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4.22/5 (sur 14 notes)

Nationalité : Royaume-Uni
Né(e) : 1837
Mort(e) : 1916
Biographie :

Jorn de Précy (1837-1916), jardinier-philosophe anglais d'origine islandaise, a influencé en profondeur l'art des jardins anglo-saxons du XXe siècle.


Source : Actes Sud
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L'édition de "Le jardin perdu", annoncée comme étant de la main d'un supposé mais introuvable jardinier-philosophe anglais d'origine islandaise, Jorn de Précy [1837-1916], se referme sur la note de l'éditeur, laquelle révèle la mystification littéraire : « Depuis sa sortie en 1912, ce court et brillant essai circule presque clandestinement en Angleterre. Faut-il s'étonner que ce texte soit resté méconnu en France jusqu'à nos jours ? Sans doute. A moins que son “traducteur”, fin connaisseur de l'art des jardins anglais du XIXe siècle, n'en soit le véritable auteur… » Ledit « traducteur », Marco Martella, malin mystificateur d'origine italienne, présente le fictif de Précy comme suit : « On sait peu de choses sur Jorn de Précy. […] Discret, isolés de ses contemporains, vivant presque comme un ermite, de Précy a influencé en profondeur l'art des jardins, notamment anglais. […] Né à Reykjavík […], Jorn de Précy quitte l'Islande en 1854. […] Il visite Rome et la Toscane. Il passe un an à Venise et deux à Paris. Là, il entame une carrière d'écrivain dont il ne reste malheureusement aucune trace. Les frères Goncourt font de lui un portrait teinté d'ironie dans leur Journal, où ils évoquent un “jeune Islandais au regard absent, perdu dans quelque rêve étrange, mais capable de s'émouvoir jusqu'aux larmes s'il se trouve nez à nez avec une rose à peine éclose ou un chêne séculaire au Jardin des plantes”. En 1861, il s'installe en Angleterre. […] en 1865 il achète le jardin de Greystone. […] de Précy était un jardinier-philosophe […]. Il se moquait volontiers des penseurs “professionnels” de son temps, se méfiait des théories et des systèmes philosophiques et se limitait, le plus souvent, à énoncer ses idées sans chercher à les approfondir ou à les étayer. […] il essayait avant tout d'incarner une vision du monde, une philosophie de l'homme, un idéal de vie. Ainsi, Greystone est, toute proportion gardée, l'héritier des grands jardins philosophiques du passé, comme ceux d'Epicure ou d'Erasme de Rotterdam. […] The Lost Garden est un traité singulier. […] Publié à deux mille exemplaires, à compte d'auteur, il ne fit l'objet d'aucune critique dans la presse spécialisée à sa sortie. Mais ces deux mille livres continuent à circuler. […] » Et le prétendu de Précy d'introduire plus loin son joli opuscule comme suit : « […] Un jour (quel âge avais-je ? quatorze, quinze ans ?), tandis que je marchais sans but sur les collines dépouillées, perdu dans je ne sais quelles pensées tourmentées, comme cela arrive souvent à l'adolescence, je me trouvai devant une poignée de bouleaux. Ils formaient un cercle. Un cercle parfait, comme dessiné au compas. L'écorce argentée, rayée de noir, attira mes yeux puis ma main. A l'intérieur du cercle, illuminées par un rayon de soleil, au milieu de l'herbe et de la mousse, apparurent les corolles mauves de cyclamens minuscules. Elles m'invitaient à rentrer dans cet enclos. Et une fois à l'intérieur, je ne sais quelle joie m'envahit […]. Etais-je dans la demeure d'un elfe ou d'une de ces nombreuses créatures innommées qui habitent notre île ? Assis sur ce tapis moelleux, appuyé contre un tronc, je fermai les yeux. Lorsque je les rouvris, il me sembla, sans que je sache pourquoi, que l'univers entier s'offrait à ma vue. Je pouvais voir plus loin que la vallée étalée devant moi, au-delà de la crête rougeâtre des volcans, jusqu'à la mer où un bateau de pêche naviguait paisiblement, et même au-delà, aussi étrange que cela puisse paraître, vers les côtes de l'Europe. La terre si vaste au-dehors et ce cercle heureux, comme un ventre maternel, un lieu protégé... “C'est donc cela, un jardin...”, me dis-je, la gorge serrée. […] Il m'arrive encore aujourd'hui, lorsque je me promène dans mon lieu, d'éprouver, comme cette toute première fois, la sensation que dans le jardin le monde peut trouver, comme par magie, un ordre heureux. Si j'étais philosophe, je dirais même : un sens. Mais quel est ce sens, en quoi consiste cette joie débordante, cette surabondance de vie ? Encore aujourd'hui, je ne saurais le dire. […] » 0:04 - Préface 2:10 - Genius Loci 6:22 - Conclusion Référence bibliographique : Marco Martella, le jardin perdu, Éditions Actes Sud, 2011 Image d'illustration : http://europeangardens.eu/wp-content/uploads/2017/11/Photo-bio.jpg Bande sonore originale : Carlos Viola - Rest in Peace Site : http

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Citations et extraits (9) Ajouter une citation
Le bonheur, lui, est toujours le même. Il m’arrive encore aujourd’hui, lorsque je me promène dans mon lieu, d’éprouver, comme cette toute
première fois, la sensation que dans le jardin le monde peut trouver, comme par magie, un ordre heureux. Si j’étais philosophe, je dirais même : un sens. Mais quel est ce sens, en quoi consiste cette joie débordante, cette surabondance de vie ? Encore aujourd’hui, je ne saurais le dire.
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Les sages taoïstes ne disaient pas autre chose lorsqu’ils prêchaient le wu-wei, le “non-agir”. Ne pas agir, cela veut dire ne pas essayer d’aller au-delà de ce qui surgit spontanément, ne pas s’engager dans des actions, même bien calculées, dont le but est d’obtenir plus que ce qui est offert par la vie. Ainsi, la seule règle du jardinage sauvage est : faites-en le moins possible, laissez à la nature le gros du travail, retirez-vous le plus possible du tableau. Et le seul slogan, s’il en faut un : jardiniers, soyez paresseux ! Oui, dans mon jardin idéal, le jardinage est avant tout une œuvre du cœur et du regard.


Ainsi immobile, assis sans rien faire
Le printemps vient, l’herbe pousse d’elle-même.
Anonyme chinois 
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Le temps du jardin est donc celui de la vie. Il ne nous pousse pas vers l’avant, comme le temps mécanique qui régit désormais nos vies, car un vrai lieu nous enracine toujours dans le temps présent. Maintenant et ici. Pas de buts à atteindre, pas d’objectifs à remplir, car la vie n’a qu’une fin : elle-même. Et la beauté aussi, qui naît constamment du processus de la vie. A l’inverse du système capitaliste, qui a besoin d’une croissance constante pour survivre et qui demande des efforts sans fin aux hommes qui le subissent, le monde naturel croit spontanément et se suffit à lui-même dans un présent éternel, lent et doux. C’est là la leçon du monde végétal. Retrouver cette vie, la vraie, et ce temps de la nature qui est aussi notre vrai temps, celui qui connaît notre corps animal – voilà ce qui nous pousse à ouvrir le portail d’un enclos de verdure et à y entrer, chaque fois, comme si on pénétrait dans un monde à part. C’est cela, le don du jardin.
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 Depuis plus d’un siècle, à la suite de l’industrialisation et du processus d’urbanisation, la ville s’est affranchie peu à peu de son territoire, jusqu’à devenir un monde en soi. Une création entièrement artificielle, autonome, ennemie jurée du monde naturel. Elle n’est désormais composée que d’espaces froids, inhospitaliers, tous semblables les uns aux autres, au point
qu’on aura bientôt du mal à distinguer les quartiers modernes de Londres de ceux de Manchester ou de Berlin. Ces endroits anonymes, ineptes, faits pour la foule et non pour l’individu, ne sont que des substituts de ce qu’étaient autrefois les lieux de la vie humaine. Ils découlent d’une idée abstraite, et donc déshumanisante, de l’homme. 

Ainsi, la ville ne répond plus qu’à des critères de fonctionnalité, les seuls que
l’esprit bourgeois soit en mesure de concevoir. Le besoin que nous avons de vivre dans un monde significatif, capable d’exprimer l’esprit profond du lieu et celui de la communauté humaine qui l’habite, la ville ne sait plus le prendre en compte. Quant au besoin de proximité avec la nature, on y répond en plantant d’horribles plates-bandes fleuries et des alignements de platanes maladifs dans les rues et devant les bâtiments publics, ou bien en aménageant ces succédanés de jardins qu’on appelle “parcs urbains”. 

Comment, dès lors, s’étonner que l’architecture ancienne soit toujours plus attrayante que la moderne ? Un vieux village, avec ses pauvres maisons groupées autour d’une église ou d’un château, ne possède-t-il pas plus de caractère que nos quartiers modernes tellement bien conçus qu’ils ressemblent à des maquettes grandeur nature ? Ces vieux bâtiments n’ont
pourtant pas été édifiés par des architectes encensés mais par des gens humbles, des paysans et des artisans qui ne savaient probablement ni lire ni écrire et qui utilisaient tout ce qu’ils trouvaient sur place : les pierres des champs, le bois des forêts, l’ardoise qui dormait depuis des millénaires à l’intérieur des collines. Ils se laissaient guider par l’esprit de leur lieu, le seul qu’ils connaissaient, et ils construisaient pour leurs enfants et les enfants de leurs enfants.
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Et dans notre âge du déracinement et du nomadisme, le fléau du tourisme ne peut que se développer. Si, aujourd’hui, la clientèle de la célèbre agence de voyage Cook n’est constituée que de bourgeois souffrant de bougeotte,
qu’adviendra-t-il lorsque tout le monde, y compris les moins fortunés, aura les moyens de s’adonner à ce succédané du voyage qu’est le tourisme ? Cela laisse présager une destruction complète et systématique de tout ce qui reste comme lieux véritables dans ce bas monde occidental.

Il en va de même avec les beaux lieux que la nature a créés. L’alternative est
simple : la disparition ou la transformation en espaces protégés, en musées à ciel ouvert, qu’on appelle “parcs nationaux”, où la nature sauvage est contrôlée par des ingénieurs agronomes et des gardes forestiers pleins de bonne volonté et où le touriste est invité à des dépaysements encore plus excitants, “au sein d’une nature primordiale”. Du théâtre, encore du théâtre : les hommes civilisés y jouent, pendant quelques heures, les sauvageons, avec un petit frisson lorsqu’ils s’aventurent, sur un sentier balisé, dans une forêt noire et menaçante… 

Que reste-t-il de beau et de simple dans ce monde ? Où respirer encore librement ? 
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Voici donc où se réfugient les derniers dieux vaillants de l’Occident.
Au jardin. C’est là la terre d’exil des nymphes et des satyres grecs, des fées et
des elfes nordiques. Voici le dernier repaire qui s’offre aussi à l’homme qui rêve d’échapper au cauchemar de l’histoire et aux espaces inhabitables de la modernité. Oui, c’est dans le jardin qu’il peut renouer avec les dieux et avec lui-même. 
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Dans la préface :
Le traité et une poignée d’articles sont les seules traces que nous avons de lui et de sa vie solitaire consacrée au jardin. Rien ne reste, à ma connaissance, de sa correspondance, si ce n’est un petit mot froissé. Il fut découvert par hasard dans la bibliothèque de Greystone lors des travaux de construction de l’hôtel,
s’échappant des pages d’un exemplaire du traité, là où de Précy l’avait probablement oublié aussitôt après l’avoir écrit. Il était visiblement adressé à son jardinier :
 
La première gelée de l’hiver est aux portes.
Cet après-midi, n’oubliez pas de rentrer le citronnier en pot dans la véranda. Comme chaque hiver, oui, et depuis tant d’années…
Tout cela vous le savez, je le sais, et ces mots
que je vous laisse ne servent pas à grand-chose. Le jardinier, c’est vous.
Moi, même ici,
même à mon âge, j’ai le sentiment de n’être
qu’un imposteur, un faux jardinier.
Continuez donc à être patient avec moi, Samuel.
Le ciel annonce la pluie, la maison est glacée, et il est temps d’allumer un feu dans la cheminée. Je vous attends ce soir pour le thé.
Comme toujours, vous me trouverez accoudé
à la fenêtre du salon, en train de regarder dehors,
jamais fatigué d’attendre. 
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Cette vision sacrée du monde, nous la nommons aujourd’hui, avec une condescendance teintée de mépris, “animisme”. Nos philosophes attitrés nous expliquent que, dans une société civilisée comme la nôtre, elle n’a plus droit de cité. Ils nous rappellent que la raison, au bout de deux ou trois siècles de batailles, a fini par triompher de la crédulité, la lumière des ténèbres, et cætera. Sommes-nous assez fous pour vouloir revenir en arrière ? D’aucuns soupçonnent la modernité d’avoir remplacé les superstitions du passé par
la superstition bourgeoise du progrès, mais ce ne sont, bien sûr, que des nostalgiques, c’est-à-dire des aigris ou de pauvres malades. L’idée que l’humanité puisse retourner à un stade antérieur de son évolution, nous dit le scientifique darwinien consterné, est tout simplement contre nature ! Et même si l’on souhaitait vraiment rebrousser chemin et renoncer aux acquis
du progrès, comment retrouver l’innocence perdue ?

Donc, plus de dieux chez nous. Tout au plus avons-nous le droit de croire au Dieu des religions monothéistes qui, retiré dans son ciel abstrait, coupé du monde des hommes, a fait le ménage et écrasé les divinités puériles, à l’identité souvent confuse, des polythéistes. Mais même ces grandes religions et leur Dieu solitaire sont destinés, apparemment, à disparaître. Bientôt, donc, l’homme restera tout à fait seul, entouré de matière inerte, maître absolu d’une terre morte à ses yeux.

Car, hélas, avec les divinités, grandes ou petites, la poésie de la terre a disparu aussi : une source sans nymphes n’est qu’une source, un arbre sans dryades n’est qu’un arbre et un sommet de montagne où aucun dieu ne réside n’est qu’un sommet de montagne. Le monde n’est plus capable, à nos yeux, de magie. Il y a quelques années, un chimiste français, un certain Marcelin Berthelot, a prononcé cette phrase qui est à elle seule un manifeste
de notre époque matérialiste : “L’univers est désormais sans mystère !” Ces mots qui expriment tout l’enthousiasme victorieux de la modernité résonnent à mes oreilles comme un glas sinistre. 

Cependant, la terre continue de s’exprimer. Elle ne peut faire autrement car tout ce qui vit a besoin de se manifester, être humain, arbre ou caillou. Mais depuis qu’il n’est plus guidé par les dieux, et qu’il a tourné le dos à la nature, l’homme n’écoute plus. Lorsque le monde lui parle, c’est l’écho de sa propre voix qu’il croit entendre. Il y a peu de temps, un célèbre critique d’art, grand humaniste et partisan du progrès, m’a expliqué que si certains paysages nous semblent parfois chargés de “vie”, ce n’est que parce que des artistes les ont peints ou des poètes chantés. C’est eux qui leur ont conféré du charme. “La nature, en elle-même, est muette ! Votre génie du lieu n’existe pas, monsieur de Précy, ce n’est qu’une image poétique de bas étage !” s’est écrié ce petit Narcisse des temps modernes, vexé que je rie d’une telle absurdité. Mais faut-il rire de ces propos ? Ou y lire de funestes présages ? 
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De ces peuples, nous disons qu’ils appartiennent à des civilisations “primitives”. L’adjectif, bien entendu, ne possède pas, comme il le pourrait, une
valeur positive. Il ne signifie pas “innocent”, “encore proche des origines”, “familier de la nature”, mais “pas encore développé”, “au plus bas dans l’échelle darwinienne de l’évolution humaine”, et donc “inférieur”. 
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