Trêve de suspense: Ce livre m'a bien saoulée. Et là j'entends d'outre-tombe la voix de ma grand-mère explicative mais bienveillante: Oye, niña, eso no se dice, no sea tan impertinente (Ce qui voudrait dire à peu de choses près "dis donc, gamine, ça ne se dit pas, ne sois pas si insolente) mais c'est comme ça.
Je le gardais sous le coude, comme quelqu'un qui ne veut pas ouvrir son cadeau avant Noël puisqu'"
un homme qui dort" du même auteur est sans conteste mon livre préféré.
SURPRISE! Je m'assois dans mon fauteuil pour le lire d'une traite et à la moitié je n'en peux plus, j'arrête et m'enfuis en me disant que je le terminerai plus tard et durant dix jours, je suis prête à me trouver n'importe quelle excuse pour ne pas l'ouvrir alors que j'ai lu deux autres livres entre temps. J'ai envie d'avoir envie, mais pas envie. Que dire de plus, alors?
Je l'ai terminé et je souhaite éclaircir certains points. le talent de
Georges Perec est bien présent comme dans
un homme qui dort. Je suis éblouie généralement plus particulièrement par certains passages par le style et la lucidité.
Le descriptif laisse entendre qu'il s'agit d'une dénonciation du matérialisme. Ca, c'est encore la faute à cette satanée société de consommation, y a plus de saison ma bonne dame.
C'est faux!
D'une part Georges précise: "Ceux qui se sont imaginé que je condamnais la société de consommation n'ont vraiment rien compris à ce livre"
Et là je dois faire référence à un passage extrêmement lucide sur le fait que le minimaliste le plus rigoureux peut difficilement echapper à matérialisme qui lui assurerait simplement les moyens minimum de subsistance. Lorsque les autres membres de leurs groupe d'amis "vendent" leur âme au diable pour réussir matériellement le fossé se creusent entre eux. Chacun rejetant la faute sur l'autre etc. L'homme est un animal social L'exclusion ( réciproque ou pas) rend le bonheur plus difficile. Quelqu'un qui comme à des temps beaucoup plus anciens vivrait sans telephone, tele, web, eau courante, et électricité aurait tout de même beaucoup plus de mal à s'intégrer ici et maintenant alors que ces choses ne sont pas indispensables. La résistance à la modernité trouve ses limites.
D'autre part, notre couple d'anti-héros oscille entre des périodes d'avidité velleitaire (il faut dire que pour ma part, je ne m'identifie pas à eux tant ils sont mous de la rotule) et des périodes de résignation et de rejet primaire du matérialisme si cher à ceux qui condamnent la société de consommation.
La lacune énorme que je trouve aussi à ce livre, est qu'il me parait réducteur. Par exemple, certes, dans la société moderne, le bonheur dépend aussi des choses mais pas seulement et là, je ne vois pas... Ce couple n'est donc pas formé d'êtres humains? Pas de fous rires? Pas d'euphorie amoureuse? Pas d'excitation et d'extase sexuelle? Pas de passion? Pas de folie? de naissances, de fêtes... Jamais, rien qui leur permettent en un instant fugace d'échapper à la morosité? Juste un peu de vins, de cinémas, petits dîners, de petites ballades, de petite musique mouais...
Les descriptions d'objet sont inévitables vu le sujet, je n'ai jamais rien eu contre dans aucun livre elles ont leur utilité pour planter un décor, faire ressentir une ambiance, symboliser... mais là vraiment le seuil de saturation est dépassé.
Pour terminer, sans savoir pourquoi, je ne ressens pas de détachement et d'absence de jugement dans la façon dont il expose leur attitude mais une pointe de mépris persistante, mais c'est peut-être seulement ma perception qui est erronée.
Une lecture déprimante bien que des gens aient de vrais problèmes. Par la baie vitrée de la médiathèque je peux voir une tente dôme installée sur le trottoir près de la voie ferrée qui abrite une jeune femme et son enfant.