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Citations sur Madeleine Férat (159)

Aux yeux de son mari, Hélène était une petite machine singulièrement curieuse. Il l’avait épousée dans un jour d’ennui. Il l’aurait chassée le lendemain de sa maison, s’il avait pensé qu’elle valût sa colère. Le travail laborieux de la physionomie de cette coquette lui causait de vives jouissances ; il cherchait les rouages secrets qui faisaient aller les yeux et les lèvres de la petite machine. Ce visage pâle, enduit de fard, qui ne restait jamais en repos, lui paraissait d’un comique lugubre, avec ses clignements de paupières, ses pincements de bouche, tout son jeu rapide et muet pour lui. C’était en contemplant longuement sa femme, qu’il avait fini par se convaincre que l’humanité se trouvait composée de marionnettes stupides et méchantes. Quand il fouillait les rides de la poupée vieillie, il découvrait, sous ses grimaces, des infamies et des sottises qui la lui faisaient considérer comme une bête qu’il aurait fallu fouailler. Il préférait se distraire à l’étudier et à la mépriser. Il la traitait en animal domestique ; ses vices le laissaient aussi indifférent que les miaulements d’une chatte en rut ; mettant son honneur bien au-dessus des hontes d’une pareille créature, il assistait, avec un dédain superbe et une froide ironie, au spectacle de la procession d’adolescents défilant dans la chambre de sa femme.

Chapitre VI
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Elle choisissait toujours des amants d’un âge tendre et délicat, dix-huit à vingt ans au plus. Il fallait à ses goûts de petite fille des jouvenceaux aux joues roses, sentant encore le lait de leur nourrice. Si elle eût osé, elle aurait débauché les collégiens qu’elle rencontrait, car il entrait dans sa passion pour les enfants un appétit de voluptés honteuses, un besoin d’enseigner le vice et de goûter d’étranges plaisirs dans les molles étreintes de bras faibles encore. Elle était douillette ; elle aimait les baisers timides qui chatouillent sans appuyer. Aussi la trouvait-on toujours en compagnie de cinq ou six adolescents, elle en cachait sous son lit, dans ses armoires, partout où elle pouvait en placer. Son bonheur consistait à avoir une demi-douzaine d’amants dociles attachés à ses jupes. Elle les mettait vite sur les dents, en changeait tous les quinze jours, vivait dans un perpétuel renouvellement d’amoureux. On eût dit une maîtresse de pension traînant avec elle ses élèves. Jamais elle ne manquait d’adorateurs, en prenait n’importe où, parmi cette foule de jeunes imbéciles, dont le rêve est d’avoir pour maîtresse une femme âgée et mariée. Ses quarante ans, ses airs ridicules de fillette, sa graisse blanche et fade qui faisaient reculer les hommes mûrs, étaient un attrait invincible pour les drôles de seize ans.

Chapitre VI
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Maniérée, adorant la puérilité, elle avait tout un arsenal de moues, de coups d’œil, de sourires ; elle jouait de son visage comme d’un instrument exquis dont l’harmonie céleste devait séduire tout le monde ; jamais elle ne laissait sa physionomie tranquille, baissant la tête d’une façon languissante, la relevant au ciel avec des feintes subites de passion et de poésie, la tournant, la dodelinant, selon ses besoins d’attaque ou de défense. Elle luttait âprement contre l’âge qui l’engraissait et la ridait, frottée d’onguents et d’huiles de toilette, sanglée dans des corsets qui l’étouffaient, elle s’imaginait rajeunir. Ce n’était encore là que des ridicules ; mais la chère dame avait des vices. Elle considérait son mari comme un bonhomme de bois avec lequel elle s’était mariée pour se poser dans le monde.

Chapitre VI
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Hélène de Rieu, qui l’accompagnait le plus souvent à la Noiraude, avait dépassé la quarantaine. C’était une petite personne ronde, d’un blond fade, qui prenait de l’embonpoint, à son grand désespoir. Imaginez une poupée d’enfant qui serait devenue vieille.

Chapitre VI
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Son orgueil de race se tournait en raillerie impitoyable ; il avait l’air de croire qu’il vivait au milieu d’un peuple de misérables pantins, pataugeant dans la boue comme des chiens errants, rampant lâchement devant le fouet et se dévorant pour un os trouvé parmi les ordures.

Chapitre VI
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« Laquelle des deux mangera l’autre ? » pensait-il. Cette étude continuelle, cette observation et cette science de ce qu’il nommait les grimaces des visages, lui avait donné un mépris souverain pour les hommes.

Chapitre VI
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Quand il entrait quelque part, il s’asseyait dans un fauteuil, et là restait des heures entières, comme perdu au fond de son éternel silence.

Chapitre VI
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La fille faisait place à la mère, à la femme féconde, assise dans la plénitude de sa beauté. Ce qui donnait surtout à Madeleine sa démarche mesurée, son grand air de paix et de santé, son teint clair et uni comme une eau tranquille, c’était la satisfaction intérieure de son être.

Chapitre VI
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La maternité achevait d’équilibrer son tempérament. Jusque-là, il lui était resté des brusqueries de fille, des gestes fous d’amoureuse ; ses cheveux roux tombaient sur sa nuque avec une libre impudeur ; ses hanches accusaient leurs balancements, et dans ses yeux gris, sur sa bouche rouge, passaient des hardiesses de désir. Maintenant, tout son être s’était apaisé, le mariage avait mis en elle une sorte de maturité précoce ; son corps prenait un léger embonpoint, il avait des mouvements plus doux, plus mesurés ; ses cheveux roux, soigneusement noués, n’étaient plus qu’un admirable signe de force, que de puissants bandeaux encadrant sa face devenue placide. La fille faisait place à la mère, à la femme féconde, assise dans la plénitude de sa beauté. Ce qui donnait surtout à Madeleine sa démarche mesurée, son grand air de paix et de santé, son teint clair et uni comme une eau tranquille, c’était la satisfaction intérieure de son être. Elle se sentait libre, elle vivait fière, satisfaite d’elle-même ; sa nouvelle existence était un milieu favorable dans lequel elle se développait largement. Déjà, pendant les premiers mois qu’elle avait passés à la campagne, elle s’était épanouie en joie et en vigueur ; mais elle avait alors gardé quelque chose de brutal qui maintenant devenait de la sérénité.

Chapitre VI
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Il fallait à son esprit inquiet cette assurance de tranquillité continue ; son souhait le plus cher était d’arriver ainsi à la mort, après une existence morte, exempte d’événements, faite d’un sentiment unique. Il se reposait et il comptait ne jamais sortir de son repos.

Madeleine, elle aussi, se reposait. Elle se reposait délicieusement des troubles de sa vie d’autrefois dans le calme de sa vie présente. Rien ne la blessait plus. Elle pouvait s’estimer, oublier la honte de son passé.

Chapitre VI
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