AccueilMes livresAjouter des livres
Découvrir
LivresAuteursLecteursCritiquesCitationsListesQuizGroupesQuestionsPrix BabelioRencontresLe Carnet
3,43

sur 612 notes
L'échange des princesses
Chantal Thomas
roman, 2013
Fiction & Cie, Seuil, 329p


Chantal Thomas relate plus qu'elle ne raconte, dans un style d'une remarquable fluidité et d'une élégance séduisante, et pleine d'empathie pour les quatre enfants concernés, l'échange de deux princesses, la princesse de Montpensier, fille rebelle voire revêche, et à demi-folle, du Régent, oncle du roi Louis XV, et la fille du roi d'Espagne Philippe V, Ana Maria Victoria. Les deux filles ont respectivement douze et quatre ans. Elles sont mariées au fils du roi d'Espagne, Luis, quatorze ans,de faibles capacités intellectuelles et que les sens travaillent, et au futur Louis XV, onze ans, bel enfant, élégant, et mélancolique, tant de morts ayant peuplé sa petite enfance. Cet échange est l'idée de génie du Régent, comme il le dit lui-même, parce qu'elle réconcilie les royaumes de France et d'Espagne, et Saint-Simon pense de même, qui espère en tirer un grand poste.
le récit se déroule sur quatre ans, entre l'été 1721 et la mi-mai 1725, dans deux pays, et en quatre parties, de l'échange, du séjour, à l'échec, corroboré par la correspondance entre les enfants et leurs parents. Chantal Thomas est historienne avant tout.
Chantal Thomas fait allusion à la vie des enfants pauvres, mis au travail dès qu'ils sont capables de se tenir debout, au dur labeur des carriers d'Avon, aux charges des domestiques qui doivent remettre en état de recevoir le château de Fontainebleau, aux paysans chargés de désembourber les carrosses et convois immenses des voyageuses. Elle montre les courtisans prêts à n'importe quelle hypocrisie pour être dans le sillage du roi, et se demandant s'ils doivent aboyer puisque l'Infante aboie, et le duc de Saint-Simon, ce nabot ruiné, embarrassé par l'étiquette, qui se presse pour être l'ambassadeur de l'échange, et qui devient grand d'Espagne au prix de la perte d'un fils et de l'aggravation de ses dépenses. A la mort du Régent, obligé de se retirer de la politique, il écrira ses Mémoires. Elle fait voir les médecins qui ne savent que saigner, et les turpitudes et les crimes des Grands des royaumes.
Quand ces turpitudes touchent les enfants, elles paraissent encore plus insupportables. On s'attache très vite à la petite Infante qui chavire tous les coeurs, et notamment celui de l'ancienne gouvernante du roi, et de la Palatine -la personnalité la plus en vue du Régime, et peut-être, avec Mme de Maintenon, celle du règne de Louis XIV,  qui a voulu demeurer vivante « dans le souci supérieur d'un être libre »- laquelle lui apprend la liberté, qui aimerait « qu'elle connaisse la musique de son être, le vrai goût de soi » ; on la trouve drôle et haute, mais le roi n'a aucun sentiment pour elle, et quand un clan rival parvient à proposer une autre politique, on craint que ne grandissant pas, elle ne soit pas apte à enfanter, et que ses babillages cachent un manque d'intelligence. le sort de la Montpensier est terrible, elle qui vit sans affection, et qu'une voix intérieure, criarde et maligne, pousse à tous les excès. Luis est incapable d'initiative, de maturité, et se révèle impuissant. Il se réfugie dans la chasse qui n'est pas toujours heureuse, et meurt à dix-sept ans de la vérole. Louis XV, son cousin germain, « né de la haine et du rejet », s'ennuie, et ne goûte que la chasse, la chasse à courre, et dédaigne sa jeune épouse qui n'est qu'une enfant, alors qu'elle, l'aime de tout son cœur et de sa conscience du rang- et lui a volé l'amour de sa gouvernante. Il n'est pas un être franc. Il a treize ans, il faut le marier et qu'il consomme, s'il allait mourir ou cédait à l'amour des garçons, ces « arracheurs de palissades ».
C'est un roman très agréable à lire, qui montre comment les enfants des Grands sont les esclaves des appétits politiques des adultes ; ils sont privés de leur enfance et d'un environnement qui leur donne confiance et sécurité. Ce monde de l'enfance est reconstruit par l'intermédiaire des poupées qui parlent et expriment des sentiments, reproduisant la Cour avec son angoisse des privilèges, et la cruauté de ses rejets. La romancière laisse voir son mépris pour certains des adultes et pour la comédie de cour, et dresse des portraits marquants de gens ignobles et parfois vraiment nobles.
Commenter  J’apprécie          40
J'ai aimé découvrir ce pan de l'histoire qui m'était inconnu. J'ai appris des choses que j'ignorai et il m'est plus agréable d'apprendre l'histoire dans un roman que lorsque j'étais adolescente en cours d'histoire. Mais le point négatif de ce livre c'est la manière dont s'est écrit qui ne me plaît pas. On aimerait que l'auteur est exploré mieux que ça les sentiments des personnages au lieu de se contenter d'expliquer simplement des allées et venues ( Louis XV par exemple change souvent de palais, Louis 1er et ses innombrables allées et venues à la chasse ). J'aurai aimé que l'auteur rentre mieux dans la tête de Louise Elisabeth par exemple. D'ailleurs pendant tout le livre je trouve que ça parle bien plus de l'infante reine que de Louise Elisabeth. Pareil on a pas beaucoup de retour sur ce que ressent Louis XV ( il apparaît donc très mystérieux pour le lecteur )et bien souvent il y a des insinuations pas assez développées, on aimerait en savoir plus ( par exemple on perçoit l'insunuation du fait que Louis XV aime la mort des autres et aurait probablement causé celle de sa famille pour être roi ) mais seulement quelques lignes alors que j'aurai voulu en savoir plus sur qu'est ce qui fait dire ça. ...cela dit rien que pour mieux connaître ce pan de l'histoire ( ce terrible et fou échange de princesses ) il mérite d'être lu.
Commenter  J’apprécie          10
J'ai été attirée par ce livre car il est à la mode (mauvaise raison !) et par ce que je croyais que c'était un roman historique (il y en a bien peu, malheureusement - bien peu de bons, en tout cas).
Je l'ai lu jusqu'au bout, sûrement des réminiscences de mon enfance où ma grand-mère me forçait à finir mon assiette même si je n'aimais pas. Ou alors, c'est de la conscience .. pas professionnelle mais comment dire ? ... "littéraire". Au moins, je sais de quoi je parle !
Bref, pour le faire court, l'histoire est inintéressante, l'arrière-plan historique ressemble à un décor en carton-pâte, plat, sans relief et aux couleurs fades.
Les deux parties sont déséquilibrées : on parle plus d'une princesse que de l'autre. Peut-être l'idée de départ n'était-elle pas bonne ?
Le lecteur est réveillé de temps en temps de sa torpeur par des scènes obscènes dont rien ne justifie l'apparition aussi brève que décalée.
Idem pour le langage grossier moderne qui fait irruption - on dirait que l'auteur éructe - au milieu du récit. Peut-être pour secouer le lecteur somnolant ?
Sans compter les clichés anti-Eglise catholique de rigueur et les clins d'oeil lesbiens et gays un peu lourds.
J'ai été abasourdie de découvrir que Chantal Thomas était non seulement spécialiste de l'époque où elle place son récit mais aussi chercheur au CNRS, donc pas une crétine a priori. Donc, au choix :
- Soit c'est une bonne chercheuse et qu'elle se concentre alors sur ce qu'elle sait faire ;
- Soit elle se fout du monde (et son éditeur aussi).
Commenter  J’apprécie          51
1721. Après la mort de Louis XIV, le Régent du royaume de France, Philippe d'Orléans, veut sceller la paix avec son voisin espagnol, Philippe V. Sa fille, Louise-Elisabeth (12 ans), épousera donc le prince des Asturies, futur monarque du royaume hispanique. Quant à Maria-Victoria de Bourbon (4 ans), elle épousera le prince Louis XV, petit neveu du Régent, à peine âgé de 11 ans.
Réduites à l'état de monnaie d'échange et « d'objets royaux » à vénérer, ces princesses doivent alors abandonner leur enfance, se plier à la volonté de parents peu soucieux de leur bien-être.
Le marché étant conclu de part et d'autre, « L'échange des princesses » a lieu en grandes pompes en 1722 sur une île à la frontière entre les deux royaumes.
On les suit, ballotées d'un pays à l'autre durant des mois, se pliant aux exigences absurdes de la vie à la cours.
Avec ce fait historique méconnu teinté d'une grande empathie, Chantal Thomas réveille l'histoire intime en redonnant à ces enfants, ici perçus comme des pièces sur l'échiquier des adultes, la parole et le libre choix de leurs actes.
Un roman, proche du réel où l'effroi côtoie l'absurde et parfois l'ironie.
Commenter  J’apprécie          460
une bien agréable manière de découvrir cette période , et les us et coutumes concernant les mariages et arrangements princiers et royaux .
Commenter  J’apprécie          70
1721 : la France et l'Espagne « «échangent » leurs princesses pour deux mariages croisés franco-espagnols à des fins « géostratégiques » comme on dirait aujourd'hui.
Sur cet événement historique Chantal Thomas jette un double regard :
- un regard sans complaisance sur deux familles royales (en réalité il s'agit d'une seule et même famille du fait des mariages croisés et de la consanguinité dominante).
- un regard attendri sur ces enfants « royaux », manipulés, formatés pour un monde d'apparences, instrumentalisés à des fins politiques. le vrai sujet du livre est là : l'enfance maltraitée, chez les « grands », comme elle doit l'être chez les petits, proie de la misère sociale.
Le portrait des adultes est cruel, seule la princesse Palatine plus authentique et plus humaine s'en sort.
Un beau livre, qu'il faut lire.
Commenter  J’apprécie          162


Cet échange cynique de deux princesses au 18 e siècle entre France et Espagne est un sujet passionnant malheureusement gâché par une construction brouillonne
et un style souvent heurté ,maladroit.Résultat sans charme.
Commenter  J’apprécie          00
Je suis passée à côté...
Je me suis terriblement ennuyée en lisant ce roman, pourtant prometteur et au sujet intéressant.
J'ai trouvé la narration poussive, le style parfois pompeux et certains éléments m'ont vraiment dérangée.
C'est très documenté et on sent le vrai désir de véracité de l'auteur qui s'attache à coller au mieux aux données historiques qui nous sont parvenues mais, au final, j'ai trouvé ça assez froid et sans réelle émotion.
Bref, je suis passée à côté...
Commenter  J’apprécie          91
Le titre de ce roman pourrait suggérer une part de féerie, et nous serions fort déçus ! Car cet échange n'a rien de féerique, il est même plutôt dramatique , il plonge deux petites princesses dans l'angoisse. L'une et l'autre, malgré suivantes ou dames d'honneur ; quand l' Espagnole, à 4 ans, se retrouve promise au futur Roi de France, âgé de 12 ans, et qu'en face la princesse de Montpensier doit devenir princesse des Asturies, pas besoin de faire un gros effort d'imagination pour savoir que tout n'est pas tout rose !
Chantal Thomas décide de nous faire partager tous les travers des différents "acteurs" : le Régent qui veut garder la main sur le pouvoir, le couple espagnol qui se suffit à lui-même, la petite Maria Victoria qui ne manque pas de malice malgré sa solitude obligée, et qui décide d'aimer le futur Louis XV ( même si celui-ci se montre peu aimable...), sans oublier l'exécrable duchesse de Montpensier. le choix de cet obscur épisode de la royauté et de ses méandres douteux m'a un peu déçue, d'autant plus que le procédé d'écriture, à partir d'extraits de lettres ou de gazettes( même si je mesure le temps consacré à ces recherches) est un peu lourd, à mon sens.
Commenter  J’apprécie          30
Dorures, immenses jardins et nourrices aux petits soins, de quoi faire rêver les enfants. La réalité est pourtant bien plus cruelle pour le jeune Louis XV, à qui la mélancolie mène la vie dure, et pour la petite infante d'Espagne destinée à l'épouser qui découvrira que tout ce luxe et ce confort ne reflètent qu'un bonheur illusoire.

Mais avant que la triste réalité, celle qui tue et qui sépare, celle que l'on ne peut maîtriser, ne triomphe, le lecteur est envouté par une narration fluide s'adaptant aux personnages. Tantôt douce et lumineuse pour la petite infante, tantôt grinçante pour le régent; à elle seule elle peint les décors, décrit les pensées et nous fait vivre à la Cour. Les dialogues sont, en effet, inexistants, seuls les extraits de correspondance nous font entendre la voix des personnages.

Avec une écriture vive et piquante, loin de la rigueur des conventions et protocoles de l'époque, l'auteur nous fait découvrir la vie de ces enfants rois et petites reines en devenir. Des enfants enfermés dans une cage dorée, dans un destin qu'il n'ont pas choisi et qu'ils ne choisiront pas, un destin qui pourrait d'ailleurs changer en cours de route.

Un très beau roman mené par une écriture à la fois douce et cruelle, à l'image de l'histoire qu'il renferme.
Commenter  J’apprécie          91




Lecteurs (1307) Voir plus



Quiz Voir plus

Quelle guerre ?

Autant en emporte le vent, de Margaret Mitchell

la guerre hispano américaine
la guerre d'indépendance américaine
la guerre de sécession
la guerre des pâtissiers

12 questions
3237 lecteurs ont répondu
Thèmes : guerre , histoire militaire , histoireCréer un quiz sur ce livre

{* *}