Maurice Sachot utilise les techniques de la médiologie pour étudier la naissance du christianisme.
Le livre est divisé en trois parties correspondant aux trois étapes du passage du courant judaïque à la religion institutionnelle (religio romana christianaque), en même temps qu'à trois temps dans l'élaboration du discours chrétien.
La première période correspond au temps de l'homélie du judaïsme. M.
Sachot montre que les disciples du Christ utilisent à la fois les institutions judaïques (les rencontres à la synagogue) et les formes du discours (la lecture de Moïse et des Prophètes, puis celle des Psaumes, puis la phase homilétique) pour prouver que le courant chrétien accomplit et dépasse le judaïsme, qu'il est le seul judaïsme vrai, la seule voie pour réaliser les voeux de Dieu, et que Jésus est son véhicule.
Dans un second temps, le Christ est annoncé aux Juifs de la Diaspora hellénistique et aux païens hellénisants, puis repris par eux. Ils s'approprient le message et le discours selon les principes propres à la civilisation grecque, c'est-à-dire en en faisant une école de pensée philosophique (hairesis) : naissance du terme « christianisme » sur le modèle du stoïcisme, cynisme etc. Là encore, le modèle est dépassé : le christianisme est la seule vraie philosophie qui permet d'accéder à la vérité.
Enfin, l'arrivée à Rome et dans le monde de la latinité marque le passage de la philosophie à l'institution : grâce à
Tertullien qui reprend le statut du judaïsme comme religio licita au sein de l'Empire romain pour le compte du mouvement chrétien, celui-ci se définit et se calque progressivement sur les marques rituelles et juridiques de Rome, au point d'en subvertir les définitions. de superstitio (« fausse croyance », en dehors du modèle romain du culte public et impérial), il devient la seule vraie religio (ensemble des rites et des institutions marquant l'adhésion au pouvoir en place), au point que désormais le terme « religion » évoque d'abord et avant tout pour nous un ensemble mental décalqué des institutions chrétiennes, et rend difficile l'appréhension d'autres formes de religions (romaine, grecque etc.) vues à travers ce prisme.