Je ne connaissais pas
Margaret Yorke. Cette dame, qui fut présidente de l'association « Crime Writer's Association » est née en 1924. Pour goûter son écriture, c'est important de le savoir. Son style ayant un parfum suranné un peu déroutant mais tellement british qu'on y plonge avec plaisir.
Pendant la guerre, Margaret fut bibliothécaire dans un hôpital avant de rejoindre la Royal Navy où elle fit partie de WRNS (!) avant de devenir libraire. Une femme courageuse et déterminée, certainement indépendante et en marge de ce que la société anglaise de l'époque attendait des femmes.
Nina, son personnage principal, voit son univers basculé après 24 ans de mariage. N'ayant jamais travaillé et ayant tout donné à son couple et sa famille, elle se retrouve désoeuvrée et seule alors qu'elle a à peine 43 ans. Sous la plume de
Margaret Yorke, elle va prendre le taureau par les cornes, surmonter appréhensions et craintes et prendre sa vie en main. On sent que l'auteure n'a pas envie d'en faire une femme larmoyante et fragile. Peu à peu, on assistera à la transformation de Nina, prenant des décisions sans l'aide de personne et se lançant dans des entreprises qu'elle ne se serait pas crue capable d'envisager !
J'ai beaucoup aimé ce regard sur la condition de la femme dans ce roman. Il y a Nina, mais aussi Priscilla, la jolie femme ambitieuse a qui tout a toujours réussi ; Heather qui a connu des revers divers mais a toujours fait front et tenu son rang ; enfin Sarah et Jenny, les filles de Nina, chez qui on retrouve des traits de caractère de leur mère.
Une fine observation de la société anglaise et des ses traditions.
En lisant ce roman, je n'ai pu m'empêcher de faire le rapprochement avec l'ambiance des romans d'
Agatha Christie ou les aventures de l'Inspecteur Barnaby. La campagne anglaise proche de Londres, ses manoirs, ses cottages… ; les habitudes britanniques comme la broderie, le thé ; la hiérarchisation de la société ; les oeuvres de bienfaisances ; les commérages ; les balades dans les champs, un labrador sur les talons… tout concourt à vous plonger dans l'atmosphère de l'Angleterre picturale de Constable.
L'intérêt du roman est justement dans ces descriptions de la vie de tous les jours et des personnages, livrant peu à peu leurs petits secrets. Certes, il est question de tueur en série, de jeunes filles assassinées mais l'enquête et l'intrigue ne sont pas au coeur du récit. Elles semblent périphériques à la vie du village de Netherton St Mary où Nina s'est installée et où elle perce petit à petit les secrets des uns et des autres.
Un récit intimiste, une écriture légère et précise comme la broderie anglaise, pour un récit atypique mais combien divertissant.