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Critiques filtrées sur 3 étoiles  
Un court essai de la romancière sur la question de la place des femmes dans la narration, ou comment là aussi elles se sont fait avoir.
Le fond reste ambitieux et érudit même si la romancière a conçu cet essai de manière la plus compréhensible possible pour les non-initiés, car il ne s'agit pas d'un simple essai : celui-ci fait appel à des notions de narratologie et de sémiotique assez complexe. Pour ma part cela m'a rappelé mes études, mais je ne sais pas si des non-initiés ne seraient pas "dépassés" par ce jargon universitaire - et cette vision qui aime tant à couper les cheveux en quatre !
Alice Zeniter y va d'anecdotes personnelles de lectrice et d'universitaire pour avoir un langage le plus proche possible du lecteur, comme s'il s'agissait d'une conversation amicale.

Pour ma part j'ai trouvé la première partie intéressante, d'autant plus que dans mes cours non plus cet aspect favorisant les attributs traditionnellement masculins (le caractère aventurier, persévérant, prompt et prêt à faire face aux dangers pour faire de son parcours une histoire passionnante, etc etc) n'a jamais été soulevé tant l'idée semble couler de soi.
En cela je considère que cette lecture a été enrichissante, même si j'ai trouvé la seconde partie du livre moins bien construite et plus brouillonne.
Quoi qu'il en soit, à une heure où tout est sujet à débat et à polémique pour exister et faire le buzz, il me paraît important de pouvoir accéder à ce type de constat qui ne pousse pas la réflexion intellectuelle au rang de la masturbation et du verbiage verbeux qui envahit la place publique pour le plaisir qu'on parle de soi plus que du contenu.
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"Un livre qui ne soit pas un roman", c'était l'item pour le mois de mai du défi littéraire 2021 lancé par mon amie Sylvie. J'ai choisi le petit essai d'Alice Zeniter "Je suis une fille sans hist♀ire", créé initialement sous la forme de seule-en-scène à la Fabrique (Comédie de Valence), en 2020. J'avoue en tirer un avis mitigé.

Avis mitigé parce que je suis passée un certain temps par la lecture d'ouvrages didactiques, qu'ils soient d'ordre pédagogique ou psychologique, mais que, depuis, mon intérêt s'est porté sur d'autres genres littéraires. Certes ce petit ouvrage n'est pas tout à fait didactique, il est aussi humoristique et j'ai beaucoup ri. Pourtant il me rappelle mes années quatre-vingt – 1980… 😉 – j'étais alors enseignante. Je me rends toutefois compte du changement de vocabulaire qui s'est opéré depuis toutes ces années. A l'époque j'étais "institutrice" et je me souviens particulièrement d'un stage suivi à "l'Ecole Normale", intitulé "l'écrit au CM". Nous avions, comme le fait aujourd'hui l'auteure, travaillé sur le schéma narratif et, notamment dans les contes. Nous avions mis l'accent sur le sujet (ou héros) qui veut quelque chose que nous appelions aussi objet. Dans sa quête (même utilisation) il rencontrait des aides (aujourd'hui appelés adjuvants), mais aussi des obstacles devenus opposants…autre époque, autres termes. Il est vrai que les parents d'élèves ont dans le même temps endossé le costume de géniteurs d'apprenants. Là, c'est la vieille qui parle.

Avis mitigé également parce que je reconnais ne m'être jamais posé la question de la place de la femme dans la littérature. Bon, c'est vrai, Anna Karenine est agaçante, Madame Bovary, ça, c'est moi qui le dis, est plutôt nunuche, et la Princesse de Clèves qui pourrait épouser son amant à la mort de son mari, rentre bêtement dans les ordres. Pour autant, j'ai lu ces romans avec un immense plaisir. Quant au discours politique, il y a bien longtemps que j'en ai compris les rouages.

Mais, cela dit, la belle écriture et l'érudition hors norme de l'auteure, le côté sérieux mêlé aux nombreuses touches d'humour, les éléments typographiques variés, la liste impressionnante des références font de cet essai un écrit particulier, original, nouveau dans le paysage littéraire. Et je suis persuadée que le ton ravira nombre de lecteurs.

Lien : https://memo-emoi.fr
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Malgré mon penchant certain pour le lâcher de détails sur ma vie perso dans mes critiques, je ne crois pas un jour avoir précisé que plus jeune, j'avais commencé des études de Lettres modernes. Que je n'ai pas achevées. Pourquoi évoquer cela ici ? Car il me reste quelques traces de cette brève période. Déjà mon incapacité à lire sans analyser un minimum, même si c'est souvent avec maladresse. Et puis des centres d'intérêt. Ainsi, les mécanismes de la fiction m'ont toujours fascinée et j'ai pas mal d'ouvrages sur la question dans ma bibliothèque. Rajoutons aussi que je suis devenue féministe au fil des années – car oui, je ne l'étais pas avant, je restais aveugle à beaucoup de combats contemporains, je ne m'en excuserais pas d'ailleurs, mais je suis contente d'avoir changé mon regard sur la question-. Ainsi quand j'ai entendu parler de l'ouvrage Je suis une fille sans histoire, qui traitait justement de la place de la femme dans la fiction, tu imagines bien, ami-lecteur, que je ne pouvais pas m'abstenir de le lire…

Avant de commencer à palabrer sur ce que j'ai pensé sur l'ouvrage de madame Zeniter, il me faut donner quelques précisions. Je suis une fille sans histoire est d'abord un « seule-en-scène », présenté en octobre 2020 à la comédie de Valence. Pourquoi à tout prix le rappeler avant même de donner mon avis ? Parce que ça compte beaucoup. L'oralité est présente tout au long du texte, ainsi que l'humour, et on voit combien il s'agit d'accrocher un public. Ce qui n'est en rien problématique mais un lectorat et un public ne se séduisant pas tout à fait de la même manière, je pense important d'en avoir conscience quand on se plonge dans Je suis une fille sans histoire.

L'ouvrage est assez court, une centaine de pages, et plus qu'accessible : point besoin pour en profiter d'avoir des notions de sémiotique ou de stylistique. L'essai ouvre quelques portes ouvertes comme "toute mise en récit est, au moins en partie, de la fiction" et cela reste léger, très léger, avec une vulgarisation à l'extrême. Finalement la dimension orale de Je sis une fille sans histoire recèle en elle-même ses qualités et ses défauts. Qualités tout d'abord. le texte d'Alice Zeniter est une très bonne entrée en matière dans les univers qu'il aborde, l'humour m'a fait sourire – ce qui pour moi est déjà très bien – et les exemples sont très vivants, très imagés. Défauts ensuite. La brièveté du texte ne permet qu'un survol de ce qu'elle avance et les notions abordées sont expliquées de manière assez superficielle, que ce soit le test de Bechdel ou le syndrome de la Schtroumpfette. Je crois qu'il faut prendre Je suis une fille sans histoire soit comme un moment sympa et léger soit comme une petite entrée en matière sur la place des femmes dans la fiction.

Restent deux passages qui m'ont particulièrement intéressée. le premier part de la préhistoire pour montrer que les peintures rupestres étaient déjà une mise en récit car alors qu'entre 65 et 80 % de la nourriture provenaient de la cueillette c'est la chasse qui est représentée. le second aborde la métalapse narrative, c'est à dire « toute intrusion du narrateur extradiégétique dans l'univers diégétique ou inversement » (Genette 1978, 244). Bref, quand les choses sont poreuses, par exemple dans une nouvelle de Cortázar, « Continuité des parcs », où un homme est assassiné par un personnage du roman qu'il lit.

Pour conclure, je dirais que Je suis une fille sans histoire est un bon texte, léger et amusant, qui permet d'aborder des notions complexes sans prise de tête mais qui, je dois bien l'avouer, m'a un peu laissée sur ma faim…
Lien : http://altervorace.canalblog..
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C'est d'abord un texte écrit pour un "seule-en-scène". D'où son oralité travaillée qui fonctionne très bien et rend sa lecture facile. C'est aussi une oeuvre didactique, sans trop de pédanterie, mais avec beaucoup d'humour, ce qui, là aussi, aide à tourner les pages. Alice Zeniter y dit deux choses : primo, il y en a marre de cette trame narrative héritée d'une société patriarcale où un mec-qui-fait-des trucs occupe le devant de la scène et jamais une femme ; secundo, par quoi remplacer cette trame narrative, ben là, c'est plus compliqué et elle ne sait pas vraiment, ce qui a le mérite de la franchise.
Si vous avez envie de vous cultiver à bon compte en riant un peu, n'hésitez pas. Vous apprendrez ce qu'est le schéma narratif habituellement utilisé dans les oeuvres de fiction depuis Aristote et sa Poétique, vous aurez droit à un rappel de sémiotique saussurienne, et vous vous délecterez de nombreuses références grand public qui vous permettront de tout bien comprendre.

Si vous pensez qu'Alice a du talent, mais qu'elle n'est pas honnête-honnête, un peu autocentrée et très dans son époque, genre "je déteste pas les hommes, mais ils ont suffisamment pris leur pied depuis les chasseurs-cueilleurs, alors s'ils pouvaient s'invisibiliser un peu pour que j'existe... euh, pardon, pour que nous les femmes nous existions..." eh bien, passez votre chemin et lisez plutôt L'Art de perdre, le roman qui l'a fait connaître.

Ne vous inquiétez pas, j'argumente. Une phrase comme "Parce que je n'en peux plus des récits de chasseurs, des récits d'hommes remarquables qui font des trucs, des récits répétés en boucle des dominants, des récits triangulaires, des récits qui invisibilisent" peut vous interroger sur le type de littérature qu'Alice lit. Vraiment, la littérature francophone depuis le Nouveau roman, ce sont ces récits-là ? Très franchement, le mec-qui-fait-des-trucs, même remarquables, ne tient plus la corde depuis les années 50 et l'un des reproches adressé à la littérature hexagonale des années 90-2000 a été la disparition du récit classique - le fameux schéma narratif d'Aristote - au profit d'une littérature auto-centrée, souvent de non-fiction, du genre "moi et mes émois". Sérieusement Alice, depuis Clément Marot et Maurice Scève, que tu cites comme suppôts d'une littérature patriarcale, ce qui n'est pas difficile, vu que le premier écrit à la fin du Moyen-Âge et le second pendant la Renaissance - là t'es franchement déloyale, même si c'est pour les besoins de la cause -, on a fait un peu de chemin, non, tu crois pas ? le XIXème siècle, c'était hier, pas aujourd'hui.

Par ailleurs, quand tu écris "J'estime qu'en gros, il est temps que les hommes ferment leur gueule", qui n'est pas de toi, mais que tu t'appropries, ben, t'es un peu décevante : remplacer la domination masculine par une autre domination où l'on sent légèrement pointer le ressentiment, c'est pas joli-joli, Alice. Mais, c'est très tendance, je te l'accorde.

Enfin, quand tu décris le désappointement qui était le tien à l'adolescence de ne pas ressembler au modèle de la femme idéale, parce que tu étais trop grande et que tu avais de grosses chevilles, bref que tu n'avais pas le physique de poupée de porcelaine érigé en absolu par les auteurs du XIXème siècle, excuse-moi, mais j'imagine que pas mal de garçons, au genre fluide ou pas, ont dû souffrir de ne pas correspondre aux canons de beauté ou de courage du mec-qui-fait-des-trucs-remarquables vanté par Balzac and Co. Mais bon, comme il s'agit d'abord de toi et d'un "seule-en-scène", je comprends cet épanchement de soi.

Si on laisse de côté ta vision militante de la littérature, "donner la parole à des personnes silenciées, publier des récits qui ont été étouffés ou n'ont pas eu la place de se former", écris-tu, il y a un point qui est juste, mais où tu sèches, comme je pense beaucoup d'entre nous : si nous sommes conscients des schémas inégalitaires que la littérature nous a légués et si nous voulons les faire évoluer dans un sens plus conforme à nos valeurs d'aujourd'hui, que pouvons-nous proposer ? Alors, stp, prochain "seule-en-scène", voire "deux-en-scène-avec-un-éventuel-mec-qui-fait-des-trucs" uniquement pour des raisons d'inclusivité, sur ce sujet, parce que ce sera drôle et essentiel, sans être essentialiste. Stp, Alice une histoire à venir pour nous tous et toutes. Ou toutes et tous, c'est comme tu veux.
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Ce livret texte d'Alice Zeniter se caractérise par des concomittances avec l'essai pionnier de Virginia Woolf "Une chambre à soi". Les deux textes sont habités par une même quête: réfléchir au pouvoir de la fiction et à la place des femmes dans la fiction - comme personnages mais aussi comme créatrices. Zeniter retourne aux luttes textuelles des origines, celles qui ont privilégié le récit des chasseurs au détriment des cueilleurs "parce que leur histoire était meilleure",
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J'ai ri, j'ai souri, j'ai apprécié ! Parfois des termes un peu trop techniques pour le simple lecteur que je suis, mais une belle petite découverte !
Je ne suis pas habitué à ce genre de lecture, je découvre, je sors de ma zone de confort et ça me fait du bien !
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Dans ce court essai, Alice Zeniter (autrice, scénariste et traductrice) interroge la place du récit, comment celui-ci se construit et en quoi son impact n'est pas si innocent.
Ici rien d'ennuyeux, bien au contraire ! Même la petite introduction à la sémiologie est drôle en plus d'être intéressante. le ton léger, la manière de s'adresser directement aux lecteur.ice.s et de les prendre à partie font de cette lecture un moment à la fois agréable, instructif et questionnant.
A savoir que ce texte a été initialement écrit pour un seule en scène.

Petit livre qui se lit vite, il s'agit d'une parfaite introduction à la question de la place des femmes dans la fiction (et notamment la littérature), mais aussi sur la manière dont se construisent nos récits.
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