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Critiques de Alba de Céspedes (28)
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Elles

Je ne m’attendais pas en ouvrant ce livre à y découvrir une véritable pépite de plus de six cents pages.



Alessandra naît dans les années trente à Rome et sa mère regrette déjà qu’elle soit une fille. Son père s’en détournera sur le champ. Élevée par une mère exaltée et passionnée, Alessandra grandira en écoutant les hirondelles, en regardant le bonheur des heures durant à la fenêtre. Elle fera surtout de l’amour vrai son étendard. Sa mère Eléonora souffrira de longues années de la monotonie de son couple. À l’époque, les femmes n’étaient considérées que pour leur utilité: procréer et faire le ménage. Si courtiser laisse entrevoir un peu de romantisme, passé le mariage, le mari se détourne de sa femme. Beaucoup s’en accommodant, Eléonora en pâtira longtemps espérant que sa fille Alessandra s’endurcisse et rentre dans le moule d’une vie sans éclat.



Véritable fresque intime au cœur de la condition féminine en Italie, à l’aube du fascisme, ce livre se lit avec douceur, concentration et moult respect. Ce n’est pas un livre qu’on ouvre pour lire dix pages entre deux occupations. Il faut lui accorder du temps afin de capter toute l’essence puissante qui émane tant de l’histoire que de cette atmosphère si feutrée aux contours magnétiques.



On accompagne Alessandra dans sa résistance, dans sa rébellion, dans cette farouche obstination d’être aimée comme elle l’a toujours rêvé, en lisant Shakespeare ou en écoutant sa mère au piano.



Si aujourd’hui les hommes sont plus enclins à s’amouracher d’une femme libérée et exaltée, si aujourd’hui la passion amoureuse attire davantage les foules, début du 20eme siècle, une femme exaltée était considérée comme folle, détraquée, volage. Il est bon de se rappeler que la condition féminine a bien évolué.



Pour conclure, je reprends cette critique très juste de Le phare Dimanche :

« C’est la plainte déchirante de la condition féminine. Qu’on ajoute la grâce et la nuance, la justesse et la discrétion, l’exceptionnelle et souple densité du récit : Elles est un très grand livre. »
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Le cahier interdit

Une femme dans la quarantaine achète un cahier, le cache à tous, et y écrit en cachette.

Elle lui confie ses pensées, ses réactions, ses doutes, sa relation avec son mari, avec sa fille, avec son fils et avec son directeur.

Ce cahier l’amène à se poser des questions, peu à peu elle réalise, sans vouloir l’admettre tout à fait, que sa vie pourrait être différente mais, toujours écrasée par les autres et surtout par ses sentiments de devoir, elle ne peut se résoudre à changer de vie.



L’écriture de ce cahier la fait réfléchir, elle ne voit toujours pas clair en elle, mais le lecteur la comprend mieux qu’elle même !



C’est une belle analyse psychologique.

Nous suivons l’évolution de cette femme, ses ébranlements qu’elle s’efforce de ne pas voir, ses certitudes d’agir correctement sans cesse ébranlées.

Nous la découvrons par ses confidences faites au cahier et bien souvent j’aurais voulu lui dire de se laisser aller, de penser à elle



Malgré la critique qui suivra, j’ai poursuivi et terminé la lecture du roman.



, le livre a fait son temps : qui aujourd’hui condamnerait à ce point sa fille de sortir avec un homme marié, de coucher avant le mariage, qui accepterait cette vie de femme soumise, qui renoncerait au bonheur, existe-t-il encore des couples obligés de se marier pour avoir « fauté » ? Le contexte sociologique de notre époque a bien évolué depuis !
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Elles

Ce roman est sorti en 1949 et a été publié au Seuil en 56.

On ne peut que se réjouir de l'heureuse initiative de Gallimard d'avoir réédité pour la France "Elles" car nous avons ici entre les mains, un grand roman sur l' Amour, sur les femmes, sur le rapport entre les femmes et les hommes mais aussi sur la lutte contre le fascisme et la recherche de la liberté.

C'est un livre d'une grande richesse écrit avec une plume moderne, féministe et intelligente.

Résumer plus de 600 pages m'est tout simplement impossible mais je peux dire sans risque que c'est un roman passionnant mêlant la petite histoire dans la grande avec force et énormément d'émotions.



Je terminerai sur un passage de la préface écrite par l'autrice elle-même en 1994

" Ce livre est aussi le résultat d'une prise de conscience autour de l'enthousiasme qui m'avait naïvement guidée dans ce combat pour la liberté et de la certitude de pouvoir vivre l'amour comme une aventure sans limites et sans ambiguïtés."

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Elles

Paru pour la première fois en 1949 en Italie puis en 1956 pour la traduction, ce livre semble connaître un regain d’intérêt, aussi bien en Italie qu’en France, avec cette nouvelle parution chez Gallimard l’an dernier.



Une jeune femme, Alessandra, rédige le récit de sa vie, nous n’apprendrons qu’à la toute fin de roman dans quelles circonstances dramatiques elle le fait. Elle nous raconte d’abord son enfance, marquée par la relation très forte, presque fusionnelle, avec sa mère. Une mère qui ne s’épanouit pas dans sa relation conjugale, elle ne semble pas avoir grand-chose en commun avec son mari. Elle a renoncé à une carrière de pianiste, et s’épuise à donner des leçons de piano, pour soutenir les finances familiales, tout en gérant le quotidien. Mais un jour, dans une famille où elle intervient, elle fait la rencontre d’un homme, dont elle tombe amoureuse. Elle ne pourra vivre cet amour, et sera détruite. Alessandra, après un séjour à la campagne, dans la famille paternelle, lui proposant un autre possible, va tenter de reprendre ses études, et va faire la rencontre d’un professeur de philosophie anti-fasciste, qu’elle va épouser. Ils traverseront ensemble la fin de la deuxième guerre, mais malgré tout l’amour qu’Alessandra éprouve pour Francesco, elle ne trouvera pas son compte dans cette relation.



L’auteure, dans une préface écrite postérieurement, insiste sur l’importance de l’amour pour les femmes, elle précise que son livre s’oppose à l’idée que l’amour est une illusion. Pourtant, c’est le sentiment que me laisse le roman. L’homme qu’aime Alessandra, qui est un homme avec énormément de qualités et d’ouverture d’esprit, ne comprend tout simplement pas ce qu’elle attend de lui et finalement n’accorde aucune importance à ses attentes. Elle devrait se plier à ce que lui attend d’elle, et qui lui paraît tout à fait légitime. L’auteure met parfaitement en évidence la condition subalterne que la société assigne aux femmes, et cela d’une manière insidieuse. Francesco ne considère jamais Alessandra comme une véritable personne, avec qui il pourrait partager sa vie, dans un vrai échange, elle doit se contenter d’une place très secondaire, chacun vivant dans une sphère bien spécifique, avec des frontières bien délimitées. Alessandra, avec son extrême sensibilité ne peut le supporter. Ce qui rend les choses compliquées, c’est l’impossibilité de dire les choses, son ressenti n’existe tout simplement pas pour les autres. Tout le monde considère qu’elle devrait être satisfaite de son sort, que ce à quoi elle aspire est incompréhensible.



C’est un beau livre, très sensible et touchant. Tous les personnages sont très bien caractérisés, il y a la descriptions de différents lieux, ambiances, sensations. C’est très romanesque, avec beaucoup d’événements, de rencontres, un tableau de l’Italie dans la deuxième guerre mondiale. Le récit n’a rien de prévisible ni de simpliste, il est très bien mené. C’est une auteure qui mérite incontestablement d’être mieux connue et que je suis heureuse d’avoir découvert à l’occasion de cette réédition que est très bienvenue.
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Avant et après

Irène est une femme qui a dû fuir son pays, l'Italie, pendant le Seconde Guerre mondiale en raison de ses idées communistes et de sa participation à un journal clandestin. De par ce fait, qui lui a longtemps été reproché par sa mère, elle a du partir de chez elle avant d'arriver à Paris où elle s'est installée et a trouvé un métier de journaliste. Tout cela, le lecteur l'apprend au fil du roman, à travers de nombreux flash-back car l'histoire en elle-même se déroule bien après la guerre et Irène commence à sa livrer aux yeux des lecteurs suite ç l'annonce que lui a faite sa jeune domestique, Herminie, de vouloir la quitter pour retourner chez ses anciens employeurs.

Cette annonce a été dure à avaler pour Irène qui ne considérait pas du tout cette dernière comme sa bonne à tout faire.

Elle avait des idées bien avancées sur la place de la femme de la société et a toujours refusé de dépendre de qui que se soit, se plaisant à être une femme livre, qui ne soit ni entretenu par ses parents ni par son mari.



Dans cet ouvrage, on découvre la difficulté à se faire une place à part entière en tant que femme, seule et indépendante, dans ce milieu d'après-guerre, l'incompréhension entre hommes et femmes et surtout les dégâts de plusieurs années de guerre peuvent apporter sur un peuple, d'où le titre "Avant et après".

Un livre que j'ai trouvé très bien écrit, avec de nombreuses réflexions sur le bonheur, comment le trouver et surtout comment savoir lorsqu'on l'a réellement trouvé. Le combat extraordinaire d'une femme qui n'a jamais accepté le domination de qui que ces soit sur ses pensées et qui est allée jusqu'au bout pour les faire entendre. A découvrir !
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Elles

"Pas un seul être n'est libre. Personne n'est libre. Notre liberté prend fin très peu de temps après notre naissance, dès qu'on nous impose un nom, dès qu'on nous greffe sur une famille. A partir de ce moment, impossible de nous enfuir, de nous dégager, d'être vraiment libres, en somme. Notre prison, c'est l'état civil."



Ces mots, prononcés par sa mère, Alessandra espérera longtemps qu'ils pourraient être dépassés et même démentis. Mais lorsqu'on est une fille puis une femme dans l'Italie des années 30 et sa société patriarcale, machiste et fasciste, cela sonne plutôt comme une malédiction. C'est toute l'essence de ce roman fleuve qui donne voix à Alessandra, une voix puissante, celle d'une femme déterminée à croire à la réalité de l'amour malgré tout. Elle revient sur son enfance, sur le fantôme de son petit frère Alessandro mort accidentellement et dont elle hérite du prénom, sur les aspirations romantiques de sa mère qui veut croire elle aussi qu'une autre vie est possible et pas seulement dans les romans qu'elle dévore. Nos vies sont-elles déjà déterminées à la naissance par notre genre et notre condition ? La conjugalité détruit-elle forcément la beauté du lien et des désirs qui y ont conduit ? Ce que raconte Alessandra des humiliations que son père lui fait subir au prétexte qu'elle est une fille est un avant-goût de ce que lui réserve plus tard la société. Mais la jeune femme est déterminée. A lire. A étudier. A travailler. A se marier par amour. Et surtout à trouver le moyen d'exister pour son mari en tant qu'amante, partenaire, amie et non pas seulement cuisinière ou femme de ménage. Les années de guerre à partir de 1939 et l'engagement anti fasciste de son mari lui en donneront l'occasion autant que les désillusions.



Ce roman a initialement été publié dans les années 50 en Italie et je suis ravie d'avoir pu le découvrir à l'occasion de cette réédition. Il est d'une densité impressionnante qui mêle habilement l'intime et le politique pour dessiner le portrait d'une nation autant que celui d'une figure féminine en quête d'émancipation. Il y est question d'amour et de relation à l'autre, comme de l'éveil d'une conscience politique au cœur du chaos provoqué par les changements de régimes. Il y est question de rébellion, de combat contre l'assignation que fait peser la société sur les femmes. C'est passionnant et parfois saisissant, comme ces quelques pages qui décrivent l'état d'esprit d'Alessandra après sa nuit de noces et se révèleront clé pour la suite tragique de l'histoire. Un formidable roman, intelligent et puissant.
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Elles

❤Je n'avais jamais entendu parler de cette autrice italienne avant la réédition chez @gallimard de son principal roman. Pourtant, c'est un texte féministe fondamental dans le paysage littéraire du XXeme siècle.



« Elles », ce sont les femmes qui habitent les pages de ce roman de leurs passions, de leurs voix étouffées, de leurs velléités d'indépendance, de leur complicité salvatrice, de leurs morts libératrices. C'est de l'intérieur, de leur point de vue, celui qui compte si peu dans l'Italie fasciste qui sert de toile de fond au roman, que nous est racontée cette histoire, celle d'Alessandra la narratrice, depuis son enfance à la fin de la guerre.



Roman de formation, histoire d'amours déçues, récit de la Résistance italienne, il y a tout cela dans ces pages d'une absolue justesse, mais il y a surtout une grande richesse psychologique dans la description des personnages féminins, des réflexions d'une contemporanéité déstabilisante, sur le mariage et la domination patriarcale, sur l'amour, idéalisé et pur, sur le vide et le désespoir qui s'emparent de ces femmes qu'on relègue constamment au second plan.



Des images marquantes me restent de ce récit : la mère d'Alessandra, élégante et tragique, le dos de Francesco, le mari d'Alessandra, ce mur de silence qui consume la jeune femme, mais aussi cette scène merveilleuse d'intimité entre Alessandra et son amie, ou encore la découverte des Abruzzes de la grand-mère maternelle.

J'ai tout aimé dans ce roman, et suis encore ébahie par la beauté et la pertinence stupéfiante des mots que pose l'autrice sur l'intériorité des femmes.



Même les événements historiques, le Fascisme, la Seconde Guerre Mondiale, la Résistance, nous parviennent de manière étouffée, des intérieurs de celles qu'on exclut de l'histoire.

C'est passionnant et tragique, et la confession de cette femme sensible, qui veut croire au véritable amour, qui veut être l'égal de son mari, étudier, travailler et se battre aux côtés des Résistants, est d'une force saisissante.



Un livre indispensable et militant qui méritait bien une réédition. A découvrir de toute urgence !
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Le cahier interdit

Ce roman qui pourrait sembler légèrement démodé ou désuet prend toute sa force lorsqu'on réalise qu'il s'agit d'une réédition et qu'il a en fait été écrit en 1952... ! En 1952 et en Italie, donc juste après la 2ème guerre mondiale dans un pays où le patriarcat s'exerçait sans partage.

Valeria Cosati commence un beau jour à écrire son journal intime, en prenant bien garde de cacher son existence à son mari et ses enfants. C'est en écrivant jour après jour les petits événements de son quotidien que Valeria prend conscience de sa "non-existence" pour elle-même : sa vie n'a de sens que pour servir sa famille, son mari et ses deux grands enfants qui n'imaginent pas une seconde qu'elle puisse avoir une vie personnelle ou des aspirations autres que celle de s'occuper du foyer. Et en effet, à leurs yeux, si Valeria travaille, c'est uniquement pour améliorer le maigre salaire de son mari et son travail n'a bien évidemment aucune espèce d'importance ou d'intérêt.

Mais voilà, l'écriture révèle petit à petit à Valeria la vacuité de cette vie vouée à son mari et ses enfant et va faire basculer son existence.

Malgré quelques longueurs, ce livre m'a en fait paru incroyablement moderne si on le ramène dans son contexte, l'Italie au lendemain de la guerre.
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Le cahier interdit

Avant de partir en vacances une semaine dans le nord de l’Italie début juillet, j’ai eu la chance de tomber sur l’avis de Sonia (@soso_books_moods_and_more sur instagram) sur ce roman de 1950, réédité en français en mai dernier. Je me suis sentie immédiatement attirée par cette histoire et mon intuition est tombée pile, car Le cahier interdit fut une découverte marquante. J’y pense encore régulièrement (je l’ai terminé mi-juillet) avec une impression bouillonnante et feutrée d’authenticité et de vie.



Rome, années 50. Valeria a une quarantaine d’années, fait partie de la petite bourgeoisie et vit dans un appartement avec son mari et ses deux grands enfants. C’est une mère et une épouse dévouée, qui gère tout de a à z chez elle et travaille en plus à temps partiel dans un bureau, pour arrondir le budget de son ménage.



Un matin, sur une impulsion qui la surprend elle-même, Valeria achète un cahier neuf, dans lequel elle commence en cachette à raconter son quotidien.



Les jours passent et de plus en plus les mots écrits la révèlent à elle-même, comme si le cahier ouvert était devenu un miroir, à la surface duquel elle se découvre – et dont les tréfonds mouvants inquiètent et troublent. Un soi qu’elle ne soupçonnait pas, qu’elle avait muselé, enfoui et renié depuis longtemps, depuis toujours – pour rentrer dans le moule, pour cocher toutes les cases dictées par les conventions, la société, sa famille, son éducation.



Introspection, réflexion, on voit se dessiner une vie qui se fissure, dans une société italienne d’après-guerre en pleine mutation. Sa fille s’émancipe et son fils se cherche, son mari a peut-être d’autres rêves. La société change et le pouvoir de la religion s’effrite, les gens commencent à pouvoir penser par eux-mêmes et non plus à l’aune d’une morale à oeillères imposées. Valeria réalise à mesure des jours qui passent que peut-être elle aussi aspire à autre chose, et l’on aperçoit en transparence entre les lignes une fleur en bourgeon qui se déploie et tente de s’épanouir.



Alba de Céspedes développe un merveilleux talent pour incarner tous ses personnages, devenus vivants à nos yeux, alors qu’il n’y a que la voix de Valeria. Le propos est bien dosé, et la plume ferme, élégante et fluide. Ce n’est pas évident de réussir à ne pas tourner en rond ni lasser, avec ce type de narration ! Le roman se tient de bout en bout, et la fin est déchirante.



A sa parution, Le cahier interdit a dû à n’en pas douter éveiller certaines consciences et en soutenir d’autres. Son discours féministe et pour le libre arbitre réjouit et inquiète tout à la fois car finalement tout cela c’était hier et encore aujourd’hui pour beaucoup – et l’on sait que certains voudraient bien ici-même en tapisser nos demains.



Un coup de cœur – de ceux à rebours, qui s’imposent dans le temps.



« Me voilà obligée de nouveau d’écrire la nuit. Pendant le jour, je n’ai pas un instant de répit. Du reste, je m’aperçois que personne ne s’étonne ou ne proteste quand je suis debout, le soir, en déclarant que j’ai encore quelque corvée. N’avoir que cette heure de solitude pour écrire me fait comprendre que c’est la première fois — après vingt-trois ans de mariage — que je consacre un peu de temps à moi-même. »
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Le cahier interdit

« Le cahier interdit » prend la forme du journal intime d’une femme de 43 ans, épouse, mère et employée.

Il explore les banalités de sa vie quotidienne, son aliénation domestique et le désir de s'en libérer qui va s’éveiller grâce à l’écriture d’un cahier acheté sur un coup de tête.



Nous sommes dans l’Italie d’après-guerre. Valeria Cossati est une épouse et mère dévouée de deux enfants étudiants, Mirella et Riccardo, vivants toujours sous le toit parental en attendant leur envol et leur indépendance toute proche.

Valeria a toujours mené une vie tranquille, remplissant consciencieusement ses différents rôles, s’effaçant et s’oubliant totalement au profit de sa famille. Fait inhabituel pour sa génération, elle occupe également un travail de bureau car le revenu de son mari est insuffisant. Le foyer vit frugalement.

Un dimanche d'automne, impulsivement, elle achète un cahier et le cache sous son manteau. Elle commence à y raconter sa vie. Elle écrit en cachette, consciente dès le départ qu'explorer son propre point de vue ne peut que troubler les eaux calmes de son monde domestique claustrophobe. Elle cache le cahier à divers endroits de l’appartement, redoutant que quelqu’un le découvre. L’idée même qu’elle puisse écrire un journal intime et avoir un tiroir lui appartenant, fermé à clef pour le ranger, semble totalement saugrenue à ses enfants et son mari, niant ainsi qu’elle puisse avoir une vie intérieure intéressante. Par le biais de leur moquerie et de leur mépris, ils lui refusent l’autorisation de prendre ses pensées au sérieux.

En couchant sa vie sur le papier, Valeria se réveille. Cette conscience de soi qui naît de l’écriture lui révèle les fissures dans la façade du bonheur domestique. De nouveaux désirs naissent et l'apparence de sa famille soudée commence à se fracturer. Le fossé entre sa vie intérieure de plus en plus désespérée et les rôles qu'elle se sent obligée de jouer grandit…



Valeria incarne les conflits et les tensions de sa génération, une génération de transition, déchirée entre les valeurs traditionnelles de sa mère et les revendications de liberté de sa fille.

De Céspedes nous offre le portrait déchirant d'une femme prise dans le piège social de la société patriarcale archaïque, écrasée par la puissance que le collectif fait peser sur elle, et explore le pouvoir libérateur de l’écriture, le rôle primordial de l'écriture dans la libération et l’amélioration de la condition des femmes, mais aussi les questions de classe sociale. Elle pose la question pour une femme d’avoir une « chambre à soi », un endroit réservée dans lequel penser et retranscrire sa pensée en toute sécurité, un endroit réservé à sa vie intérieure.

Ce roman féministe magistral, puissant et brillant, considéré comme subversif lors de sa parution en 1952, n’a pas perdu de sa force, de son actualité et son caractère subversif.

Une grande partie de la puissance du roman vient de ce qui est seulement suggéré mais jamais tout à fait dit.

Un roman sublime après le non moins sublime « Elles ».
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Elles

Une histoire dramatique, bouleversante de cette femme italienne qui veut être reconnue comme telle et aimée.

Histoire de sa mère qui n'a jamais été heureuse avec un mari qui gouverne la maison.

Elle fera une belle rencontre mais ne pourra pas quitter sa fille.

Puis on part dans les Abruzzes, où la vie est dure, où elle rencontre sa famille mais elle n'aura pas d'autres choix que de revenir sur Rome s'occuper de son père avec qui elle n'a aucun échange, aucune communication.

Elle rencontrera son futur mari. Elle voulait et avait une vision de la vie pleine d'amour et de joie, de relations intenses mais nous sommes en période de guerre et l'homme change.

Un grand roman, d'une grande force, d'une grande puissance.
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Elles

D’origine cubaine, Alba de Céspedes est une écrivaine italienne féministe du XXème siècle. Bénéficiant probablement de la mouvance #metoo, ses écrits ressortent chez Gallimard, et c’est à la faveur de mon anniversaire l’année dernière que son roman « Elles » est arrivé entre mes mains.

Alessandra y raconte son histoire : fille unique d’un couple sans argent et sans amour, elle grandit dans l’ombre de sa mère Léonora dans le Rome de l’avant-guerre. Pendant que son père fonctionnaire s’ennuie dans un emploi qu’il exècre, toutes les deux vivent dans un monde à part, entre les corvées inhérentes à toutes les femmes de l’époque, les leçons de piano données par la mère, et l’ombre de ce grand frère trop tôt disparu. Jusqu’au jour où Léonora tombe amoureuse d’un autre homme et veut quitter son époux…

On dit qu’Elena Ferrante s’est grandement inspirée de l’œuvre d’Alba de Céspedes, et cela ne m’étonne pas du tout. On retrouve en effet dans « Elles » les mêmes qualités et défauts que dans la saga « Mon amie prodigieuse » : le quotidien dans la classe ouvrière de l’Italie du siècle dernier, la prise de conscience de la condition de la femme dans cette société profondément patriarcale, la sororité pour les points positifs ; l’art de couper un cheveu en quatre et de partir dans une looongue analyse des sentiments féminins pour les défauts. Car si j’ai été emportée par la première moitié du roman, la seconde a vraiment trainé en longueur avec la découverte de l’amour par Alessandra. Jusqu’à la fin, surprenante, que je ne n’avais pas vue venir et qui m’a scotché, donnant un autre éclairage à ce que j’avais pu lire auparavant.

Bref, pas mal mais un peu long !
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Le cahier interdit

Le cahier interdit

Alba de Céspedes

Gallimard



« Je voulais être seule pour écrire, ou quiconque veut s’enfermer dans sa solitude, en famille, porte toujours en lui le germe du péché. »





Ce jour-là, elle achète ses fleurs, le paquet de cigarettes de Michelle et le cahier. C’est dimanche et c’est interdit, mais elle le veut, il lui faut, elle va insister et partir avec son cahier.

L’autre difficulté : le cacher, une difficulté de taille quand chez vous, rien ne vous est propre ou strictement privé, pas même un placard dans la buanderie. Et suivra ensuite le souci fondamental, où et quand l’écrire sans se faire surprendre ni éveiller soupçons et curiosités !



Nous sommes en 1950, Valéria Cossati achète donc ses fleurs et n’a pas de chambre à soi et cela devient un problème majeur. Surtout depuis qu’elle consigne, dès qu’elle le peut, ses secrets dans son cahier. Elle déverse ses pensées, ses regrets, ses difficultés avec ses enfants déjà grands et presque adultes, elle s’offusque de l’émancipation de sa fille Mirella, 20 ans qui sort avec cet avocat, marié et plus âgé. Elle relate combien ses copines n’hésitent pas à mentir, à trahir ou travestir, elle se rend compte que le pas de côté est si vite franchi. Valeria écrit, elle se confie, elle a l’âge de l’entre deux, ne se voit pas vielle mais n’est pas non plus une jeunette de l’année, elle voudrait plaire encore, que son époux Michelle cesse de l’appeler « maman ».

Écrire la libère et lui ouvre les yeux, sur sa vie, ses renoncements, les dysfonctionnements d’une famille et le manque d’audace pour basculer tout cela... si Valeria n’était pas avant tout un bon petit soldat.



Un roman qu’il faut replacer dans le contexte d’une époque et d’un pays. Un roman hautement introspectif, tellement que j’ai hésité à le poursuivre me sentant voyeuse ...mais j’ai continué et bien m’en a pris ! Je garde ce libre sur mon étagère « bibliothérapie » et je dis oui aux vertus de l’écriture introspective, ici démontrées.

Dommage que Valeria ne soit pas allée au bout...

Au bout de quoi ?

Lisez donc La cahier interdit !



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Elles

Avant Elena Ferrante existait en Italie une autre femme écrivain. Dotée de la même écriture puissante. Alba de Céspedes est, hélas, tombée dans l’oubli, elle qui fut pourtant, dans les années cinquante, l’auteure italienne, la plus lue et traduite dans 29 pays. Quelle injustice d’oublier un tel talent. Gallimard répare donc cette erreur en republiant ce roman et nous fait ainsi le cadeau de redécouvrir la plume de cette merveilleuse intellectuelle qui connut une grande influence dans le monde littéraire. « Elles » racontent les femmes bien sûr. Celles que leurs maris cloisonnent à la maison, les empêchant de travailler ou de s’épanouir. Sans autre lieu que les mots, Alba de Céspedes nous emporte, nous fait rire et pleurer. Elle nous chuchote aussi que la vie peut, à tout moment, faire voler en éclat le poids de la résignation. Cette femme qui a porté de son vivant la littérature au plus haut niveau est redevenue vivante et palpitante sous mon regard avec ce roman des années 50 qui vous écorche, vous enlace et vous laisse dans la bouche le goût amer de l’amour
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Le cahier interdit

Tendres et cruelles dominations de la vie domestique ; insidieuses révélations de ces mécanismes par la découverte de l’écriture intime, sa lucidité et ses ressassements, l’enfermement aussi de ses prises de conscience sans issue qui offrent une saisissante image d’une femme dans la société italienne des années 50. Mimant très habilement le mélange de sincérité et de dissimulation diariste, la crainte et le désir d’être surpris dans cette clandestinité, dans son désir d’un espace à soi, dans l’invention du secret, Alba de Céspedes nous fait apercevoir la matérialité d’une existence. Le cahier interdit ou les oscillations des hésitations.
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Elles

Ce livre et moi avons vécu une longue aventure ensemble, dans la mesure où il appartient à la municipalité de Paris, que je le recèle sous emprunt prolongé depuis cinq mois - en toute légalité toutefois vis-à-vis de la médiathèque, je suis pas un sauvage moi - et que j'ai pour lui et lui seul dérogé à mon cycle habituel de non-lecture, insistance puis abandon de mes livres de bibliothèque. (Cycle bien connu qui consiste à choisir un livre, ne pas le lire, étendre son prêt, ne pas le lire, céder face à l'évidence de l'improbabilité de toute lecture future éventuelle dudit ouvrage, et enfin procéder à sa logique et piteuse restitution.)



Pourquoi ai-je persisté à garder ce livre à mes côtés malgré ma flagrante incapacité à l'ouvrir ? Parce que j'avais senti un truc en le parcourant. Une mélodie, une mélancolie, quelque chose de doux, de fort et de très troublant, dès les toutes premières lignes de ce récit en forme de confession, et même de confidence.



Car Alessandra ne rougit pas de qui elle est, ni de ce qu'elle a fait. Ce n'est pas un récit de honte, mais d'humilité. Elle voudrait simplement expliquer. Que ce soit écrit, là, en entier. Que si un jour quelqu'un, pour une fois, voulait la comprendre, et connaître la raison de ses actes, de ses élans, de ses pensées, ça lui soit accessible. Parce que personne ne s'intéresse jamais à ce qui peut bien habiter l'esprit des femmes, et qu'à défaut de se rendre importante, Alessandra peut au moins se rendre justice.



Alessandra est l'enfant d'après, la remplaçante, on n'a jamais cherché à le lui cacher. Avant elle, il y a eu Alessandro - à quoi bon faire semblant, on change une lettre et ça repart -, petit garçon prodige, d'autant plus adulé par ses parents endeuillés qu'il n'a jamais eu l'occasion de les décevoir et qu'une noyade accidentelle l'a emporté bien avant qu'il ait pu démontrer n'importe lequel des dons qu'ils s'entêtent à lui attribuer depuis le drame. Dans l'ombre de ce petit fantôme qu'elle ne dépassera jamais vraiment, et dont elle a souvent l'impression qu'il l'habite et la contrôle, Sandra se tait, écoute, assiste, et n'agit pas.



Alessandra est l'enfant timide, l'enfant sage qui rêve d'amour sans jamais oser imaginer que ça la concernera un jour. Et puis Alessandra grandit, la vie la surprend, la brime, le pays bascule, et elle, contrainte à la passivité mais pas à l'ignorance, se construit tant bien que mal, entre tabous, devoirs, espoirs et nuits sans bruit.



Les années défilent, les corps se délient - mais pas les langues -, et page après page, Alessandra décortique tous les non-dits qui ont abîmé nos adolescences de jeunes filles, tout ce qu'on aurait eu besoin de crier et qu'on n'a même pas toujours eu la possibilité d'écrire. C'est très simple, très beau, aucune prétention derrière ce récit, aucune fausse modestie non plus. Juste une jeune femme qui se raconte et qui peut prendre toute la place qu'elle veut - 600 pages, pour commencer, ce ne sera pas de trop.



Jamais on ne s'ennuie, parce qu'il n'y a que les vieux messieurs en costume pour croire qu'on s'emmerde dans la tête d'une jeune fille, qu'il ne s'y passe rien. Au contraire, ça bouillonne, observe, déduit, ça tire un sens fou de tous les rituels des femmes partout autour d'elle, ça fait écho aux gestes de nos grand-mères, tantes, mères, quand bien même 80 ans séparent les dames autour d'Alessandra et celles avec lesquelles on a grandi. Ca a si peu changé. C'est aussi triste que beau à constater.



On hallucine devant la modernité, la justesse, la pertinence d'observations qui pourraient être celles d'une grande cousine, cette permanence de la solitude, du compromis et du recroquevillement dont Alessandra (et tant d'autres jeunes femmes après elle) est familière, et surtout l'amour, cet amour immense qui la traverse, l'emporte, la sidère, la tétanise, cet amour si mal accueilli par un homme qui ne fera jamais le moindre effort pour le comprendre - encore moins pour le mériter.



C'est l'histoire de murs de prison, de sacrifices gratuits, de fantômes sans prénom et de maisons abandonnées. C'est l'histoire de Sandra, d'un piano, d'un pays, de plusieurs maisons, et de tout ce qu'elle n'a jamais dit. C'est magnifique, et à défaut de subtiliser une fois pour toutes ce sublime bouquin à la médiathèque d'où je l'ai soustrait, comptez bien sur moi pour aller en acheter un exemplaire.
Lien : https://mademoisellebouquine..
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Elles

Une excellente production littéraire qui laisse le lecteur de bout en bout sur le qui-vive. Le mariage est la plus belle institution qui soit, a-t-on dit pendant des siècles sous l’égide de l’église catholique. Ce roman, débutant dans les années 30 et se terminant à la fin de la guerre en 45, essaie de défendre une mère et sa fille au cœur de leur mariage qui part à la déroute. Sous le joug des règles, des oppressions, des habitudes sociales et des droits de leurs maris. D’où le titre du livre. L’actrice principale de l’histoire se raconte au plus dénudé qu’il soit, donnant une authenticité presque insupportable du récit. Un abord si précis de sa vie quotidienne que nous entrons dans les pensées profondes de celle-ci, nous mettant dans une situation inconfortable dont nous voulons sortir. Le tout sur fond de guerre dans la ville de Rome mais dans les conditions du pauvre peuple, pas celle des soldats. Pourtant une partie des hommes restant sont des antifascistes, dont le mari d’Alessandra, notre héroïne. Excellent, je recommande. Une œuvre écrite en 1949 mais rééditée en 2015 en italien et en 2022 en français. La notice de l’auteur reprise à la fin du livre est d’une importance majeure pour parfaire l’Histoire. MG
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Elles

Enfin réédité, le roman Elles permet de redécouvrir l'esprit d'une grande écrivaine italienne ayant eu à cœur de faire valoir le point de vue des femmes.
Lien : https://www.lesinrocks.com/l..
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Le cahier interdit

Année 50, Valéria Cossati est mariée à Michele, elle a deux grands enfants de 18 et 20 ans et travaille en tant que secrétaire. Quand elle se procure un cahier pour consigner ses réflexions sur le quotidien, toutes ses certitudes se mettent à vaciller. Ce cahier interdit, qu’elle cache à sa propre famille, devient alors son refuge. Un roman publié en 1954, écrit avec une grande justesse, dresse le portrait d’une femme tiraillée entre sa liberté et le poids des traditions. A n’en pas douter, ce texte est un véritable chef d'œuvre !

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Le cahier interdit

Comment un simple cahier d'écolier acheté par hasard peut changer une vie... En commençant à écrire sur ce cahier, à y parler de son quotidien, une femme prend conscience de ce qui ne va pas dans sa vie, de ses manques, de ses attentes. Ce roman est le témoin d'une époque, comme souvent, il est la preuve qu'un tout petit événement, à priori sans importance, peut bousculer une existence de fond en comble.

Ce roman m'a beaucoup plu.
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