Tout le monde connaît
Dominique Besnehard. le fils d'épiciers normands a conquis une place éminente dans le cinéma européen. Acteur, directeur de casting, agent, producteur… La série Dix pour cent, dont il a eu l'idée, l'a placé sous les feux de la rampe. Il nous a régalé voici quelques années avec ses souvenirs dans
Casino d'hiver. Il nous propose aujourd'hui, avec la journaliste
Nedjma van Egmond, l'histoire de la puissante agence Artmedia, qui fut au centre de l'activité cinématographique des années 1970 jusqu'aux années 2010. Artmedia, c'est une série de portraits de personnalités qui ont marqué leur époque :
Gérard Lebovici, Jean-Louis Livi, Serge Rousseau, Bertrand de Labbey,
François Samuelson et quelques autres. Profession : agent artistique – dans le temps on parlait d'impresario.
Comme le dit
Claude Berri, « s'occuper d'acteurs et de réalisateurs, c'est un métier magnifique. Un sacerdoce ! » La réflexion n'est pas tombée dans l'oreille d'un sourd.
Gérard Lebovici crée son agence en 1960 avec quelques clients, auteur et interprètes. Il rachète coup sur coup deux agences déjà établies et devient, à partir de 1967, un aspirateur à vedettes : Belmondo,
Deneuve, Schneider, Piccoli, Noiret, Blier, Cassel, Trintignant… Seul
Alain Delon résistera à ses sirènes. À la fin des années 70, Artmedia regroupe 80% du cinéma français. Lebovici est devenu un promoteur, bousculant le système en place : il lance des projets, trouve les acteurs et les financements, facilite la conjonction des talents pour monter des films. C'est le parrain. Entretemps il a été rejoint par Jean-Louis Livi – neveu d'
Yves Montand – et Serge Rousseau.
Longue silhouette élégante, peu amateur de mondanités, Lebovici a une double personnalité : il est à la fois ambitieux et discret. Son assassinat, en 1984, ne sera jamais élucidé. Jean-Louis Livi lui succède aux commandes de l'agence. C'est une personnalité plus humaine et plus chaleureuse, moins ambiguë que celle de son prédécesseur. L'âge d'or d'Artmedia se prolonge pendant dix ans sous sa direction. Livi recrute Besnehard, puis Elisabeth Tanner qui deviendra Andréa Martel dans Dix pour cent. Il quitte l'agence pour devenir producteur, comme Lebovici avant lui et Besnehard après. Bertrand de Labbey lui succède pour de nombreuses années. Cependant l'agence, minée par des problèmes de gouvernance, de rémunération et d'ego finit par péricliter.
La mémoire de
Dominique Besnehard est d'une grande précision et la plume de Nedjma van Egmond particulièrement percutante. Un minimum de nostalgie, pas de sévérité, pas de méchanceté, pas de bassesse. Quelques regrets parfois. Beaucoup d'indulgence et de tendresse. L'humanité de Besnehard transparaît à tous les chapitres. Pour qui aime le cinéma et ses coulisses, le livre est passionnant.