« Beaux enfants, vous perdez la plus belle rose. » Déjà, avec un titre pareil, ça accroche. Mais rien à voir avec le titre original, « Soné que la nieve ardia », qui se traduit par quelque chose qui ressemble à « Il semblait que la neige brûlait ». Mais, dans les deux cas, c'est assez évocateur. En fait, le titre français fait référence à un poème de
François Villon qu'on trouve en épigraphe. Bref, avant même que l'histoire ne commence, on sent qu'on a probablement un roman spécial entre les mains. Surtout que les mains du génial
Antonio Skarmeta l'ont écrit.
Et le début est tout aussi prometteur. Comme la quatrième de couverture l'indiquait, on rencontre le jeune Arturo qui part pour la capitale. Son grand-père l'y accompagne, avec mille recommandations. Touchant, je reconnaissais quelques des traits de mon propre aïeul dans certains de ses gestes et paroles. Puis il y a la rencontre avec cet homme excentrique, petit, qui cache un coq de combat sous son imper. Ensemble, ils arrivent à Santiago en 1973 où ils se retrouvent dans une pension qui abrite déjà des artistes marginaux et des jeunes étudiants politisés. Avec une telle brochette de personnages, et à un moment charnière de l'histoire chilienne (juste avant le coup d'État), on se dit qu'on a droit à quelque chose de génial.
Eh bien, oui et non. Peut-être aussi le problème vient-il de moi, et d'autres apprécieront grandement ce roman au si long titre. J'y ai trouvé moi-même beaucoup de qualités. Par exemple,
Skarmeta a réussi à dépeindre avec justesse (à ce qu'il me semble) les personnages, les enjeux, les différents milieux, etc. Passer du milieu des music-hall avec les paumés et la racaille qui gravitent autour, aux milieux estudiantins, qui copine avec les ouvriers et les syndicats, tout un tour de force. Et ce pauvre Arturo, complètement apolitisé, qui ne rêve que de foot, côtoit tout ce beau monde sans jamais se sentir à sa place, parfois même en étant rejeté.
En fait, c'est surtout ça qui m'a déplu. Dès le début, j'ai bien aimé ce pauvre Arturo, un jeune puceau de dix-huit ans, la risée de son village, qui s'en va dans la grande ville avec son seul ballon de foot. Il me semble qu'il y avait une histoire à faire avec seulement cette idée. À la place, il a été noyé dans les histoires d'un peu tout le monde et surtout de ce pays, le Chili, qui fonce vers la catastrophe à grande vitesse. Mais, plus j'y pense, plus je me dis que ces enjeux toujours plus importants sont ce qui constituent une grande oeuvre. Je crois que, finalement, je relirai un jour ce roman et sans doute que je me raviserai…