps. Il ne pouvait adhérer à l'appel au meurtre aveugle d'un Sartre contre le « colon », en réalité pour la majorité, des êtres humains dont les seuls torts étaient d'être blancs, au mauvais endroit, au mauvais moment.
L'intolérance du philosophe parisien, bien confortable à vivre, fut d'autant plus virulente qu'il avait raté son rendez-vous avec l'histoire, par exemple en 1933 1934 alors qu'il vivait à Berlin.
Rien vu, rien entendu, rien dit, des autodafés, des combats de rue pour exterminer tous les opposants et ceux que le régime nazi condamnait par essence, les untermenschen.
Plus facile de jeter l'anathème sur Camus que sur Hitler…
La vie et l'oeuvre de Camus demeurent par conséquent à jamais une conscience de la condition et de la dignité humaines, bien plus précieuses que certains systèmes philosophiques académiques prestigieux.
Dans ce livre riche et très dense, des faiblesses en particulier au sujet du surréalisme historique et tout particulièrement d'André Breton.
Onfray peut ne pas apprécier ce mouvement et ses animateurs mais le moins que l'on puisse dire est que, dans cet essai son avis manque de consistance et de rigueur. S'agissant du bouillonnement et de la créativité poétique, artistique, politique qui ont animé ce mouvement ce n'est pas très sérieux, pas très philosophique, d'exfiltrer des citations, des anecdotes sans les situer dans leur contexte, de les analyser soigneusement. Et si des intellectuels ont eu des vies engagées, philosophiques, au cours des ces années noires, ce sont bien les surréalistes. Rien à voir avec l'étiquette de nihilisme de salon ou de terrasse de café parisienne qu'Onfray colle aux surréalistes. La vie des André Breton, Robert Desnos, Benjamin Péret etc… furent un combat permanent pour la liberté, au mépris de leur confort, de leur « carrière ». Peu d'artistes, d'intellectuels de cette époque peuvent justifier d'une vie aussi exposée et ce du bon côté. Pour Onfray, seul René Char semble échapper au dénigrement.
Ce livre est néanmoins remarquable et je lui mets sans hésiter la note maxi
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Après la sortie du livre de Michel Onfray, l'Ordre Libertaire ou la vie philosophique d'Albert Camus, les critiques littéraires de nos grands journaux, se sont mis à se turlupiner pour offrir une palette peu civile de chroniques, de bons mots, de touches ironiques, d'humours grinçants, la palme revenant au Télérama du 11 janvier 2012, avec "Saint Camus".

Je relève au passage," mémoires d'une fille rangée" (l'express n'a pas ajouté vieille), "vilipender Jean-Paul Sartre", "monument bâclé", "alléchant sur le papier", "décevant à l'arrivée."..

Aussi, j'ai choisi de m'appuyer sur un très grand journal le Monde, pour écrire cette chronique.
Le biographe officiel d'Albert Camus, Olivier Todd, dont la plume a douillettement réchauffé les lecteurs du monde, a pris curieusement la tête de cette cabale. En effet le grand motif de cette unanimité vise les 596 pages de Michel Onfray et non les écrits ni la biographie d'Albert Camus.


http://www.lemonde.fr/livres/article/2012/01/12/l-ordre-libertaire-la-vie-philosophique-d-albert-camus-de-michel-onfray_1628602_3260.html


Mais comment ne pas égratigner le turbulent Michel Onfray, sans salir derrière lui quelques plumes de l'auteur de l'Envers et l'Endroit, ou de la Chute, vraiment Olivier Todd a-t-il mesuré la nature de sa critique, lui Olivier Todd qui avait si adroitement glissé à Hubert Beuve-Méry cette phrase : “s'il faut choisir entre la justice des terroristes et ma mère qui pourrait mourir de cette prétendue justice, je choisis ma mère et les miens. page 460” .

Ces paroles sont rapportées également par Olivier Todd avec le commentaire, et la réaction du directeur du monde; " jubilation du directeur Hubert Beuve-Méry , excité par le sang, j'étais tout à fait certain que Camus dirait des conneries," Todd page 70 biographie officielle de Camus.

À vouloir trop rectifier, parfois soi-même on peut l'être, comme un par un boomerang.

Ce qui saute aux yeux dans la critique d'Olivier Todd c'est en premier lieu l'usage du Cessez-le-feu. Jeu d'esprit ou de la méchanceté pure. le cessez-le-feu c'est le 19 mars 62, c'est remettre les pendules en plein coeur de sa critique, celle du conflit algérien. le trait est cinglant car le biographe officiel de Camus écrit: “Issu d'une famille de pieds-noirs algérois, et rajoute l'adjectif, blanc ! ”

Quelle provocation pour l'orphelin qui a pour famille une mère sourde, et qui fut très jeune contraint d'arrêter ses études. Avancer ces mots dès le début de sa chronique c'était placer Camus dans le camp des contres l'indépendance, le livre de Michel Onfray de 596 pages ne sont là que pour témoigner de tout ce qu'il a entrepris au contraire pour permettre l'indépendance de l'Algérie, et de mettre fin à cette légende créée par Sartre, le penseur des petits blancs.

Le journal le Monde, s'est peut être fourvoyé en ne voyant dans ce livre, la vie philosophique d'Albert Camus, qu'un moyen détourné pour rehausser le prestige de Camus et de salir la probité de Sartre; “Cataloguant les dérives de Sartre face au communisme, Onfray omet de mentionner quelques faits à sa décharge” ajoute Oliver Todd (le Monde du 12 janvier 2012).

L'article d'Olivier Todd se déroule comme une pesée, 20 g de Camus, pour 60 g de Sartre, afin de rééquilibrer les plateaux de la balance aux yeux du public.


Cependant, l'essai, apparait dans mes mains, très structuré en 12 grands chapitres, dont la métaphysique de l'absurde, en 34 pages. C'est pour le moins un travail de fonds, où s'insèrent les 596 pages de Michel Onfray, qui cite Todd 14 fois, Sartre 90 fois, et Nietzsche 82 fois. Au plan des idées on retrouve des constantes puisque tous les livres de Camus sont cités dont l'étranger 21 fois, le FLN 28 fois, le thème de la vérité, vérité liberté, vérité bonheur, ou passion de la vérité, 68 fois.

Dans le journal le Point, d'octobre 2013, l'approche de l'oeuvre et de l'homme loin de l'ignoble Onfray, est bien différente, Olivier Todd écrit : J'ai fini par trouver Camus très sympathique.


Je reprend cette allusion à Camus écrite par un libertaire, " il a été un compagnon fidèle et respecté de la Fédération anarchiste. Voilà ce qu'on a longtemps occulté. Onfray a un double mérite, à première vue, qu'il était un écrivain et un philosophe, et rappeler que Camus était un libertaire, Nous recommandons le livre de Maurice Joyeux : Albert Camus ou la révolte et la mesure. L'anti-colonialisme de Sartre était une posture, celui de Camus était viscéral pour l'avoir vécu, à la différence du premier".


Camus le philosophe a été à de nombreuses reprises l'objet de rencontres organisées par France Culture récemment sur L'Etranger. Aujourd'hui le livre Alice Zeniter complète l'approche que l'on peut avoir sur cette tragédie algérienne.
L'éclairage que donne Alice Zeniter des événements qui ont émaillé la vie d'Albert Camus est important, la terreur par exemple. Il ne faut pas oublier, tout ce que ce livre, restitue de la mémoire de ceux qui ont été désignés comme des parias, les harkis.


On peut même imaginer que le sort des populations qui vivaient en Algérie dans les années 50 auraient pu suivre un autre chemin si d'autres Camus s'étaient joints à sa parole, je pense à tous les philosophes de la seconde moitié de XXème siècle.


Très largement inspiré par les meilleures biographies écrites, et suivant la demande expresse de Camus : "je demande une seule chose et je la demande humblement, bien que je sache qu'elle est exorbitante : être lu avec attention", l'analyse de Michel Onfray est solide, incrustée de milliers de références, de citations, et de notes sur tous les auteurs, un Wikipédia romancé, 540 personnes sont citées, de tous horizons



Olivier Todd et Herbert R. Lottman sont par exemple largement cités.
Le travail de fourmi réalisé par l'auteur de cosmos, est surprenant de profondeur, rehaussé de témoignages en veillant à citer chacune de ses sources, ses détracteurs n'ont pas toujours cette vigilance, c'est une aide précieuse pour tous ceux qui souhaitent explorer l'oeuvre d'Albert camus.

Pour moi il manque un domaine qui devrait être mieux analysé le pardon cité 16 fois, et qui me semble l'une des clés de l'Etranger. Il ne faut rien pardonner , c'est la lucidité de Camus, poser la question de la grâce et de la peine de mort est essentiel pour Albert Camus, qui a eu raison de demander la grâce de Robert Brasillach, comme pour d'autres de ses ennemis, Onfray nous confie que ses interventions discrètes n'ont jamais pas été triées selon les Idées ou les écrits.

Ce livre est l'aiguillon qui me servira à relire Camus.
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10/2012: quel plaisir Camus et Onfray en même temps. Un délice.
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Voilà une très belle étude critique que j'ai lue de manière tronquée sur plusieurs mois mais qui vaut sa lecture. Elle a le mérite de proposer une lecture assez cohérente (même si j'ai eu "peur" avant d'arriver à la fin) de la fin de _l'etranger_ de Camus, sur laquelle tant de personnes, y compris des philosophes, "se cassent les dents". J'approchais un peu... mais il me manquait cruellement d'avoir lu Nietzsche sur la question du consentement au monde... du coup, je m'inquiète pour lesdits philosophes de profession en pleine purée de pois...

J'écris un peu au fil de la pensée (pardon, je suis pressée, je vais sans doute même laisser des fautes-coquilles) et je me rends compte que je n'ai même pas dit de quoi il était question !

Michel Onfray écrit une sorte de biographie philosophique, l'histoire de la pensée d'Albert Camus, son inscription dans une Histoire philosophique, certes, mais aussi politique et littéraire ; son inscription sur un territoire, l'Algérie, la France, mais aussi une Europe du nord par rapport à l'Europe du sud. Il fait également une étude critique de son oeuvre et de sa correspondance, dissipe des malentendus, fustige des calomnies, dézingue (c'est Onfray) quelques idoles indûment campées dans l'Olympe philosophique française du XXème (ça, ce sont "les Thénardier", Sartre et Beauvoir), et explique le tragique contresens du "je préférerai toujours à la justice ma mère", qui, il est vrai, sonne très étrangement.

Cf. suite de cette longue note de lecture sur mon blog.
Lien : http://aufildesimages.canalb..
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Superbe !
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excellent
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