On s'assoit tranquillement dans un large canapé, après avoir dîné rapidement d'un quelconque plat préparé, un peu gêné d'attaquer un album appelé
le Gourmet Solitaire avec ce genre de nourriture dans l'estomac. Une légère somnolence, provoquée par le début de la digestion, engourdit les membres et le cerveau. On se cale confortablement contre le dossier, on teste plusieurs positions de jambes, croisées, repliées, en l'air…
Puis on attaque. Ah, une introduction du traducteur…
Et puis tout de suite on se jette dans l'histoire, dans le quotidien de cet importateur de produits de mode qui, de déjeuner solitaire en dîner en face à face avec lui même, nous dévoile le bonheur qu'il y a à prendre son temps, à se laisser porter par ses sensations sans chercher à les dominer.
Il ressort un grand calme de l'album, sans doute aidé par le dessin simplissime et pourtant si évocateur de Taniguchi, qui croque en trois traits une émotion, un souvenir, une passion. L'écriture de
Masayuki Kusumi est rythmée, lente, on pourrait même dire chaloupée. Elle happe le lecteur dans un tourbillon de râmens et de chagrins d'amour, de nouilles sautées et de ciel bleu. On s'attarde sur les visages, les expressions, les histoires des divers personnages, on essaye d'entrer dans les petits restaurants, de changer les yens en euros. On rentre dans l'album, en fait, alors qu'on avait peut-être craint de s'ennuyer : la succession des repas de midi d'un homme d'affaires, ce n ‘est pas forcément palpitant.
Et puis on tourne la dernière planche, on survole rapidement la nouvelle qui clôt l'histoire, on ferme l'album… Et si on a de la chance, s'il est encore une heure avouable, on fonce vers le premier restaurant japonais parce qu'on a faim !
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