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Qui ne se souvient du triste fait divers, ayant défrayé la chronique et soulevé l'indignation de tous, celui de l'enlèvement,de la séquestration,des sévices infligés et de l'assassinat horrible (par Youssouf Fofana et son gang des Barbares) d'Ilan Halimi, jeune Juif appaté par une jolie fille?
Voilà le thème choisi par Morgan Sportes, auteur contemporain (Juif algérien par son père, catholique par sa mère) dont plusieurs des dix huit titres ont été traduits en plusieurs langues et dont L'appat a été adapté au cinéma par Bertrand Tavernier.
Dans Tout tout de suite, point de Youssouf mais un Yacef, point d'Ilan mais un Elie, mais tout autant de barbarie et d'ignominie.
Des faits précis décrits de façon journalistique.
2006.Une bande de délinquants de la banlieue parisienne kidnappe un jeune Juif, soit disant fortuné, et exige une rançon auprès de sa famille.De milieu modeste, cette dernière ne peut verser la somme réclamée.
D'une manière très méthodique, ce récit nous conte, avec force de détails et d'indices, les vingt quatre longs jours de détention de la victime, les agressions subies, les travaux de sape psychologique, les réactions diverses, l'horreur à l'état pur.
Comme dans tout phénomène de groupe, bien qu'obéissant au chef, certains se démarquent pour lui acheter à manger ou lui fournir des couvertures, mais la folie mégalomaniaque du leader l'emportant l'issue sera fatale.
Est-ce ça notre société, où la torture existe encore et où la mort d'un homme ne pèse rien ?
Des faits,de simples faits dénoncés sans prise de position, de la part de Morgan Sportes,mais un récit d'une insoutenable tension qui oblige le lecteur, lui, à s'indigner pour crier:"plus jamais ça!"
Le sujet choisi ne m'a pas plu, mais il est à signaler que Tout tout de suite a été sélectionné pour le prix Goncourt 2011.
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Encore un livre acheté par hasard, à la gare, quelques minutes avant de prendre mon train. J'ai tout simplement adoré !
Un journaliste qui raconte l'affaire du gang des barbares…mais sans jugement !
Il rapporte juste les faits, rien que les faits, cite les paroles des accusés.
Il a décortiqué cette affaire et l'a reconstituée parfaitement, nous laissant confrontés à la réalité de notre société.
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Les faits, tout le monde les connaît, ou presque. le 21 janvier 2006, Ilan Halimi, jeune israélite vendeur de téléphones, est kidnappé par le « gang des barbares », bande de petits malfrats sans envergure dirigés par un certain Youssef Fofana, un délinquant originaire de Bagneux. La victime ne sera retrouvée que trois semaines après l'enlèvement, agonisant au bord d'une voie ferrée près de Sainte-Geneviève-des-Bois, dans les Yvelines. Partiellement brûlé, le corps d'Ilan porte la trace de nombreux sévices. Arrêté à Abidjan, Fofana, vingt-six ans, évoquera à la fois des motivations crapuleuses et raciales, antisémites. Tous ses complices seront rapidement arrêtés, et lourdement condamnés. Journaliste et auteur, Morgan Sportès est revenu sur l'affaire cinq ans après, décrivant de façon précise les différentes étapes du drame, depuis les premières tentatives d'enlèvement avortées en passant par le «recrutement» d'un appât féminin, jusqu'aux multiples tentatives d'extorsion. Rebaptisé Yacef, Fofana apparaît tel qu'en lui-même : à la fois cruel, manipulateur, affabulateur se croyant investi d'une mission politique et prophétique, mégalomaniaque. Les autres protagonistes de la tragédie (gardiens, tortionnaires, simples témoins, parents du jeune homme supplicié…), sont également campés avec beaucoup de vérité. Impeccablement documenté, l'auteur construit là une parfaite reconstitution, située en plein coeur des banlieues d'Île-de-France, déshumanisées et déshumanisantes. le résultat est saisissant : un tableau à la fois exact et dur de notre époque, la face cachée d'une période marquée par d'importantes tensions communautaires et sociales, une misère économique et intellectuelle croissantes. Incisif et efficace, le style de Sportès reste au service de l'intrigue, au sens où chaque élément est minutieusement dépeint, avec un grand souci du détail. L'écrivain cite également des textes de rap en exergue de chaque chapitre, et le langage des cités est soigneusement retranscrit : La « bête de meuf » entre à nouveau en scène : Zelda, cette lycéenne d'origine iranienne qu'on avait utilisée dix mois auparavant pour tenter d'appâter Raymond, à Bagneux. "Elle avait 16 ans alors. Elle en a 17 aujourd'hui, mardi 17 janvier 2006. Il fait gris, froid, elle arpente, avec ses cuissardes blanches, le trottoir à la sortie du RER Denfert-Rochereau" (p.139). Troublant et lucide, ce nouveau roman de M. Sportès reste sans doute l'un des plus intéressants de la rentrée littéraire 2011.

Article d'Etienne Ruhaud paru dans "Diérèse".
Lien : https://pagepaysage.wordpres..
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Ce roman n'est pas une fictiion .... seuls les noms des différents protagonistes ont été modifiés, les faits, eux, restent bien réels .... Il s'agit du récit de l'épouvantable kidnapping de Ilan Halimi en 2006, de sa séquestration, qui a duré 24 jours au terme desquels le jeune homme juif a été assassiné.
L'auteur prend le seul parti possible pour livrer cette histoire, un récit froid, clinique.....
Je fais cette lecture en mars 2019, au moment où la mémoire d'Ilan Halimi a été souillée par des actes antisémites.
Ce récit met en scène cette partie perdue de la jeunesse de notre pays, celle qui veut tout, tout de suite, qui n'a plus aucun repère, aucune morale, aucun respect de rien, qui fait peur ..... mais qui pose aussi beaucoup de questions sur les raisons qui ont fini par amener cette jeunesse-là jusque là...
Un livre qui fait froid dans le dos
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L'auteur, Morgan Sportès, reconstitue au travers de ce roman la genèse et l'histoire de ceux qui ont été affublé du surnom de « Gang des Barbares ». Souvenez-vous en 2006 cette histoire de kidnapping qui avait défrayé la chronique sous fond de violence, barbarie et d'antisémitisme.

Tout, tout de suite n'est pas un roman de grande littérature et usant de grandes phrases Proustiennes et de longues envolées lyriques. L'auteur s'est emparé d'un style précis, clinique, vraisemblable (certains critiques diront que le jeu du langage argotique de banlieue est trop artificiel … il ne m'a pas gêné mais lui a donné au contraire une valeur polyphonique) pour faire ressortir des vérités, essayant d'élaborer un semblant d'explication sur ce qu'a été le gang des Barbares. Les choses sont en effet rapidement remises dans leur contexte lorsque l'auteur nous rappelle que les criminels que les médias ont qualifiés de barbares en jouant sur le sensationnalisme sont avant des hommes comme les autres, des « loosers ». Etudes parfois ratés. Petits boulots à la chaîne. Avenir imprécis. Vies passées dans les tours et les banlieues parisiennes. Cette horde d'hommes comme les autres pour ne pas dire banals est menée par Yacef. Drôle de chef de bande qui rate presque tous ces coups. Charismatique, manipulateur, violent, instable, pauvre intellectuellement, c'est lui qui les rassemble et les façonne en gang. Et c'est avec ce gang qu'il se décide á kidnapper un Juif pour demander une rançon : car, pour lui, c'est une certitude : les juifs sont tous riches et s'ils ne le sont pas, ils sont une communauté solidaire. Sa vérité le conduira à kidnapper Elie.

C'est cette vérité d'un antisémitisme banal, ordinaire et malheureusement répandue au sein d'une jeunesse désoeuvrée qui servira de justification. Ils n'avaient pas encore frappé de Juifs, ils n'avaient pas brûlé de synagogue. Non, avant tout cela, ce n'était que préjugés. Rien de bien méchant, pas vrai ? Mais, il s'agit pourtant d'antisémitisme … un crime. Quant à la violence, elle est partout présente dans ce roman. Psychologique, physique. Menaces. Passage à tabac. Elle fait partie du paysage des tours de banlieue. Faites de la prison et vous serez un grand. Battez-vous et faites-vous respecter. Ont-ils conscience de la réalité ? Nul ne le sait mais il n'a fallu qu'un petit coup de pouce du destin pour les faire gravir les échelons de la violence pour sombrer dans la barbarie. A couper le souffle.

Le roman se veut polyphonique. Nous passons par les souffrances d'Elie, par les paroles des geôliers et leur revendication d'humanité (le passage du Macdo m'a tout simplement bluffé) pour aboutir à l'apogée de la violence. Par les gestes. Par le silence. Ces personnes normales, ordinaires, banales sont devenues des Démons, des monstres. Comment en sont-elles arrivées là ? Tout cela a semblé si facile ? Nous avons suivi leur ascension dans l'échelle de la violence pour finalement en arriver là. Choqué.

Ce roman ne se veut pas moralisateur. L'auteur nous laisse tout simplement là, à la fin de celui-ci. Il nous abandonne et nous laisse avec cette vérité qui fait mal, qui fait peur, qui révolte. Un bijou moderne.
Lien : http://leslescturesdespleenl..
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J'ai été bouleversée et un peu traumatisée par ce livre,je dois le dire.J'ai été contente de le refermer.
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Plus de trois cent pages relatant par le menu détail, un « conte de faits », une enquête policière, mais aussi une enquête sociologique (dissimulée) analyse sans jamais émettre un jugement, une société, la nôtre. Société multiraciale qui se forme à l'échelle de la mondialisation. Société qui avance peut être vers sa propre destruction. Cela se passe, ici chez nous pas très loin, en banlieue. Les gangs, la drogue, la délinquance, sous fond de « guerre de religions » (prétexte ou non ?). Les nouveaux diables : musulmans remplacent les anciens les juifs. La misère, sociale intellectuelle, culturelle les ghettos. Tout, tout est présent. Tout est dépecé, analysé, décortiqué, et l'on est tenté de crier : Assez, c'est pas vrai, c'est pas chez nous… Et pourtant.
Ce qui fait la valeur de ce livre, qu'il soit ou ne soit pas un roman littéraire, c'est qu'on aimerait bien qu'il ne soit que policier, qu'un roman-fiction. Mais hélas, l'impression de malaise qu'il donne ne peut nous tromper…
Je crois que Spencer nous alerte, nous demande de regarder de plus près (comme à son habitude) les faits-divers-qui-deviennent-réels.
C'est un travail de titan qu'il a entrepris et mené à bien à mon avis. Et je conseille vivement sa lecture.
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Morgan Sportès né en 1947 à Alger, est un écrivain français. Il a publié dix-huit livres, nombre d'entre eux ont été traduits en de nombreuses langues et ont attiré l'attention de personnalités comme Claude Lévi-Strauss ou Guy Debord avec lequel il se lie d'amitié après la publication de la Dérive des continents en 1984. Il partage actuellement sa vie entre la rédaction de ses livres et de nombreux voyages de recherche.
En préambule à son roman Tout, tout de suite qui vient tout juste de paraître, Morgan Sportès nous prévient : « En 2006, un citoyen français musulman d'origine ivoirienne a kidnappé et assassiné, dans des conditions particulièrement atroces, un citoyen français de confession juive. J'appelle le premier Yacef, le second Elie. L'un a 25 ans, l'autre 23. J'ai réélaboré ces faits, à travers mon imaginaire, pour en nourrir une création littéraire, une fiction. »
L'auteur est donc très clair, ceci est un roman écrit à partir d'un fait divers réel et si vous ne vous souvenez plus exactement de quelle affaire il s'agit, sachez qu'il s'agit de celle que la presse avait baptisée à l'époque, « le gang des barbares ».
Pour écrire ce livre, Morgan Sportès s'est livré à une véritable contre-enquête, épluchant la presse, interrogeant certains témoins, lisant des documents de source policière etc. Tous ces faits sont la base même de ce récit certifié exact, seuls les dialogues sont de la fiction, la sauce littéraire et le liant qui constitue le roman, la fiction. D'où une avalanche de détails qui ne servent à rien dans le récit mais qui rappellent les rapports de police, comme indiquer le numéro d'une cabine de téléphone public ou préciser qu'une boucherie fait aussi volaille, triperie, charcuterie ! Tous les faits et gestes des protagonistes sont intégralement mentionnés, les noms des rues empruntées, les noms des cybercafés et des commerces où ils entrent.
Tout est épouvantable dans ce drame car tout est nul. Si le terme « gang des barbares » sonne bien et a fait de beaux titres de presse, il ne correspond pas à la réalité car il n'y a pas de gang. Yacef est un tocard de banlieue avec une grande gueule - mais qui bégaye sous le coup de l'émotion - qui a réussi, grâce à un séjour en prison, à se faire une réputation de petit caïd et se créer une petite cour de plus minables que lui. A peine libéré, « c'est à la société qu'il déclare la guerre. Il veut du fric, vite. » Les barres HLM, les caves et les halls d'immeubles investis pour des trafics en tous genres, les jeunes en sweat-shirts à capuche, le chômage, l'immigration, l'échec scolaire, l'exclusion sociale etc. tel est le décor sordide et connu de cette histoire horrible.
La bêtise crasse de Yacef laisse pantois et effraie car elle défie les raisonnements logiques. Si la brute enlève Elie, la victime est choisie au hasard, c'est tout simplement parce que juif, il est sensé avoir de l'argent et qu'une rançon pourra être demandée. Sauf que Elie n'est pas d'une famille fortunée. le montant de cette rançon fluctuera à la baisse au fil des trois semaines que durera cet enlèvement.
Le roman fait plus de 370 pages, mais il se lit à une vitesse hallucinante car le style est sec fait de phrases courtes alignant les faits les uns après les autres, froidement. On connaît la fin puisqu'elle est connue, pourtant on ne peut se retenir de dévorer l'ouvrage pour en venir à bout et être bien certain que Yacef va se faire coffrer. Un thriller sans suspense final mais tout aussi prenant.
Morgan Sportès ne donne jamais son avis, seules quelques phrases nous interrogent, la tactique policière pour retrouver Elie était-elle la bonne, demande le père de la victime tout en rendant hommage aux membres de la Crim' qui ont « travaillé comme des fous », ce « monstre » comme d'autres du même tonneau n'arrive pas de Mars, il est issu de notre société, qu'elles sont les raisons et les causes d'une telle furie ? La question n'est pas nouvelle, des réponses – incomplètes peut-être - ont été fournies mais que faisons-nous pour que cela change ?
Un livre coup de poing, à lire bien évidemment.
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Ce livre est l'autopsie d'un fait divers. En 2006 une bande emmenée par Youssouf Fofana (Yacef dans le livre) enlève Ilan Halimi (Elie dans le livre) parce qu'il est juif et que pour eux « les juifs ont de l'argent ». Il est séquestré, subira de nombreux sévices puis sera laissé pour mort dans un bois. La presse a baptisé cette bande « le Gang des Barbares », barbares représentait « étranger » pour les grecs et les romains mais ce ne sont pas des étrangers au sens de « différent » qui ont commis ce crime, ce sont des filles et garçons comme nous, qui comme nous ont été à l'école républicaines, comme nous vivent dans des quartiers plus ou moins « fréquentable » et c'est cela qui est absolument glaçant dans ce livre : ce crime a été commis par des gens que l'on croise chaque jours à la boulangerie, dans la salle d'attente d'un médecin, au café… Il est dans ce cas surement rassurant pour l'inconscient collectif de les nommer « barbares ». Ce ne sont pas des barbares, ce sont les pieds nickelés du crime, les abrutis du système, élevés aux séries tv, ayant pour seul horizon les murs de leurs cités et pour seul avenir la débrouille et les magouilles.

Ce livre est sidérant. Il est incroyable de voir autant de protagoniste garder le silence, minimiser les faits, ne pas prendre conscience qu'une vie est en jeu. Plusieurs parlent à des amis, à leurs parents une réaction prédomine : ne rien dire, ce ne sont pas nos affaires. Pourquoi ? Un simple appel anonyme à la police aurait peut-être pu sauver ce garçon. Si ce n'était pas aussi grave ou rirait de ces gens, de leurs inculture, de leur bêtise, mais c'est grave ils sont nombreux par leurs actions, leurs silences, leurs complicités à être responsable de l'agonie et de la mort d'un jeune homme. L'auteur détaille les fait tel un clinicien, il nous relate minute par minute l'organisation bancale d'un crime. Les tentatives ratés, les complices peu fiable, les geôliers incontrôlables.

Ce roman baigne dans l'islamisation de ces jeunes en ruptures qui deviennent musulman parce que c'est « cool » tel ce geôlier qui « rattrape » ces prières le soir n'ayant pu les faires durant sa journée de garde de la victime. L'appât qui elle semble n'avoir aucune conscience de ce quelle fait, jolie poupée ayant besoin d'être regardé pour existé. Yacef qui clôture un mail de demande de rançon d'un « bisou » incongru, qui harcèle les familles et se retrouve rattrapé par son bégaiement des que la situation lui échappe. On comprend également comment la strategie policière, qui semble avoir utilisé des « méthodes » courante dans le cas de kidnapping contre rançon, a échoué car il n'avait pas face à eux un gangster, un kidnappeur avec une stratégie, mais une bande de bras cassés emmenée par un illuminé. Une bande sans moyen, sans strategie qui gérait au jour le jour l'affaire. Assez vite certains vont partir, d'autre vont se plaindre mais aucun ne relâchera Eli même quand le meneur les dirigera depuis la Cote d'Ivoire où il se refugie régulièrement. Elie a été retrouvé près d'une voie de RER par une passante, corps brulé et mutilé, il décédera peu de temps après à l'hôpital.

Un bémol toutefois, la couverture du livre que je ne trouve pas engageante du tout.

L'auteur ne prend pas partie dans le livre, il relate les faits juste les faits en se permettant toutefois parfois une ironie qui en dit long. Il s'avère tout de même qu'avec les citations introduisant chaque chapitre l'auteur semble nous transmettre sa vision des choses sans y toucher vraiment ce qui m'a un peu gênée. En effet de nombreuses citations nécessiteraient d'être creusées et étayées.
Lien : http://mespetitesidees.wordp..
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Yacef de Bagneux a acquis une petite expérience dans un créneau du banditisme. Avec son entourage, ses copines, ses connaissances, son réseau de petits gars désoeuvrés, il se spécialise dans le kidnapping avec l'espoir toujours d'une belle rançon à la clé. Envoyer une fille draguer la cible, obtenir son numéro de téléphone, l'attirer dans un guet-apens, contacter les caïds endurcis du 93 pour porter la victime à la planque, nommer les gamins et les potes qui seront chargés de surveiller le kidnappé, obtenir les contacts de son entourage qu'il faudra faire chanter. Tout est rôdé, son plan machiavélique dont il est si fier, même s'il se heurte parfois à la vigueur non prévue des cibles, ou leur non coopération, doit marcher coûte que coûte afin qu'il rembourse ses dettes et paie ses sujets des belles sommes promises. Alors cette fois, on va viser Elie, vendeur dans une boutique de téléphone, mais surtout Juif, dont évidemment entouré d'une famille et d'une communauté aisée qui seront prêts à tout pour le sortir de l'enfer qu'il lui réserve...

On ne lit pas "Tout, tout de suite" pour son style littéraire, sinon on est grandement déçu. On peut lire ce livre, ce roman non fictionnel, ce fait divers à peine romancé, comme un policier à suspense, même si on en connaît l'issue tragique. On fait bien de le lire comme un état des lieux gravissime, comme le décorticage minutieux, résultat d'un travail d'enquête (un travail que les journalistes devraient avoir les moyens de faire ?) de très grande haleine, qui nous permet de revenir à tête reposée et avec l'ensemble des éléments factuels, sur un fait divers qui a bien sûr fait sensation mais qui malgré tout nous a été raconté par la presse de façon très superficielle.

Jour après jour, en commençant bien avant l'affaire de l'enlèvement d'Ilan Halimi par Youssouf Fofana et ses acolytes en 2006, Morgan Sportès décrit grâce à l'enquête, aux dépositions, aux indices récoltés, comment tout cela s'est déroulé, avec qui et où (les lieux sont toujours décrit avec précision et replacés dans le réel).
Le gang des barbares, avait surnommé la presse, une expression sensationnelle pour les media qui caricature les protagonistes en s'éloignant de la vérité. Il s'agit plutôt d'un fou fébrile, Youssouf Fofana qui apparaît nerveux, très mal organisé, mauvais en orthographe, ayant une fausse confiance en lui-même, entouré de quelques caïds d'expérience auxquels il devra faire appel, et d'une nuée de jeunes qu'il manipule en faisant miroiter des sommes variables. Des filles influençables, des gamins de 17 ans, ou des pères de famille qui traînent dans la cité. Sa petite armée crédule de petits bras. Des garçons qui auront bien plus de scrupules que leur chef, qui feront pour certains preuve d'empathie envers la victime qu'il doivent garder séquestrée dans un appartement puis un local technique, aussi froids l'un que l'autre : il leur arrive de lui acheter de la nourriture avec leurs propres sous, de lui parler malgré l'interdiction du chef, de nouer une relation humaine, d'acheter des couettes pour le réchauffer, d'acheter du "faux-sang" pour produire une photo-chantage d'Elie/Ilan défiguré demandée par Yacef/Youssouf. Ces "gardiens" qui se relayent pendant 3 semaines au lieu de 3 jours, sont les exploités de celui qui voudrait venger les exploités du monde. Autour de Yacef/Youssouf, peu d'amitié, peu de rapports "vrais" et au final, beaucoup de trahison, d'abandon devant sa folie qui se fait de plus en plus visible et dangereuse.
Un livre qu'on ne lâche pas, tout en étant effaré de ce personnage effrayant par son incompétence et ses passages à l'acte, à toute son inorganisation, ses machinations bancales... Et malheureusement, on croit percevoir des ratages impardonnables de la police, dus à une stratégie un peu trop rigide...
La dissection effarante (.......)
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