Avec France Loisirs, c'est un peu quitte ou double : soit je repère direct un truc qui m'intéresse voire figurait déjà dans ma wishlist sur le catalogue... soit il faut impérativement « trouver quelque chose » en guise d'achat obligatoire du trimestre. Ce qui n'est pas toujours facile, ledit catalogue faisant la part belle à la « blanche ». Après tout, c'est France Loisirs, pas Bragl*nne... Dans le catalogue de printemps donc, le choix a été vite fait puisque le seul livre susceptible de me botter était celui-ci. Pensez donc, un polar, situé au Mexique, avec une archéologue, un ancien rite maya et des magouilles politiques, ça a de quoi donner sacrément envie.
Si le résumé plaçait Zia en tant que personnage principal, les têtes d'affiche sont en réalité plutôt son ami Pablo, commissaire de village, et Luis Ramos, lieutenant à Mérida, ainsi que son supérieur le commissaire Delgado. A ce trio s'ajoutent de nombreux autres narrateurs, suspects ou simples témoins, qui permettent non seulement d'avoir une vue d'ensemble sur l'enquête, mais aussi et surtout de brouiller les pistes !
Il faut reconnaître que les personnages sont, à l'exception de Ramos, majoritairement antipathiques, les descriptions de leur physique et de leurs traits de caractère insistant surtout sur leurs défauts. Ce qui n'est pas dérangeant dans le cas de politiciens plus ou moins véreux ou d'un gourou pédophile, mais tout de suite plus gênant quand il s'agit des personnages principaux. Par exemple, Pablo est un flic consciencieux, mais pendant tout le bouquin, ne pense qu'à résister à l'envie de tromper sa femme avec Zia... Néanmoins, on ne peut pas considérer ça comme un défaut, plutôt comme une caractéristique du récit renforçant son ambiance parfois oppressante ! Ici, tout le monde a quelque chose à cacher, qu'il s'agisse de secrets inavouables ou de simples pensées coupables. On n'est pas là pour batifoler dans les pâquerettes, mais plutôt pour côtoyer l'humanité dans ce qu'elle a de moins reluisant. Et il faut avouer que mettre en avant la part d'ombre de chacun plutôt que le côté bisounours, c'est plutôt approprié dans ce genre d'histoire.
Rituel Macabre est un polar classique. L'autrice s'avoue fan d'
Agatha Christie, et l'on sent qu'elle a été à bonne école car le récit est très bien construit : entre les découvertes des protagonistes et les changements de narrateurs, on se fait notre propre idée sur l'affaire. Pas vraiment de fausse piste ici, si ce n'est celles que l'on peut imaginer soi-même jusqu'à ce qu'un nouvel élément vienne les contredire. En outre, l'histoire se charge d'un certain suspense au fur et à mesure que les secrets sont dévoilés et que la vérité s'esquisse... ou pas. Les indices semés ici ou là accusent tour à tour un peu tout le monde, mais si il est possible de deviner le coupable avant la fin, ce n'est bien qu'une fois en possession de tous les éléments que l'on pourra comprendre le mobile du crime. Entretemps, on aura eu notre dose de petites cachotteries entre « amis », magouilles politiques, délires sectaires, jalousies et course au scoop.
Et il faut avouer que la lecture est sacrément plaisante, même si tout n'est pas non plus parfait.
On déplorera surtout le côté creux de Zia. du début à la fin, elle est le personnage le moins utile à l'intrigue, celle qui n'est liée à l'enquête en aucune façon, mais qui, pourtant, la résout de son côté en deux tours à la bibliothèque. Mouais. Et ne parlons pas de la « résolution » en question, qui laisse un arrière-goût de capillotracté là où l'histoire se voulait jusque-là plutôt crédible et surtout, logique.
Enfin, le personnage en lui-même porte à interrogation : comme tous les protagonistes, Zia porte un nom hispanique et aurait très bien pu être une archéologue locale sans que l'histoire ne s'en trouve le moins du monde changée. Sauf que non, pour une raison inexplicable, elle est française. A-t-elle des racines espagnoles ou latino, on l'ignore. En fait, on ne sait pas grand-chose sur elle et, du début à la fin, elle demeure une étrangère, pas seulement celle qui parcourt la ville avec un regard de touriste, mais surtout celle qui demeure en marge d'un récit qui, en fin de compte, aurait très bien pu se passer d'elle.
On constatera aussi un certain manque de naturel dans pas mal de dialogues, souvent dû à l'absence de ponctuation là où de simples virgules auraient suffi à leur donner un rythme plus agréable. C'est du chipotage, mais sur tout un bouquin, et surtout en contraste avec les passages narratifs qui eux, sont très réussis, c'est un peu dommage.
Pour le reste, il n'y a pas beaucoup de décor, mais ce n'est pas vraiment un manque, le récit misant davantage sur la psychologie de ses personnages que sur leur environnement. En revanche, si vous vous attendiez à ce que les aspects archéologie, histoire ou folklorique soient mis en avant (ce que la quatrième de couverture pouvait laisser supposer), préparez-vous à être déçus, car il ne s'agit en aucun cas d'un polar ésotérique !
Enfin, sachez que si l'enquête de ce tome y est bien résolue, la conclusion en appelle un second et peut se révéler un peu frustrante.
Une lecture sympathique, mais surtout une enquête bien ficelée.