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3,7

sur 518 notes
La découverte de la plume et l'univers de Véronique Ovaldé fut un choc. Un uppercut littéraire reçu lors de la lecture de « Ce que je sais de Vera Candida ». Lire Ovaldé, c'est avant tout découvrir un imaginaire, des intrigues à la fois oniriques et tragiques situées dans des lieux qui n'existent pas, mais évoquent tantôt l'Amérique latine, tantôt une île italienne située au coeur de la Méditerranée, où se déroule son dernier roman, dont le titre évoque un poème, « Fille en colère sur un banc de pierre ».

Sur une île qui porte le nom de « Iazza », au sud de la Sicile, vit la famille Salvatore, dont le roman nous narre les contes et légendes. Une courte présentation de cette famille qui vit sur une île qui n'existe pas (petit rappel pour les lecteurs distraits) s'impose : le père Salvatore Salvatore (cela ne s'invente pas), « dit plus communément le Vieux et plus clandestinement Sa Seigneurie », la mère Silvia discrète, voire effacée et quatre filles, l'aînée Violetta, suivie de Gilda, Aïda et Mimi.

L'île de « Iazza » évoque un lieu indolent et figé où règne l'entre-soi, la corruption ainsi qu'une mafia qui ne dit pas son nom. Un patriarcat tenace ainsi que des coutumes étranges évoquent un lieu mystérieux qui n'aurait pas quitté le Moyen-Âge. L'une de ces coutumes, qui a failli coûter la vie à Salvatore lors de son arrivée sur l'île, consiste à placer chaque 1er mai des ânes sur les toits des habitations de l'île. Une autre coutume, plus célèbre, est l'organisation annuelle d'un carnaval haut en couleur, une nuit de catharsis où les participants dissimulés sous leur déguisement se laissent gagner par une liesse troublante. Un carnaval que le Vieux a formellement interdit à ses filles de fréquenter.

Le patriarche un peu aigri de s'être retrouvé coincé sur l'île depuis qu'il a épousé Viola et lui a fait quatre filles, voue une affection attendrie à ses deux petites, Aïda qui a huit ans et Mimi âgée de six ans. Cette dernière a attendu ses trois ans pour parler, se casse la figure plus que de raison, et évoque un petit ange déchu qui n'aime rien tant que se promener sur l'île, découper des yeux dans les magazines ou grimper dans les arbres pour y faire un somme.

« Peut-être aussi que le jeu n'en valait pas la chandelle. Mais le jeu, n'est-ce pas, en vaut rarement la chandelle. le jeu n'est désirable que parce qu'il est le jeu. »

La nuit du carnaval, Aïda entreprend de faire le mur et de braver l'interdit paternel. Elle se fait surprendre par Mimi qui ne la quitte jamais et accepte d'emmener la petite dans son aventure. Cette nuit la marquera à jamais du sceau de l'infamie. Mimi disparaitra mystérieusement et sa grande soeur sera tenue pour responsable du tragique évènement. Une responsabilité trop lourde à porter pour une adolescente à qui son père ne parle plus. Une responsabilité qui la conduira à quitter Iazza pour rejoindre Palerme à l'âge de quinze ans.

« Était-il possible que sa détestation soit l'exact revers de son amour ? ».

Quinze plus tard. Aïda a totalement rompu avec sa famille, lorsqu'elle reçoit l'appel de Violetta qui lui annonce que Salvatore vient de mourir et la convie à son enterrement. Un enterrement qui sera évidemment suivi d'un passage chez le notaire destiné à partager les biens du défunt. le retour de la fille prodigue sur l'île sera plus mouvementé qu'on ne l'imagine et permettra surtout de comprendre enfin ce qui s'est passé, cette funeste nuit de carnaval, la nuit où Mimi a disparu.

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Nous retrouvons pour notre plus grand plaisir la plume alerte, aiguisée et incisive de l'auteure dans « Fille en colère sur un banc de pierre ». Une plume qui n'hésite pas à interpeller son lecteur, comme pour mieux l'intégrer dans le récit qui lui est destiné.

« Souvenez-vous de cet âge où construire un château de sable vous demandait un tel degré d'implication que vous étiez quasiment désespérée à l'idée de sa nature éphémère. »

Au-delà de ce procédé narratif stimulant, c'est encore une fois l'imaginaire de Véronique Ovaldé qui fait mouche. Si l'île de Iazza n'existe pas, on imagine aisément ce petit bout de terre brûlé par le soleil méditerranéen. Pour se perdre dans les méandres de l'imaginaire de l'auteur, il faut plutôt se tourner vers ses personnages. Aïda l'indocile, qui refuse de se draper dans la dignité, la dignité de celle qui a été injustement désignée coupable d'un crime qu'elle n'a pas commis. Et bien entendu Mimi, ce petit ange disparu trop tôt, une enfant qui évoque tout à la fois Saint François d'Assise et l'un de ses petits oiseaux qui venaient, selon la légende, se poser sur les épaules du saint homme. Mimi, l'enfant éternelle, qui conservera à tout jamais l'âge magique de ses six ans.

« Souvenez-vous de cet âge où jamais vous ne marchiez mais toujours sautilliez. »

Mimi, personnage touché par la grâce et délaissée par la pesanteur. Une enfant pour qui la vie sur l'île n'est qu'un jeu qui n'a pas de fin, un présent éternel, sans angoisse ni remords. Une petite fille qui prononce tantôt des phrases dont la sagesse évoque un philosophe grec aux cheveux blanchis par les ans.

« Mimi, donc, prononça avec sa voix aiguë et son zézaiement caractéristique :
- Mais à quoi bon durer.
(...) Aïda se retrouva le coeur fendu et elle se mit à pleurer comme ça, là, devant Mimi, qui arbora tout à coup un air vaguement surpris puis reprit son découpage comme si elle n'avait fait qu'émettre une réflexion sur la vitesse du vent. »

À travers une intrigue finement menée où se joue la possibilité d'une rédemption pour la farouche Aïda, « Fille en colère sur un banc de pierre » nous parle avec une immense délicatesse de l'enfance, cet âge qui semble éternel, et qui est pourtant si fugace, cet instant où se côtoient une inextinguible soif de jeu et une sagesse infinie.

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« Elles étaient quatre soeurs inséparables promises à la plus belle des vies. Il y avait Violetta la reine, Gilda la pragmatique, Aïda la préférée et Mimi le colibri. ».
Mais, Pour leur père, « n'avoir que des filles, c'est ne pas avoir d'enfants ». Et les 4 soeurs subissent au quotidien sa tyrannie, cherchant vaillamment à s'émanciper, jusqu'à ce terrible soir de carnaval, qui va les séparer à tout jamais.

Un roman comme un conte où j'ai retrouvé avec bonheur la plume fantaisiste, incisive et imagée de Véronique Ovaldé. Secrets, regrets, jalousies, culpabilité jalonnent ce texte, esquissant en pointillé le portrait d'une famille meurtrie, complètement minée par la disparition d'un de ses membres.
Un récit âpre, douloureux, à l'image de cette fille en colère sur son banc de pierre.
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« Oui mais ça ne marche pas comme ça. L'Univers ne résulte pas d'une relation de cause à effet. Tous les livres de vulgarisation scientifique qu'Aïda lit indiquent que la relation de cause à effet n'existe pas. La situation présente n'est pas qu'une somme des hasards possibles. La situation présente est à la fois passée, présente et future. Tout advient en même temps que tout. Ce qui expliquerait que Mimi soit là, quelque part, pas très loin. Coincée. »

Les trois soeurs de la famille Salvatore, Violetta, Gilda et Aïda vont se réunir à Iazza, une petite île (imaginaire semble-t-il) au large de la côte sud de la Sicile, après la mort du père (qui était amateur d'opéra, on s'en doute par le choix des prénoms de ses filles).

Aïda n'y est pas retournée et n'a pas donné de ses nouvelles depuis 15 ans. Elle vit chichement de petits boulots à Palerme.

Mimi, la plus jeune des soeurs Salvatore, a disparu un soir de carnaval vingt ans plus tôt. le blâme familial a été porté sur Aïda qui y avait emmené Mimi en cachette. On ne sait pas ce qui est advenu d'elle. L'enfance d'Aïda a été saccagée après ce drame. Elle est devenue une adolescente puis une femme rebelle.

L'accueil de ses soeurs et de sa mère ne se passe pourtant pas aussi mal qu'elle aurait pu le penser. le passé et ses secrets va être au centre de l'intrigue de ce roman à la fois sombre et pétillant.

Le style de Véronique Ovaldé est clair mais souvent un peu tortueux : il a du caractère, à l'image de celui d'Aïda… Les pages se tournent presque toutes seules en lisant ce roman captivant. Il nous tarde d'avoir le fin mot de l'histoire, ce qui arrivera. Mais pas sans frustration à cause d'une fin qui m'a semblé un peu abrupte.
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J'ai bien accroché au début de ce roman familial. Puis, je ne sais pas pourquoi, progressivement, je me suis un peu lassée, puis encore plus.... Finalement l'attrait du livre a décru pour moi page après page....
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Une famille, 4 soeurs. La plus jeune n'aura jamais 7 ans. Les deux aînées, les parents rendent la n°3 responsable. L'histoire commence avec la mort du pater familias. Les 3 soeurs entourent leur mère, toujours persuadée que la benjamine va revenir.
Je ne sais pas pourquoi j'ai ressenti une lassitude progressive à la lecture de ce roman. Je n'ai en fait pas réussi à m'intéresser aux femmes présentées, à la mère, aux deux soeurs aînées, à la cadette victime du reniement familial.
J'en suis d'autant plus désolée, que ma fille cadette qui l'a lu juste après moi, a dévoré ce roman avec plaisir.
Je ne peux donc que vous inviter à lire ce roman afin de vous faire une idée par vous-même !
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Je pense n'avoir pas su apprécier ce roman à sa juste valeur. J'ai été, au début, décontenancée par les multiples interventions de la narratrice omnisciente, sous forme de parenthèses que j'ai trouvé digressives, comme l'intervention d'un tiers inopportun s'immiscent trop souvent dans une discussion entre deux personnes , mais il est vrai que, peu, à peu, je me suis habituée à cette écriture, à ces parabases souvent ironiques apportant, effectivement des informations, des précisions intéressantes.
Par ailleurs, j'ai eu du mal à situer l'époque de ce récit (décennie soixante, soixante dix, plus tard ?) et si finalement, l'histoire se déroule de nos jours, plusieurs indications permettent de se repérer dans cette contemporanéité (karcher, écran tactile…) ces données me sont apparues comme autant d'anachronismes tant la vie dans l'île de Lazza semble être enserrée dans une gangue sans datation, une vie faite d'atavismes, de traditions qui empêchent toute modernité. Et pourtant, les femmes de l'île ont gagné quelque liberté…
Les relations familiales, celles des trois soeurs Aïda, Violetta, Gilda, celles de la mère Silvia et d'Aïda, sont décryptées avec un réalisme exacerbé.
Augustin Trapenard a dit de ce roman qu'il « était solaire, plein d'allégresse », j'ai ressenti, pour ma part, une grande tristesse à vivre, à s'épanouir, même si la fin laisse présager un horizon plus serein.
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Lecture en audio au son de la voix de l'auteure elle-même ce qui a ajouté une dynamique et une pertinence aux mots, a l'ambiance.... Quel plaisir d'écoute, je le suis installée sur le banc de pierre sicilien et écouté l'histoire de cette famille marquée par la disparition inexpliquée, il y a 15 ans de Mimi, la plus jeune des filles.
Il s'agit certes de résoudre l'énigme mais surtout une peinture d'un village méditerranéen et de ceux qui y vivent et celle qui a été répudiée, bannie car désignée comme coupable.
On est plongé parmi eux, tout juste si l'on ne ressent pas la chaleur sur la peau, l'odeur des amandiers et surtout Véronique Ovalde, avec son ton, ses remarques personnelles transforme un drame en une chronique distanciée analysant les comportements de chacun avec pertinence et bienveillance.
La résolution de l'intrigue n'a pas été le point essentiel pour moi car j'ai plus été envoûtée par l'ambiance de ce coin de Sicile, ses mystères, ses décors, les relations familiales et ses silences.
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Le titre pourrait être l'intitulé d'un tableau, et dans ce roman on visualise très bien les personnages , présents voire absents du tableau.
De retour au bercail après une très longue absence, dans une île au large du sud de l'Italie, Aïda vient assister aux funérailles de son père « Sa Seigneurie » un homme qu'elle a adoré et qui un jour l'a repoussée suite à la disparition d'une petite soeur. Elle a fui dès qu'elle a pu, aidée par sa mère, cette vie qui devenait intenable et donc à ce retour elle retrouve ses deux soeurs et leur famille, sa mère, éthérée et absente . Elle fait presque figure d'étrangère, mais il leur faudra passer chez le notaire.
Aïda ,présumée coupable de la disparition de sa petite soeur Mimi pourra-telle enfin comprendre ce qu'il s'est passé vraiment , se déculpabiliser et même se venger ?
C'est tout l'art de V.Ovaldé que de décrire les liens qui unissent des soeurs, comment ces petites filles peuvent être en même temps ange ou démon.
Ce roman ne manque ni de force ni d'humour parfois, on y reconnaît la signature bien particulière de l'auteur.
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Une histoire de famille sur une île au large de Palerme en Sicile. Quatre soeurs, nées à un intervalle régulier de deux ans, Violetta, Gilda, Aïda et mimi vivent sous la dure autorité d'un père passionné d'opéra qui ne tolère pas la moindre incartade de sa progéniture. Aïda, la troisième s'est éloignée de sa famille pendant quinze ans et vit à Palerme. Un coup de fil qui lui apprend le décès de sa seigneurie la décide à retourner sur l'île familiale ou le passé et ses secrets vont ressurgir. La plume alerte et incisive de l'autrice explore de façon subtile les méandres des tensions familiales exacerbées par une tragédie suggérée pendant tout le roman et magnifiée par un grand talent de conteuse de l'autrice.
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Ce qui m'a séduite avant tout dans ma première lecture de Véronique Ovaldé, c'est son écriture si particulière. Elle met superbement en scène cette île (fictive) au large de la Sicile et l'ambiance à la fois pesante et protectrice qui y règne.
Sa plume se veut à la fois caustique et humoristique et j'ai beaucoup aimé la manière de la narratrice (l'auteure elle-même) de prendre à partie le lecteur, comme pour s'assurer qu'il ait bien saisi tous les tenants et les aboutissants de l'histoire.
Une famille, un drame, un secret qui a divisé... Rapidement, c'est presque un thriller qui se met en place. Que s'est-il passé le soir de ce carnaval où Mimi, la cadette des quatre soeurs Signore a disparu, il y a plus de quinze ans ? Chaque personnage est croqué avec bonheur. Pourtant la tragédie est bien présente et le lecteur a hâte d'en connaître le dénouement.

Un roman magistral à l'écriture hypnotique, qui traite de la complexité des liens familiaux, de la jalousie, de la culpabilité et de la revanche également. Divers prix littéraires bien mérités et un 16/20 pour cette découverte de Véronique Ovaldé que je vais poursuivre.
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Véronique Olvadé propose son nouveau roman, Fille en colère sur un banc de pierre, sur le retour d'Aïda dans sa famille en Sicile après le décès de son père. Un énième roman sur la filiation, direz-vous ! Oui certes, mais l'écrivaine n'a pas son pareil pour créer ses fictions qui ressemblent comme deux gouttes d'eau à la réalité et qu'elle triture sans jamais la faire casser pour en éprouver les ressentis.

Sa Seignerie, c'est ainsi que les filles ont surnommé leur père. Elles sont quatre: Violetta, la reine, Gilda, la pragmatique, Aïda, la préférée et Mimi, le petit colibri. Leur père étant passionné d'Opéra, trois de ses enfants portent le prénom d'héroïnes de Verdi. La dernière, s'inspire d'une pièce de Puccini.

De fait, Mimi est différente, de celle qu'on accepte dans une famille sans en dire plus, son étrangeté, en fond. Seulement, une nuit de carnaval, elle disparaît. Depuis, Aïda porte la culpabilité de ce drame, de la douleur de sa famille et du manque de protection de son père. Et depuis, Aïda s'est enfui !

Alors lorsque sa soeur Violetta l'informe des funérailles à venir, elle hésite, puis revient sur cette île d'à peine cent kilomètres où tout le monde se connaît. Elle va être le grain de sable qui fait dérailler l'équilibre familial plus que précaire.

À l'aide de ses contes et légendes de la famille Salvatore, Véronique Olvadé révèle le passé, petite touche par petite touche, et nous balade dans son univers en posant des indices deci-delà, où la personnalité de ses personnages s'infirme, se défait ou se clarifie.

L'écriture de Véronique Olvadé installe une proximité avec son narrateur, semblant révéler pour son lecteur une cachotterie ou soulignant avec humour un détail, pour créer un entre-deux de complicité, animée par son style si particulier.

Un autre personnage de Fille en colère sur un banc de pierre est cette nature avec tous les sens que Véronique Olvadé déploie. L'île devient familière, l'hôtel particulier appelé Grande Maison du domaine des Sycomores aussi, mais aussi cette maison du bas qu'on a tous connu !

La langue de Véronique Olvadé dissèque, ausculte, étire la réalité qu'elle a inventée. Plaisir certain de s'embarquer dans cette histoire qui revisite le thème de la culpabilité en non-dits, d'amour familial sans violence mais strict et de faux-semblant à tous les niveaux.

Évidemment, Véronique Olvadé est une écrivaine complètement reconnue dans l'univers littéraire. Et Fille en colère sur un banc de pierre affirme encore son talent de conteuse dans un roman qui n'a rien à voir avec une belle fable !
Lien : https://vagabondageautourdes..
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