À Dimitri
Ce jour-la
Personne ne l’avait vue remonter la ruelle
Franchir le seuil de ta maison
Se glisser sous la treille
Traverser la cour
Puis s’asseoir
Tout près
De toi
Personne ne l’a entendue frapper aux vitres
Comme une mendiante égarée
Personne n’a vue la dernière hirondelle de l’été
S’envoler du taillis de ta barbe
Personne n’a su pourquoi le petit chat tigre
s’était réfugié si haut dans l’arbre
Personne n’a pu saisir le sac de blé
Qui se renversait sur la terre
Personne ne la voyait tenir la vieille cloche de la chapelle
Dans une main, ta vie dans l’autre
Quand la mort est venue te prendre
Il n’y avait pas une ombre, pas une tache
Pas une pierre éboulée sur les murs de ta maison
Mais
Le grand drap de la lumière
Qui claquera longtemps, longtemps
Sur le fil tendu de nos vies.
// Bruno Doucey
La prophétie intime…
extrait 2
Au fond de la nuit, baguée de mes bleus
Mon corps crypte ses métaphores.
Chair où s’esquisse ma voix.
Naïve, vaste et chère inquiétude
Tendre reptation des sorts solides et sans salut.
À pudeur de paupières
J’aperçois la vocation du vitrail.
Lente épousée scellée d’attentes
altérée d’altitudes.
Figure de femme
Chuchotée au chant qui te vêt
Je consens à ton rêve comme un poème pur.
// Anne de Commines (1966-)
Le prétexte
Il y avait les dunes.
La maison qui restait toute seule.
La mer qui glissait sur une plage, toute à elle
et les tamaris qui poussaient éperdument.
Il y avait la lune plus pleine de jour en jour
jusqu’à être rouge comme une boule de glace
qui m’appelait à la goûter.
Et le vent qui amenait le sable aux visages
sable sans poids, doré, humide et collant à la peau.
Et toi qui n’étais pas là, mais remplissais les chambres
d’un amour éperdu comme les tamaris.
Tu n’étais pas là.
Mais tu étais le prétexte.
//Lily Michaelides
/Traduit du grec par Michel Volkovitch
La prophétie intime…
extrait 1
La prophétie intime
Un don fertile a précédé ce corps
Je récite son silence
Pour épure de toute histoire.
Son écho s’est poli a la peau qui l’ogive
l’arque et le désigne.
Je vous conterai ma distance.
Mon désir,
migrant infidèle
tu convoques ma forme
et consoles l’espèce de l’homme.
…
// Anne de Commines (1966-)