Sans vouloir – et même, bien au contraire ! – diminuer le mérite de
Pascale Quiviger, comment cette remarquable série a-t-elle pu passer aussi largement « inaperçue » (je sais, le terme est impropre, il est signalé en quatrième de couverture que la presse, les libraires et les jurys de nombreux prix ne sont pas restés insensibles, mais, auprès du grand public…).
Pourtant, cette quadrilogie est à mon sens du grand art – même si j'ai vu passer quelques critiques négatives, mais qui n'en suscite pas ? -. Et j'ai comme le sentiment que le fait qu'elle ait été considérée comme de la littérature jeunesse contribue à cette reconnaissance a minima. Au contraire, le fait que ce livre puisse être lu par des ados me semble indiquer l'effort inouï qui a été consenti, car cette accessibilité ne s'est pas faite en tronquant les difficultés, en adoucissant les monstruosités, mais, au contraire, en leur donnant une langue simple, pure… et, pour le dire simplement, juste belle.
On voit trop souvent, en effet, des romans « jeunesse » dans lesquels des auteurs s'autorisent des à peu près, des approximations. Mais, ici, aucune concession. La trame est rectiligne, quand le couperet tombe, il tombe. La mort, la brutalité, la violence gratuite, après tout, font partie de la vie. La séparation, la fin de l'amour, les sentiments bruts, aussi. Ce n'est pas édulcoré, c'est rendu accessible ! Ce sont même de grandes et graves questions qui sont posées : le devoir, l'opposition entre l'intérêt individuel et l'intérêt collectif, le pouvoir… Et puis, à l'autre bout de l'échelle, l'ambition, la soumission, l'égoïsme.
Et – contrairement à ce que j'ai lu quelque part, et qui m'agace encore, allez savoir pourquoi -, non seulement les personnages ne sont pas « sacrifiés à l'action », mais, au contraire, ils sont, pour certains, d'une grande complexité. Et ils évoluent, à leur rythme, non pas pour aller vers une happy end qui aurait un côté éminemment ridicule, mais, au contraire, en fonction de leurs contraintes propres. Bref, je les ai trouvé crédibles, accessibles, humains, qu'ils soient « bons » ou « mauvais ». Certains sont plus faibles, certains sont colériques, certains sont impatients, certains sont égoïstes… Ils ont leurs failles, leurs imperfections.
En général, je déteste les parallèles entre auteurs et entre livres, parce que c'est forcément réducteur, et cela ne parle, en réalité, qu'à celui ou celle qui fait la comparaison. Mais, cette fois-ci, j'ai envie de dire que, au cours de ma lecture, j'ai eu l'impression d'une sorte de filiation avec un de mes livres fétiches, La tapisserie de Fionavar, de
Guy Gavriel Kay (qui n'a pas été chroniquée ici mais qui devrait…)… Cette quête qui vous tombe sur les épaules, et à laquelle chacun réagit comme il le peut, avec ce qu'il a, avec ses blessures et ses zones d'ombre, voilà ce que j'ai lu dans ces deux séries, qui ont au moins un point commun, si j'ai bien compris : le Canada !
Mais finalement, voilà. J'ai aimé. En fait, est-ce qu'il y a autre chose à dire ? C'est bien fichu, c'est cohérent, il y a un vrai dénouement – que, personnellement, je n'avais pas vu arriver tel qu'il se déroule -, on n'est ni dans l'angélisme béat ni dans le défaitisme navrant… Et moi, ça me va !
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