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EAN : 9782020130875
187 pages
Seuil (17/04/1991)
4.14/5   110 notes
Résumé :
L'étoffe du diable.
La rayure et les étoffes rayées sont longtemps restées en Occident des marques d'exclusion ou d'infamie. En furent notamment vêtus tous ceux qui, à un titre ou à un autre, se situaient aux marges de la société chrétienne ou bien en dehors : jongleurs, musiciens, bouffons, bourreaux, prostituées, condamnés, hérétiques, juifs, musulmans ainsi que, dans les images, le Diable et toutes ses créatures. Sans faire aucunement disparaître ces rayu... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (13) Voir plus Ajouter une critique
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Une fois de plus j'ai appris , je me suis divertis, je me suis passionnée par cette histoire, j'ai voyagé dans le temps grâce à Michel Pastoureau. Une étude à travers les siècles, sur les tissus rayés, les animaux au pelage zébré , les symboles formés de raies, à la fois savante, ludique.
Porter des vêtements à rayures fut longtemps un signe distinctif souvent infamant, et puis, les modes , les moeurs changent les rayures deviennent à la mode, elles sont signe de modernité, d'originalité, de ralliement . Paradoxalement aussi les rayures peuvent être positives et négatives, protectrices et dangereuses.
Un cadeau de Noël fort apprécié !
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Comme toujours avec Michel Pastoureau, on apprend beaucoup. Dans ce livre c'est l'histoire des rayures qui est racontée, depuis leurs débuts péjoratifs puisqu'ils sont réservés aux personnes à part, les fous, les prostituées par exemple jusqu'à aujourd'hui où elle évoquent les loisirs et surtout le sport. Si le tigre est rayé, cela souligne sa méchanceté. Quant aux tissus tachetés ils évoquent des maladies de peau.
Je n'avais jamais remarqué par exemple que les dessous et les pyjamas étaient rayés parce que perçus ainsi comme plus hygiéniques. Cependant le livre date un peu, presque trente ans ce qui le rend un peu dépassé pour le présent.
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Passionnante plongée dans les représentations mentales des hommes du Moyen-Âge, avec pour guide Michel Pastoureau, dont j'ai déjà adoré l'histoire de la couleur bleue et celle du cochon. Et il est bien vrai que nous avons bien du mal à nous imaginer dotés de l'outillage intellectuel de cette période si rude, ou la pensée magique prenait souvent le pas sur la connaissance, le plus souvent lacunaire et surtout pour nous, paradoxale ... Un livre court et dense, très facile à lire malgré son érudition, qui intéressera autant les férus d'histoire des civilisations que les couturières.

Nous voici donc confrontés à l'histoire des rayures et des tissus rayés. Nous apprenons que les surfaces, au Moyen-Âge, sont signifiantes. On classifie ainsi l'uni, le rayé et le semis auxquels sont conférés des valeurs positives ou négatives spécifiques. Le semé par exemple (fleur de lis, hermines ...) est toujours valorisant, solennel, majestueux, sacré, signe de pouvoir, attribut marial, symbole de fécondité, de souveraineté. A l'opposé, le tacheté sous-entend pustuleux, scrofuleux, bubonique, lépreux, bref, l'antichambre de la mort ...

Le rayé, c'est le passage d'un état à un autre. Le terme "varietas" désigne à la fois la tromperie, la méchanceté, la lèpre. La rayure horizontale est infamante, elle signifie servilité, pare les prostituées, les personnes en marge et même, en héraldique, elle indique la bâtardise. Parfois, la rayure indique seulement l'ambivalence, l'ambiguïté : le vêtement rayé est attribué à Caïn, Judas, et même à Joseph car croire en la conception naturelle de Jésus est une hérésie. La rayure est donc considérée comme transgression de l'ordre social. Elle distingue le maître du valet, le bourreau des victimes, les fous des sains d'esprit, les damnés des élus.

Jusqu'à l'explosion de la mode des rayures au XVIIIème siècle. Buffon réhabilite alors le zébre comme "le quadrupède le plus élégamment vêtu" ... et les 13 colonies insurgées de l'Amérique donnent le ton avec leurs "stripes". Cela devient une folie, aussi bien dans le textile, la décoration, le vêtement. Le statut visuel et culturel de la rayure se transforme radicalement pour évoquer la liberté et les idées nouvelles. La jeunesse, l'esprit sportif, le bord de mer comme la rayure horizontale des tricots de marins, la rayure devient chic.

Sauf pour de notables exceptions qui forment autant de rémanences : si aujourd'hui le banquier et le malfrat portent tous deux des costumes à rayures, ce ne sont pas du tout les mêmes. Au XIXème siècle, le costume rayé des bagnards a pour origine les colonies pénitentiaires américaines, il sera repris comme marque d'infamie pour les déportés victimes du nazisme.

La rayure joue le rôle de trompe-l'oeil, de mise en garde. Elle montre et cache à la fois, elle filtre entre interdiction et perméabilité : en signalisation routière, elle signale une barrière que l'on peut éventuellement franchir mais avec précautions.

La rayure est donc une marque culturelle, si rarement présente dans la nature (à part le tigre et le zèbre). Michel Pastoureau nous en instille toutes les différentes interprétations ... Difficile de regarder désormais une surface rayée sans y penser. Et pour moi, une explication historique de ma préférence pour les étoffes à semis comme le Liberty !

Lien : http://www.bigmammy.fr/archi..
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Drôle de titre pour un ouvrage d'art. Drôle de titre pour un ouvrage d'histoire. Ce livre est pourtant l'un et l'autre. Michel Pastoureau s'empare-là d'un sujet surprenant, les rayures et les tissus rayés. Dans notre monde où l'image se capture d'un doigt, en appuyant compulsivement sur un bouton, savons-nous encore qu'elle se construit ? L'image est devenue évidence immédiate à nos esprits contemporains, alors qu'il n'en est rien, nous avons simplement désappris, à l'investir, à la décrypter et à la lire pour y mettre ou y trouver du sens. Au Moyen-Age, l'iconographie est construite, savamment, pour délivrer un message consistant et toujours important. Au coeur de l'image, la couleur parle, la couleur dit et affirme. Non pas une humeur ou un choix, « j'aime beaucoup le rouge », « l'orange me sied peu au teint ». La couleur signifie socialement et symboliquement. Ainsi est sera-t-il aussi de la rayure. Il est d'abord nécessaire de s'accorder sur ce qu'est la rayure. Michel Pastoureau, avec érudition, précision et clarté, précise. Naissant du découpage du plan en un certain nombre de raies ou de bandes, la rayure se distingue pour l'oeil et l'esprit médiéval des raies ou des bandes se superposant sur un plan uni, pair. Quand la bichromie est équilibrée, il n'y a qu'un plan pour l'oeil médiéval. En revanche, quand le nombre de bandes est impair, il y a, pour l'homme du Moyen-Age, deux plans, la couleur dominante étant celle du fond. Impair, disruptive, clivante, la rayure est infamante, transgressive, impie, elle habille le traître Judas ou Ganelon, la prostituée, les comédiens, comme elle signera plus tard le statut du bagnard – rappelez-vous les Dalton dans Lucky Luke. Comment est-elle devenue l'uniforme du marin ? La « couleur » des bébés au maillot ou des culottes de coton des petites filles ? Michel Pastoureau suit, avec le flair du limier, l'évolution des moeurs, pour nous apprendre à voir, ce que nous ne voyons plus. Alors un zébre est-il blanc rayé de noir ou noir rayé de blanc ?
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Essai de Michel Pastoureau. Lettre P de mon Challenge ABC critiques Babelio.

Du costume des jongleurs ou des bourreaux au tristement célèbre pyjama rayé des détenus concentrationnaires, du pelage du tigre au cuir lustré du zèbre, de la marinière à la livrée domestique, des chasubles sportives à l'uniforme militaire ou sportif, de l'héraldique des blasons aux drapeaux nationaux et jusqu'au code de la route, Michel Pastoureau épluche la rayure et les tissus rayés. Il retrace l'histoire culturelle de la rayure qui "n'est pas une forme, comme le besant, l'étoile ou la rouelle, c'est une structure." (p. 29)

Du "caractère dévalorisant, péjoratif ou nettement diabolique de la rayure vestimentaire" (p. 11), l'auteur démontre comment "la rayure médiévale était cause de désordre et de transgression" avant que "la rayure moderne et contemporaine [se soit] transformée en instrument de mise en ordre." (p. 15)

La notion culturelle qui prétend que les rayures verticales agrandissent l'espace et que les rayures horizontales le tassent n'est pas tout. La rayure véhicule des traditions d'exclusion, de mise à l'écart voire de mise à l'index et de disctinction. Les porteurs de tissus rayés furent tour à tour exclus, diabolisés, puis reconnus et consacrés.

La rayure n'est jamais neutre: aujourd'hui encore elle singularise et elle frappe les esprits. Les frères Dalton et leur casaque jaune et noire, Coluche et sa salopette ou Picasso dans sa marinière sont autant de représentants divers de la rayure.

Ce court essai est très bien écrit, même si je reproche à l'auteur d'être un tantinet trop assertif voire péremptoire dans ses affirmations. Mais il défend avec conviction et documents à l'appui des idées clairement exprimées et parfois originales.
Lien : http://lililectrice.canalblo..
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Citations et extraits (28) Voir plus Ajouter une citation
La peinture flamande des XVè et XVIè siècles utilise parfois un procédé qui consiste à placer, en un endroit soit central, soit focal du tableau ou du panneau, un personnage en habits rayés, sur lequel le regard du spectateur s'accroche dès le contact avec l'œuvre. Quelquefois, ce personnage rayé fonctionne comme un véritable trompe-l'œil. Memling, Bosch, Bruegel et quelques autres sont particulièrement habiles à mettre ainsi en exergue non pas un des acteurs principaux de la scène ou de l'histoire, mais un comparse de troisième ordre dont le seul rôle est de détourner momentanément notre regard d'une zone du tableau pourtant essentielle et qui demande à se dévoiler lentement. Dans son célèbre portement de croix (1564), par exemple, tableau de très grandes dimensions comportant plus de cinq cent personnages, Bruegel a placé presque au centre de la composition un paysan anonyme et parfaitement anodin, marchant d'un pas pressé, couvert d'un bonnet et vêtu d'une robe à rayures obliques blanches et rouges. Parce que ces rayures forment un fort écart visuel avec ce qui les entoure, c'est d'abord vers ce paysan que se dirige l'œil du spectateur, et non pas vers le premier plan du tableau ou Jean et les saintes femmes tentent de soutenir la Vierge éplorée, et encore moins vers l'arrière-plan de la scène où le Christ, tombé sous le poids de sa croix, est perdu, comme oublié au milieu d'une foule indifférente.
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Note 32
L'Allemagne connut aussi, à la fin du XVIIe siècle et dans la première moitié du XIXe siècle, ses "bêtes de Guévaudan". En outre, depuis la dernière guerre, nombreuses sont en Angleterre et en France les apparitions de "félins mystères" (l'expression est de V. Campion-Vincent) présentant avec la "bête" certaines ressemblances et ayant parfois une robe rayée. Un colloque organisé par le CNRS et consacré à ces apparitions s'est tenu à Paris au mois de novembre 1990.
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Géométriquement et métaphoriquement, le lien est très fort entre les rayures horizontales du vêtement pénitentiaire et les rayures verticales que forment les barreaux de la prison. Se croisant à angles droits, rayures et barreaux semblent constituer une trame, une grille, une cage même, qui isole encore plus le prisonnier du reste du monde extérieur. Plus qu'une marque, la rayure est ici un obstacle.
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Il est un dernier domaine qui contribue lui aussi à mettre en valeur le lien qui existe entre la rayure et la punition, l'exclusion ou la privation : le lexique. En français moderne, le verbe rayer a le double sens de faire des raies et de retrancher, supprimer, éliminer. Rayer un nom dans une liste, c'est faire un trait sur ce nom, et exclure la personne qui le porte de ce à quoi donne droit la liste. La même idée se retrouve dans le verbe corriger, qui signifie à la fois rayer et punir et qui, dans cette seconde acception, a donné naissance à l'expression maison de correction, lieu d'enfermement où les fenêtres ont des barreaux et les détenus - parfois - des vêtements rayés. Le verbe barrer, qui est souvent synonyme de rayer, souligne très justement comment les barreaux sont des rayures et les rayures, des barrières.
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Cela dit, l'homme propose et la rayure dispose Sa nature et son fonctionnement propre ne peuvent se plier totalement aux codes que la société voudrait lui faire exprimer. Il y a toujours dans la rayure quelque chose qui résiste à l'instauration de systèmes, quelque chose qui porte le trouble et la confusion, quelque chose qui "fait désordre".
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Videos de Michel Pastoureau (49) Voir plusAjouter une vidéo
Vidéo de Michel Pastoureau
Rencontrer Michel Pastoureau, c'est être frappé en premier par son regard amusé et malicieux. L'historien, diplômé de l'école des chartes, est archiviste paléographe, spécialiste de la symbolique des couleurs, des animaux, d'héraldique. Il a reçu de nombreuses aides du CNL, notamment pour son livre « Symboles du moyen-âge : animaux, végétaux, couleurs, objets » en 2012, des aides à la traduction pour ses ouvrages sur les histoires des couleurs « Noir », « Bleu », « Vert », « Rouge », « Jaune », en 2014, 2016, 2018, et en 2020, ainsi qu' une bourse de création relative à l'histoire du nuancier sur les cartographies de couleurs et d'imaginaires. Sa curiosité est sans limite, son raisonnement implacable, le grand entretien avec Michel Pastoureau dans Son Livre, c'est parti.
Michel Pastoureau est professeur à la Sorbonne et à l'école pratique des Hautes Etudes où il est titulaire de la chaire d'Histoire de la symbolique occidentale. Il a reçu de nombreux prix littéraires, dont le Prix Medicis essai en 2010 pour son ouvrage « La couleur de nos souvenirs » paru aux éditions du Seuil, mais aussi, le Prix Broquette-Gonin (histoire) de l'Académie française pour l'ouvrage La vie quotidienne en France et en Angleterre au temps des chevaliers de la Table ronde (1977).
Passionnant !
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