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"M Train"est dédié à Sam Shepard qui ressemble fort au cow-boy que l'on croise plusieurs fois au détour des 18 textes, illustrés de photos prises par Patti Smith. Ils composent ce recueil où reviennent aussi le café (14 tasses par jour ne l'empêche pas de trouver le sommeil) et les cafés, les objets talisman habités par la présence de ceux qui les ont possédés ou les lieux où ils ont été trouvés, les êtres chers disparus, les écrivains passionnément aimés...

Au moyen-âge elle aurait pu être brûlée comme sorcière car pour elle, présent et passé ne font qu'un, les vivants et les morts se rejoignent, elles les invoquent, les fait revenir et les relient par la magie de son écriture.
Les nombreux objets auxquels elle tient, qu'ils soient juste photographiés comme la chaise de l'écrivain chilien Robert Bolaño ou celle de son père sur laquelle elle se refuse à s'asseoir, son vieux manteau noir, offert par un poète pour son 57ème anniversaire, qu'elle perd, vivent de la vie de ceux auxquels ils ont appartenu, qui, s'ils se manifestent par leur intermédiaire, nous restent souvent inaudibles.
p 168 "Choses disparues. Elles griffent à travers les membranes, tentent de capter notre attention par d'indéchiffrables SOS. Les mots dégringolent désespérément dans le désordre. Les morts parlent. Nous ne savons plus écouter. Avez-vous vu mon manteau ? Il est noir, sans véritable signe distinctif, ses manches sont effilochées et l'ourlet est tout abîmé. Avez-vous vu mon manteau ? C'est le manteau parle-mort."

Elle garde au fond d'elle la présence des êtres chers, Fred son mari, son frère, ses parents et les nombreux écrivains et artistes qui ont croisé sa route. Elle va à leur rencontre dans ses vagabondages : en Guyane, Jean Genet, au Mexique, Artaud, Frida Khalo et Diego Rivera, à Heptonstall proche de Leeds, Silvia Plath, au Japon, Dazai, Ozu, Kurozawa, Mishima, Akutagawa et beaucoup d'autres... Certains nous accompagnent déjà depuis longtemps, pour d'autres elle nous les fait découvrir et aimer et elle nous offre de belles nuits blanches en perspective.
Il y a aussi toutes les rencontres inattendues dans les cafés, la rue ou simplement celles qui glissent fugaces derrière une vitre, pas moins importantes que les autres. Toutes nous la rendent proche et ces êtres connus ou pas, dont ses lecteurs font partie, elle les serre tous dans ses bras avec douceur, elle les enveloppe de ses mots, des mots qu'elle alignent dans des carnets mais aussi sur des bouts de papiers, sur les serviettes des cafés où elle a ses habitudes : cafés Dante et Ino à New-York son point d'ancrage où elle commande régulièrement son café accompagné d'un toast de pain complet et d'huile d'olive, le café Pasternak à Berlin avec sa variante plus luxueuse, café, caviar et petit verre de vodka et bien d'autres...
Au Japon elle a beaucoup de mal à se procurer un café. Elle finit par le trouver dans un coffee-shop express et, et.....
p 196 "Assis à la table face à la mienne se trouvait un homme, la trentaine passée, en costume, chemise blanche, cravate, qui travaillait sur son ordinateur portable. J'ai remarqué une rayure subtile dans son costume, à peine visible et qui cependant marquait sa différence comme une sorte de défi. Il avait un comportement qui le distinguait de l'homme d'affaires habituel.(...) J'ai été émue par la concentration sereine et pourtant complexe qui se manifestait dans les rides irisées de lumière sur son doux front. Il était bel homme, un peu à la Mishima jeune, laissant présager une certaine bienséance, des infidélités discrètes et une dévotion morale. J'ai regardé les passants. le temps aussi passait. J'avais envisagé de prendre un train pour Kyoto et d'y rester la journée, mais j'ai préféré boire du café face à cet inconnu silencieux."

Sachant que je ne pourrais pas rendre toute la richesse et la beauté poétique de ce livre, à mes yeux au-dessus de Just kids, j'arrête sur cette belle rencontre japonaise qui, je l'espère vous donnera envie de découvrir toutes les multiples facettes de ce livre qui me rend encore plus proche cette vieille amie magicienne.
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Un livre solitaire à l'image de la vie de Patti Smith aujourd'hui. Sans trame narrative, sans destination particulière, entre vagabondages et déambulations parfois mélancoliques.

Quelque chose de délicieux dans ce livre qui donne envie de s'imprégner de cet art de vivre un peu à rebours. Et de réécouter... People have the power !!!
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Patti Smith, c'est un fragment de ma jeunesse insouciante.
J'ai dansé, que dire... j'ai déployé mes ailes, tour à tour dépliées repliées, sur Because the night, celles et ceux qui sont de ma génération se reconnaitront dans l'imagination de quelques délires nocturnes.
Dans ce journal presque intime, un véritable blues littéraire, Patti Smith nous invite dans ses déambulations et nous partage ses voyages, ses rencontres, ses souvenirs aussi. C'est une envoûtante alchimie des mots et des sensations qui m'a emporté...
Elle parle aux objets, aux livres, aux maisons dont elle franchit les portes. Parfois avant de prendre la route, elle sort de son sac à main un jeu de tarot, tire une carte et cela lui indique le ton de la lumière qu'il y aura sur ce chemin. On devrait faire cela plus souvent, on aurait moins de mauvaises surprises...
Patti Smith aime les livres, la photographie, le café, les chats et les séries B à la télévision... Elle avoue qu'elle peut boire jusqu'à quatorze cafés par jour sans que cela ne vienne troubler son sommeil...
Elle fréquente assidument un lieu de New-York, le Café ‘Ino, et nous y invite avec allégresse, elle y a sa table attitrée où elle lit et écrit, parfois la table est déjà prise, et c'est une violence douloureuse, sourde, qui grogne en elle... Patti Smith rockeuse des seventies, mais le terme lui déplairait je le sais à présent, aime les rituels silencieux, presque chamaniques... Ramasser une pierre dans une montagne et vouloir la garder dans sa poche, l'étreindre avec les doigts comme un chapelet... Je l'ai découvert avec étonnement et éblouissement dans ses silences.
Au Café ‘Ino, elle n'est pas seule, elle vient avec sa bande d'amis : Mikhaïl Boulgakov, William Burroughs, Albert Camus, Jean Genet, Antonin Artaud, Vladimir Nabokov, Haruki Murakami, William Blake, Frida Kahlo, Hermann Hesse, Virginia Woolf... J'en oublie sans doute et c'est déjà beaucoup pour une bande d'amis...
M Train est un voyage autant intérieur qu'extérieur. Nous voici plongés dans les chemins de Patti Smith qui court avec son polaroïd et c'est un délice. Parfois le prétexte est de venir goûter le meilleur café de la planète, celui des hauts plateaux au-dessus de Vera Cruz. La prison de Cayenne en Guyane française, désormais vide, quoique... La chambre de Frida Kahlo...
Un roman lui tient à coeur, celui de Haruki Murakami, Chroniques de l'oiseau à ressort, et je m'en suis réjoui car ce fut aussi pour moi bien plus qu'un coup de coeur, une déflagration.
D'ailleurs, l'univers de Patti Smith ressemble étrangement à ce roman. La promesse d'un jardin presque inaccessible au départ, un puits presque sans fond où elle chute, et puis, à force de tâtonner, tout au bout d'un tunnel une porte s'ouvre sur l'horizon plus vaste qu'on ne l'imaginait.
Elle refuse d'être l'Alice au pays des merveilles, cependant qu'elle en prend, selon moi, parfois follement le chemin innocent et inconfortable.
M Train est un carnet de voyages magnifiquement écrit, - et donc magnifiquement traduit, épris de pudeur et de nostalgie, l'enfance n'est jamais loin et plus tard on y découvre la douleur de l'auteure d'avoir perdu son compagnon de route et de vie, Fred « Sonic » Smith, père de ses deux enfants, décédé brutalement d'une crise cardiaque en 1994, à quarante-cinq ans, évocation d'un souvenir qui vient comme des bulles qui remontent à la surface de l'eau d'un lac...
Il y a toujours comme une part de crépuscule qui s'éventre, le sommeil qu'on repousse à la lisière de la nuit et des mots.
M Train c'est aussi une bande-son. On entend au loin Riders on the Storm, des Doors... Mais musicalement c'est l'univers de Neil Young et du Crazy Horse, dont elle est le plus proche...
Pendant longtemps, c'est-à-dire 260 pages, j'avais oublié que Patti Smith était née en 1946. Je découvre qu'elle pourrait presque être ma mère... Pendant plus d'une décennie je l'ai prise pour une soeur et dans ce récit ici aussi... Longtemps j'ai pensé que Patti Smith avait vingt ans...
J'ai découvert ici qu'elle travailla dans une librairie avant son goût pour la chanson et la scène...
Les mots de Patti Smith semblent portés par le vent. Ce sont les mots d'une femme solitaire, peut-être seule qui vieillit avec rêverie, qui se souvient...
« Nous désirons des choses que nous ne pouvons pas avoir. Nous cherchons à retrouver tel moment, tel son, telle sensation. Je veux entendre la voix de ma mère. Je veux revoir mes enfants quand ils étaient petits. Petites mains, petits pas rapides. Tout change. le garçon a grandi, le père est mort, la fille est plus grande que moi, elle pleure après un mauvais rêve. de grâce, restez pour l'éternité, dis-je à ceux que je connais. Ne vous en allez pas. Ne grandissez pas. »
Ce récit de Patti Smith ramène aux heures des années soixante et soixante-dix, mais peut-être tout simplement à nos jours tout aussi effilochés que son récit et que nos existences, qui sont en attente de rencontres comme celle-ci.
Pour moi Patti Smith aura toujours vingt ans. Et quand je l'écoute ou je la lis, moi aussi...

Take me now, baby, here as I am
Pull me close, try and understand
Desire is hunger is the fire I breathe
Love is a banquet on which we feed

Come on now, try and understand
The way I feel when I'm in your hands
Take my hand, come undercover
They can't hurt you now
Can't hurt you now, can't hurt you now

Because the night belongs to lovers
Because the night belongs to lust
Because the night belongs to lovers
Because the night belongs to us
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Patti Smith est une femme bien dans ses baskets qui conjugue passé et présent, souvenirs et nostalgie avec bonheur et sérénité.
Intelligente, cultivée et moderne, même au détour de certaines confessions nimbées de nostalgie on sent transparaître la lucidité qui l'a accompagnée tout au long de son périple dans la vie.
Cette fois on a l'impression de passer son âme en accéléré au scanner . Elle dévoile des bribes de ce qui fait sa personnalité, ses passions, ses lectures, ses listes et ses séries TV. Elle nous parle d'une belle galerie d'artistes de tous genres qui ont laissé une empreinte dans sa vie accomplie et bien remplie.

Avec simplicité mais avec une profondeur et une pudeur rares, Patti Smith continue de pratiquer le talent de la légèreté pour nous offrir une lecture qui pourrait être autant de pistes vers soi-même.


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Lorsque j'ai tourné la dernière page, j'ai crié : « Oh ! C'est fini ! » Je m'étais habituée à cette rencontre quotidienne avec une personnalité hors du commun et si attachante : Patti Smith.
En fait, je ne connaissais rien d'elle sinon quelques chansons que j'écoutais autrefois, il y a bien longtemps...
Tout d'abord, ce qui m'a fascinée dans ce livre, c'est la photo de couverture : elle est assise dans un café, une tasse blanche devant elle. Elle porte un bonnet de laine, une veste d'homme et un jean. Elle tient son visage dans sa main droite et regarde sur le côté. Présente et absente. Sa main gauche est posée sur la table. Je crois que je n'ai jamais autant regardé une couverture de livre. Patti Smith raconte en quelles circonstances cette photo a été prise : tous les matins, elle se rend au café Ino, situé sur Bedford Street, dans Greenwich Village, commande du café noir, un toast de pain complet et un ramequin d'huile d'olive.
Or, ce jour-là, elle apprend que l'établissement ferme. C'est un choc pour elle. On lui sert tout de même un dernier café lorsqu'une jeune fille qu'elle connaît passe. Elle lui demande d'immortaliser ce moment difficile, « l'image de l'affliction » dira-t-elle. C'est vrai, elle a l'air profondément triste. Je crois que c'est cette grande mélancolie que j'ai ressentie et qui m'a touchée.
« Ce n'est pas si facile d'écrire sur rien. » dit le cow-boy de son rêve, « Il est bien plus facile de ne parler de rien », ajoute-t-elle…
Écrire sur rien, parler de rien … en réalité, Patti Smith nous emmène avec elle, dans son train, à son rythme, sans horaires, ici et là. Elle nous embarque et on la suit dans son « vagabondage », un peu partout sur la planète et dans ses rêves aussi, aujourd'hui et hier, autrefois et demain.
Vie quotidienne peuplée de chats, de cafés et de livres, rencontres d'auteurs, voyages dans les rues de New-York et ailleurs, au Japon, au Maroc, à Londres, méditations sur le passé, sur ceux qui l'ont quittée et qu'elle a aimés, sur le temps, tout se mêle, se lie, se correspond et s'enchaîne, à l'image de la vie, décousue, fragmentée, surprenante, insensée parfois. Les horloges ont perdu leurs aiguilles et le monde sa boussole...
Elle aime le café et les cafés, aurait aimé ouvrir un petit établissement mais son ange, l'amour de sa vie, le musicien Fred « SONIC » Smith, l'a appelée à Détroit : elle est partie.
Ils sont allés à Saint-Laurent-du-Maroni en Guyane française pour voir les vestiges de la colonie pénitentiaire où l'on envoyait les pires criminels. Genet évoquait ce lieu pour lui sacré dans Journal du voleur mais ne l'aura jamais vu. Elle ramassera quelques cailloux et les portera sur la tombe de l'écrivain, au cimetière chrétien de Larache, au Maroc. de même, à Charleville, Rimbaud aura droit à des perles de verre bleu de Harar...
Les auteurs sont sacrés, elle leur fait des offrandes, nettoie leur tombe, vit avec leurs livres dispersés çà et là, dans sa maison, un sac, une chambre d'hôtel. Elle les aime, toujours et encore, leur parle, écoute leur voix même s'ils ne sont plus. Plus présents parfois que les vivants, ils partagent le quotidien de la chanteuse, Bolaño, Rimbaud, Michima, Kurosawa, Dazai, Akutagawa, Plath, Kahlo… Elle aime aussi Sarah Linden, l'enquêtrice de The Killing et n'imagine pas un seul instant ne plus la revoir quand la série sera finie.
Ses êtres chers, ses frères …
Elle a aussi d'autres compagnons de route : ce sont les choses, les objets : sa cafetière, un dessus de lit, son lacet. Elle leur parle, ils lui répondent. Parfois, elle les perd et elle a remarqué d'ailleurs que plus elle les aime, plus elle les perd : son vieux manteau noir, son livre de Murakami Chroniques de l'oiseau à ressort, son vieil appareil photo… C'est comme les gens finalement, ceux qu'elle a aimés ont disparu, elle les a perdus eux aussi… Elle reste là, seule ou presque.
Et puis, comment ne pas parler de ses photos : la chaise de Roberto Bolaño, la table de Schiller à Iéna, le lit et les béquilles de Frida Kahlo, la canne de Virginia Woolf, la machine à écrire de Hermann Hesse, les tombes, les cafés … Quel que soit le sujet, l'image en noir et blanc, floue parfois, fascine, me fascine. Je la regarde plusieurs fois comme pour en percer le mystère. Il s'en dégage une force que j'ai rarement vue ailleurs…
Patti Smith parle d'elle, des autres, de la vie, des oeuvres qui lui sont chères, des auteurs qu'elle porte en elle, des siens, de son ange, de son bungalow de Rockaway Beach, du quotidien. Je ne la connaissais pas, il me semble avoir fait une belle rencontre, une de celles que l'on n'oublie pas, une femme dont l'univers poétique est riche et profondément mélancolique, quelqu'un avec qui j'aurais aimé partager un coin de table, là-bas ou ailleurs. Pas forcément pour parler. Pour être là, sentir ce que le soir a à nous dire et écouter le temps qui passe...
Lien : http://lireaulit.blogspot.fr/
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Voici une ballade littéraire qui m'a bien plu. Autant j'avais moins accroché aux autres livres de Patti Smith, celui-ci où elle nous emmène à sa suite à la recherche de souvenirs d'écrivains qu'elle a aimés, est fort attachant. Avec en arrière-fond constant, son amour pour le père de ses enfants, décédé.
C'est sensible, drôle, émouvant. Vraiment je recommande.
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J'avais lu et apprécié Just Kids, récit de la jeunesse de l'auteure et de ses amours avec Robert Mapplethorpe. J'ai ici retrouvé avec plaisir la plume sensible et vagabonde de Patti Smith. « Nos pensées ne sont-elles rien d'autre que des trains qui passent, sans arrêt, sans épaisseur, fonçant à grande vitesse devant des affiches dont les images se répètent. » (p. 66) de sa table attitrée dans un petit café de Bedford Street à New York en passant par le Mexique, l'Angleterre, le Japon et beaucoup d'autres pays, elle donne à voir ce qui constitue la carte de son monde intérieur. À 66 ans, avec plusieurs chats, un appartement à New York, une passion pour les séries policières et les livres, l'auteure ne s'impose rien. « Je suis certaine que je pourrais écrire indéfiniment sur rien. Si seulement je n'avais rien à dire. » (p. 8) Ses déambulations physiques ou mentales ne sont ni vaines ni précises, mais autant d'errances poétiques et délicates en elle-même. « J'ai vécu dans mon propre livre. Un livre que je n'avais jamais eu l'intention d'écrire, enregistrer le temps écoulé et le temps à venir. » (p. 156) Entre rêve et réalité, passé et présent, Patti Smith évoque des souvenirs et chante la fuite du temps, avec élégance et nostalgie.

Illustré de clichés pris par Patti Smith elle-même, cet ouvrage est un peu un inventaire à la Prévert, une carte aux trésors. On suit l'auteure sur le chemin de ses maîtres, à la rencontre des références qui ont forgé son univers artistique : livres, films, séries télévisées et musiques, nombreuses sont les oeuvres qui composent son panthéon personnel. En montrant ce qu'elle aime, Patti Smith se dévoile, forces et fêlures indistinctement mêlées. « le lecture souhaite-t-il seulement me connaître ? Je ne peux que l'espérer, tandis que j'offre mon monde sur un plateau rempli d'allusions. » (p. 54) Dans son monde intime, il y a un cow-boy qui hante ses rêves, le souvenir toujours douloureux de son mari Fred trop tôt disparu, des artistes croisés et aimés, une maison presque en ruines près d'une plage. Sans vraiment s'expliquer comment ni pourquoi, Patti perd des choses : livres, manteau et appareil photo sont autant de cailloux blancs laissés derrière elle. « Nos possessions pleurent-elles de nous avoir perdu ? » (p. 183)

Inclassable, tout comme son auteur, ce texte se savoure comme un carnet de voyage intime. Il n'y a rien à apprendre, rien à découvrir au bout du chemin, mais une multitude d'émerveillements à saisir tout au long du parcours, jusqu'au moment de revenir à la maison, dans une bienheureuse quiétude bâtie sur des certitudes simples. « Mon chez-moi est un bureau. L'amalgame d'un rêve. Mon chez-moi, ce sont les chats, mes livres, et mon travail jamais fait. Toutes les choses disparues qui, un jour peut-être, m'appelleront. » (p. 188) M Train est un charmant ouvrage, délicat et émouvant, à l'image de son auteure, poétesse maudite bénie des muses.
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Une écriture magique qui fait se passionner pour rien, pour des vagabondages poétiques sans consistance, les références dans le désordre de l'univers de Patti Smith. Il n'y a rien à raconter, mais on ressent à la lecture de ce livre beaucoup de chaleur et une sérénité qui soulage, loin de toute contrainte, préjugé, ou stress inutile. Attendre que le café soit passé dans le percolateur, se laisser entrainer par les mots d'un livre, rêver, suivre un fil imaginaire et le mélanger au réel, tout est prétexte à un vagabondage aussi important et magique que toute autre préoccupation, sur laquelle il a priorité. J'avais déjà aimé " just kids " dans lequel Patti Smith s'effaçait un peu devant Mapplethorpe et je me suis promené avec beaucoup de plaisir en sa compagnie dans ce livre plus personnel. Seul petit bémol, passé la première moitié du livre et le charme de la découverte , j'ai eu un peu de mal à tenir sur la distance, et reconnais être resté sur le bas côté de certaines des routes empruntées par l'auteur, parfois difficiles à suivre. Mais je ne dois pas avoir perdu entièrement le fil, car j'ai eu le plaisir de voir le livre se terminer par une photo de la canne de Virginia Woolf, qu'une association d'esprit m'avait fait rapprocher du texte de Patti Smith.
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C'est toujours un plaisir de passer quelques heures avec Patti Smith. Quand on ne l'écoute pas, on peut la lire. Cette fois, elle nous conte ses souvenirs : son mari Frederick Dewey Smith décédé en 94, ses voyages, ses discours, ses rencontres d'écrivains. le tout alimenté par des photos faites par elle et en buvant son éternel café.

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Deux mois en compagnie de Patti Smith, qui elle parcourt un peu plus d'une année de sa vie dans ce livre.
Il m'a fallu d'abord apprendre à la connaître un peu, la découvrir, me laisser apprivoiser par son caractère: son appartement bordélique et les reliques qu'elle garde autour d'elle, sa spiritualité très forte, sa solitude, le souvenir de Fred, et ses nombreux allers-retours à la fois entre le passé et le présent et entre le rêve et la réalité. Car le monde dans lequel évolue Patti Smith est multi-dimensionnel et dans le temps et dans l'espace et elle a un certain don pour l'ubiquité.
Je me suis petit-à-petit attachée à cette femme qui a un regard extrêmement poétique et positif sur la vie et les gens, qui est généreuse, drôle, indépendante, sensible, fragile aussi et donc, très attachante.
J'ai suivi ses pérégrinations au Mexique, Maroc, à Cayenne, en Angleterre et au Japon, autant de voyages-hommages aux artistes qu'elle aime; j'ai bu des cafés (des litres et des litres!), j'ai ri en la voyant maugréer et réagir comme une gamine lorsqu'une femme s'est assise à sa table habituelle au Café 'Ino, mais j'ai également ressenti sa mélancolie au souvenir du passé et notamment de l'époque où Fred, son mari, était vivant.
Patti Smith a la qualité rare de savoir écrire à partir de rien ou presque rien et cela avec une grande poésie. Un beau moment de lecture.
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