AccueilMes livresAjouter des livres
Découvrir
LivresAuteursLecteursCritiquesCitationsListesQuizGroupesQuestionsPrix BabelioRencontresLe Carnet
3,55

sur 166 notes
5
6 avis
4
12 avis
3
7 avis
2
5 avis
1
0 avis

Critiques filtrées sur 5 étoiles  
Salman Rushdie est un grand écrivain. En lisant Les enfants de Minuit et le dernier soupir du Maure, j'avais été enthousiasmé par son talent de conteur, à même de donner vie à des personnages insolites, d'imaginer des aventures fantasmagoriques, et de les dérouler sur un ton flamboyant et symbolique où l'humour ne manque jamais. Rushdie est aussi un intellectuel courageux, qui n'a pas sa plume dans sa poche quand il s'agit de prendre position, et on se souvient de l'infâme fatwa qui lui avait été assignée pour son roman Les versets sataniques. Né en Inde, élevé en Grande-Bretagne, anobli par la Reine, Rushdie est aujourd'hui citoyen américain et vit à New-York.

Il m'a semblé que son dernier roman, La Maison Golden, avait reçu un accueil mi-figue mi-raisin. Cela m'a étonné. La meilleure façon de me faire une opinion était de le lire.

Il est vrai que les soixante premières pages (sur un total de quatre cents) sont un peu indigestes. Elles sont consacrées à la présentation des lieux et des principaux personnages. Pour te simplifier la tâche, lectrice, lecteur, je vais essayer de te donner les clés, car la suite vaut vraiment la peine.

Tout se passe aux Macdougal Sullivan Gardens, qu'on nomme tout simplement les Jardins. C'est un îlot de verdure dans Greenwich Village, au sud de Manhattan, entouré d'une vingtaine de maisons, accessible aux seuls résidents de ces maisons, parmi lesquelles celle où la famille Golden s'est établie. Un petit univers clos privilégié, où René, le narrateur, vit depuis qu'il est né.

Les Golden sont originaires de Bombay, qu'ils ont quittée pour New-York après les attentats islamistes ayant endeuillé la grande ville indienne en 2008. Néron, le chef de famille, est un homme âgé à l'abord inquiétant. Il est accompagné de ses trois fils, affublés de prénoms étranges, emblématiques de leur personnalité et prémonitoires de leur destinée. Pas de femme !... Pour l'instant !

René est un jeune assistant réalisateur vidéo. Il se met en tête de faire un film sur ces Golden, qui viennent de s'installer en face de ses fenêtres et qui l'intriguent. Il subodore que le père, Néron, cache de lourds et noirs secrets.

Au fil du roman qui s'étend sur huit ans, les Golden seront rattrapés par le passé de Néron, dans des péripéties foisonnantes, dramatiques et burlesques imaginées par René. Des péripéties inspirées par quatre femmes d'exception, dont une bimbo russe férocement manipulatrice. Des péripéties dans lesquelles René lui-même se laissera entraîner à jouer un rôle décisif.

Voilà une structure de roman très originale, où René est à la fois témoin, scénariste et acteur. Sans oublier qu'il est aussi le narrateur. Pour reprendre ses mots, il écrit une fiction qui a parfois la forme d'un documentaire, une fiction sur des hommes qui sont une fiction d'eux-mêmes. Finalement, René ne s'y retrouve plus trop entre ce qui est réel et ce qui est inventé. Mais toi, lectrice, lecteur, tu planeras au-dessus de tout cela avec jubilation, comprenant bien que tout est fiction.

Il n'empêche que La maison Golden délivre une intense critique de la société américaine actuelle, et au-delà, des sociétés occidentales en général – particulièrement de la nôtre, si j'en juge par l'actualité : prolifération de fake-news sur Internet, dénonciation des élites par le « peuple » inquiet de perdre ses repères, élucubrations sur l'identité et le genre, contorsions imposées par la bien-pensance pour ne pas stigmatiser les minorités,… ni ensuite les minorités internes aux minorités...

Dans ce roman à la fois tragique et divertissant, émaillé un peu lourdement de citations érudites littéraires, philosophiques et cinématographiques, Salman Rushdie ne dissimule rien de ses opinions. le roman commence en janvier 2009 lors de l'investiture de Barack Obama, pour exploser huit ans plus tard, dans un monde ayant pris l'apparence d'une BD. A Gotham, Batwoman a été battue. le clownesque Joker à la chevelure verte prend le pouvoir.

Lien : http://cavamieuxenlecrivant...
Commenter  J’apprécie          454
Une première incursion dans l'univers de Salman Rushie et pour une première, c'est réussi!
René Unterlinden, le narrateur, habite le même ensemble d'immeubles que la famille de Néron Golden, à New York City, la ville-phare des Etats-Unis. Golden, richissime homme d'affaires, a fui l'Inde avec ses trois fils Petronius (Petya), autiste de haut niveau, « un esprit prisonnier de lui-même purgeant une peine à perpétuité », Lucius Apuleius (Apu), artiste dandy et Dionysos (D.), à l'identité sexuelle floue. Nul ne sait pour quelles raisons obscures. « Ils se prenaient pour des Romains », en avaient emprunté les noms et se comportaient comme tels, sûrs de leurs avantages et de leur puissance financière sur le sol américain. le narrateur, séduit par cet étalage de vanité et d'assurance, s'attache à leurs pas et l'idée d'un scénario fait peu à peu son chemin dans son esprit. Et ce qu'il découvrira sur eux culminera dans une série de malheurs impossibles à prévoir.
Un roman magistral alliant la tragédie grecque aux films de gangsters, truffé de références cinématographiques, de mythologie et de culture pop, superbement écrit et intelligemment mené. Une intrigue forte sur fond de politique américaine (l'arrivée au pouvoir de Donald Trump, identifié au Joker des comics, a cartoon president comme dans la bande dessinée télévisée). Une plume éloquente au service d'une brillante analyse du monde moderne.
Commenter  J’apprécie          237
💓 Alerte coup de coeur ! 💓
.
Salman Rushdie, l'érudit ! Salman Rushdie, le conteur ! Quel bonheur que de retrouver l'auteur dans ce conte cinématographique, savant mélange des plus grandes tragédies grecques et de Fenêtre sur cour !
.
Sur fond de politique contemporaine (de l'investiture de Barack Obama à l'arrivée du Joker maléfique), Salman Rushdie nous conte là l'histoire de la maison Golden, une famille qui semble fuir un passé obscur, et son installation dans les "Jardins", une petite communauté nichée au coeur de Greenwich Village.
Et c'est René Unterlinden, notre narrateur, voisin observateur et scénariste, qui va dérouler le fil de l'histoire passée et présente de ces nouveaux arrivants. C'est décidé, ils seront le sujet de son prochain film.
Mais à trop vouloir mener l'enquête, René deviendra acteur de cette histoire, parfois à ses dépens, et enragera de constater que le sujet de ce film n'est autre que lui-même, emporté dans l'orbite de cette famille énigmatique.
.
L'auteur mêle histoire mythologique et sujets d'actualité, traite avec tact des attentats de Bombay en 2008, et pointe du doigt cette Amérique qui part en vrille. On y parle d'identités, de genres, de cinéma, de mafia indienne, d'amour, de filiation, de la difficulté des vétérans à s'adapter au retour en société, d'anonymat sur le Web...
Encore une fois, Salman Rushdie nous livre un roman particulièrement méticuleux (qui peut parfois paraître exigeant), où rien n'est laissé au hasard, réussissant le pari fou de distiller un enchantement grandiose sur l'inexorable tragédie de Néron Golden et ses fils. Car c'est bien son caractère inexorable qui fait de cette histoire familiale une telle tragédie.
.
Si j'avais été un peu déçue par "L'enchanteresse de Florence", je me suis au contraire absolument régalée avec cet opus que je vous recommande chaudement ! 💛
Commenter  J’apprécie          62
Années Obama.
Une très riche famille immigrée de Bombay arrive à New York pour commencer une nouvelle vie dans une nouvelle maison, sous un nouveau nom: ce sera Golden. Néron, ambitieux quinquagénaire s'impose avec ses trois fils, Pétronius, Lucius Apuleius et Dionysos dans cette nouvelle vie. René, un voisin apprenti scénariste entreprend de raconter leur ascension mais se prend au jeu, au point de faire un enfant à la nouvelle Mme Golden, qui sera le quatrième fils Golden.
Je n'ai lu que la moitié des livres de Salman Rushdie et celui-ci n'échappe pas à la règle de narration, très scénarisée, qui porte toute l'attention du lecteur sur les détails de l'histoire car l'auteur a l'habitude de dire la fin de l'histoire dès le début. Ce qui compte c'est alors la psychologie des personnages, troublés par leur fuite et le changement d'identité qui leur est imposé, mais aussi l'enchainement inexorable des faits, et les entrelacs des (mauvaises) décisions et des conséquences déterminées par ces choix.
L'auteur est d'une incroyable lucidité concernant les intentions et les motivations de chacun de ses personnages, excelle dans l'explication de l'implacable fin.
Pour les aficionados: c'est une perle.
à noter, une description truculente de l'ascension politique de D. Trump que l'auteur voit en "Joker"...
Commenter  J’apprécie          50
J'ai découvert Salman Rushdie sur le tard. En fait avec son excellent dernier roman publié en 2016 chez Actes Sud "2 ans, huit mois et vingt-huit nuits". J'avais été marqué par son intelligence, son érudition, ses connaissances religieuses, spirituelles et théologiques, et sa capacité à pointer du doigt de nombreux problèmes sociétaux au travers de formes aussi diverses que le conte, le récit historique mais aussi fantastique et magique, cependant ancrées dans les profondeurs du réel.
Entre temps j'ai eu le temps de me cultiver et de lire par exemple "Les enfants de Minuits", que je vous recommande vivement si vous voulez lire un magnifique roman picaresque au coeur de l'Inde, de son histoire et de sa sagesse millénaire.

Parlons peu, parlons bien. The Golden House (oui j'suis bilingue), nous emmène aux États-Unis, et démarre précisément le jour de l'élection d'Obama. Jour où Néron Golden, mystérieux riche magnat venu d'un pays dontonnedoitpasprononcerlenom débarque avec ses trois fils à Greenwich Village, un quartier résidentiel huppé de Manhattan. Dans cette communauté plutôt fermée, "Les Jardins" sont un lieu de partage, où des réceptions splendides sont parfois données.
Mais qui sont ces richissimes nouveaux arrivants? D'où viennent-ils? Qui est Néron Golden? Qui sont ces fils Petya, Lucius Apuleius et Dyonysos? (Rien que ça 😊)
Autant d'intrigues qui vont pousser René Underlingen, notre narrateur, curieux voisin, scénariste et réalisateur en panne d'inspiration, à pousser l'enquête pour le bien de son travail, trouvant enfin matière à créativité, calquant son film sur les vicissitudes de la vie de cette famille pour le moins particulière, l'entraînant toujours plus, à ses risques et périls, dans la promiscuité, l'intimité et les secrets bien de la Maison Golden.

Du coup c'est un super roman sur l'Amérique contemporaine. Une très vaste critique socio-culturelle. Des réflexions d'une intelligence incroyable sur le pouvoir des très riches. C'est très dense comme narration, avec beaucoup de références cinématographiques car justement le narrateur essaie de réaliser un film sur cette famille Golden. C'est philosophique, satirique, d'une compréhension aiguë de nos sociétés actuelles. Les 8 années de présidence d'Obama en toile de fond avant l'arrivée catastrophique du Joker au pouvoir comme l'appelle très ironiquement Rushdie dans le livre 😁. L'auteur est toujours ancré dans le réel, la question du genre y est évoqué, la place de la famille, l'importance de la filiation, les luttes de pouvoir intestines et la répercussion de nos actes passés sur notre présent et notre futur. Un petit bémol sur la toute fin mais dans l'ensemble j'ai adoré 😉
Commenter  J’apprécie          40
Un régal ! Après les écritures foisonnantes des 'Enfants de Minuit' ou du 'Dernier soupir du Maure' , celle de 'La maison Golden' est beaucoup plus fluide sans perdre en rythme ni energie.
Une interessante -et drôle- analyse de l' Amérique au temps de Trump et une reflexion solide sur les questions d identité et de genre ...tout ça au fil d un roman porteur d espoir puisque l amour triomphe !
Un bonheur de lecture.
Commenter  J’apprécie          00


Lecteurs (498) Voir plus



Quiz Voir plus

Famille je vous [h]aime

Complétez le titre du roman de Roy Lewis : Pourquoi j'ai mangé mon _ _ _

chien
père
papy
bébé

10 questions
1431 lecteurs ont répondu
Thèmes : enfants , familles , familleCréer un quiz sur ce livre

{* *}