Si l'on suit la pensée de Mitchell Hundred, qui prétend que la publication ininterrompue des comics les empêche de devenir des tragédies, alors Ex-Machina n'est pas un comics.
Car on atteint bel et bien une fin ici, et que la notion de tragédie y a toute sa place.
Bon, cela n'est pas surprenant non plus. Hundred lui-même nous avait avertis dès le début que ça allait mal se terminer. Il se raconte dans cette série après tout.
Mais il ne nous avait pas dit pour qui ou pour quoi cela allait mal se terminer. Sans trop dévoiler, je dirais que c'est moins pour sa personne que pour ses idéaux. Hundred, en somme, est comme tout homme politique (c'est un ex super-héros devenu maire de New York je rappelle) rattrapé par la « realpolitik » : il a besoin de rester dans le « circuit », et il prend des mesures pour cela. Il n'est pas aussi cynique et ivre de pouvoir que le Frank Underwood de House of Cards, mais il prend des mesures… à contrecoeur.
Mais ses raisons profondes diffèrent de celles des simples politicards. Ici, l'histoire est rattrapé par sa dimension « super-héros », et c'est une machination multiverselle létale pour son plan d'existence qui est à l'origine de sa volonté de grimper la colline du pouvoir. Sans tourner vers quelque chose de magique à la Docteur Strange - on est plus dans une ambiance SF – les horreurs que l'on aperçoit de l'autre côté de la « porte » semblent tout droit sorties de l'esprit de
Mike Mignola ou de celui de
H.P. Lovecraft.
Le récit est toujours aussi violent dans son action tout en conservant un ton humoristique durant les pires batailles, aussi attaché à discuter des problèmes sociaux comme l'interdiction de l'IVG, aussi fascinant et, bien sûr, définitif dans ses aboutissements. Hundred, l'a dit : ce n'est pas un comics, les morts ne ressuscitent pas.
C'est épatant de bout en bout.
Brian K. Vaughan et
Tony Harris m'ont bluffé. J'applaudis.
Et j'espère que la Grande Machine n'apparaîtra jamais dans notre réalité.