Citations sur Adam & Eve (34)
Aadam Rymättylä était conscient d’avoir eu une réaction violente et primitive. La courbe électrique de son cerveau avait dépassé son seuil de tolérance. Les fluctuations soudaines de l’électrochimie organique sont extrêmement difficiles à contrôler, se consola-t-il. Le cerveau fonctionne comme un accumulateur. Cette fois, la surcharge avait provoqué une décharge brutale et concrète, sous forme de bourre-pif. Parvenir à déterminer la formule chimique du phénomène lui permettrait peut-être de mieux se maîtriser, songea-t-il, mais était-ce vraiment nécessaire en toutes circonstances ?
Il lui fallut un certain temps pour se calmer.
Dans quelle époque sans foi ni loi vivons-nous, se lamentèrent les badauds, si les mendiants et les voleurs en sont à s’approprier le patrimoine national ? N’ont-ils vraiment honte de rien ? Et qu’allait bien pouvoir faire cette clocharde du vase du président ?
L’amour a un prix, certes, mais le vaut-il ? Pendant de fugitifs instants d’indicible bonheur, oui.
" Il suffirait qu’un riche bienfaiteur aille dans n’importe quel hôpital psychiatrique finlandais avec une valise pleine de billets et distribue cent mille marks, par exemple, à chaque patient, pour que tous se trouvent instantanément guéris et libérés. L’argent est un remède qui ramène les plus fous à la raison, croyez-moi. "
« Les entrepreneurs sont le bétail des huissiers, qu’il faut veiller à faire paître et à traire jusqu’au bout. On nous hait, on nous méprise, on nous crache dessus... mais on ne comprend pas notre véritable rôle. »
Les Américains ont développé une batterie plus moderne, au carbone, qui est quatre fois plus efficace qu’une batterie classique au plomb. Son électrode négative, l’anode, est faite de particules de zinc, tandis que l’électrode positive, la cathode, qui est en contact avec l’air, est en carbone poreux. Plutôt ingénieux, non ? En s’oxydant, le zinc de l’anode libère des électrons qui vont migrer vers la cathode, et l’électricité ainsi produite fait tourner le moteur. Des centaines d’électrochimistes planchent depuis des années sur la question. Aux États-Unis, on investit des sommes folles dans ce type de projets.
Quand on branche un câble aux bornes de la batterie, autrement dit ici, elle se charge, ce qui signifie qu’elle accumule de l’électricité. Ce boîtier contient un liquide et des plaques de plomb. Sous l’action du courant électrique, les ions du plomb se déplacent, et la réaction chimique produit de l’hydrogène et de l’oxygène.
Difficile de jouer les dons juans avec un corps aussi meurtri et une mine aussi fatiguée, songea-t-il. Ça faisait longtemps qu’il n’avait pas regardé la gent féminine dans cette optique, lui qui était autrefois si entreprenant. La vie sexuelle d’un homme menacé de faillite a tendance à être calme. Il repensa à son ex, Laura, dont il avait divorcé cinq ans plus tôt. Elle avait claqué la porte par jalousie, emmenant leurs trois enfants.
Il avait cependant assez vite constaté que le développement des accumulateurs au zinc avait atteint son apogée : les matériaux étaient adéquats, le mode de fabrication aussi, et la batterie, bien que désespérément lourde, n’était guère perfectible. Si on voulait trouver un système de stockage d’électricité plus léger, il fallait aborder le problème sous un angle neuf.
Le premier prix se montait à deux cent mille couronnes, net d’impôt. Plus de douze mille candidats s’étaient inscrits, dont l’électrotechnicien Rymättylä, donc, qui l’avait emporté. Sa femme de l’époque, Laura, avait émis des doutes sur le génie de son mari quand celui-ci avait expédié par la poste une enveloppe d’un bon kilo. Elle trouvait toute cette activité plutôt ridicule, mais le projet d’Aadam, un système de culture mécanique des plantes de jardin, était exceptionnel, au point même qu’il avait été impossible de lui trouver un débouché industriel dans un marché aussi restreint que la Scandinavie. Avec l’argent, l’inventeur avait offert un manteau de fourrure à Laura.
Tout cela n’avait été que du bricolage, certes amusant en soi, mais aujourd’hui, pour la première fois, Aadam Rymättylä avait le sentiment d’être sur la voie d’une invention réellement prodigieuse. Il avait commencé à réfléchir à la possibilité de réduire le poids des batteries, selon un schéma classique, parce qu’il avait mal au dos à force d’en soulever tous les jours. Il avait cependant assez vite constaté que le développement des accumulateurs au zinc avait atteint son apogée : les matériaux étaient adéquats, le mode de fabrication aussi, et la batterie, bien que désespérément lourde, n’était guère perfectible.