Ecrivain plébiscité pour ses romans, Gerald Candless lègue à la postérité une importante bibliographie, ainsi qu'une confortable fortune à ses filles, et à sa femme, Lundy View House, vaste maison située sur le haut de la falaise qui surplombe les dunes de Gaunton et la plus belle plage du Devon, longue de 8 kilomètres de sable fin, souvent noyée dans la brume de mer.
Son éditeur opportuniste désire exploiter son décès,et propose à Sarah, l'aînée des deux soeurs, de rédiger la biographie de son père, susceptible de drainer un abondant lectorat. A peine ses premières recherches généalogiques entamées, elle découvre de nombreux éléments incohérents, avant d'arriver rapidement à cette conclusion irréfutable : son papa chéri n'est pas ce qu'il prétendait être. Tout ce que sa femme, ses filles, ses amis, ses employeurs, éditeurs et lecteurs croient savoir sur lui n'est que pure invention de sa part.
Mais alors, qui était réellement Gerald Candless ? Pourquoi a-t-il usurpé une identité ? Quel événement, sans aucun doute grave, a entraîné cette décision aussi lourde qu'irrévocable ?
Ruth Rendell remonte le cours de son existence d'où émerge le portrait d'un homme bien éloigné de son image conventionnelle, lisse, idéale savamment construite.
Ursula, sa veuve, bien qu'ignorant comme tout le monde la supercherie, a vécu 34 ans auprès de lui sans le connaître réellement. Au fil du roman, elle égrène ses souvenirs depuis leur rencontre. A la mort de son mari, les premiers actes d'Ursula sont d'aller faire couper sa longue chevelure, de se débarrasser des vêtements du défunt, de reprendre son nom de jeune fille, d'accepter un modeste emploi de baby-sitter à l'Hôtel des Dunes, et de mettre en vente Lundy View House, c'est dire la sensation de libération ressentie.
De son côté, Sarah tente de dêméler l'écheveau inextricable de la vie de son père. En dehors de preuves indéniables collectées, elle comprend que les réponses aux questions posées se trouvent dans les romans de son défunt papa. Sous couvert de fiction, Gerald s'est en effet inspiré de la réalité, filtrée, modifiée, transformée, expurgée, pour raconter son mystérieuse vie. Tout fait sens pour qui sait interpréter les énigmes et les symboles.
On retrouve dans
Jeux de mains les thèmes de prédilection de
Ruth Rendell : le sang est plus épais que l'eau, les familles hébergent souvent les pires et les plus douloureux secrets qui bouleversent définitivement des vies et détruisent pour toujours des hommes et des femmes. Une fois encore, elle raconte le destin sans marge de manoeuvre possible, de personnages broyés par la morale, les convenances, la bienséance d'une société confite dans l'hypocrisie, qui à travers des lois d'un autre âge ou mêmes indignes, refuse d'évoluer. Un grand roman.