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EAN : 9782707346438
240 pages
Editions de Minuit (10/09/2020)
3.62/5   105 notes
Résumé :
Lorsque Jean Detrez, qui travaille à la Commission européenne, a commencé à s’intéresser de manière professionnelle à l’avenir, il s’est rendu compte qu’il y avait une différence abyssale entre l’avenir public et l’avenir privé. La connaissance, ou l’exploration, de l’avenir public, relève de la prospective, qui constitue une discipline scientifique à part entière, alors que la volonté, ou le fantasme, de connaître son propre avenir relève du spiritisme ou de la voy... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (25) Voir plus Ajouter une critique
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Toutes les femmes de sa vie

Jean-Philippe Toussaint poursuit dans «Les émotions» son cycle bruxellois et européen entamé avec «La clé USB» et nous offre quelques superbes variations sur le sentiment amoureux en détaillant les rencontres qui l'ont marqué.

Ceux qui ont lu «La clé USB» seront très vite ici en terrain connu, car même si ce roman peut très bien se lire sans avoir connaissance de l'oeuvre ou du précédent roman de l'auteur, il pourrait fort bien composer un dyptique, puisque l'on reprend l'action au moment où Jean Detrez, le personnage principal, de retour du Japon apprend que son père est décédé, mettant en quelque sorte un point d'orgue a une année qui aura vu sa femme le quitter (juin 2016), le Brexit être voté (23 juin 2016), et Donald Trump accéder à la présidence des États-Unis Trump (8 novembre 2016).
Nous voici donc en décembre, au moment des obsèques de son père, événement chargé d'émotion, mais aussi propice à l'introspection. Les souvenirs affluent, ceux qui ont marqué la vie de son père, fonctionnaire européen comme lui, mais aussi tous ces moments qui ont provoqué chez lui ces émotions qui donnent le titre du roman et dont l'intensité va déterminer le souvenir bien davantage que la chronologie. Les femmes, ou plus précisément les émois amoureux formant alors la matière première d'un récit qui, bien que très factuel, fait précisément partager au lecteur les battements de coeur et l'exaltation de ces moments où la vie s'illumine, où on sent que quelque chose se passe…
Comme lors de ce colloque international de prospective qui tente de tracer l'avenir de l'Europe sans le Royaume-Uni et qui se tient précisément à Hartwell House, dans le sud de l'Angleterre. Alors que les intervenants s'écharpent sur la pertinence de leur méthode de prospective stratégique en quatre phases – scoping, ordering, implications, integrating futures – l'attention de Jean va être détournée par Enid Eelmäe. Pour faire connaissance, les participants ont été invités à un exercice, baptisé Tell the story of your names. C'est ainsi qu'après avoir expliqué que les Detrez étaient originaires du Nord de la France et que le grand-père paternel avait disparu durant la Première Guerre mondiale, il apprit que Eelmäe voulait dire
«première montagne» ou «avant-montagne» en estonien, mais aussi que ce patronyme, avant l'estonisation des noms, était Eiffel, comme le constructeur de la Tour Eiffel. Ajoutons que la seule personne appelée Enid de leur connaissance les renvoyait tous deux à leur enfance et à la lecture du Club des cinq et du Clan des sept d'Enid Blyton. Il n'en fallait guère davantage pour tomber sous le charme de belle venue de Baltique. Au fil des heures, ils vont devenir très complices. Jusqu'à ce tête-à-tête dans la bibliothèque: «J'avais envie de déposer ma main sur son bras, mais je n'osais entreprendre le moindre geste. Il y a toujours un moment, dans les relations amoureuses, où, même si on sait que nos corps vont finir par se rapprocher, qu'une étreinte va survenir, qu'un baiser ne va pas tarder à être échangé, on demeure dans l'attente, et rien ne se passe si on ne prend pas la décision d'agir. Même si on sait l'un et l'autre que quelque chose de tendre est susceptible de survenir à tout instant, il y a un dernier cap à franchir, qui peut sembler minuscule, et dont on peut même se rendre compte, a posteriori, en se retournant pour revoir la scène dans son souvenir, que ce n'était en réalité qu'un tout petit gué tellement aisé à traverser, mais qui, tant qu'il n'est pas franchi, tant qu'on ne l'a pas passé, demeure un obstacle insurmontable.»
Bien entendu, ce sont les détails de ces moments qui donnent toute sa saveur à ce roman, comme si Jean-Philippe Toussaint à la manière d'un cinéaste, décidait de passer d'un plan général à un gros-plan, de se focaliser sur ces moments de grâce.
On passe ainsi des couloirs du Palais de Berlaymont, bâtiment emblématique de l'Union européenne où se retrouve tous les thèmes du livre, l'Europe aujourd'hui à la croisée des chemins, mais aussi le fils et son père, tous deux fonctionnaires européens, mais aussi l'architecture puisque la rénovation du bâtiment est confiée à son frère qui a suivi les pas de son arrière-grand-père, Pierre de Groef, qui a construit beaucoup d'immeubles à Bruxelles au début du XXe siècle. Et, comment pourrait-il en être autrement, les femmes. D'abord Diane, sa seconde épouse dont il se sépare, mais dont il nous raconte avec tendresse et sans doute nostalgie la rencontre dans ce temple de la technocratie. Puis sa course effrénée avec Pilar Alcantara lors de l'éruption du volcan Eyjafjöll en 2010. L'occasion aussi de nous faire découvrir un mystérieux souterrain.
Remontant dans le temps, nous irons aussi en Toscane au moment où Jean rencontre Elisabetta, sa première épouse. Contrairement à Diane, elle sera présente aux obsèques avec son fils Alessandro. Encore une occasion de constater combien restent vivaces les émotions. Et d'exprimer des regrets que l'on peut aussi prendre comme un conseil d'ami: «J'aurais peut-être dû faire davantage d'efforts pour essayer de sauver notre amour et prendre le risque d'entamer avec Elisabetta une longue relation suivie, la relation d'une vie, un amour au long cours, quitte à ce qu'il y eût des hauts et des bas, des orages et des disputes (et, sur ce point, je pouvais faire confiance à Elisabetta), mais j'aurais pu ou j'aurais dû avoir cette ambition pour nous, plutôt que, au premier accroc, à la première infidélité, céder à la facilité de nous séparer, abdiquer sans combattre.»


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« Depuis la fin de la Seconde Guerre mondiale, l'Europe a connu deux grands cycles. Un cycle qu'on pourrait dire progressiste, dans le domaine des moeurs et des droits humains, jusqu'à la fin des années 1970, et un cycle libéral, qui a duré peu ou prou jusqu'à la crise financière de 2008. J'ai l'impression qu'aujourd'hui, avec le Brexit, nous venons d'entrer dans un troisième cycle, un cycle populiste, qui se traduit par une défiance nouvelle envers les élites et la démocratie représentative. »
En regard de cette analyse des 70 dernières années par Jean-Philippe Toussaint, le titre de son roman Les émotions prend une connotation négative : ces émotions sont en effet celles, incontrôlables, qui régissent le monde dans le cycle populiste, à l'heure des fake news, de la manipulation 2.0 et ses périls pour la démocratie. de fait, l'élection de Trump et le Brexit affectent fortement le narrateur et héros du roman, Jean Destrez, un haut fonctionnaire européen élevé dans le culte du projet de construction européenne – un projet se voulant reposer sur l'intelligence, la raison et la culture européenne, (références, d'Erasme à Zweig, à l'appui) : bref, l'opposé de ces émotions irréfléchies et leurs dangereux excès.
Mais ce narrateur et héros incarne lui-même assez mal ce beau projet européen : certes, en tant que fonctionnaire, il fait de son mieux son travail, mais l'Europe qu'il nous fait connaître à travers son expérience n'est pas tant celle d'Erasme ou de Zweig ; et c'est plutôt à Kafka que l'on pense, tant pendant la visite des méandres du chantier de rénovation du bâtiment Berlaymont, siège de la Commission européenne, qu'en découvrant le fonctionnement bruxellois : toute la troisième partie du roman, c'est le château en version accélérée ! – et au moins K avait-il le loisir de son temps…
Même à titre personnel, Jean Destrez incarne mal l'homme de modération et de maîtrise de soi : hanté par ses deux divorces, par la figure imposante de son père (ou encore par la place qu'a su prendre son frère, architecte de renom), c'est un homme que l'on sent affectivement fragile, en proie à ses propres émotions… Mais celles-ci ne sont, du reste, pas toutes négatives : c'est, dans la première partie du livre, l'émotion charmante et douce d'une rencontre – elle ne tient pas toutes ses promesses, mais qu'importe, une rencontre peut en cacher une autre (on apprécie au passage tout l'humour de JP Toussaint)… Ce sont, dans la deuxième partie du roman, de singulières décompensations que Jean Detrez est amené à vivre avec ses première et seconde femmes (on retrouve alors le Toussaint conteur des situations étranges que l'on a aimé dans L'appareil photo). C'est enfin, dans la troisième partie, l'émotion collective de la crise aérienne de 2010, vécue dans toute sa fièvre parce qu'il est au coeur des cellules de crise…
Où Toussaint veut-il nous mener, dans ce nouveau cycle engagé avec La clé USB ? le second opus intitulé Les émotions ne nous le laisse pas encore discerner très clairement, mais à tout le moins on y retrouve avec plaisir la délicatesse de JP Toussaint à saisir les instants fugaces, moments magiques ou situations insolites…
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Rappelez-vous dans La clé USB, Jean-Yves Detrez haut fonctionnaire de la Commission européenne rentrait de Chine où il s'était fait embarquer dans une sombre histoire de bitcoins (d'autant plus sombre que j'ai complètement oublié l'intrigue mais c'était vraiment très très bien…) Bref, nous le retrouvons ici dans différents lieux. Tiens, d'ailleurs, si vous cherchez un sujet de thèse (ça arrive tous les jours, hein, de chercher un sujet de thèse ...), en voici un : « Espace public/espace privé dans l'oeuvre de J.P Toussaint ». En effet, ce qui nous est donné à voir dans le deuxième opus de cette future trilogie, ce sont des lieux (publics surtout) où s'inscrit une histoire intime, celle du narrateur.
En effet, outre la Commission européenne (le chantier du Berlaymont) que nous explorons lors d'une visite guidée de l'architecte Pierre Detrez, frère du narrateur, nous découvrons le château d'Hartwell House (belle demeure datant en partie du XIe siècle, située dans le Buckinghamshire au nord-ouest de Londres) pour un séminaire autour de la prospective (eh oui, certains sont payés pour lire dans une boule de cristal afin d'élaborer des scénarios plus ou moins plausibles…), nous déambulons aussi bien entendu dans les rues de Bruxelles, rue de Belle-Vue, avenue Émile Duray, place du Châtelain… (Tiens, finalement, il y aurait bien un petit côté modianesque dans ce roman…) En tout cas, nous est donnée à explorer une véritable géographie toussaintienne (?) tout à fait passionnante...
En effet, ce qui peut sembler paradoxal, c'est que les émotions naissent et s'épanouissent dans un espace public qui, par définition, est organisé, structuré, codifié, et c'est notamment en franchissant légèrement les limites de cet espace public que surviennent lesdites émotions (notamment à travers des rencontres amoureuses) : on court dans les sous-sols labyrinthiques de la Commission européenne, on marche la nuit tombée dans les sous-bois de Hartwell House, on se caresse la main sur un coin de table de la cafétéria de l'Eurocontrole en pleine crise de volcan islandais en furie.
En revanche, l'espace privé est étroitement lié à la mort de l'amour - c'est le lieu où l'on étouffe, où on ne supporte plus la promiscuité des corps - mais aussi à la mort tout court, celle du père, au coeur même du roman. On observe ainsi une espèce d'inversion : le sentiment tire son origine et sa force dans un espace où il n'a pas lieu d'être (l'espace public). Au contraire, il s'affaiblit et finit par s'évanouir totalement dans un espace où il aurait a priori tout pour se fortifier (l'espace privé). On a l'impression que chez Toussaint l'espace public porte en lui des promesses, un avenir possible contrairement à l'espace privé (la chambre, la salle de bains) qui pousse vers la destruction, le néant. En effet, l'appartement du couple subit une inondation… Tout prend l'eau. Et d'ailleurs leur première union intime a lieu dans une baignoire de salle de bains (ce qui n'est pas vraiment bon signe chez Toussaint.) Tout se passe comme si l'espace confiné, retiré du monde, l'espace pascalien s'autodétruisait de lui-même, comme s'il lui manquait une ouverture pour respirer, de la place pour s'épanouir et se développer...
En tout cas, comme le fait remarquer le narrateur, englué dans ses histoires de prospective ou de volcan islandais Eyjafjöll provoquant un blocage de tout l'espace aérien européen qu'il faut choisir de prolonger ou non, « si dans ma vie professionnelle, j'avais une maîtrise incontestable de l'avenir, je me rendais compte que, depuis quelques temps, je ne maîtrisais plus rien dans ma vie privée. »
Il y a donc un espace que l'on maîtrise (celui du travail) et un espace qui nous échappe (celui du coeur). Et Toussaint joue des contrastes entre ces deux espaces, notamment lorsqu'ils se télescopent lors d'une rencontre intime dans le cadre du travail, d'un coup de fil privé au bureau ou bien lorsque l'émotion privée s'empare d'un haut fonctionnaire tandis qu'il fait un discours public.
Si l'on peut (j'ose l'espérer) tirer quelques bénéfices de la prospective publique, elle semble totalement inefficace lorsqu'elle touche le domaine privé (même si la rencontre avec sa femme Diane a commencé sur un « - Comment ? » qui annonçait déjà une communication un peu compliquée...)
Encore une fois, chez Toussaint, l'humain échappe aux codes, aux grilles de contrôle, aux tableaux de prospective. Il est inattendu, surprenant, souvent imprévisible, parfois indéchiffrable, n'obéit ni aux codes ni à la raison encore moins à la logique. Et surtout, il est capable de créer un espace de liberté précisément là où c'est interdit. D'ailleurs les corps semblent parfois agir sans aucun sens du rationnel, de la cohérence ou de la sagesse, ils ne se plient à aucune loi, échappent à tout commandement, à la moindre prévision. Ils sont le vacillement, le mouvement, le pas de côté (n'oublions pas que la racine d'émotion est « movere » qui signifie « mouvoir »).
Hors du temps et hors de l'espace, ils sont un espace à eux tout seuls, retranchement ultime où il est peut-être encore possible d'accéder au bonheur... Une dernière forme de romantisme désespéré (comme chez Houellebecq), espèce de bouée de sauvetage hélas, déjà percée...
Par ailleurs, au coeur même du roman, la mort du père, homme public, européen convaincu, viscéralement humaniste, intervient précisément au moment où les sphères publique, politique, sociale, religieuse s'écroulent, se fracassent : 2016, le referendum du Brexit, l'élection de Trump, la brutale montée des populismes, les attentats. Les émotions publiques grossières, vulgaires et « dangereuses » s'emparent de la raison : on crie, on tweete, on s'insulte, on se frappe, on tue… Elles envahissent l'espace public mais elles ne sont que la caricature des vraies émotions qui « sont intimes et silencieuses », extrêmement ténues, fugaces, si fragiles et si précieuses.
Le père meurt parce qu'il n'a plus sa place dans un monde sans repères.
Juste deux mots encore : Toussaint est bien le seul auteur avec Carrère (on pourrait d'ailleurs les rapprocher sur bien des points) à être capable de me passionner avec des histoires de blockchain, de bitcoin ou de prospective… S'il y a du Carrère dans Toussaint, on y respire aussi Proust parfois au détour d'une phrase sur le temps… C'est vraiment un très grand conteur parce que, quand même, (tenez bon, ce sont les derniers mots), quelle écriture, quelle magnifique et incroyable fluidité …
Lien : http://lireaulit.blogspot.fr/
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Je suis décidément partagée par ce livre d'où les 3 étoiles malgré une belle écriture, un style que j'apprécie chez cet écrivain.
Commençons par ce qui m'a plu. Deuxième cycle romanesque de Jean-Philippe Toussaint, "les Émotions" suit La clé USB. Nous retrouvons Jean Detrez, fonctionnaire européen spécialiste de la prospective. Il est plaisant de voir l'antagonisme entre la rigueur quasi scientifique avec laquelle le narrateur travaille sur l'avenir et l'imprévisibilité de sa vie personnelle, voire professionnelle. L'imprévu advient avec le référendum sur le Brexit, l'élection de Trump, les séparations d'avec ses deux femmes, la mort de son père, l'éruption du volcan islandais Eyjafjöll en 2010 et le summum : cette incroyable et sensuelle nuit passée avec une inconnue.
Et pourtant...pourtant je sais qu'une fois le livre terminé, dans quelques semaines, quelques mois, cette histoire se sera estompée dans mon esprit. Je le sens. Ce livre ne m'a pas marqué au point d'y penser régulièrement comme peuvent le faire ces livres devenus mes compagnons...Serait-ce la volonté, marquée je trouve, de montrer la Commission européenne plus humaine que nous la ressentons ? Ai-je trouvé la description de ses rouages un peu pesante ? Peut-être.
En tout cas, il fait bien écho au livre précédent et c'est sans doute tout le cycle romanesque dans son ensemble que je vais devoir considérer et non le livre seul. Hâte de lire la suite et de me faire une idée plus globale !
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Après La clé USB, l'an dernier, ce deuxième volume du nouveau cycle romanesque de Jean-Philippe Toussaint, centré autour du personnage de Jean Detrez, est un enchantement ! On retrouve notre protagoniste, spécialiste de prospective à la Commission européenne, à son retour d'Asie, suite à la mort de son père, événements dont il était question à la fin du précédent récit. L'enterrement du père donnera d'ailleurs place à certaines des scènes les plus touchantes, sinon, disons-le, même si l'adjectif semble, dans le contexte, déplacé, les plus réjouissantes du roman. Mais le récit, loin de suivre un fil chronologique, aime, comme souvent chez Jean-Philippe Toussaint, les digressions, et emprunte des chemins de traverse, guidé par le retour d'un souvenir ou une association d'idées. Jean Detrez retrouve sur l'écran de son téléphone la photo d'une jeune femme, témoignage flou d'une aventure d'une nuit, au cours d'un séminaire de prospective en Angleterre. Ce séminaire, comme l'évocation, plus loin, de la crise du transport aérien lors de l'éruption d'un volcan islandais en 2010 (crise à la résolution de laquelle notre fonctionnaire européen se trouve associé, à cause de ses responsabilités dans un précédent poste), offre l'occasion d'un développement sur le travail de prospective (avec des références précises à l'actualité, qu'il s'agisse du pouvoir effrayant de Donald Trump, de l'épuisement des ressources ou des flux migratoires), une manière qu'affectionne l'écrivain d'ancrer sa fiction dans le réel, mais en même temps, ce séminaire est le lieu d'une intrigue amoureuse, dont Jean-Philippe Toussaint décrit avec humour et finesse les tours et détours, et le point de départ d'une réflexion sur les accidents de l'existence et leur résonance dans nos vies. le vrai sujet du texte, c'est, en effet, ces «émotions» qui lui donnent son titre. Sexe et amour, fuite du temps et mort, inquiétude récurrente, aussi, dont Jean Detrez découvre qu'elle est l'un des principaux héritages de son père, Jean-Philippe Toussaint a toujours su en parler avec les mots les plus justes, une forme ici d'attention très proustienne, ciselant une scène érotique ou un tableau de larmes avec la même délicatesse, avant d'y ajouter, parfois, le sel de son ironie. L'intelligence du regard et l'élégance de l'écriture charment son lecteur, et si l'écrivain fait à plusieurs reprises, dans ce roman, allusion à Stefan Zweig, à sa disparition au moment où le monde basculait dans ce pire qu'il avait annoncé (comme le père de son personnage, Jean Detrez, meurt lui-même, presque heureusement, au moment où triomphe, avec Trump, ce populisme qu'il sentait venir en le détestant), on se met à espérer qu'une telle exigence littéraire, une pareille «émotion», oui, ce plaisir du texte partagé par l'auteur et son lecteur, perdurent, dans cette époque souvent séduite par la facilité. Tant qu'il y aura Toussaint…
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critiques presse (3)
FocusLeVif
01 décembre 2020
Dans un décor de mondialisation, sur fond de crises européennes, Toussaint signe une partition virtuose sur comment nos vies échappent aux prévisions.
Lire la critique sur le site : FocusLeVif
LesInrocks
22 septembre 2020
Jean-Philippe Toussaint poursuit un nouveau cycle romanesque commencé avec La Clé USB et dresse le portrait d’un homme qui fait l’expérience de l’imprévisibilité.
Lire la critique sur le site : LesInrocks
LaLibreBelgique
16 septembre 2020
Le roman de Jean-Philippe Toussaint analyse comment l’essentiel de notre vie échappe à nos prévisions.
Lire la critique sur le site : LaLibreBelgique
Citations et extraits (21) Voir plus Ajouter une citation
INCIPIT
À Bruxelles, la journée avait été caniculaire. Nous vivions avec Diane les dernières heures de notre vie commune. Depuis quelques semaines, nous ne nous parlions plus. Notre mariage, qui avait duré dix ans, s’achevait dans la froideur et le ressentiment. C’était le 23 juin 2016, le jour du référendum sur le Brexit au Royaume-Uni. Dans la soirée, un orage très violent a éclaté à Bruxelles, accompagné de pluies diluviennes. Je me revois dans le salon de l’appartement de la rue de Belle-Vue en train de regarder une pluie torrentielle tomber derrière la baie vitrée. Les branches des saules se tordaient sous le vent. Un éclair, parfois, zébrait le ciel, et on entendait les grondements du tonnerre au loin par-delà les étangs d’Ixelles. Diane était assise derrière moi dans le salon assombri par l’orage, elle feuilletait en silence une revue dans le canapé. Elle ne tarda pas à quitter la pièce, et je l’entendis s’éloigner dans le couloir jusqu’à la chambre à coucher. Ce fut notre dernière soirée ensemble dans l’appartement de la rue de Belle-Vue (ma décision, à cette heure, était déjà prise de quitter l’appartement et de trouver un nouveau logement à la rentrée).
Je n’ai appris le résultat du référendum britannique que le lendemain en écoutant la radio. J’avais un rendez-vous à la Commission européenne en début de matinée. À la fin de ma réunion, en sortant du Berlaymont, j’ai traversé la rue de la Loi avec quelques collègues pour rejoindre le bâtiment Juste Lipse, qui se trouve de l’autre côté de la rue. Le Juste Lipse était encore l’unique siège du Conseil de l’Europe à l’époque, le nouveau bâtiment « Europa » construit par Philippe Samyn — le fameux cube de verre évidé qui luit pendant la nuit au cœur du quartier européen — n’est entré en service qu’au début de l’année suivante. Il y avait beaucoup plus d’animation que d’habitude dans le hall du Juste Lipse. On croisait des équipes de télévision, des dizaines de journalistes se pressaient vers la salle de presse. J’ai encore présent à l’esprit l’entrée en scène du président du Conseil européen ce jour-là. Précédé d’un bouillonnement de conseillers et de membres des services de sécurité, je revois sa silhouette décidée s’avancer sur le tapis rouge en longeant la rangée de drapeaux européens. Son visage était grave, l’attitude solennelle. Il monta à la tribune et commença son discours avec une émotion inhabituelle. Je suis pleinement conscient de la gravité, et même de l’ampleur dramatique de l’heure que nous vivons. C’est un moment historique, mais ce n’est sûrement pas le moment d’avoir des réactions hystériques. Les dernières années ont été les plus difficiles de notre histoire, mais je tiens à rassurer chacun, nous sommes prêts à affronter ce scénario négatif, et je pense toujours à ce que me disait mon père : « Ce qui ne te tue pas te rend plus fort. » Je regardais le président du Conseil européen s’exprimer à la tribune. Au moment où il avait évoqué son père, ses yeux furent parcourus d’un fugitif voile de timidité, qui ne dura qu’un instant. Il esquissa un sourire, le sourire d’un homme adulte qui évoque son père en public, avec ce que cela peut avoir de pudeur, de respect et de piété filiale, et je ne pus m’empêcher de songer à mon père, à mon propre père, Jean-Yves Detrez, qui avait été commissaire européen dans le passé. Depuis que j’avais appris la victoire du « Leave » au référendum britannique, je ne cessais de penser à ce qu’il devait ressentir. Son monde, le monde qu’il avait toujours connu, était en train de vaciller. Les crises s’accumulaient en Europe, les populismes montaient partout inexorablement. L’humanisme, que mon père avait toujours défendu avec zèle, semblait plus mal en point que jamais. Le Brexit n’était que la dernière manifestation, la plus spectaculaire, la plus désagréablement inattendue, de ce dépérissement délétère.
Jusqu’à quel point peut-on oublier quelque chose qui nous est arrivé ? Je ne me serais peut-être jamais posé la question, si, quelques mois plus tard, je n’avais retrouvé une photo compromettante dans mon téléphone. C’était dans un Thalys, j’avais assisté à une réunion de prospective à Paris dans la matinée, et je revenais à Bruxelles le soir même. J’avais fait l’aller-retour dans la journée. J’étais fatigué, la journée avait été longue. Je me laissais bercer par le train. Calé au fond de mon siège, je faisais défiler distraitement du doigt les images de mon téléphone, quand je suis tombé par hasard sur la photo d’une jeune femme à moitié dénudée. La photo, presque floue, avait été prise l’été précédent dans une chambre d’hôtel pendant que je participais à une retraite de prospective à Hartwell House, près de Londres. Je ne me souvenais plus des circonstances exactes dans lesquelles la photo avait été prise. Je me souvenais seulement d’avoir passé la fin de la soirée avec cette jeune femme et d’avoir emprunté les escaliers majestueux d’Hartwell House avec elle très tard dans la nuit, mais je ne me souvenais plus ensuite de ce qui s’était passé, ou plutôt, à partir d’un certain point, mes souvenirs se dissipaient dans les brumes d’une fin de soirée trop arrosée. Nul doute pourtant que c’était bien dans une chambre d’hôtel de la résidence d’Hartwell House que la photo avait été prise, et par qui d’autre que moi puisque c’était dans mon propre téléphone que je venais d’en retrouver la trace, à ma grande surprise et à ma grande gêne. Je ne gardais pourtant aucun souvenir qu’il s’était passé quelque chose d’intime avec cette jeune femme cette nuit-là, même si la photo semblait apporter un démenti visuel au témoignage défaillant de ma mémoire. Il y avait, à l’évidence, une contradiction entre ce que me disaient mes souvenirs et ce que montrait la photo.
Depuis plusieurs années, mon ami et collègue Peter Atkins organisait les Rencontres d’Hartwell House, des retraites de prospective, où les participants, responsables politiques, analystes et experts internationaux, se réunissent pendant une semaine dans le cadre somptueux du château d’Hartwell pour imaginer l’avenir ensemble. L’avenir, pour moi, qui le côtoyais au quotidien dans le cadre de mes activités à la Commission européenne, était une notion parfaitement abstraite, que j’étais capable de modéliser et de faire parler avec des chiffres. Mais si, dans ma vie professionnelle, j’avais une maîtrise incontestable de l’avenir, je me rendais compte que, depuis quelque temps, je ne maîtrisais plus rien dans ma vie privée. Mon mariage avec Diane était en train de sombrer, nous étions entrés dans une crise conjugale dont je ne voyais plus l’issue. L’avenir, pour moi, était devenu irrémédiablement opaque. Je ne disposais pas des outils appropriés pour imaginer ce que nous allions devenir. Moi qui me pensais si performant dans l’exercice de mes fonctions, j’étais complètement démuni dans la conduite de mon histoire d’amour avec Diane. À croire que la prospective ne nous est d’aucun secours dans les affaires de cœur — ou qu’en amour, il n’y a pas de méthode.
Lorsque, dans les années 1990, j’ai commencé à m’intéresser de manière professionnelle à l’avenir, j’ai très vite compris qu’il y avait une différence abyssale entre deux notions qui peuvent paraître voisines, voire similaires, mais qui ne sont pas de même nature, l’avenir public et l’avenir privé. La connaissance, ou l’exploration, de l’avenir public, qui est au cœur de mon activité professionnelle, relève d’une discipline à part entière, au même titre que les statistiques ou la démographie, avec son ensemble de techniques et d’outils méthodologiques spécifiques. Lorsqu’elle est pratiquée dans les règles de l’art, la prospective permet de repérer les principales métamorphoses qui couvent à bas bruit dans la société avant qu’elles ne s’expriment au grand jour, ce qui nous permet d’anticiper les grandes évolutions à venir. Alors que la volonté, ou le fantasme, de connaître son propre avenir relève du spiritisme ou de la voyance. C’est alors à une boule de cristal ou aux cartes du tarot qu’il faut avoir recours pour lire l’avenir. Mais a-t-on toujours envie de savoir ce que nous réservent les prochains jours ou les prochaines semaines, a-t-on toujours envie de savoir ce que nous deviendrons dans un futur plus ou moins éloigné, quand on sait que ce qui peut nous arriver de plus stupéfiant, le matin, quand on se lève, c’est d’apprendre qu’on va mourir dans la journée ou qu’on va vivre une nouvelle aventure amoureuse ou sexuelle dans les heures qui viennent. Le sexe et la mort, rien ne peut nous émouvoir davantage, quand il s’agit de nous-même.
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Je la regardais, et je pensais que quelque chose arrivait, quelque chose m’arrive, me disais-je. C’est là une singulière vertu de l’amour ou du sentiment amoureux de se rendre compte que ce qui arrive nous arrive à nous-même et à personne d’autre — c’est à moi, à moi que cette chose arrive —, que le regard adressé, le geste esquissé, l’est pour nous et pour nous seul, et le fort sentiment d’élection que cette vérité nous procure nous apporte un intense bien-être qui fait disparaître instantanément tout le reste, la fatigue et les soucis professionnels, les mauvais pressentiments et la hantise. p. 227
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C'est là une singulière vertu de l'amour ou du sentiment amoureux de se rendre compte que ce qui arrive nous arrive à nous même et à personne d'autre - c'est à moi, à moi que cette chose arrive - que le regard adressé, le geste esquissé, l'est pour nous et pour nous seul, et le fort sentiment d'élection que cette vérité nous procure nous apporte un intense bien-être qui fait disparaître instantanément tout le reste, la fatigue et les soucis professionnels, les mauvais pressentiments et la hantise.
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À l’été 2016, j’ai assisté à la retraite de prospective organisée par mon ami Peter Atkins à Hartwell House. L’avenir, durant ces quelques jours, fut au centre de toutes nos attentions. Nous l’entourions de nos sollicitudes expertes. Nous le sondions, par petits groupes, autour de tables de réunion recouvertes de feutrine verte. Nous l’auscultions, avec d’infinies précautions, pour construire, sous forme de scénarios exploratoires, des représentations de différents futurs possibles. Je connaissais Peter Atkins depuis toujours, cela faisait près de vingt ans que nous hantions ensemble les terras incognitas de la prospective stratégique et que nous explorions ses dernières steppes indéfrichées. Au début des années 2000, Peter avait rejoint à Londres l’équipe du Government Chief Scientific Adviser, qui conseille le Premier ministre britannique sur les questions de technologie. Il avait été chargé de créer la première cellule de prospective stratégique au sein de cette agence gouvernementale. C’est ainsi, sur le tas, que Peter s’était formé aux techniques les plus sophistiquées de la discipline et qu’il avait fait la connaissance de la plupart des hommes politiques, responsables militaires et hauts fonctionnaires qui travaillent dans le domaine en Angleterre. Ensuite, des experts étrangers, qui envisageaient de créer leur propre cellule de prospective dans leur pays, étaient venus faire des voyages d’études à Londres pour voir comment ils procédaient, et c’est ainsi que Peter était devenu une personnalité incontournable dans le petit monde très fermé de la prospective stratégique. En 2011, Peter avait quitté son poste dans la haute administration britannique pour s’établir à son propre compte, et il avait fondé l’association des Rencontres d’Hartwell House. L’événement phare de l’association était la retraite stratégique estivale. Dès la première session, Peter avait instauré l’idée originale du live challenge. Le principe était d’avoir chaque année un défi à relever en temps réel, un sujet d’intérêt général sur lequel tous les participants pourraient travailler pendant les cinq jours de la retraite. En 2016, les Rencontres d’Hartwell House s’étaient tenues début juillet, soit seulement une dizaine de jours après le référendum sur le Brexit.
Le lundi 4 juillet 2016, j’ai pris le train à Bruxelles aux premières heures pour rejoindre Londres. J’avais rendez-vous à la gare du Midi avec mon ami Viswanathan Ajit Pai, qui travaille avec moi à la Commission européenne. Viswanathan était lui aussi de la partie pour Hartwell House et nous avions décidé de faire le voyage ensemble. Dans l’Eurostar, nous nous étions installés dans un carré de sièges vides et nous avions pris nos aises, déployant nos journaux et posant nos ordinateurs sur les tablettes. Viswanathan, confortablement installé au fond de son siège, avait ouvert le Financial Times, dont il tournait précautionneusement les pages saumonées dans un froissement feutré de papier journal, délicat murmure matinal bientôt voué à disparaître avec le déclin annoncé des journaux papier. Peu après le départ, un très bon petit déjeuner nous avait été servi à la place. Viswanathan était contrarié comme moi par le résultat du référendum britannique, mais il ne semblait pas disposé à se laisser abattre. Au contraire, appréciant le petit déjeuner, se régalant des viennoiseries et des yaourts aux fruits (le sien et le mien, que je lui avais cédé bien volontiers), il se lança plutôt dans un vibrant hommage rétrospectif de l’Angleterre qu’il avait connue pendant ses années d’études à Cambridge au début des années 1990. Tu sais, à l’époque, c’était vraiment un environnement très stimulant, disait-il, une ambiance de libre pensée, de curiosité intellectuelle, on parlait de new internationalism. À ce moment-là, la Grande-Bretagne était ouverte sur les autres cultures. C’était le moment où on commençait à bien manger en Angleterre, avec de bons vins, des fromages affinés, de superbes huiles d’olive. La société anglaise respirait différemment, il y avait une ouverture extraordinaire sur le monde. Selon Viswanathan, cela avait commencé à se dégrader à partir du début des années 2000, et la crise financière de 2008 n’avait rien arrangé. À ce début de récession s’étaient greffés une rhétorique anti-migrants et le déchaînement de la presse populaire contre l’Europe. Si on ajoute à cela beaucoup de cynisme et deux ou trois apprentis sorciers, il ne fallait pas chercher beaucoup plus loin les raisons du Brexit, selon Viswanathan (et il finit pensivement mon yaourt à la cerise en jetant un coup d’œil par la vitre du train).
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Tout s’était passé comme les autres fois ce jour-là, et j’étais reparti prendre mon bus. Il s’en était fallu d’un rien qu’il n’arrivât jamais rien entre nous. C’est pourtant ce jour-là que nous nous étions embrassés pour la première fois. Par la suite, en repensant à cet après-midi, j’ai toujours imaginé qu’Alessandro était au balcon de cette scène, et qu’il nous observait depuis les limbes, tel un angelot accoudé à un nuage, en se demandant, en fonction de l’issue de la scène, si, dans les années à venir, il allait naître ou pas. J’imaginais Alessandro au-dessus de nous, penché à sa balustrade céleste comme un de ces chérubins ailés de Raphaël, torse nu et joufflu, qu’on trouve au bas de la Madone Sixtine, qui suivait avec attention les différentes étapes de mon manège autour de sa future mère. Sans doute Alessandro a-t-il dû penser que c’était bien mal engagé au moment où j’avais quitté la chapelle et qu’il m’avait vu m’éloigner sur la route pour aller reprendre le bus. Je me suis d’ailleurs demandé par la suite ce qui serait advenu si je n’avais pas raté le bus ce jour-là. Ce sont souvent d’infimes moments qui sont décisifs dans notre vie, qui ne tiennent à rien – un choix, une impulsion, un hasard, un retard – et dont on perçoit rarement l’enjeu au moment où on les vit. Un rien, pourtant, à ce moment-là, peut faire basculer notre destin. Ayant raté le bus, j’ai donc repris le chemin de la chapelle. Lorsque je repassai la porte, Elisabetta m’attendait en haut de son échafaudage. Tu es revenu, me dit-elle en souriant, comme si elle n’avait jamais douté de mon retour, comme si elle avait toujours su que j’allais revenir, et elle me tendit la main à distance. Je la rejoignis sur l’échafaudage, j’escaladai avec prudence la structure tubulaire et m’approchai d’elle sur la passerelle. Il y avait de la gravité dans son regard. Je luis pris doucement la main, et nous échangeâmes notre premier baiser là sur cet échafaudage, à un mètre cinquante du sol, sans autre témoin que les oiseaux du saint François lacunaire, aux couleurs pâles et délavées, de la fresque qu’elle était en train de restaurer. (pp.165-166)
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Philippe de la librairie le Divan partage ses lectures de la Rentrée littéraire 2023 "Une rentrée littéraire sans Jean-Philippe Toussaint c'est moins bien, donc là on en a deux, c'est formidable."
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