La lecture de Tabous et la rencontre avec Danièle Thiéry, (Merci Babelio – Merci Flammarion) m'ont amenées à entreprendre l'exploration de la production de cet auteur.
L'Ombre des morts, un polar écrit en 2008 dont l'action se déroule au Commissariat de la Gare du Nord avec sa responsable Edwige Marion, le personnage phare des romans de Danielle Thiéry, ne m'a pas déçu, même si par moment la furie sentimentale du commissaire Marion prend des proportions inquiétantes.
On trouve (déjà, allais-je dire) dans l'ombre des morts, l'écriture simple, directe et sans fioritures de l'auteur, sa maîtrise de la narration, la gestion simultanée de plusieurs parcours de personnages dont on sait qu'ils vont se croiser à un moment, mais l'auteur ne le dévoile jamais avant la fin, maintenant le lecteur en haleine jusqu'au dénouement.
Dans l'Ombre des morts, Edwige Marion est amoureuse de Victor Laferrière. Cet amant sans égal disparait sans laisser de traces. Marion est au 36ème dessous. Ses collaborateurs Abadie et Valentine Cara voient que quelque chose cloche chez leur patronne.
Dans le même temps, Albin Lovici, un truand de la grande époque, est transféré de Belgique en France. Malgré un déploiement impressionnant de forces de police, son arrivée à la Gare du Nord est un fiasco. Il est descendu. Dans la mêlée, l'auteur de ce meurtre en direct n'est pas identifié.
L'IGPN s'en mêle. Marion est très mal. En dépit des menaces qui pèsent sur elle, elle poursuit son obsession, retrouver le beau Victor et franchit souvent la ligne jaune. Cette obsession la conduit à Compiègne. Parmi les transhumantes, des femmes qui font chaque jour le trajet de Compiègne à Paris Gare du Nord, elle va retrouver la trace de Victor Laferrière, mais aussi celle de Albin Lovici.
A Compiègne on trouve pêle-mêle le Commissaire Arpion ; Jacky Carlet, un contrôleur SNCF border-line ; l'Hôtel de la Gare, un hôtel miteux ; un médecin de famille empressé mais intéressé ; un buffet de la gare souvent fermé lorsqu'on a besoin de lui ; une « bonde plantureuse mâchant du chewing-gum à la fraise » chauffeur de taxi ; Bernard Loncle, un voyeur pas très clair ; Armande Klein et Hélène de la Ferrière, deux femmes elles aussi amoureuses de Victor ; Magalie, Julie et Natacha, trois transhumantes vendeuses aux Galerie Lafayette ; Elsa Vogel, la disparue de la Gare du Nord.
La trame du roman parait simple. Ce qui lui donne du corps, est la capacité de l'auteur à rendre crédible les personnages et les situations, à mettre de la viande autour du squelette.
Le polar dresse un tableau de la France de 2008 qui résonne curieusement avec ce que nous vivons actuellement.
« (…) la population laborieuse qui travaillait à la capitale et faisait tous les jours la navette pour rejoindre des banlieues éloignées (…) Ex-campagnes, faux havres de paix qui n'étaient en fait que des ersatz, des non-choix rattrapés par la tentaculaire expansion urbaine. »
« Patron, on va tourner encore longtemps ? J'en peux plus, moi ! On n'a pas dormi de la nuit, il est près de deux heures de l'après-midi…Et je voudrais manger si ça ne vous dérange pas »
Les lacunes et les manques de Etat, omniprésentes…soulignent les paradoxes de notre société : représentation de l'Etat par des élus loin des réalités… politiques qui réduisent les moyens de l'Etat tout en affirmant qu'il faut restaurer son autorité.
Danielle Thiéry donne une juste représentation de l'Etat. L'Etat au quotidien, n'est-ce pas un policier, un prof, une infirmière, une travailleuse sociale, un postier, un agent SNCF, d'autres « petites-mains » que j'oublie – que certains osent qualifier de privilégiés - se débattant pour accomplir leur mission et rarement un homme politique ?
L'Ombre des morts renoue avec la tradition du polar social.
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Marion, allaitée aux proverbes maternels selon lesquels " il n'y a pas de fumée sans feu", "quand le tigre remue la queue, c'est qu'il n'est pas loin de se réveiller" et beaucoup d'autres dictons, savait, hélas que c'était mal parti, qu'il allait falloir affronter une très, très grosse crise.
Plantée au milieu de la gare où la foule des banlieusards s’écoulait tel un fleuve en crue, elle tira de sa poche de poitrine son téléphone portable et appuya sur la touche 1. Un numéro qu’elle connaissait par cœur au point de le haïr s’afficha, un prénom, qu’elle roulait dans sa tête et qui claquait chaque fois comme une mauvaise nouvelle. Les relais s’activèrent. Avant même que ne résonne la première sonnerie, une voix électronique impersonnelle encourageait l’interlocuteur à laisser un message.
Il n’y avait plus qu’à attendre. Le cœur de Marion se serra. Attendre… Ce verbe plongeait en elle à la manière d’une lame d’acier chauffée à blanc. Attendre… Le train, la nuit, les vacances, la paie, la fin du mois, la mort. Il lui semblait qu’elle n’avait jamais fait que cela.
C’était un autre homme qu’elle attendait, qu’elle n’en pouvait plus d’attendre. Personne ne savait ce qu’elle endurait, même si ses proches officiers avaient pu entrevoir quelques signes des métamorphoses de la passion qui la rongeait un peu plus chaque jour : fièvre, altération de sa concentration, brusque disparition de sa volonté et, ici et là, de son sens du devoir. Son problème à elle, c’était la souffrance, l’accélération vertigineuse du processus de dégradation de son état psychique depuis dix jours. Dix jours d’absence.
Dans sa tête, des pensées confuses se télescopaient sans qu’elle arrive à les ordonner. Il fallait se calmer, dormir un peu pour supporter les heures à venir. Elle appela d’autres images à la rescousse : les mains de Victor, la bouche de Victor, son ventre collé au sien. Elle frissonna malgré la chaleur et sa peau se couvrit d’une fine pellicule de sueur à cause du désir brutal qui tendait ses seins et son ventre. Victor et sa façon impérieuse, urgente, de faire l’amour. Comme si sa vie en dépendait.
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