Cela faisait longtemps que les romans d'
Erica Waters me faisait de l'oeil. C'est donc avec beaucoup de joie que j'ai appris que les éditions du Chat Noir seraient les premières à traduire l'un de ses romans en français !
Une rivière furieuse est donc paru fin août, sous une splendide couverture de
Mina M.
Lorsque Rochelle disparaît dans la forêt – une réserve sauvage surnommée la Courbe – sa soeur Natasha sombre dans une colère mêlée de désespoir. Si le petit ami abusif de Rochelle lui apparaît comme le coupable désigné, la police, elle, n'en est pas du tout convaincue. Della, qui vit près des bois, est une sorcière, comme sa mère. Une mère désormais monstrueuse, que Della cache dans une prison en ruines, dans la forêt, pour éviter qu'elle ne s'échappe ou ne soit enfermée loin de là. Lorsque Natasha se tourne vers Della pour retrouver Rochelle via un sortilège, les choses vont se compliquer…
Ce roman Young Adult a reçu le prix
Bram Stoker en 2021 et l'on comprend aisément pourquoi à la lecture ! La plume est fluide et addictive, c'est bien simple : je n'ai pas pu lâcher le livre, au point de me coucher tard tant je voulais lire encore un chapitre ! Et pourtant, j'avais rapidement deviné l'identité de qui se cachait derrière la disparition de Rochelle, mais ça ne m'a pas empêchée d'avoir le souffle suspendu. Je précise, d'ailleurs, que l'autrice a glissé des indices subtils ainsi que des fausses pistes. À mon avis, tout le monde ne devinera pas aussi tôt que moi (le fait d'écrire ou de lire beaucoup, et donc d'être attentive aux petits détails, a sans doute joué dans ce « je suis sûre que c'est tel personnage qui a fait le coup ! »). Mais, comme je le disais, le suspense reste malgré tout de mise, car
Erica Waters ne repose pas son intrigue uniquement là-dessus.
Une rivière furieuse, ce n'est pas seulement un thriller fantastique dont les héroïnes sont deux jeunes filles. C'est aussi l'histoire de Natasha et Della, à l'histoire familiale compliquée, qui s'efforcent de soutenir leur famille et, ce faisant, assument des responsabilités bien lourdes pour leur âge : Natasha qui se bat pour retrouver sa soeur, coûte que coûte ; Della qui travaille pour subvenir aux besoins du foyer et qui dissimule sa mère devenue monstre, en dépit du mal qu'elle a fait. Chacune va devoir affronter les conséquences de leurs actes, parfois douloureusement.
C'est aussi l'histoire d'une rencontre explosive entre deux jeunes femmes aux caractères bien marqués. La touche de romance, entre elles deux, est subtile, secondaire, mais apporte une douceur bienvenue à l'histoire somme toute très sombre, ainsi que des échanges des plus piquants entre Natasha et Della.
Une rivière furieuse porte aussi un regard incisif sur la société américaine contemporaine. En filigrane, à coups de quelques phrases percutantes, glissées ici et là,
Erica Waters dénonce le sexisme et le racisme qui infectent les États-Unis : violences policières envers les noirs, la double oppression subie par les femmes noires ou autochtones, les féminicides… Des thèmes qui sous-tendent l'intrigue et lui apportent toute sa densité.
Le sujet de la sorcellerie se marie fort bien avec tout cela, la magie offrant aux femmes une possibilité d'être en position de pouvoir, dans une société qui ne cesse de vouloir les garder sous contrôle.
Une rivière furieuse, c'est donc un roman YA prenant, aux personnages entiers et dont le texte comporte plusieurs couches entremêlées, en faisant un brillant thriller fantastique, énervé et bien dosé. Un coup de coeur, pour ma part, et j'ai d'autant plus hâte de découvrir les autres romans d'
Erica Waters – j'espère d'ailleurs qu'ils seront aussi traduits !
Lecture réalisée dans le cadre du Pumpkin Autumn Challenge, menu Automne de l'étrange, catégorie Sois vent, rêve, cendre et néant, sois nuit, noir, âme et souhait.
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