Citations de Riss (172)
Quand le vaccin sera trouvé, quand tout le monde repartira de plus belle en voiture, quand les usines recracheront encore plus de fumée et que les ports rempliront de nouveau des porte-conteneurs géants propulsés par des tonnes de gasoil, l’autre grande catastrophe, écologique, poursuivra sa route. Le furtif moment de doute que le coronavirus nous aura imposé sera vite oublié. On aura sauvé nos poumons d'un virus meurtrier, mais pour mieux les livrer en pâture aux microparticules et aux gaz toxiques.
CHARLIE Hebdo n°1438 du 12 février 2020 (Édito).
Le chaos du monde, la fragmentation de la société, le repli sur soi font perdre de vue qu'il subsiste encore des émotions qui nous unissent. Aucune société humaine ne peut tenir debout sans un pacte commun minimal qui rappelle que l'humanité est une et indivisible.
CHARLIE Hebdo n°1470 du 23 septembre 2020 (Édito).
On est différents, et puis c’est tout. Ce constat ne devrait pas avoir de conséquences. Mais le raciste ne se satisfait pas d’acter cette diversité et il ne peut s’empêcher de conclure qu’elle implique une hiérarchie des individus. Alors le racisme pousse et grandit comme le chiendent entre les pierres, dans les moindres interstices qu'il trouve pour se diffuser.
CHARLIE Hebdo n° 1454 du 03/06/2020 (édito).
La suppression de l'ENA donne l'impression d'être la victoire des cancres du fond de la classe sur les bons élèves toujours assis au premier rang, sur lesquels on se défoule à la récré. Les Français adorent les premiers de la classe tant qu'ils conservent l'espoir d'en être, mais ils les détestent le jour où ils comprennent qu'ils n'en feront jamais partie. Un peu comme ces parents d'élèves qui s'immiscent dans le travail des profs de leurs gosses, comme pour se venger de ceux de leur jeunesse qui leur mettaient des mauvaises notes parce qu'ils étaient des cancres. À trop réformer uniquement pour apaiser le ressentiment de quelques-uns, la France risque de ressembler de plus en plus à un pays de 66 millions de frustrés.
CHARLIE Hebdo n° 1499 du 14 avril 2021 (Édito).
Cette crise sanitaire dramatique fait naître chez certains l'espoir d'une société meilleure, dont chaque génération rêve d'être l'artisan. Comme si seules des épreuves terribles étaient capables de nous faire progresser, mais jamais notre propre volonté. Parce que de la volonté, finalement, en temps normal, nous n'en avons aucune.
CHARLIE Hebdo n°1444 du 25 mars 2020 (Édito).
Le temps où on reprochait à Charlie d'avoir publié les caricatures est passé. Il semble que la société française ait enfin compris que cette histoire de caricatures n'était que la partie émergée d'un iceberg dont l'objectif est d'envoyer par le fond la totalité de notre démocratie. Tout ce qui, de près ou de lui, incarne la liberté doit disparaître, et si les intimidations ne suffisent pas, le recours à la violence sera employé.
CHARLIE Hebdo n°1471 du 30 septembre 2020 (Édito).
Ce mot possède une puissance, une force irrésistible et inégalée. Et on prend conscience qu'on ne le prononce pas assez souvent. Qu'on ne le crie pas suffisamment fort. Liberté. Il est temps de se réapproprier ce mot magique capable de métamorphoser les plus timides en insurgés et d'affranchir les plus faibles de la peur qui les enchaîne.
CHARLIE Hebdo n°1470 du 23 septembre 2020 (Édito).
Le racisme est une sorte d'invariant qu'on retrouve sur tous les continents, en Europe, aux États-Unis, mais aussi en Afrique, en Asie et en Amérique du Sud. Les Romains qualifiaient de barbares toutes les autres civilisations. Anglais, Français et Belges étaient convaincus de leur supériorité sur les peuples qu'ils colonisaient, sous prétexte qu'ils avaient inventé le pudding, le pastis et les moules-frites. Qu'ont inventé les policiers américains blancs pour croire que la vie d'un Noir vaut moins que la leur ? Même pas la matraque et la poudre à canon de leur flingue.
CHARLIE Hebdo n°1454 du 3 juin 2020 (Édito).
Qu'est-ce que la France ? Les hommes politiques se posent-ils cette question lorsqu'ils entrent en fonction ? L'emploi, c'est pour gagner sa vie. L'écologie, c'est pour la vivre dans un écosystème protégé. La laïcité, c'est pour coexister avec ceux qui croient différemment. Qu'est-ce que la France ? C'est le pays où le questionnement sur soi-même est toujours associé à celui sur les autres. C'est concilier individualisme et universalisme.
CHARLIE Hebdo n° 1459 du 8 juillet 2020 (Édito).
Quant à nous, notre haine et notre crainte, nous n'en aurons pas honte. Nous les tairons pour ne pas heurter ceux qui ne comprendront jamais ce que se faire massacrer signifie réellement. Nous les tairons sans chercher à nous en défaire car cela est impossible, mais aussi parce qu'elles nous aideront, qui sait, à traverser d'autres épreuves dans le combat contre cet obscurantisme qui a tenté par la terreur de faire de nous ses esclaves. Car nous ne nous coucherons jamais. Nous ne renoncerons jamais.
CHARLIE Hebdo n°1467 du 2 septembre 2020 (Édito).
L'humour et la dérision sont une menace mortelle pour les organisations qui ont bâti leur pouvoir sur la peur. La peur de Dieu, la peur du parrain. Celui qui tente de s'en affranchir par le rire finira empoisonné comme dans le roman d'Eco, mitraillé comme le 7 janvier 2015 ou dynamité comme en Sicile. Et il n'aura pas d'excuse car on l'avait prévenu.
CHARLIE Hebdo n° 1437 du 5 février 2020 (Édito).
L'idéologie du "moins d'État et toujours plus de privé" est suicidaire, et le Liban en est l'exemple tragique. Un pays truffé de banques mais qui importe tout, des couches-culottes au rouleaux de PQ. Comme la France, pays des 365 fromages, certes, mais obligé de faire venir en catastrophe des masques et des médicaments fabriqués en Asie pour sauver de la mort des milliers de Français.
CHARLIE Hebdo n°1464 du 12 août 2020 (Édito).
L'argent s'est arrogé le droit de donner une valeur à toute chose, mais cette valeur est bidon, comme le démontre l'effondrement de la Bourse et du PIB. La seule valeur sûre, c'est l'humain et ses mains moites qui travaillent, c'est l'individu et son corps fatigué qui sue. Sans ces organismes vivants et primitifs, aucune société ne tiendrait debout.
CHARLIE Hebdo n°1447 du 15 avril 2020 (Édito).
Durant tout le XX° siècle, la démocratie a été coincée entre deux formes de totalitarisme, le fascisme et le stalinisme. La même tragédie semble se remettre en place aujourd'hui avec d'un côté les extrêmes droites xénophobes et de l'autre les extrémistes religieux islamistes. C'est dans ce champ de mines qu'il nous faut avancer pas à pas sans jamais s'écarter du chemin.
CHARLIE Hebdo n° 1475 du 28 octobre 2020 (Édito)
Pour l'instant, la France s'évite des émeutes raciales, les libertés fondamentales de croire ou de ne pas croire sont toujours protégées et, malgré les attentats, les Français démocrates, quelles que soient leurs convictions politiques, spirituelles et leur situation sociale, tiennent toujours à vivre en paix plutôt que de se laisser enfermer chacun dans leur ghetto et de n'avoir plus que l'émeute pour s'exprimer.
CHARLIE Hebdo n° 1476 du 4 novembre 2020 (Édito).
Le chaos n'est pas une forme d'expression désordonnée de la liberté, mais une méthode fasciste pour imposer un ordre nouveau. Le chaos que Bolsonaro et Trump organisent dans leur pays en laissant le virus se développer résulte de la même logique totalitaire : les dominants sortiront vainqueurs de l'épidémie et les plus faibles en mourront.
CHARLIE Hebdo n° 1449 du 29 avril 2020 (Édito).
Après la crise du coronavirus, il faudra continuer d'applaudir les soignants, brancardiers, médecins, infirmiers, anesthésistes et chirurgiens, mais cette fois pour protéger l'hôpital du virus libéral mortifère qui le contamine depuis des années.
CHARLIE Hebdo n°1451 du 13 mai 2020 (Édito).
Vaut-il mieux être surveillé par la NSA ou par un olibrius russe qui diffuse nos vidéos privées ? Vaut-il mieux être manipulé par des bataillons de hackeurs poutiniens ou suivi à la trace par Amazon grâce à nos achats sur le Net ? Aucune de ces perspectives n'est vraiment réjouissante. Comme au XX° siècle, où tout le monde fut écartelé entre deux totalitarismes, il nous faut trouver notre place sur ce champ de bataille impitoyable
.
CHARLIE Hebdo n° 1440 du 26 février 2020 (Édito).
Finalement, le verdict de ce procès, ce sont les lecteurs de Charlie qui l'on prononcé : chaque semaine en tenant ce journal bien vivant entre leurs mains, six ans après son massacre. Comme l'a conclu Maître Malka dans sa plaidoirie, on ne tue pas une idée. Surtout quand elle est la plus puissante et la plus exaltante de toute une vie : la liberté.
CHARLIE Hebdo n°1482 du 16 décembre 2020 (Édito).
Si le crime est si difficile à nommer, c'est parce qu'il fut commis au nom d'une idéologie fasciste nourrie dans les entrailles d'une religion. Et rares sont ceux qui, cinq ans après, osent s'opposer aux exigences toujours plus pressantes des religions en général, et de certaines en particulier.
CHARLIE Hebdo n°1467 du 2 septembre 2020 (Édito).