Ambiance brumeuse dans ce tome qui clôt la série Klezmer.
Difficile de le nier, c'est du
Sfar pure sucre. Tant dans le graphisme à la fois émouvant sur les gros plans des visages féminins - les Mona Lisa made in
Joan Sfar ! - qui interpellent le lecteur et parfois vraiment brouillons, entre gribouillis d'enfants et délires sous emprise d'alcool.
Quant aux propos de ce tome,
Joan Sfar donne de sacrés coups de griffes à deux de ses bêtes noires : la religion et la xénophobie. Les deux s'alimentant mutuellement comme il l'explique à la fin de son ouvrage. Et dans une certaine mesure, il faut bien avouer qu'il n'a pas complètement tort.
D'emblée, le titre fait référence au pogrom qui eu lieu à Kishinev en Ukraine et fut immortalisé (en plus des photos prises par l'armée comme des trophées...) par un très long poème de Chaïm Nahman Bialik : "La Ville du massacre". Poème qu'il a ajouté en annexe.
Pour rendre son propos plus léger, le père du Chat du rabbin use de son meilleur outil : l'humour; pour ridiculiser ces dangereux ignorants racistes. Et aussi des scènes parodiques de séries B, façon
Quentin Tarantino. Heureusement d'ailleurs que notre inimitable gitan, Tchokola est là pour empêcher ces Juifs ashkénazes de se laisser aller à la morne mélancolie qui les caractérise.
Et bien sûr, comme c'est
Sfar, on n'échappe pas à quelques paroles un peu crues... Mais, peut-être parce qu'il a fini ce tome le lendemain de la Saint Valentin : il nous parle aussi d'amour !
A l'issue de cette lecture, je pense que ce tome est le plus ambitieux, de plus réussi et le plus émouvant de la série. de par ce qu'il dénonce et, le plus appréciable, grâce à ce que
Joan Sfar a su mettre de lui dans cet album.
Là où il y a de quoi désespérer : c'est qu'on se demande si la condition pour dénoncer les préjugés sur les communautés ethniques et religieuses n'est possible aujourd'hui que chez ceux qui détestent la religion ? Triste constat ...