"Comme dans du verre brisé" de Agnès Marietta. Quelques extraits du spectacle, filmé lors d'une répétition générale à Saint Gaudens.
Je ne me détends pas, jamais. Si je regarde en arrière, les jours, les années, je m'aperçois que jamais je ne me suis détendue. Vraiment se détendre, je ne sais pas ce que c'est, laisser faire, laisser dire, laisser le temps filer, sans courir pour le rattraper, je suis toujours en action, en mouvement, en projet, en projection, et en fait je suis épuisée.
C'est merveilleux, la sensation d'avancer sans rien savoir, sauf qu'on avance, que la machine enfin se remet en route et peu importe de savoir ou de ne pas savoir où on va.
" Ma femme déteste la campagne... Je crois qu'elle en a trop mangé quand elle était petite.
- Indigestion.
- Voilà.
- Du coup, c'est vous qui vous faites manger par la ville ... "
Faire de la place au hasard. A ce qui me touche de si près que je ne le vois plus. La main de mon mari. Sa tête sous l'oreiller quand il dort, enfoui comme ça depuis l'enfance, sa tête tournée vers moi, toujours, quand il se réveille, pour vérifier, avant de se lever, que je suis toujours là, que je ne me suis pas envolée, qu'il ne m'est rien arrivé.
- Tu as pensé à moi ?
- Tous les jours. Plusieurs fois par jour. J'ai failli t'appeler. Et puis je me suis dit " Bon'.
- Tu t'es dit "Bon" ? Quelle vie intérieure trépidante.
j'avais le trac. Un trac de malade. Un trac qui me nouait l'estomac et m'engourdissait toute entière. Un inconnu allait franchir la porte de cette maison et j'allais devoir l'appeler papa.
- Qu'est-ce qui est difficile? [...]
- Rien.
De vous voir là, tous les cinq réunis, pendant que la nuit tombe dehors, votre sentiment de sécurité qu'aucun hiver ne viendra refroidir, vous voir me laisser une place que je n'ai pas envie de prendre parce que j'ai un trou d'air dans la poitrine, voilà, c'est tout cela qui est difficile.