Citations de Eugène (43)
Dans un livre, j'ai lu que mille cinq cents fois par jour, nous sommes submergés par des noms de marques. C'est pourquoi un Européen moyen en connaît quelque cinq mile. Ce qui n'a l'air de rien, mais l'affaire devient vertigineuse quand on sait qu'il faut seulement deux mille cinq cent mots pour parler une langue couramment...
Dans un livre, j'ai lu que le "Tartuffe" fut régulièrement interdit : par le Parlement et par l'archevêque de Paris en 1667, puis sous Charles X, puis pendant la Première guerre mondiale, et enfin, pendant l'Occupation. "Tartuffe" est donc le baromètre de la liberté d'expression en France depuis quatre siècle
A la télé, c'est Champs-Elysées, présenté par Michel Drucker. J'aime bien la musique du générique, mais chut, faut pas le répéter aux copains : j'ai quand même quinze ans.
Dans un livre, j'ai lu que la bibliothèque Brautigan, aux Etats-Unis, à Burlington dans le Vermont, est constituée exclusivement de livres refusés par les éditeurs. Elle s'inspire du roman L'Avortement de Richard Brautigan, qui raconte l'histoire d'un bibliothécaire et de son amie, vivant dans une bibliothèque imaginaire de livres non publiés. Ayant ouvert ses portes en 1990, avec seulement sept livres, elle en compte aujourd'hui plusieurs milliers. La Brautigan Library accepte tous les ouvrages à l'exception de ceux publiés. Ses auteurs ont entre treize et quatre-vingt-douze ans. Poésies, proses, oeuvres franchement ratées ou étranges, il y a de tout sur ses rayons.
Selon une loi tacite en littérature, tout serpent finit par se mordre la queue. Ainsi, un grand éditeur envisage sérieusement de publier "un choix de textes de la bibliothèque Brautigan".
Dans un livre, j'ai lu que parfois, les grands écrivains sont devenus des légendes de leur vivant. Parmi de nombreux exemples, j'en choisis un : Victor Hugo. En mai 1881, un décret de la Ville de Paris donne le nom de Victor Hugo à l'avenue où habitait l'écrivain. Si bien que durant les dernières années de sa vie, les amis et les personnalités qui lui envoyaient des lettres écrivaient à l'adresse suivante :
Victor Hugo
Dans sa rue
Paris
Dans un livre, j'ai lu que rien ne prédestinait Christiane Rochefort à devenir écrivain."Comment, étant une fille, aurais-je pu seulement imaginer que je pourrais être quelque chose qui n'a même pas de féminin ?". Alors, ce féminin, elle finira par l'inventer. Ce sera "écrevisse".
Dans un livre j’ai lu ....
"Qu’il existe 17000 livres consacrés à Proust. Et encore cet inventaire datait de 1992. Depuis le chiffre proprement phénoménal de 20 000 a certainement été atteint"
A cinq ans et demi, je découvre comment se donner des super sensations en se touchant « là ». Oui, exactement « là ». Comme si un petit lutin me chatouille de l’intérieur avec une plume magique. Askeucébon. Je me touche « là » dans mon lit, le soir. Je me touche « là » dans mon lit pendant la sieste. La seule chose que je ne pige pas, c’est pourquoi personne ne m’a prévenu que c’est si bon. Sibon. Sibon. On m’a fait goûter au chocolat, aux glaces vanille et aux cerises noires ; on m’a laissé m’amuser sur la balançoire et le cheval à bascule ; on m’a montré les dessins animés à la télévision. J’ai même bu une fois la limonade noire qui vient d’Amérique avec des bulles qui piquent et son goût caramel. Mais personne ne m’a parlé de ce petit lutin qui peut me chatouiller de l’intérieur avec sa plume magique.
Dans un livre, j'ai lu une observation de Jean d'Ormesson sur les écrivains : "Lorsque deux banquiers se rencontrent, ils parlent littérature. Et lorsque deux écrivains se rencontrent, ils parlent chiffres de vente."
Dans un livre j’ai lu que ....
"Tartuffe » fut régulièrement interdit : par le Parlement, par l’Archevêque de Paris en 1667, puis sous Charles x, puis pendant la Première Guerre mondiale, et enfin sous l’Occupation, Tartuffe est donc le baromètre de la liberté d’expression en France depuis quatre siècles."
p. 152 Khovor, ville située au milieu de montagnes inhospitalière. Berceau du farisme, religion fondée par Fari au 13è siècle. Dans la rubrique restaurants du chapitre consacré à cette ville on trouve la mention suivante :
Kumsäkih
Petit restaurant calme et discret qui propose une bonne cuisine pamukale. Essayez la table numéro 5. Elle n’a rien de spécial, sauf que le patron l’a achetée au bazar d’Alep, en Syrie. Sur cette petite table en bois, Agatha Christie, qui accompagnait régulièrement son archéologue de mari au Proche-Orient, a écrit les Dix petits nègres. Du la moins la rumeur le prétend. (Voir chapitre « La maison des rumeurs », p. 99).
Un coup de cœur ! Un tendre regard d’adulte sur son enfance. La triste réalité de la Roumanie et de son dictateur. Le petit Eugène découvre la vie pas à pas. C’est bien écrit.
Un coup de cœur ! Le regard d’un adulte sur son enfance.
À leur place, aurais-je eu le courage de fuir à l'autre bout du continent, en laissant mes deux enfants derrière moi, avec l'espoir de les faire venir un jour ? Quand je pense à la vie paisible de mon père et de ma mère à Lausanne, je me demande encore où ils ont trouvé la force de tout quitter. Les migrants sont des sur-hommes.
C'était si étrange d'écrire en roumain ! De penser en roumain. D'ironiser en roumain. À mon arrivée en Suisse à l'âge de six ans, j'ai commencé une migration intérieure : d'une langue à l'autre. Peu à peu, j'ai rêvé en français, compté en français et surtout... menti en français. La langue dans laquelle on ment sans se faire attraper raconte beaucoup sur nous. Moi, je mens en français. Toi, en roumain.
Ça m’a rappelé cette blague : «Que se passerait-il si le communisme s’implantait dans le Sahara ? Réponse : au début, on ne verrait pas la différence. Mais, au bout de six mois, les Bédouins constateraient une grande pénurie de sable.»
Dans un livre de médecine, j'ai lu que "le placebo est un mensonge qui guérit". Je me demande s'il ne s'agit pas de la plus belle définition de la littérature.
Comme tous les dictateurs, tu t'es pris pour ta statue.
(p. 98)
Je rejoins la chapelle funéraire pour me retrouver encore une fois en présence du corps mort de mon père.
Cette fois, la panique n'est pas aussi envahissante. Je lève la main droite pour la déposer tendrement sur celle de mon père. Le contact est abominable. Ca ressemble à une bougie qu'on vient de sortir du frigidaire. Les sanglots s'étranglent dans ma gorge. Je réalise à quel point ce qui se présente devant moi n'a plus rien en commun avec un être humain. Je parviens à murmurer "Adieu papa, adieu".
Puis je reprends mon souffle et je quitte ma jeunesse.
(p. 199)
Je n’exclus pas de me rendre à Bucarest pour déposer cette lettre sur ta tombe. Ça me donnera l’occasion de lire ton nom gravé dans la pierre. Continue à être mort, Nicolae ; tu fais ça très bien.