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Le Livre de Poche (23/07/1973)
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Etoiles Notabénistes : ******

Sredni Vasthar
Traduction : Gérard Joulié pour l'Edition "Nouvelles - Edition Intégrale" - Editions de l'Age d'Homme dont cette nouvelle est extraite

ISBN : Inconnu. Pour l'édition L'Age d'Homme : 9782825117453

Beaucoup d'entre nous - ce fut mon cas - lurent pour la première fois cette nouvelle dans une anthologie de récits fantastiques présentés, en ce qui concerne mon exemplaire, dans "Le Livre de Poche", sous le label "Alfred Hitchcock présente" - "Le Livre Poche" a édité, sous cette présentation, trois recueils de nouvelles d'épouvante ou encore insolites (dont "Histoire Epouvantables" et "Histoires A Ne Pas Lire La Nuit") que je vous recommande car ils sont, et de loin, bien supérieurs à ce que devait faire Pocket bien plus tard. Rassurez-vous, vous trouverez par-ci, par-là, dans cette rubrique, nombre de fiches relatives aux textes les plus marquants (à mon sens) desdites anthologies auxquelles je conserve toute ma tendresse. (Et en plus, je SAIS où je les ai rangées, c'est-y-pas beau, ça ? )

Pourtant, quand on cherche à l'analyser, "Sredni Vasthar" apparaît, un peu à l'image du "Qu'Etait-Ce ?" de Fitz-James O'Brien, dominé par cette ambiguïté qui laisse au final la porte ouverte aussi bien au réalisme qu'à l'épouvante pure. Alors que, au contraire, l'autre nouvelle de Saki que je connaisse et qui appartient au genre fantastique, "La Musique sur la Colline", est, sans aucun doute possible, un récit d'horreur. (Nous en parlerons plus tard.)

Au centre de l'intrigue de "Sredni Vasthar", un trio inégal : Mrs de Ropp, une femme d'un certain âge, aigrie et sadique, qui aime à torturer moralement un pupille dont elle n'a accepté la garde que parce que tout le monde pense, la Faculté en tête, qu'il ne dépassera pas ses dix/douze ans ; Conradin, le pupille en question, un jeune garçon d'autant plus délicat et fragile que son entourage et ses médecins passent leur temps à le lui enfoncer dans le crâne, petit personnage introverti qui, profondément malheureux au sein d'un monde sur lequel règne Mrs de Ropp, n'a pour autre solution que de trouver refuge dans l'imaginaire et le rêve ; et enfin un furet de belle taille que, pour faire plaisir à l'enfant (en prenant soin que leur maîtresse ne s'en aperçoive, les membres du personnel de Mrs de Ropp se montrent bien souvent compatissants envers l'enfant livré au sadisme moral et mental de sa tante), lui a apporté le jardinier.

Installé dans la resserre qui sert plus ou moins d'atelier de jeux extérieur à Conradin (ce que Mrs de Ropp tolère en général, probablement heureuse de ne pas avoir alors l'enfant dans les pattes), dans une cage certes mais pourvue d'une paillasse moelleuse, et ponctuellement nourri, voire caressé par Conradin, auquel il s'est habitué, le furet, que l'enfant finit par baptiser "Sredni Vasthar", nom exotique et digne du dieu qu'il imagine voir incarné sous la fourrure de l'animal, a pour co-locataire, mais dans l'autre coin de la resserre et soigneusement hors de portée de ses redoutables mâchoires, une poule de Houdan un peu vieille, c'est vrai, mais fort aimable, à laquelle Conradin porte également une certaine affection même si, bien sûr, cette poule n'est pas aussi intéressante que Sredni Vasthar.

Se réfugiant dans ses rêves à chaque coup de griffe ou de dents de sa tutrice - vous n'avez qu'à imaginer combien il a pu et continue à en recevoir - Conradin qui, on le comprendra sans peine, nourrit une haine croissante pour Mrs de Ropp, ne se sent vraiment à l'abri que dans la resserre. Là, il rêve, lèche ses plaies - et imagine, entre autres, un hymne à la grandeur du dieu Sredni Vasthar. Mais tout commence en fait par une rage de dents qui fait souffrir Mrs de Ropp pendant trois jours - bien fait ! - et que Conradin se persuade lui avoir infligée par la prière journalière d'action de grâces qu'il adresse chaque soir à son dieu.

Evidemment, arrive le moment où Mrs de Ropp, remise de ses maux de dents, remarque l'intérêt manifesté par Conradin envers la resserre. Elle en conclut, en bonne sadique, qu'il trouve à s'y rendre une source de bonheur et, du coup, elle en fait l'inspection. La malheureuse poule de Houdan tombant immédiatement sous ses yeux, elle ne voit pas Sredni Vasthar, lequel se tient, rappelons-le, dans un coin plus écarté et plus sombre. Dans un état proche de la jouissance pure, elle fait enlever le pauvre gallinacé et le vendre illico, profitant du goûter pour annoncer, en fanfare et sans préparation aucune, la nouvelle à Conradin.

Lequel blêmit peut-être un peu - ce qui inquiète vaguement sa tutrice, laquelle ne voudrait pas se voir accusée de mauvais traitements à enfants - et serre les lèvres mais ne dit pas un mot. Simplement, sa supplication journalière à son dieu bien-aimé croît en intensité : "Sredni Vasthar, exauce ma prière ..." L'enfant ne précise jamais ce qu'est ce voeu qu'il tient tant à voir exaucer par son idole mais on devine facilement sa nature ...

Les visites de Conradin se poursuivant à la resserre, Mrs van Ropp en conclut qu'elle a raté quelque chose. Et hop ! nouvelle inspection en perspective. Après avoir fouillé de fond en comble la chambre de son pupille et déniché une clef en laquelle elle voit celle de l'énigme, elle se rend, toute seule car elle ignore tout du danger qui l'y attend, à la resserre, bien décidée, cette fois-ci, à faire place nette. Il pleut, il vente, il fait froid et Conradin, posté à la seule fenêtre du rez-de-chaussée qui lui permet de conserver un oeil sur la remise, attend, attend ... Il sait, bien sûr, que Sredni Vasthar n'est qu'un furet et que Mrs van Ropp va encore triompher mais, durant ces minutes qui s'éternisent de manière anormale, devant cette porte laissée ouverte qui ne cesse de battre et de battre, avec un petit air moqueur, dans le vent, l'Espoir renaît en lui ...

La fin, d'une fluidité parfaite et d'une ironie grinçante, vous laisse le choix, lecteurs : ou Sredni Vasthar était bel et bien un dieu, de Vengeance et de Colère, ou bien ce n'était qu'un furet, un peu plus grand, plus long et plus malin que les autres, c'est tout.

Pour moi, inutile de vous préciser, je l'espère, que ce bon Sredni Vasthar est toujours comme je le voyais alors que j'avais quatorez / quinze ans : un dieu. Un dieu, aux dents longues et meurtrières, aux griffes bien affûtées et sans pitié, qui protège les enfants maltraités des sadiques.

Bonne lecture et que Sredni Vasthar, dans Sa Grande & Redoutable Puissance, vous accompagne durant toute votre lecture - et veille à tout jamais sur vos rêves, surtout si, il y a de cela plus ou moins longtemps, vous avez connu, sous une forme ou sous une autre, ce qui fut longtemps le lot de Conradin ... ;o)
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Citations et extraits (2) Ajouter une citation
[...] ... Mrs de Ropp observa que les visites à la resserre ne cessaient pas et un jour elle entreprit une nouvelle tournée d'inspection.

- "Qu'est-ce qu'il peut y avoir dans ce clapier ?" demanda-t-elle d'un ton impératif. "Ce doit être des cochons d'Inde, j'imagine. Je vais faire débarrasser tout ça."

Conradin serra fortement les lèvres, mais la Femme fouilla sa chambre de fond en comble jusqu'à ce qu'elle eut trouvé la clef qui y était soigneusement cachée, et gagna immédiatement la resserre dans l'intention de compléter sa découverte. C'était un après-midi froid d'hiver et Conradin avait reçu l'ordre de rester à la maison. De la fenêtre la plus éloignée de la salle-à-manger, on pouvait juste apercevoir la porte de la resserre, à peine masquée par le buisson, et c'est là que se posta Conradin. Il vit la Femme entrer, puis il l'imagina ouvrant la porte du sanctuaire et scrutant de ses petits yeux de myope la paillasse sur laquelle était couché son dieu. Peut-être allait-elle remuer la paille dans sa maladroite impatience et Conradin murmura pour la dernière fois sa prière avec une ferveur décuplée mais il savait, tout en priant, qu'il n'y croyait pas. Il savait que la Femme allait bientôt ressortir de la resserre avec, au coin des lèvres, ce petit sourire pincé et content de soi qu'il détestait tellement et que, dans une heure ou deux, le jardinier viendrait emporter son dieu merveilleux, qu'il ne serait plus du tout un dieu mais un simple furet marron en cage. Et il savait que la Femme triompherait une fois de plus comme elle l'avait toujours fait et qu'il lui faudrait encore supporter ses tracasseries, son harcèlement et sa sagesse supérieure jusqu'au jour où tout lui deviendrait indifférent et où les prédictions du médecin se réaliseraient. Et dans l'amertume de sa défaite, il se mit à entonner, d'un air de défi et à haute voix, l'hymmne de son idole menacée :
Sredsni Vasthar s'est avancé

Ses pensées étaient des pensées rouges et ses dents étaient blanches

Ses ennemis demandaient la paix mais il leur infligea la Mort

Sredni Vasthar le Magnifique.

Et puis, tout à coup, il interrompit sa psalmodie et se rapprocha de la vitre. La porte de la resserre était toujours entrouverte et les minutes s'égrenaient. C'étaient de longues minutes, mais qui finissaient néanmoins par passer. Il regarda le ballet des étourneaux au-dessus de la pelouse ; puis il se mit à les compter tout en gardant un œil sur cette porte qui grinçait au vent. Une bonne au visage morose vint mettre la table pour le thé, mais Conradin ne quittait toujours pas son poste d'observation. L'espoir s'était insensiblement insinué en son cœur et maintenant, une lueur de triomphe se mit à briller dans des yeux qui n'avaient connu jusque là que la résignation mélancolique du vaincu. Puis à mi-voix, avec une exaltation contenue, il se remit à entonner le péan de la victoire et de la dévastation. Et sa patience finit par être récompensée : une longue bête jaunâtre, courte sur pattes, dont les yeux clignotaient au soleil couchant, avec des taches sombres sur son pelage autour des babines, apparut sur le seuil de la resserre. Conradin tomba à genoux. Le grand furet se dirigea vers un petit ruisseau qui coulait au bas du jardin, y but un moment, traversa un petit pont de planches et disparut dans les fourrés. Ainsi s'en fut Sredni Vasthar. ... [...]
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[...] ... Au bout d'un certain temps la fréquentation presque quotidienne de la resserre par son pupille commença d'attirer l'attention de cette dernière [= Mrs de Ropp]. - "Ce n'est sûrement pas bon pour lui de traînasser tout le temps dans un endroit aussi humide et aussi malsain," décida-t-elle soudain, et un beau matin, elle annonça au petit-déjeuner que la poule de Houdan avait été vendue et amenée la veille. De ses petits yeux de myope, elle scruta Conradin dans l'attente d'une explosion de rage et de chagrin qu'elle s'apprêtait à contenir par un flot de vertueuses paroles et de sages préceptes. Mais Conradin garda le silence : il n'y avait rien à dire. Le visage blême et crispé de son pupille lui causa peut-être une inquiétude momentanée car cet après-midi-là, le thé fut accompagné de toasts, friandises qu'elle bannissait ordinairement de sa table sous prétexte que c'était mauvais pour lui.

- "Je croyais que tu aimais les toasts," s'exclama-t-elle d'un air outragé en observant qu'il n'y touchait pas.

- "Ca dépend," répondit Conradin.

Ce soir-là, dans la resserre, il y eut une innovation dans le culte rendu au dieu du clapier. Conradin, qui jusque là se contentait de lui offrir des actions de grâce, lui demanda une faveur.

- "Sredni Vasthar, exauce ma prière."

Cette prière ne fut pas précisée. Comme Sredni Vasthar était un dieu, il était censé le savoir. Et tout en réprimant un sanglot tandis qu'il regardait l'autre coin vide de la resserre, Conradin regagna le monde qu'il haïssait tant. ... [...]
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