Si dans notre littérature maritime,
Claude Farrère est assurément l'écrivain de toutes les marines, si
Paul Chack et
Jean-Jacques Antier sont certainement ceux de la "Royale", si
Jean Merrien est, sans nul doute, l'homme de la plaisance,
Edouard Peisson, lui, est, avec
Roger Vercel, la plume de la "Marchande".
Avec "
la mer est un pays secret", il nous offre un livre original qui se situe à mi-chemin entre l'ouvrage documentaire, le livre de
souvenirs et l'album de photos de famille.
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La mer est un pays secret" est paru en 1948, chez Grasset, dans un format atypique.
Il est illustré de 65 photographies, en noir et blanc, de
René Jacques.
Celui qui court l'océan, de port en port, sous la seule garantie de son fascicule d'inscrit maritime, quitte la terre à quinze ans et y revient la cinquantaine passée.
S'il a une maison, une femme et des enfants, ce n'est pas pour en jouir mais pour y penser quand il est en mer.
Il est chez lui dans le poste d'équipage, au carré, dans le roof d'embarcation.
Dans sa cabine, il tient les quelques livres qu'il a aimé, dans les tiroirs de sa couchette, il enferme ses cahiers d'étude et ses quelques effets personnels.
Si vous lui parlez kilomètres, il vous répondra milles marins...mesurés de cap à cap et non de port en port.
Quand au temps nécessaire pour rallier telle destination, il dépendra du vent, de l'état de la mer, de la direction et de la force des courants, de la régularité de la machine et de l'importance du chargement....
Edouard Peisson, qui fait l'objet d'un superbe dossier dans le 178ème numéro de la revue d'ethnographie maritime "
Chasse-Marée, est l'auteur d'une trentaine de roman, d'autant de nouvelles et de cet ouvrage magnifique.
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La mer est un pays secret" nous ouvre les portes de la Marine Marchande.
Teinté de poésie, de nostalgie et d'attachement, le propos est simple et juste, peut-être parfois un peu idéalisé.
Cet album est un original compromis entre les mots et l'image, entre la littérature et l'art photographique.
Il est réalisé en hommage à ces hommes, à ces bateaux, qui, sillonnant les océans, arpentent le globe, en tous sens, durant leur vie entière.
Il donne une furieuse envie de se replonger dans l'oeuvre, si riche, d'
Edouard Peisson, d'y retrouver "les
gens de mer", d'y rencontrer, à nouveau, "
Hans le marin", perdu sur les quais de Marseille et "
parti de Liverpool" d'appareiller "
à destination d'Anvers".