— Mièvretééééeeee ! Fabliauuuuu !
Hem ! S'cusez, c'est ma petite voix pessimiste et désagréable, celle qui voit toujours le verre à moitié vide, qui s'est échappée de sa cage de neurones. Je vais arranger ça.
C'est le premier tome du Royaume de Pierre d'Angle qui la met dans cet état. Sa présentation par son éditeur début 2019 m'avait interpelé. Puis il a eu le prix elbakin.net 2019, catégorie roman fantasy français jeunesse. L'expression « jeunesse » a tendance à un peu m'inquiéter, mais je me suis dit que ce serait parfait pour les vacances de fin/début d'année.
— Cendrillonitéééeee ! Disneyitudeeee !
(Tu vas la fermer, oui ?) Ok, ok, ma petite voix du côté obscur n'a pas tort sur ce point. C'est vraiment jeunesse / ado comme lecture. Et alors ? C'est très agréable aussi, non ?
Pascale Quiviger nous fait naviguer à bord de l'Isabelle depuis les lointaines contrées équatoriales jusqu'au nordique royaume ilien de Pierre d'Angle. Thibault, prince de ce pays qui est comme une Suisse locale (je veux dire neutre politiquement, pas paradis fiscal), retourne chez lui après un long voyage d'exploration à la Darwin. Il a embarqué avec lui une passagère clandestine, Ema, une métis ancienne esclave qui a vécu à la dure. Un lien à la fois étrange et inévitable va enchainer les deux jeunes gens à la vie si différente.
—Doucerositééééeeee ! Rigoleriieeee !
(Mais tu vas te taire ?) C'est très manichéen, c'est vrai. Pas de gris. La plupart des personnages, et ils sont nombreux, sont de braves gens, peut-être un peu bourrus parfois. Les autres sont de vraies saletés que l'on se régale de détester. le récit est essentiellement léger, les problèmes, parfois proches du tragique, sont assez facilement réglés. La bonne humeur fuse, les dialogues pètent. Les personnages se tiennent souvent les côtes de rire, et ça c'est vraiment du « jeunesse rafraichissant ». Dans cet esprit, je range le roman aux côtés de Mage de Bataille, de
Peter A. Flannery ou de la série de la Guerre de la Faille de
Raymond E. Feist. On ne peut que s'attacher à ces personnages qui ont tous au moins une particularité ou un défaut touchant et qui ont souvent la loyauté et l'honnêteté collée au coeur. Certains sont particulièrement réussis, comme l'infirmier Lucas ou le savant Clément de Frenelles.
Je regrette une chose néanmoins : cette manie de faire utiliser par les personnages un langage complètement anachronique à leur propre temps – qui doit se situer aux alentours des 17ème, 18ème siècles. « Microbes », « génétique », « champs magnétiques », cela me sort systématiquement du récit. Si l'auteur emploie ce vocabulaire sciemment afin de rendre la lecture plus confortable, je crois qu'elle sous-estime ses lecteurs.
— Désespoiiirrrr ! Malveillaaaannnce !
(Ah, ça te plait plus ça hein ?). Oui, si le voyage de l'Isabelle et la visite du royaume de Pierre d'Angle servent à introduire, souvent succinctement, un univers à grand potentiel, la dernière partie du récit voit les nuages noirs s'amonceler dans un changement complet d'atmosphère. Car l'île cache un secret, un revers de médaille, qui va se rappeler aux héros et abréger leur joie de vivre. Clairement, on quitte le monde des Hobbits et le Mordor fait entendre sa voix.
Vive les vacances ! Quand j'en ai le temps, c'est le genre de livre que j'avale en quelques goulées. C'est une très bonne porte d'entrée à la fantasy pour vos ados, si vous en avez, et pour les grands un bon bol d'air. Nul doute que je poursuivrai l'aventure.
— Nooooooooooon !
Si !