Maurice Roche surprend par un dispositif typographique qui tend à faire de chaque page une case (ou une cage) à images que le texte aurait peu à peu tout envahie.
Codex, déjà précédemment... Les dessins y abondaient, empruntés aux « civilisations de signes ».
Cet assemblage iconologique, dans
Codex, est exemplaire : Circus, le livre qui précédait, l'annonçait en s'encom- brant de signes de correction typographiques, hiéroglyphes, runes, arabesques, vignettes de guides touristiques, musique, etc.
Opéra bouffe, le dernier paru des livres de Maurice Roche, revient à l'apparente nudité du texte. Quatre fragments : Introduction, Intermezzo (Entracte), Intermezzo, Final. D'entrée de jeu,
Maurice Roche nous rappelle qu'il est le compositeur de la musique du Gouffre de Temiriasef (1946), des Epiphanies de Pichette (1947), de Stabile pour le concert (Hambourg, 1960), des Mines circulaires (Berlin, 1961), etc., qu'il est l'auteur d'une remarquable étude sur
Monteverdi aux Editions du Seuil et qu'il a collaboré au numéro d'Esprit sur les musiques nouvelles.
Il est fort intéressant de voir comment un de nos contemporains reprend — comme Mallarmé — à la musique son bien.
Livre-partition dont chaque page est comme une case de bande dessinée. Un «
opéra bouffe » qui commence cruellement (et innocemment) entre « la boîte à joujoux » et « l'enfant et les sortilèges ». le collage-citation chez Maurice Roche est utilisé comme Stockhauson le fait des voix étrangères dans Hymnen.
Il est fascinant de voir cette nouvelle écoute que requièrent de nous les musiciens contemporains devenir mots sur le papier et se visualiser en occupant l'espace-page. du haut en bas, la phrase se découpe, se désarticule, devient insolite en intégrant le blanc de la page ou, plutôt, en se désintégrant à son contact. «
Opéra bouffe appartient au genre comique » et satirique, donc agressif », déclare Maurice Roche dans un entretien avec
Jacques Henric (dans Art press n° 21, déc. 1975).
La création contemporaine ne se prend pas tout à fait au sérieux ou, tout au moins, intègre dans chaque oeuvre une dimension parodique, satirique, humoristique souvent importante. L'art n'est plus seulement un simulacre mais aussi un mime grotesque, dérisoire. le psychodrame fait ressortir des scories, exorcise nos anachronismes triviaux. «
Opera-bouffe, dit Roche, est une » mise en perspective (et en boîte) des » fantasmes. » La typographie n'échappe pas à ces jeux.
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