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Le titre est le leitmotiv de la narration qui introduit chaque nouveau paragraphe décrivant Monet à l'oeuvre de ses nymphéas. Ce texte court, brillamment écrit montre bien l'attitude de l'artiste face à son travail colossal qui sent que son achèvement sera également sa finitude d'être humain et qui le corrige, l'amende par petites touches pour faire durer le plaisir de l'accomplir et de repousser la mort. L'auteur nous offre également une remarquable description des souffrances de la vieillesse qui s'installe progressivement, mais dont les effets délétères sont atténués par la création artistique.
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A l'instant où il entrait dans son atelier où il peignait les Nympheas, que quittait Monet? Son jardin de Normandie, la grande guerre au loin, le rappel de son âge vieillissant, le jour où il terminerait son oeuvre?
Jean-Philippe Toussaint imagine cet instant de transition où Monet passe de la vie à son art, où il se prépare à peindre, posant sa tasse de café, réorganisant ses pinceaux, réfléchissant déjà à la présentation de ses Nympheas quand ils seraient prêts à être exposées à l'Orangerie.
Je garde un souvenir grandiose de l'exposition des Nympheas quand j'étais à Edimbourg, dans les années 2000, et ce court récit m'a bien plu car il m'a permis d'essayer de me mettre un instant dans la vie de Monet, peintre que j'admire.
Ceci dit, je suis un peu choquée de voir que ce texte de 28 pages est vendu 6,50€, le prix d'un roman de poche de plusieurs centaines de pages... est-ce vraiment nécessaire, pour un texte agréable certes mais pas non plus transcendant?
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Quelle jolie idée ont eue les éditions de Minuit ! Cet opuscule a tout pour m'attirer.
Je suis une fidèle de leurs publications, j'admire l'auteur, Monet est un de mes peintres préférés et j'irais bien m'installer à Giverny.
Le titre est assez intrigant.
Jean-Philippe Toussaint propose trente pages. C'est peu et c'est beaucoup à la fois. Je m'explique. C'est peu pour un livre, c'est vrai, mais, pour un seul instant, c'est énorme.
Quelle est cette contrainte que s'impose l'auteur ? : « Je veux saisir Monet là, à cet instant précis où il pousse la porte de l'atelier dans le jour naissant encore gris. » Comment traduire en mots un si bref laps de temps ?
Jean-Philippe Toussaint répète cette phrase comme un mantra à chaque alinéa. Et chaque fois, ce sera un jour différent, car, si le début reste identique, le complément, lui, varie.
Monet est déjà âgé. La guerre se termine. Il peint les grands panneaux des « Nymphéas » qui couvriront les murs de l'Orangerie et, comme l'artiste pose délicatement de la pointe du pinceau des taches de peinture dont les nuances varient à l'infini, l'écrivain pose, de la pointe de son stylo, les mots qui traduiront l'oeuvre picturale. C'est un miracle de délicatesse, de précision, de poésie.
Les sens sont en éveil : « l'aube est fraîche, l'air vif picote les joues » ; « une odeur de plâtre, de colle humide, de tabac froid et d'huile de lin », « partout des bleus, des bleus mêlés de rose, des bleus mauves et des bleus plus profonds, des bleus de cobalt, des bleus nocturnes » ; « il dépose sur une table basse la tasse de café qu'il a emportée avec lui » ; « quelques pépiements d'oiseaux dans le jardin où les arbres sont immobiles comme le silence ».
Peu de mots suffisent pour nous faire visualiser l'atelier : « Dans quelques jarres, en bouquet, des éclosions de pinceaux » ; « le long des murs, ce ne sont que paysages d'eau et de lumière » ou le jardin : « un frémissement dans les herbes du rivage, un souffle dans les branches, une fugitive vibration de lumière ».
Les phrases jouent une délicate mélodie dont les allitérations nous bercent : « des couleurs mouillées d'huile dans leur matérialité moelleuse, c'est la vie même, dans ses infimes variations, métamorphosée en peinture. »
En trente pages à peine, nous traverserons toute une partie de la vie de Monet. C'est la Grand guerre « qui gronde aux portes de Giverny », c'est l'armistice, c'est la discussion avec Clémenceau pour décider de l'agencement des toiles, c'est l'attaque de la cataracte « le brouillard commence à envahir son champ de vision », c'est l'opération, c'est, enfin, l'immortalité de l'artiste. « Son esprit s'est dissous dans la peinture ».
Ce petit livre est un bijou, une merveille. Une parenthèse enchantée dans les nouvelles affreuses dont on charge notre quotidien. Pour ce moment de grâce que vous m'avez offert, Monsieur Toussaint, j'ai envie de vous dire Merci.
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Un petit bijou, comme je les aime.
C'est court, très court mais que c'est beau !
Jean-Philippe Toussaint qui est un véritable virtuose de la langue française nous présente un nouveau moment fort, dans la continuité se son oeuvre brillante.
On en redemanderait bien un peu plus.
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Précis, court, interprétatif. le sujet vaut surtout par la plume vive de Toussaint qui transforme un instant en objet littéraire. le lecteur accompagne Monet sur le pas de son atelier et suggère les émotions du grand peintre face à l'immensité de ses toiles.
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Instant de grâce hors du temps

C'est une très courte lecture, une plume lumineuse et sobre qui se savoure et transporte le lecteur de 1916 à 1926, à cet instant précis où Monet entre chaque matin dans son atelier pour travailler à  ce qui s'appellera plus tard les Nymphéas, passant de la vie prosaïque et bruyante à l'art.

C'est très immersif et doux, trop court peut-être direz-vous,  mais non, c'est parfait...

[Ce texte littéraire de Jean-Philippe Toussaint est né à l'invitation de son ami plasticien Ange Leccia pour accompagner une installation vidéo autour des Nymphéas prévue au musée de l'Orangerie et à Tokyo. Sur le site du musée, vous trouverez un dialogue intéressant entre les deux hommes sur leur démarche ]
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"Je veux saisir Monet là, à cet instant précis où [...]" : cette anaphore ritualise le court récit de Jean-Philippe Toussaint. En peu de pages, il réussit à extraire le nectar de la biographie de Monet, s'attardant sur les Nymphéas qui deviendront source d'admiration des amateurs de peinture impressionniste. Evidemment, on ne peut pas tout dire en 32 pages, mais l'émotion est pourtant bien présente. J'ai été reprojetée au Musée Marmottan-Monet, puis à Giverny. Une petite lecture plaisir grâce aux critiques des lectrices que je suis sur Babelio. Merci à elles d'avoir pris le temps d'écrire une critique.
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On croyait tout savoir sur Claude Monet et ses « Nymphéas ». Que nenni. Jean-Philippe Toussaint, oeil omniscient, saisit l'artiste pénétrant dans son atelier pour réaliser son magnum opus, dont il ne sera pourtant pas totalement satisfait. Dix années seront nécessaires au résident de Giverny pour peindre huit panneaux. Seule sa mort, en 1926, l'arrêtera.
En quelque trente pages, le geste créatif et l'obsession pour une oeuvre qui efface les contingences sont captés ici avec une grande intelligence.
L'atelier des Nymphéas devient un havre de solitude qui arrache Monet, presque aveugle, à la fureur de la guerre afin qu'il compose un hymne pictural à la paix.
Ce court texte intense a la grâce.

EXTRAITS
La solitude, chez Monet, n'est pas un retrait ombrageux, c'est une condition de son art.
Il éprouve devant la nature un inattendu apaisement su monde.
Car ce qu'il dépose, […], c'est la vie même, dans ses infimes variations, métamorphosée en peinture.
Ce qui est à l'oeuvre, […], c'est la conversion de la substance éphémère et palpitante de la vie en une matière purement picturale.
Peindre, c'est oublier ses tourments intérieurs, c'est tenir à l'écart le passage au néant dont il sent l'imminence.
Peindre les Nymphéas aura été pour lui la plus apaisante des extrêmes-onctions.


Lien : http://papivore.net/litterat..
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Par une écriture souple, nous devenons Monet face à ses Nymphéas. Nous sommes celui qui peint sans relâche avec ce désir de repousser l'achèvement jusqu'au moment où les pinceaux glissent sans fin. L'art, quel qu'il soit, est une passerelle, un voile, un instant, ôté sur un monde décevant.
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La brièveté de ce petit livre, 32 pages, n'ôte rien à son intensité. Comme le titre l'indique si bien, l'auteur veut saisir ce moment unique où l'artiste franchit le seuil de son « Royaume » érigeant ainsi comme un mur infranchissable et invisible entre lui et le monde extérieur, lui permettant d'oublier d'un coup de pinceau les soucis du quotidien et de s'immerger dans son oeuvre.
Une fois ce pas franchi, il sera « hors d'atteinte », protégé des tourments, de la guerre et même de la vieillesse et de la mort qu'il sent se rapprocher mais que l'acte de peindre tient à distance.
« … Monet s'obstine, il reprend, il retouche… Il pénètre toujours plus avant dans la peinture, il s'y fond, il s'y dilue. »
À lire pour la force du ressenti et la beauté des mots.

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