Citations de Marc Aurèle (711)
La philosophie, c'est de préserver le génie qui est au-dedans de nous de toute ignominie, de tout dommage. C'est de vaincre le plaisir et la douleur, de ne rien faire au hasard.
Ou bien, tout provient, comme pour un corps unique, d’une seule source intelligente, et il ne faut pas que la partie se plaigne de ce qui arrive dans l’intérêt du tout. Ou bien, il n’y a que des atomes et rien autre que confusion et dispersion. Pourquoi donc te troubler ? Dis à ta faculté directrice : « Tu es morte, tu es anéantie, tu es réduite à l’état de brute, tu fais partie d’un troupeau, tu broutes »
Épictète
Si tu t'affliges d'une cause extérieure, ce n'est pas elle qui t'importunes, c'est le jugement que tu portes sur elle.
«Pénètre dans l'âme qui dirige chacun et laisse tout autre pénétrer dans ton âme à toi.»
LIVRE I
De mon grand-père Verus : sa bonté et son humeur toujours égale.
De la réputation et de la mémoire laissée par le père qui m'engendra : sa réserve et son mâle caractère.
De ma mère : sa piété, sa propension à donner du sien et s'abstenir non seulement de faire acte de méchanceté, mais même de s'arrêter à une telle pensée ; et encore la simplicité de son genre de vie et son éloignement du train que mènent les riches.
(INCIPIT) - ÉDITIONS LES BELLES LETTRES - traduction A.I. Trannoy
Quand quelqu’un te choque par son impudence, demande-toi sur-le-champ : « Se peut-il qu’il n’y ait pas d’impudents dans le monde ? » Non, cela ne se peut pas. Ainsi donc, ne cours pas après l’impossible ; car cet homme qui te choque est un de ces impudents dont l’existence est inévitable dans le monde où nous sommes. Aie toujours la même réflexion présente s’il s’agit d’un malfaiteur, d’un perfide, ou de quelqu’un qui s’est rendu coupable de toute autre faute. En te disant qu’il est impossible que cette sorte de gens n’existe pas dans la société, tu te sentiras plus de tolérance envers chacun d’eux en particulier.
En même temps, tu feras bien aussi de penser à la vertu spéciale que la nature permet à l’homme en opposition avec le vice qui te blesse. Ainsi, contre l’ingrat, elle nous a permis la douceur, et telle autre vertu contre tel autre genre de faute. Toujours il t’est loisible d’offrir tes conseils et tes leçons à celui qui s’égare, puisque toujours, quand on dévie, on quitte la voie qu’on s’était proposée, et que c’est une erreur qu’on commet. Et puis, quel tort as-tu souffert ? En y regardant de près, tu verras que pas un de ceux contre qui tu t’emportes si vivement, n’a pu rien faire absolument qui corrompît ton âme ; or, le mal et le tort personnel que tu pourrais éprouver ne consiste absolument qu’en cela. Est-ce donc un mal ou une chose si étrange qu’un ignorant fasse œuvre d’ignorance ? Examine si ce n’est pas bien plutôt à toi-même qu’il faudrait t’en prendre de n’avoir pas prévu qu’un tel homme commettrait une telle faute : Car la raison te donnait bien des motifs de présumer que, selon toute apparence, il commettrait ce délit ; et si tu t’étonnes qu’il l’ait commis, c’est que tu n’as pas assez écouté les avertissements de la raison.
Ὅταν τινὸς ἀναισχυντίᾳ προσκόπτῃς, εὐθὺς πυνθάνου σεαυτοῦ· δύνανται οὖν ἐν τῷ κόσμῳ ἀναίσχυντοι μὴ εἶναι; Οὐ δύνανται· μὴ οὖν ἀπαίτει τὸ ἀδύνατον· εἷς γὰρ καὶ οὗτός ἐστιν ἐκείνων τῶν ἀναισχύντων, οὓς ἀνάγκη ἐν τῷ κόσμῳ εἶναι. Τὸ δ αὐτὸ καὶ ἐπὶ τοῦ πανούργου καὶ ἐπὶ τοῦ ἀπίστου καὶ παντὸς τοῦ ὁτιοῦν ἁμαρτάνοντος ἔστω σοι πρόχειρον·
ἅμα γὰρ τῷ ὑπομνησθῆναι ὅτι τὸ γένος τῶν τοιούτων ἀδύνατόν ἐστι μὴ ὑπάρχειν, εὐμενέστερος ἔσῃ πρὸς τοὺς καθ ἕνα. Εὔχρηστον δὲ κἀκεῖνο εὐθὺς ἐννοεῖν, τίνα ἔδωκεν ἡ φύσις τῷ ἀνθρώπῳ ἀρετὴν πρὸς τοῦτο τὸ ἁμάρτημα· ἔδωκε γὰρ ὡς ἀντιφάρμακον πρὸς μὲν τὸν ἀγνώμονα τὴν πρᾳότητα, πρὸς δὲ ἄλλον ἄλλην τινὰ δύναμιν, ὅλως δὲ ἔξεστί σοι μεταδιδάσκειν τὸν πεπλανημένον· πᾶς δὲ ὁ ἁμαρτάνων ἀφαμαρτάνει τοῦ προκειμένου καὶ πεπλάνηται. Τί δὲ καὶ βέβλαψαι; Εὑρήσεις γὰρ μηδένα τούτων, πρὸς οὓς παροξύνῃ, πεποιηκότα τι τοιοῦτον ἐξ οὗ ἡ διάνοιά σου χείρων ἔμελλε γενήσεσθαι· τὸ δὲ κακόν σου καὶ τὸ βλαβερὸν ἐνταῦθα πᾶσαν τὴν ὑπόστασιν ἔχει. Τί δαὶ κακὸν ἢ ξένον γέγονεν, εἰ ὁ ἀπαίδευτος τὰ τοῦ ἀπαιδεύτου πράσσει; ὅρα μὴ σεαυτῷ μᾶλλον ἐγκαλεῖν ὀφείλῃς, ὅτι οὐ προσεδόκησας τοῦτον τοῦτο ἁμαρτήσεσθαι· σὺ γὰρ καὶ ἀφορμὰς ἐκ τοῦ λόγου εἶχες πρὸς τὸ ἐνθυμηθῆναι ὅτι εἰκός ἐστι τοῦτον τοῦτο ἁμαρτήσεσθαι, καὶ ὅμως ἐπιλαθόμενος θαυμάζεις εἰ ἡμάρτηκεν.
Ne te laisse point prendre au tourbillon ; mais, dans tout élan, propose-toi le juste ; et, dans toute représentation, sauvegarde ta faculté de comprendre.
Livre IV - XXII
Souvenez-vous toujours que très peu est nécessaire pour mener une vie heureuse.
« Quoi qu’on fasse ou qu’on dise, il me faut être émeraude et garder ma couleur. »
Tu as subsisté comme partie du tout. Tu disparaitras dans ce qui t'a produit, ou plutôt, tu seras repris, par transformation, dans sa raison génératrice.
Habitue-toi à être attentif à ce qu’un autre dit, et, autant que possible, entre dans l’âme de celui qui parle.
La perfection morale consiste en ceci : à passer chaque jour comme si c'était le dernier, à éviter l'agitation, la torpeur, la dissimulation.
Prends pour habitude, à toute action, si possible, que tu vois faire à quelqu’un , de te demander à toi-même : à quel but cet homme rapporte t- il cette action ? Mais commence par toi-même, et examine-toi le premier.
Tout est en train de se transformer. Toi-même tu es dans un changement continuel qui va en quelque partie, jusqu’à la destruction ; il en est de même de l’ensemble du monde.
Si cet acte ne convient pas, ne le fais pas ; si cette parole n’est pas vraie, ne la dis pas.
MARC-AURÈLE / Pensées / Les Stoïciens / Bibliothèque de la Pléiade / nrf Gallimard 1962
« Prendre avec simplicité, et lâcher facilement. »
< VIII (33) p.1206 >
Mon âme ! ...
Quand seras-tu pleinement satisfaite de ton état ?
Quand trouveras-tu ton plaisir dans toutes les choses qui t'arrivent ?
Quand seras-tu persuadée que tu as tout en toi ?
On ne doit craindre ni sa propre mort ni celle des autres.
Pour cela, il faut s'y préparer par des exercices spirituels et de la méditation.
Bien voir toujours au total combien sont éphémères
et sans valeurs les choses humaines.
Ce petit instant du temps de la vie, le traverser en se conformant à la nature,
partir de bonne humeur, comme tombe une olive mûre,
qui bénit celle qui l'a portée et rend grâce à l'arbre qui l'a fait pousser.
Une excellente manière de te défendre d'eux, c'est d'éviter de leur ressembler.
Trois choses te composent : le corps, le souffle, l'intelligence. De ces choses, deux sont à toi, en tant seulement qu'il faut que tu en prennes soin. La troisième seule est proprement tienne. Si donc tu bannis de toi-même, c'est-à-dire de ta pensée, tout ce que les autres font ou disent, tout ce que toi-même as fait ou dit, tout ce qui, en tant qu'à venir, te trouble, tout ce qui, indépendamment de ta volonté, appartenant au corps qui t'enveloppe ou au souffle qui t'accompagne , s'attache en outre à toi-même, et tout ce que le tourbillon extérieur entraîne en son circuit, en sorte que ta force intelligente, affranchie de tout ce qui dépend du destin, pure, parfaite, vive par elle-même en pratiquant la justice, en acquiescant à ce qui arrive et en disant la vérité... ; si tu fais de toi-même, comme le dit Empédocle Une sphère parfaite, heureuse de sa stable rodontité ; si tu t"exerces à vivre seulement ce que tu vis, c'est-à-dire le présent, tu pourras vivre tout le temps qui te reste jusqu'à la mort en le passant dans le calme, dans la bienveillance et l'amabilité... difficile de couper le beau rythme de cette pensée.