Est-ce le début d’une accoutumance à la littérature japonaise à force de piocher dans l’étonnante diversité de l’Atelier Akatombo ? Ou la surprise de tomber sur un tel roman noir là où je ne l’attendais pas ? Tout est-il que je me suis régalé avec Les Chiens de l’enfer de Akio Fukamachi (traduit par Jacques Lalloz), pavé sombre, addictif et réussi.
Gorô Idezuki est flic.
Shôgo Kanetaka est un homme de main du gang Kôzu.
Gorô et Shôgo sont la même personne…
Gorö/Shôgo est un infiltré !
À la manière d’une Nikita au pays du soleil levant, Gorô a accepté de renier sa vie d’antan où une belle carrière lui était promise au sein de la police de Tokyo. Patiemment, à la demande de ses supérieurs, il s’est refait une identité et a intégré les yakuzas du gang Kôzu. La fin justifiant les moyens, son aptitude au combat, sa résistance au mal, mais aussi ses capacités à enlever, torturer et tuer s’il le faut l’ont hissé auprès du triumvirat qui dirige la fédération des gangs de la pègre japonaise.
Quatre années d’efforts, de reniement, de risques, de blessures et de sang sur les mains et le voilà désormais proche de son objectif final. Mais c’est là que tout bascule : la mission évolue, les masques tombent, le doute parcourt les gangs et les vengeances sanglantes se multiplient. Les infiltrés ne sont plus forcément ceux que l’on croit ; les bons et les méchants non plus ; Gorô est désormais en réel danger de mort…
Dès l’ouverture - d’une tension et d’un réalisme quasi-cinématographique – Fukamachi nous plonge dans un rythme fou, qui ne va quasiment plus faiblir pendant 460 pages où les âmes sensibles auront parfois des lignes à sauter. C’est l’intensité de ce rythme (et l’utile index de début de livre) qui permet de digérer le sentiment de confusion de noms et de gangs qui s’installe parfois, vite effacé par la reprise d’un fil d’action qui reste toujours crédible.
Mais ce qu’il réussit le mieux, c’est ce portrait de flic infiltré et convaincu de la justesse de sa cause comme de la légitimité des horreurs qu’il commet, mais qui page après page, se prend à douter et à voir ses repères vaciller. Un personnage réussi donc, qu’on apprécierait bien récurrent…
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Livre lu dans le cadre de l'opération Masse critique de mars 2021. Je remercie Babelio de m'avoir sélectionnée. Et un grand merci aux éditions Atelier Akatombo pour leur diligent envoi accompagné d'un sympathique petit mot.
Du fait de son choix éditorial axé sur des traductions d'auteurs japonais peu ou pas connus en France, cette maison ne pouvait que me plaire, et enrichit ma bibliothèque de ses publications depuis ses débuts en 2018. En plus, j'adore la libellule du logo!
Aussi est-ce avec impatience que j'ai commencé son dernier-né, Les Chiens de l'enfer, d'Akio Fukamachi. L'auteur tire les choses au clair dès le premier chapitre: avec lui, on n'est pas chez Hello Kitty. Du brut, des brutes, de la baston, du yakuza en veux-tu en voilà.
Pourtant, croire, au vu de ces premières pages, ce roman réduit à un simple concentré de violence serait une erreur. Il est plus que cela et m'a apporté bien plus qu'une forte dose d'adrénaline et d'hémoglobine.
Le récit se concentre sur Shôgo Kanetaka, alias Gorô Idezuki. Ou plutôt Gorô Idezuki, alias Shôgo Kanetaka. Encore que... ou bien...
Non, je ne déraille pas, la grande question est là. Le personnage apparaît à la première ligne, homme de main du gang Kôzu, de la Fédération yakuza Tôshô du Kanto. Il est Shôgo Kanetaka, un des meilleurs exécuteurs du clan. Et réputé des plus dangereux.
Il est aussi Gorô Idezuki, flic infiltré parmi la mafia japonaise depuis déjà plusieurs années. Avec tous les périls qu'une telle opération comporte. A chaque instant, il risque d'y laisser des plumes. D'y perdre la vie. D'y perdre son âme. Et son identité, donc!
En plus d'offrir à ses lecteurs une plongée dans le milieu des yakuzas, Akio Fukamachi nous fait partager le stress infini, les tiraillements et les tourments où est plongé Shôgo/Gorô. Il a créé un personnage auquel j'ai cru tout le long de ma lecture, et même quand je refermais - difficilement - le livre. Avec Shôgo, j'ai découvert le fonctionnement des clans mafieux, basés sur une hiérarchie extrêmement rigoureuse, sur des rituels qui semblent sortir d'un autre temps et sur un certain sens de l'honneur, de la loyauté et de la solidarité. Loin de toute approche romantique ou manichéenne, l'auteur montre les divers aspects, les plus repoussants comme les plus fascinants, de cet univers si dangereux, ombreux mais où toute humanité n'a pas entièrement disparu. On est ainsi plus à même de comprendre les déchirements de conscience de son personnage.
Si l'histoire tourne autour de Shôgo/Gorô, Akio Fukamachi n'a pas pour autant négliger ses autres protagonistes. Yakuzas ou policiers, il donne profondeur et vraisemblance à toute une galerie de personnages.
Quant au style, il est à l'image du récit : nerveux, tendu, sombre et faisant la part belle à un descriptif cinématographique. Le roman se déroule sans le moindre temps mort, sur un fil au-dessus d'un abîme.
J'ai eu beaucoup de mal à lâcher ce livre et je le referme à regret tant son "héros" et ses comparses se sont ancrés dans mon esprit. J'ai lu que l'auteur avait écrit d'autres romans. J'espère vivement que d'autres traductions de son œuvre suivront celle-ci. En attendant, encore un grand merci à Atelier Akatombo et à Jacques Lalloz, le traducteur de ces Chiens de l'enfer, pour m'avoir permis cette belle découverte et cette palpitante lecture.
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L'action se situe au Japon, de nos jours.
Le jeune Gorô Idekuzi se connecte à un site hautement sécurisé pour communiquer à son supérieur à la Brigade spéciale d'investigation de l'Antigang, Masuru Anai.
Il tape un rapport d'activité dans lequel il décrit dans quelles conditions il vient de traiter le cas Shûzô Kina, membre de la fédération Washô. Il précise les noms et les fonctions des personnes qu'il a rencontrées, mais surtout, où elles viennent d'être enterrées. Car Idekuzi n'est pas un policier comme les autres : c'est un policier d'élite infiltré depuis quatre ans dans un gang de yakuzas, le gang Kôzu. Sa mission a exigé de lui de changer de nom, de visage. Mais surtout d'effectuer les missions difficiles des yakuzas, avec son partenaire Hideki Murooka, le tueur numéro un du gang Kôzu. Si en temps ordinaire la vie d'un yakuza n'a rien d'un long fleuve tranquille, que dire lorsque s'ouvre une période de guerre de gangs ?
Je suis fascinée par le Japon et sa culture. Les Chiens de l'enfer, roman policier japonais d'Akio Fukamachi, me promettait une immersion au sein du monde très fermé des yakuzas. Il dépeint l'atmosphère ultra-violente qui règne au sein des clans. En effet, la violence est omniprésente, quelquefois gratuite. Lors des combats, les yakuzas ne disposent pas d'armes au sens classique, ils combattent en général à mains nues ou en utilisant toutes sortes d'objets détournés de leur fonction initiale – il s'agit de donner la mort. Les traques, les enlèvements d'hommes, de femmes voire d'un enfant, les exécutions, m'ont paru insoutenables.
Dès le départ le lecteur sait que Katenaka est infiltré se demande ce qui va se passer lorsqu'il sera démasqué… Mais rien ne se passe comme prévu, c'est bien l'art d'Akio Fukamachi de nous lancer sur des fausses pistes…
Il me semble que l'un des intérêts du roman réside dans l'analyse psychologique de Katenaka, qui peu à peu prend conscience du prix à payer pour l'accomplissement de sa mission au demeurant totalement illégale. Comment peut- on supporter l'accumulation d'une telle violence qui le révulse à tel point qu'il vomit, prend des médicaments pour "tenir" jour après jour ? Pourra-t-il redevenir un policier comme les autres ? Restera-t-il à jamais prisonnier de son personnage de yakuza, de ses tatouages, de sa mémoire qui refuse d'effacer les visages des hommes et de la femme qu'il a tué de ses mains, de sa conscience qui commence à le tarauder ?
De ce roman, je garderai en mémoire les visages fatigués et inquiets de Gorô Idezuki et de Noriko Kinugasa, la masseuse âgée qui l'aide et sert d'agent de liaison, alors qu'ils vont finalement affronter leur destin. Leur questionnement aussi.
Gorô se dépeint comme un chien enragé qui a envoyé en enfer amis et ennemis, mais qui a toujours eu la liberté d'agir. Mais quelle est cette liberté ?
Un roman au final époustouflant.
La traduction de Jacques Lalloz me semble particulièrement bien rendre en français le texte original, et j'ai hâte de découvrir le manga tiré de ce roman.
Je remercie Masse Critique, de Babelio et les Ateliers Akatombo (en japonais : la libellule rouge), de m'avoir adressé Les chiens de l'enfer, d'Akio Fukamachi pour en faire la critique.
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Grâce à la masse critique, j’ai découvert cette maison d’édition spécialisée dans les livres japonais. Premier point positif : le livre objet est vraiment beau. Puis je me suis plongée dans cette histoire hyperviolente de flic infiltré chez les yakusas. Certaines scènes de torture et de mise à mort ne sont à peu près soutenables que parce qu’il s’agit de règlements de comptes entre affreux jojos, et qu’on se console en se disant que la «victime» serait capable des mêmes actes de cruauté. Cependant, j’en ai lu certaines en diagonale… Par ailleurs, le style ou la traduction laissent à mon avis à désirer, avec l’utilisation de certaines expressions d’une façon qui m’a parfois semblé impropre. Je me suis néanmoins laissé prendre par le suspense et n’ai pas lâché le livre une fois ouvert. Je le recommande donc à tous les amateurs de romans noirs bien sanglants…
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🌺Les chiens de l'enfer🌺 de Aki Fukamachi - 474 pages - 20,00€
Idezuki est devenu lieutenant à la force de son travail, Son supérieur lui demande alors de s'infiltrer chez les Yakuzas.
Après une chirurgie esthétique et un changement de nom, Idezuki devient alors Kanetaka, prêt à entrer dans le gang très réputée du clan de la Tôshô.
On va alors suivre son parcours dans la pègre, où la mort et les sévices sont monnaie courante, les détournements d'argent et de drogues aussi.
Kanetaka s'intègre dans ce milieu où le sang coule sur ces mains, il n'hésite pas à tuer.
Il arrive a avoir la confiance de tous et parvient au rôle de garde du corps du patron, Toaké, du gang de la Tôshô.
On va suivre ce policier à travers la guerre des gangs, à la recherche du traître Ujiie.
Va t'il réussir à retrouver une vie normale après avoir baigné dans le sang ?
Va t'il pencher vers la pègre ou la police, revenir à la vie ou rester du côté sombre ?
Une écriture fluide et agréable, des personnages bien définis pousse le lecteur dans une lecture addictive.
Je découvre encore un super polar japonais grâce à la maison d' éditions @atelierakatombo que je remercie.
Une lecture que je vous recommande amplement.
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Je ne suis pas un fin connaisseur de polars. C'est d'ailleurs en toute honnêteté le premier que je lis. A fond dans la culture japonaise et les jeux de type Shenmue et Yakuza, ce livre m'a été offert pour contenter ma monomanie.
Le livre s'avère plus profond qu'attendu.
On y retrouve des descriptions précises à la japonaise, avec un attachement pour l'alimentaire et la violence très aride et rude (visuellement et olfactivement). Une histoire excessive qui interroge de manière intéressante la condition de la taupe : ayant une idée fixe pour justification, capable d'annuler son être à défaut d'en avoir un, Fukamachi nous invite à suivre ceux qui cherchent à obéir tout en ne parvenant ni à mener leur quête à bien par impossibilité, ni à s'échapper de cette servitude sans en payer le prix et révéler ainsi l'absurdité de la condition humaine, de façon parfois aussi stéréotypée que saisissante, non sans parvenir à être percutant sur le plan littéraire.
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