Mon commandement en Orient

Voici un officier général, Maurice Paul Emmanuel Sarrail (1856-1929) qui, sans ses amitiés et soutiens politiques, plutôt classables à gauche, chez les socialistes et radicaux-socialistes, aurait pu voir sa carrière militaire être arrêtée net ou stagner. Limogé en juillet 1915, après des résultats plus que décevants voire contreproductifs, il rebondit dans le secteur des Balkans, où il se voit "bombardé" commandant du "corps expéditionnaire d'Orient" en octobre 1915 puis commandant en chef des armées d'Orient en janvier 1916. Sa tâche n'est pas aisée, car la Grèce est écartelée entre un roi Constantin qui voudrait adopter une attitude de neutralité et un Venizelos qui prend fait et cause pour les Alliés. Malgré le jeu compliqué auquel il doit se livrer, Sarrail parvient à lancer une offensive avec les Serbes à Monastir qui enfonce les lignes bulgares et conduit les troupes franco-serbes jusqu'à la vallée de la Cerna.
Sarrail a joué un rôle dans la mise à l'écart, en juin 1917, du roi De Grèce, considéré comme germanophile, mais il doit quitter son poste à Salonique en décembre 1917. Il est alors remplacé par Adolphe Guillaumat.
Les souvenirs laissés par Sarrail, publiés pour la première fois chez Flammarion en 1920, font l'objet d'une nouvelle édition chez Soteca avec un formidable appareil de notes écrites par le brillant historien de la Première Guerre mondiale et des conflits lointains qui jalonnèrent les quatre longues années de l'affrontement qu'est le lieutenant-colonel Rémy Porte.
Sans les éclaircissements qu'il apporte et qui nous renseignent sur les enjeux et détails des opérations ainsi que sur l'arrière-plan diplomatique et politique sans lesquels Mon commandement en Orient resterait un ouvrage à la gloire de son seul auteur, qui force un peu sur une certaine auto-satisfaction. Sans les commentaires de bas de page de Rémy Porte, toujours lumineux et nécessaires à la compréhension des événements,l'intérêt du texte de Sarrail serait amoindri, tandis qu'il regagne en importance avec cet ensemble ajouté et indispensable, qui n'alourdit en rien le texte original et au contraire permet d'en faire la bonne lecture.
On apprend ainsi plus de choses, et ces choses prennent alors intérêt et sens, grâce au travail explicatif de Rémy Porte, très à l'aise pour aborder les questions liées à ce théâtre d'opérations.

François Sarindar

Un ouvrage fort utile pour la compréhension d'un théâtre d'opérations extérieur durant la Première Guerre mondiale. le général Sarrail, après avoir commandé le IIIe corps d''armée lors de la bataille de la Marne à l'automne 1914, prend le commandement de l''armée d''Orient d'octobre 1915 à décembre 1917. Voilà la réédition d'un ouvrage écrit par l'auteur en 1919 et paru en 1920 chez Flammarion. Au texte du général Sarrail, qui est rigoureusement chronologique et couvre la période de son commandement des forces françaises à Salonique, s'ajoutent ici des notes fortement utiles de Rémy Porte militaire de carrière mais également historien de la chose militaire. L'ouvrage démarre en juillet 1915 lorsque le général Sarrail doit céder sa place de commandant de la IIIe armée au général Humbert et il se termine en décembre 1917 quand après 26 mois à la tête des armées basées à Salonique, il quitte son poste. La préface du général Sarrail montre combien il s'agit pour lui de rendre hommage à une armée dont les actions étaient largement ignorées (même à travers le filtre de la censure) durant le conflit. Il pense que les succès de cette armée est (après son départ) d'ailleurs directement liés à la fin de ce conflit puisque celle-ci obtient la reddition bulgare, première étape vers des armistices successifs qui arrêtent définitivement le conflit. Ce livre ne permet pas seulement de comprendre le destin des 400 000 soldats des empires français et anglais qui laissèrent leur vie dans les Balkans mais il approche certaines données des relations du gouvernement français avec ses généraux, les relations de chefs militaires entre eux et la concurrence entre diverses doctrines relatives à la menée de cette guerre.

Mon commandement en Orient est le récit, écrit par le Général Sarrail lui-même, de sa période passée en tant que général en chef des forces de l'Entente sur le front des Balkans, de 1915 à 1917. Plus qu'un descriptif très précis des mouvements tactiques des deux camps sur la ligne de front grecque, il s'agit là en fait des mémoires d'autojustification de Sarrail, dans la mesure où ce dernier cherche continuellement à louer ses prises de décisions personnelles, tout en accablant dans le même temps les acteurs qui gravitent autour de lui de reproches divers et variés. Cette tendance lourde à l'autojustification peut parfois énerver, mais elle a cependant le mérite de pointer du doigt les difficultés d'un commandement interarmes et interallié. Les forces placées en théorie sous le commandement du Général sont constituées de contingents non seulement français, mais également anglais, russes, italiens, serbes, auxquels viendront s'ajouter plus tard quelques troupes grecques. Considérés comme un front secondaire de la Première Guerre mondiale, les Balkans ne sont pas scrutés, la plupart du temps à juste titre, comme une priorité par le Grand Quartier Général (GQG) et les dirigeants politiques français. de manière quelque peu réductrice, on peut dire que la mission principale de Sarrail durant ces trois années se résuma à fixer l'armée bulgare afin de soulager les autres fronts de l'Entente. Même si le Général Sarrail fait souvent montre d'audace et de pugnacité pour tout ce qui toucha aux [...]
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